Conférence - Consensus
La Wallonie au Futur
Namur - 1994

Où en est et où va
le système éducatif en Wallonie ?
Comment le savoir ?

Institut Jules Destrée, Congrès La Wallonie au futur, retour à l'index

Conclusions générales

Michel Quévit
Professeur à l'UCL -
Rapporteur général du congrès permanent La Wallonie au Futur

Monsieur le Ministre, Mesdames, Messieurs,

Tout d'abord, je voudrais vous dire ma très grande satisfaction pour les trois jours que nous avons vécus ensemble. Nous n'avons pas trop sombré dans un congrès " béni, oui, oui ". Nous n'avons pas sombré dans la morosité. Hier déjà et encore plus aujourd'hui, je crois que nous l'avons contournée. Je voudrais dire aussi ma grande satisfaction, évidemment pour tous les intervenants, mais surtout aussi pour le panel de la société civile - on n'aime pas le terme; disons le panel des citoyens -. Je peux en témoigner, pour avoir suivi vos travaux de l'extérieur mais de très très près, vous avez donné une leçon de civisme dans la mesure où vous-mêmes vous avez été divisés entre vous, et où vous avez essayé de dépasser vos divisions pour nous proposer quelque chose de concret. Nous avons donc atteint nos résultats et nous avons une déclaration-consensus sur laquelle nous nous appuierons dans le futur.

Je voudrais pourtant ne pas conclure. On ne conclut pas, je crois, une conférence consensus, mais il est quand même important d'essayer de voir quel message nous en retirons. En fait, nous sommes partis de constats très durs. Les travaux de cette conférence consensus ont porté d’emblée sur les problèmes que rencontre le système éducatif de notre communauté à un moment particulièrement difficile où nous cumulons le taux maximum d’échecs scolaires et l’investissement dans l’éducation le plus élevé par tête d’habitants des pays de l’OCDE sans compter l’importance du chômage des moins de 25 ans ainsi que les contraintes budgétaires des financements publics. Néanmoins, tout cela mis ensemble, nous n'avons pas sombré dans le piège de la cause unique. Nous avons dit qu'effectivement il y avait des effets structurels, effets structurels liés à la crise, qu'il y avait des effets de société. On a vu que les jeunes, effectivement, ne savent pas, ne voient pas où ils vont. On a dit aussi que nous étions dans une société où s'installaient des ruptures de solidarité institutionnelle qui avait pourtant été à la base, depuis les années '50, du contrat social de notre société. On nous a dit aussi qu'il y avait une absence d'objectifs clairement définis du système éducatif et sur la manière de s'organiser. Donc nous sommes partis, c'est vrai, et c'est exprimé - et vous l'avez exprimé - d'une angoisse : une angoisse vis-à-vis de la réussite économique et sociale, et une angoisse vis-à-vis du fonctionnement du système éducatif. Mais je dirai que, partant de là, l'apport de la conférence concensus a été justement de la dépasser. Le panel a voulu, d'emblée, dépasser le sentiment de pessimisme qui était en fait ambiant dans tout ce qui avait été dit.

Je vais rappeler deux faits : les experts, devant nous, ont exprimé une divergence de vue. Certains - favorables à un système d'évaluation de pilotage - disant que c'est un instrument important pour permettre aux enseignants de mieux réaliser leur mission éducative; d'autres - plus contre - ont estimé que ça pouvait être un instrument générateur d'effets pervers car il ne s'appuie pas nécessairement sur une définition claire et acceptée par les enseignants, par les institutions, par la société, des objectifs à assigner au système éducatif.

Grâce à cela, vous avez renvoyé l'ascenseur. Vous avez dit aux experts : Où sont les solutions? Les experts ont répondu : Ce n'est pas à nous à trouver des solutions, c'est au Ministre à les trouver.

Vous ne nous êtes pas arrêtés sur ce constat, vous avez dit : Non, il faut trouver des passerelles entre les citoyens et les institutions pour trouver des solutions. Et nous avons entendu des choses dures hier, très dures. On nous a dit qu'il n'y avait pas de politique d'éducation clairement définie au niveau des décideurs dans notre communauté; qu'il y avait une absence de volonté d'évaluer réellement le système éducatif; qu'il y avait des divergences entre le pouvoir politique et même l'administration.

Mais nous ne nous sommes pas arrêtés à cela. Ce que vous avez voulu, ce que vous avez montré par vos travaux, par votre déclaration-concensus, c'est ce que vous vouliez. Vous avez montré une volonté de trouver des solutions qui rétablissent le dialogue - et j'insiste là-dessus - entre les citoyens, le monde de l'enseignement et les institutions représentatives. Et je dirai que l'un des grands apports de votre contribution, c'est de ne pas avoir enfermé le débat au niveau d'une analyse sur l'efficacité d'un instrument d'évaluation - aussi bon puisse-t-il être - mais de l'ouvrir aux vraies questions auxquelles nous sommes confrontés.

Et je voudrais en tout cas conclure sur quatre pistes qu'il nous apparaîtra peut-être, à l'Institut Jules Destrée en particulier, important d'approfondir.

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1. Nécessité d'un débat démocratique

Nous savons tous que nous sommes dans une société démocratique et nous en avons fait la preuve. Ce qui s'est passé aujourd'hui est un débat démocratique. Ce qui s'est passé hier est un débat démocratique. Mais derrière le mot démocratique, il y avait une volonté aussi de demander aux institutions - pas qu'aux pouvoirs politiques, aux institutions, c'est-à-dire aux groupes de pression légitimement reconnus, aux institutions mises en place par le pouvoir politique - de faire ce débat avec ceux qui ne sont pas dans les institutions et qui sont près de la réalité de tous les jours et qui la ressentent et qui ont quelque chose à dire. Et d'ouvrir ce débat démocratique non pas uniquement au système d'éducation, et ce serait peut-être la grande leçon d'aujourd'hui, d'ouvrir ce débat démocratique sur les finalités de la société pour construire un système d'éducation.

 

2. Retrouver des lieux de dialogue

Des lieux de dialogue et de participation entre les enseignants, le système éducatif et les citoyens à un niveau global de la Communauté française et de la Région wallonne mais surtout, on l'a bien dit, au niveau local, en partant des lieux de l'école et des lieux de vie des gens.

 

3. Apprendre à apprendre

Là, - c'est un avis personnel -, ce n'est pas un slogan : on peut en faire un slogan. Mais apprendre à apprendre, c'est oser dire au pouvoir politique, compte tenu des contraintes budgétaires qu'il connaît bien, qu'il y a une priorité à investir dans l'enseignement : pas uniquement dans l'acquisition des connaissances mais bien dans la pédagogie. Et il faut faire l'évaluation du pourcentage d'investissement que l'on fait dans le système éducatif chez nous pour la pédagogie et le développement de l'acquisition d'un savoir pédagogique des enseignants.

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4. Nécessité de se doter d'un bon système d'évaluation

Pas un système technique d'évaluation mais un système qui nous permette de connaître chaque fois : Où est-on ? Où va-t-on ? et plus encore de donner aux enseignants un instrument efficace qui permette de piloter d'abord l'élève pour ensuite que cela puisse permettre de piloter l'ensemble du système éducatif.

Voilà quelques pistes de réflexions que je voulais vous livrer en conclusion. Je demanderai en fait, puisque la partie invitante est en fait l'Institut Jules Destrée, je demanderai à Monsieur Destatte de donner la conclusion finale.

(Mars 1994)

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Page mise à jour le 23-08-2004

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