Au moment où, en janvier 2002, l'Europe atteint l'objectif principal
du Traité de Rome de 1957 – la mise en place d'un territoire
économique commun
[1],–
elle n'est pas parvenue à stabiliser une construction politique,
pourtant originale. Certes, Philippe Moreau Defarges notait que la
grande force de l'unification européenne comme processus interétatique
consiste à ne rien imposer à ses membres mais à tout négocier entre
eux, pour avancer de manière concertée. La négociation est plus
qu'un moyen, c'est une manière de vivre ensemble [2].
L’élargissement en cours donne une acuité particulière à la démarche
d’intégration politique. Ainsi, l’Europe essaie à la fois de réformer
ses institutions et d'approfondir ses objectifs. Ces deux questions
sont intimement liées car, comme le souligne Hugues de Jouvenel,
prétendre élargir sans approfondir serait condamner l’Europe à n’être
qu’une vaste zone de libre échange risquant, à terme, de se diluer
dans l’économie du monde
[3].
Il s'agit dès lors de réussir l'intégration et d'appliquer les
principes de la gouvernance, ce qui impose de revoir le contenu des
compétences communautaires et le fonctionnement des institutions.
En effet, si l’intégration fonctionnelle qui caractérise la
construction européenne a fait ses preuves depuis un demi-siècle –
cette méthode dite "communautaire" a permis d’asseoir les fondements
économiques de l’Union –, la difficulté majeure est que l’intégration
n’est plus essentiellement économique mais politique. Or, dans ce
domaine, les progrès ont été particulièrement faibles, les objectifs
et les visions réduites. Le regard extérieur du politologue Zbigniew
Brzezinski est à cet égard particulièrement interpellant :
Pour le dire sans détour, l'Europe de l'Ouest reste
dans une large mesure un protectorat américain et ses Etats
rappellent ce qu'étaient jadis les vassaux et les tributaires des
anciens empires. Cette situation est assurément malsaine, pour
l'Amérique comme pour les nations européennes. Elle se trouve
encore aggravée par le déclin qui frappe la vitalité interne de
l'Europe.
[…]
D'une manière générale, l'Europe de l'Ouest donne
aujourd'hui l'impression d'un conglomérat de sociétés affectées
par un malaise social chronique, prises dans la routine,
sans élan ni perspectives larges. L'unification européenne
apparaît de plus en plus comme un processus qui s'impose de
l'extérieur, pas comme un idéal auquel on croit
[4].
L'explication que donne à ce constat sans concession l'ancien
conseiller à la sécurité nationale du président Jimmy Carter tient aux
motivations des Européens à s'engager dans la construction ou
l'approfondissement de l'Europe : le souvenir des destructions des
deux guerres mondiales, la volonté de reconstruction et la menace
soviétique [5].
Brzezinski relève un tournant majeur dans les années quatre-vingt-dix,
avec la fin de la pertinence de ces motivations : l'Europe, malgré
certains discours, s'est alors montrée incapable de s'affranchir de la
tutelle américaine, même quand elle était directement concernée dans
sa sphère géopolitique ‑ à l'occasion notamment de la crise dans
l'ex-Yougoslavie [6].
Jean-Marie Guéhenno ajoute une dimension essentielle à cette question
de la motivation, lorsqu'il relève l'illusion que constitue la mise
en place d'un modèle européen distinct de la conception de l'économie
de marché valorisée par les Etats-Unis. Le constat établi, de
l'évolution des conceptions économiques et sociales des forces
politiques européennes ‑ y compris de la social-démocratie, met en
évidence cette incapacité d'élaborer une plate-forme sociale
européenne concrète :
L'évolution des négociations commerciales internationales, qui
portent désormais de plus en plus sur des domaines qui naguère
auraient été considérés comme relevant de la souveraineté des
Etats – définition des normes, règles de concurrence – et les
difficultés croissantes auxquelles se heurtent les Européens pour
préserver leurs spécificités, notamment dans le domaine culturel,
vont dans le sens de cette interprétation, et jettent le doute sur
la réalité d'un véritable modèle de société qui serait
spécifiquement européen
[7].
Cela signifie que, ne se distinguant guère de manière tangible du
modèle global, le Marché commun risque tout simplement de s'y diluer.
Comme l'écrit Jacques Lesourne : l'Union européenne est aspirée par
un processus de globalisation
[8]
Mais, il y a plus. Non seulement les mécanismes mondiaux de
globalisation et de fragmentation n'ont pas fait de l'Europe un
espace de relais réel entre le mondial et le local, mais aucun signe
de dimension nationale ou post-nationale européenne ne s'est manifesté
permettant ne fut-ce que de concevoir un Etat européen comparable à
chacun des Quinze Etats. Jean-Marie Guéhenno relève d'ailleurs la
faiblesse des moyens accordés au budget européen par les Etats comme
le symptôme d'un renoncement concret à une fédération d'Etats-nations
: 1,27 % des PNB combinés des Etats membres, soit un chiffre très
inférieur à la masse des budgets nationaux
[9].
L’essoufflement des institutions de l'Union européenne ne se manifeste
pas uniquement sur le plan interne et sur le plan fonctionnel, il
apparaît également au sein des politiques communautaires, face à la
globalisation de l’économie. Sur cet axe, l’Union connaît également un
blocage qui tient au fait que, pour des raisons juridiques liées aux
Traités, la Commission ne peut intervenir dans de très nombreuses
matières proches des attentes des citoyens, comme le droit au service
universel, le logement, l'aménagement du territoire, etc. Dans cette
perspective, une constitution européenne est un grand pas en avant,
mais ne suffit pas car les droits fondamentaux doivent se traduire par
un transfert réel de compétences communautaires. En effet, diverses
évolutions mondiales ‑ notamment le débat entre mondialisation et
altermondialisation, les crises économiques en Amérique latine ou
en Asie, les mutations du continent africain, les impacts sociaux de
l’élargissement de l’Union ‑ remettent en cause l’approche
essentiellement institutionnelle de la construction européenne
[10].
Ces débats font, eux, partie de l'agenda politique des citoyens. Ces
éléments ont été mis en évidence par les travaux de la Cellule de
Prospective de la Commission qui ont débouché sur la rédaction du
Livre blanc sur la gouvernance, lors de ses travaux de la fin des
années quatre-vingt-dix, sous la direction de Jérôme Vignon puis de
Jean-Claude Thébault.
L’Union doit faire face à deux types d’approfondissements et ne pourra
les ignorer compte tenu des conséquences qu'ils ont sur sa politique
et sur ses citoyens. D'une part, l’approfondissement vise
l’architecture institutionnelle de l’Union et tout particulièrement
la gouvernance européenne, c'est-à-dire le fonctionnement des
institutions européennes dans leurs relations avec tous les acteurs
et, avant tout, avec les citoyens européens. D'autre part, il s'agit
de l’approfondissement des objectifs et du contenu des compétences
communautaires face aux problèmes sociétaux : globalisation, sécurité
extérieure, fracture sociale, missions d’intérêt général, cohésion
territoriale, droit du travail, développement durable, etc. En
d’autres termes, il s'agit de concevoir quelle société européenne la
population européenne veut voir construire
[11].
Pour réussir le défi de la gouvernance, l’Union européenne devra
dépasser quelques problèmes auxquels elle est fréquemment confrontée,
tels le fonctionnement démocratique, la légitimité ou encore la
citoyenneté européenne. Le principe d'une subsidiarité active
pourrait constituer l’atout par excellence pour réussir ce défi. La
nouvelle gouvernance valorise ce principe comme une spécificité du
fonctionnement de l’Union qui favorise une approche endogène (bottom
up) des politiques depuis le local jusqu’au niveau communautaire
européen.

Comme l'indique Jacques Lesourne, le problème de l'approfondissement
de l'Union, c'est celui de l'apparition, au sommet, d'un véritable
pouvoir politique. Le professeur au Conservatoire national des Arts et
Métiers émet quatre hypothèses :
– un toilettage des textes cachant un échec et aboutissant à des
procédures de décision européennes complexes et inefficaces;
– un aménagement modéré mais réel des procédures n'ayant pour but
que de limiter les principaux inconvénients résultant de
l'élargissement;
– des modifications substantielles des traités avec application
d'une Constitution européenne donnant au centre un pouvoir
politique général tout en précisant les droits des Etats;
– la création, au sein de l'Union européenne, d'une fédération
restreinte de pays décidés à aller plus loin dans leur coopération
[12].
L'Europe cherche à disposer de projets concrets, consciente du fait
qu'elle ne dispose que de plans encore à l’état d’ébauche. On se
souviendra de l'engouement et des réactions que le discours du
ministre allemand des Affaires étrangères Joshka Fischer, devant
l'Université Humbold à Berlin le 12 mai 2000, a suscités. Selon Joisef
Janning, qui dirige le service Politique de la Fondation Bertelsmann,
l’intégration européenne peut, dans le futur, suivre deux voies. Dans
le premier scénario, l’Union deviendrait une fédération d’Etats
européens basée sur un traité constitutionnel prévoyant des
compétences délimitées suivant les différents niveaux ainsi que des
procédés de légitimation et de contrôle démocratique. Le transnational
supplanterait ici le national car on assisterait à un transfert de
souveraineté. Dans le deuxième scénario, l’action supranationale et la
coopération des gouvernements ne fait que compléter la politique des
Etats. Une voie intermédiaire se profilerait entre ces deux scénarios,
celle de l'intégration différenciée. Dans ce cas, l’Europe se
constituerait de groupes d’Etats. L’un de ces groupes formerait
l’Union économique, un autre l’Union de la Sécurité intérieure et un
troisième celui de la Défense. Une dernière alternative se dessine
néanmoins, il s’agit du déclin de l’intégration. On y considère que
l'Europe, étant un produit de la Guerre froide et de la division en
blocs antagonistes, ne survivrait pas, à moyen terme, aux
circonstances qui l’ont engendrée. Deux possibilités sont envisagées
dans le cas d’un déclin : soit les divergences d’intérêts des Etats
transcendent la nécessité de la collaboration, soit de nouvelles
formes de directions transnationale et mondiale prennent le pas de
l’intégration régionale
[13].
La construction européenne est démocratique dans la mesure où tous les
Etats qui y participent y sont égaux : chaque pays y a un même statut
notamment pour les dossiers stratégiques comme la modification des
institutions ou l'entrée de nouveaux membres – même s'il peut y avoir
pondération dans certains cas précis [14].
Toutefois, depuis de nombreuses années, la question du déficit
démocratique de l’Union revient régulièrement à l'ordre du jour, ce
qui montre, d'une part, que l'on considère que l'Europe ne fonctionne
pas uniquement selon la logique d'une organisation internationale ou
interétatique et qui suppose, d'autre part, que le fondement ultime
de la légitimité dont on parle est le peuple
[15].
Cette question trouve sa source dans plusieurs origines. Selon le
secrétaire de la Conférence des Régions périphériques maritimes (CRPM),
le déficit démocratique dont souffre l’Union résulte en partie des
difficultés à structurer la participation de la société civile dans le
processus européen [16].
Le déficit démocratique provient également d’un processus décisionnel
européen trop souvent opaque et compliqué, au point que les experts
eux-mêmes peinent à l'appréhender. Il est aisé de conclure à un défaut
de transparence et de contrôle démocratique de l’action européenne [17].
Ce problème se réfère notamment au phénomène de la comitologie,
qui est loin d’être transparent [18].
Ce déficit démocratique purement théorique, s'accompagne d'un déficit
lié à l'absence de prise de conscience européenne véritable. La
démocratie n’est en effet pleinement possible que si se forment un
peuple, une société, une communauté des citoyens
[19].
De même, la thèse de Philippe Herzog, qui a contribué aux travaux de
prospective de la Commission, consiste à considérer que l'implication
des citoyens constitue le défi décisif pour l'avenir de la
construction européenne. Il faut, écrit-il, retrouver les
sociétés et tenter de les associer pour former, avec les nations, une
société européenne. Sans société européenne, pas d'union politique
[20].
Pour le professeur de Sciences économiques à Nanterre et député
européen, une société consciente et animée d'un "vouloir vivre
ensemble" est indispensable à l'action politique :
"L'autorité" du personnel politique n'est qu'"augmentation" de la
force de la société. Il convient donc de penser la société
européenne et sa relation vivante au système politique
institutionnel si on veut vraiment associer des peuples. Former
une société, ouvrir le système institutionnel et le refonder pour
qu'il soit pleinement ouvert à l'implication et à la participation
des citoyens et de leurs organisations : c'est un vaste programme
de recherche et d'action [21].
Cet aspect du déficit démocratique est directement lié à la carence
d'identité de l’Europe et à la faible volonté de participation des
citoyens au projet commun. L’enjeu des élections européennes reste
inconnu pour la majorité des citoyens, alors que la transparence et
l’existence d’une véritable opposition constituent une dialectique
fondamentale à toute démocratie. En dehors de ce manque de
transparence, le déficit démocratique européen trouve sa source dans
d’autres facteurs tout aussi importants : d’une part, dans la volonté
manifeste des Etats-nations d’occulter les vrais débats communautaires
dans leurs discours, ‑ afin de garder leur légitimité et leur capacité
de maximiser ‑ sous le couvert de la confidentialité ‑ leurs intérêts
nationaux dans les rapports de force communautaires, ainsi par exemple
les non-décisions sur le brevet européen, sur les agences européennes,
etc. ‑, d’autre part, dans la pauvreté de l’information des
médias sur les décisions communautaires et les grands enjeux de
l’Europe. Le niveau dérisoire de formation sur l’Europe et ses
institutions au sein des écoles, depuis l'enseignement primaire
jusqu’au niveau universitaire, n’aide pas à pallier le déficit
démocratique que vit l’Union européenne.
Incapables de choisir entre les modèles divers de fédéralisme et d'intergouvernementalité,
les Etats n'ont pu faire de la méthode communautaire ‑ alliant
centralisme, diplomatie et technocratie
[22]
‑ qu'un outil généralement limité au premier pilier (l'Union
économique et monétaire) tandis que la capacité d'action reste
fondamentalement réduite sur les questions internationales (deuxième
pilier) et les affaires intérieures (troisième pilier). Depuis le
Sommet de Nice (2000), la logique communautaire s’est encore
affaiblie au profit de la méthode intergouvernementale
[23].
Le pouvoir de blocage des Etats a été renforcé et les domaines les
plus sensibles n’ont pas été soustraits à la règle paralysante de
l’unanimité. Nice n’a pas amélioré le processus du vote à majorité
qualifiée. Les possibilités de veto sont renforcées et le principe de
l’unanimité est quelque peu tempéré afin de faciliter la
collaboration. Un point d’interrogation demeure néanmoins sur la
pondération des voix.
Certes, l'élaboration d'une Constitution permettrait de résoudre ces
différents problèmes, mais renouer avec un langage constitutionnel
risquerait de réveiller les vieilles querelles "théologiques" sur la
nature de l’Union. Les opposants à cette démarche demandent la preuve
qu’une Constitution résoudrait les tensions actuelles. La question
n’est pas spécialement de créer un nouveau modèle politique mais de
conserver ‑ voire de sauvegarder ‑ les acquis de l’Union. Comme
l'écrit Jurgen Habermas, seule l’entité qui en surgira sera
nouvelle
[24].
Le philosophe allemand rappelle les trois conditions nécessaires pour
la constitution d’une identité qui puisse dépasser le cadre des
frontières nationales : l’existence d’une société civile
européenne, la construction d’une opinion publique à l’échelle
européenne, et la création d’une culture politique. Dans ce cas,
une Constitution serait le point de référence vers lequel convergerait
tout le développement de l’Union. L’idéal serait donc un referendum
sur l'adoption ou non d’une Constitution. Ce processus constituerait
un moyen exceptionnel de communication transnationale
[25].
Fritz W. Scharpf a développé un modèle qui distingue
deux légitimités complémentaires :
– la légitimité par les inputs : c'est-à-dire le
gouvernement par le peuple, qui légitimise directement le pouvoir,
– la légitimité par les outputs, c'est-à-dire que le peuple
bénéficie de l'exigence de résultats et de l'efficacité posées à
l'action publique : c'est le gouvernement pour le peuple dans la
mesure où celui-ci bénéficie du bien-être commun [26].

La légitimité de la Commission européenne s'est fondée davantage sur
les résultats de son action ‑ c'est-à-dire sur une démarche
fonctionnaliste, rendue possible par son pouvoir judiciaire et la
capacité d'expertise de son administration ‑ que de manière politique,
parlementaire ou démocratique
[27].
Toutefois, les travaux réalisés depuis la moitié des années
quatre-vingt-dix au sein de la Cellule de Prospective de la Commission
ont apporté au moins trois constats nouveaux liés à la légitimité de
l'action politique européenne :
– Le premier porte sur la segmentation fonctionnelle
[28]
et l'organisation verticale des processus politiques qui imposent
une conception préétablie des limites du problème, au détriment de
l'ouverture aux interdépendances et de l'écoute des autres parties
concernées. Cette approche prive l'action politique de l'appui de la
société civile. Ce qui ne fait que conforter le sentiment général
selon lequel les choix politiques ne sont que l'aboutissement d'un
compromis entre un petit nombre d'acteurs dominants, au lieu d'être
le fruit d'un consensus et d'une coopération entre tous ceux qui
sont effectivement concernés, qu'ils soient ou non reconnus comme
des acteurs privilégiés dans le domaine en question
[29].
– Le deuxième constat porte sur le caractère consensuel des
décisions, à savoir que la démarche consensuelle,
traditionnellement caractéristique de la définition des politiques
communautaires, n'est plus viable et qu'il faut la remplacer au plus
vite par une définition plus précise des responsabilités de chacun
dans la réalisation des objectifs de ces politiques [30].
– Le troisième constat porte sur la politisation croissante des
politiques communautaires. Celle-ci rend impérieuse une séparation
entre les responsabilités politiques et technico-administratives.
Dès lors, une parlementarisation de la Commission devient
inévitable
[31].

La prospective, on le sait, place l'individu au centre du système dont
elle souhaite rendre compte. Jean-Marie Guéhenno a bien formulé la
question que pose le modèle européen :
L'Europe ne peut plus se bâtir sur une vision rétrospective de son
histoire et les défis qu'elle rencontre aujourd'hui appellent une
réponse prospective : au delà du processus de réconciliation et de
sa signification historique, l'aventure politique dans laquelle
sont engagés les pays européens peut-elle apporter des réponses
inédites aux questions nouvelles que pose la mondialisation ?
[32]
Pour les prospectivistes de la Commission, l’Europe doit renoncer à
une lecture jusqu’au-boutiste de la répartition des compétences entre
Union, Etats et régions, afin d’affronter les problèmes qui
l’attendent [33].
Ainsi, dès 1999, la Cellule de Prospective de la Commission européenne
a relevé quatre chantiers essentiels auxquels la société européenne
doit faire face :
– la mondialisation,
– la sécurité internationale,
– la réforme des systèmes de protection sociale,
– le défi démographique dans un développement soutenable.
L'échelon national est trop petit : trois de ces défis sont
d'envergure mondiale, et aucun Etat membre n'a la capacité de les
influencer seul. Si l'Europe veut faire avancer ses valeurs et ses
objectifs communs, elle doit agir à l'unisson, s'exprimer d'une
seule voix. Quand au système de gouvernance mondial, il est trop
faible aujourd'hui pour constituer une réelle alternative : en
l'absence d'un système international plus solide, les groupements
régionaux sont le meilleur moyen de parvenir à une gestion
concertée du monde. Pour preuve, presque toutes les régions du
monde affichent aujourd'hui l'ambition de procéder à une
intégration régionale, en s'inspirant le plus souvent du modèle le
plus profond et le plus achevé qui existe : l'Union européenne
[34].
Les travaux du projet Gouvernance
[35]
ont mis en évidence la nécessité de revoir la conception du
processus politique européen. Celui-ci reste en effet trop centré
sur le moment de la prise de décision alors qu'il subit des pressions
croissantes appelant la proactivité plutôt que la réactivité. Une
exigence de ce constat sur l'action politique sont, pour Notis
Lebessis et John Paterson, l'association systématique de la société
civile dans les affaires européennes, afin que celle-ci puisse s'y
impliquer pleinement. Cet appui sur une société civile mieux informée
et plus engagée pourrait apporter, au processus politique, une
immense source d'expertise et de connaissance
[36].
Au delà, la Cellule de Prospective a rédigé huit propositions en vue
de la rédaction du Livre blanc sur la gouvernance :
– accroître les opportunités de débat public
authentique;
– renforcer la transparence et l'ouverture du processus décisionnel
européen;
– compenser les inégalités matérielles et cognitives;
– ouvrir un processus décisionnel trop longtemps dominé par la norme
experte et bureaucratique;
– promouvoir l'apprentissage collectif;
– développer l'évaluation et la révision collectives des politiques;
– assurer la cohérence entre les différentes politiques;
– améliorer l'articulation verticale et horizontale de l'action
publique européenne [37].
L'ambition du Livre blanc sur la gouvernance visait à donner
l'impulsion à la marche vers l'intégration politique. Aux yeux de ses
concepteurs ‑ une équipe de fonctionnaires détachés de leur service
sous la direction de Jérôme Vignon
[38]
‑,le parallélisme avec la Livre blanc sur le marché intérieur ‑
véritable manifeste de la Commission Delors ‑, était évident. Le Livre
blanc voulait dès lors s'imposer comme le manifeste de la
Commission Prodi [39].
Publié le 25 juillet 2001, le Livre blanc sur la Gouvernance
européenne dresse l'inventaire des outils nécessaires au renforcement
de la cohérence des politiques de l'Union et utiles pour faciliter les
travaux des différentes institutions. Le Livre blanc répertorie les
principes de bonne gouvernance qui s'appliquent à tous les niveaux de
gouvernement : l'ouverture et la transparence des institutions, la
plus large participation des citoyens à tous les stades de la décision
politique, la responsabilité accrue des institutions et des Etats
membres, l'efficacité des politiques définies par des objectifs clairs
et évaluables, la cohérence et la compréhension des politiques. Sur
ces bases, le Livre blanc propose des changements politiques suivant
quatre axes :
– une participation et une ouverture renforcées avec
les collectivités régionales ou locales et la société civile, ainsi
qu'un renforcement de l'interaction avec la Commission
(participation à l'élaboration des politiques, prise en compte de la
diversité des conditions locales, cohérence des politiques par
intégration de l'incidence territoriale);
– un contrôle de qualité (politique, normatif et en termes de
résultats);
– un recentrage des politiques et une mise en cohérence des
institutions (Conseil, Commission et Parlement, ainsi qu'une
identification plus claire des objectifs à long terme)
[40]
.
Il est permis de se demander si la réflexion sur la gouvernance et
l'approfondissement de la démocratie sont deux logiques
complémentaires ou si tous les acteurs suivent des logiques opposées.
D'un côté, les diplomaties et une bonne partie des gouvernements
nationaux défendent obstinément des modes de décisions
intergouvernementaux; d'un autre côté, la Commission européenne et un
certain nombre d'élus et d'acteurs non gouvernementaux cherchent à
développer des formes innovantes de fonctionnement démocratique. Le
concept de gouvernance ne remplace certainement pas celui du
gouvernement, indispensable dans tous système démocratique, mais il
l'élargit. Si l'on parle plus de gouvernance que de gouvernement dans
le cas de l'Union européenne, c'est pour deux raisons. D'abord, il
n'existe pas de véritable exécutif de l'Union, mais celui-ci serait de
plus en plus nécessaire pour mener une action politique efficace.
Ensuite, le concept de gouvernance va au delà du concept de
gouvernement classique, en tenant compte notamment de la participation
d'acteurs politiques non gouvernementaux comme la société civile
[41].

La mondialisation de l’économie, la croissance des flux immatériels
et, plus largement, la société de l’information ont pu laisser croire
que le territoire et l’espace s'estompaient, étant le réceptacle de
mouvements, de flux et de localisations. Tout se déroulait sur et non
dans le territoire. Paradoxalement, ce n’est pas la réalité actuelle :
de nombreux auteurs et analystes ont relevé cette montée en force du
territoire. Georges Benko résume bien cette évolution dans un
titre-slogan : La mondialisation n’abolit pas les territoires [42].
Associé aux travaux de la Cellule de Prospective de la Commission
européenne, Pierre Calame y insiste sur le principe de subsidiarité
active, permettant d'organiser la gouvernance en conciliant unité et
diversité :
Plus le monde devient village, plus la technique se dématérialise,
plus l'économie se mondialise et plus se confirme l'importance de
territoires et de "milieux" capables de cohésion, d'initiative, de
partenariat, d'innovation, de mobilisation, d'adaptation fine au
"terrain", de responsabilisation [43].
Ainsi, pour Pierre Calame,
l'action publique est la résultante, la superposition sur le
terrain des compétences exercées à différents niveaux. La
coopération entre ces niveaux se fait souvent à travers des êtres
hybrides, nécessaires mais complexes, des cofinancements, par
lesquels les deux systèmes vérifient leur convergence.
Mais c'est pour répondre à la désillusion des citoyens, à la
bureaucratie et à l'absence de projets que le président de la
Fondation Charles Léopold Mayer pour le progrès de l'Homme avance la
notion de subsidiarité active :
Subsidiarité parce qu'on affirme fermement que la pertinence de
l'action publique ne se trouve qu'à la base, dans une appréhension
globale et partenariale d'une réalité elle-même globale et
systémique qui ne se laisse pas découper en tranches.
[…]
Active parce qu'on reconnaît que, dans un monde interdépendant,
l'articulation des échelles est la règle et que, au rebours des
blocs de compétence, les niveaux de formulation des stratégies
sont variés et dissociés des niveaux de la gestion quotidienne
[44].

Le Traité de Maastricht (1992) a introduit formellement le principe de
subsidiarité (article 5 du Traité CE) dans la cadre juridique de
l'Union, tandis que, en 1997, le Traité d'Amsterdam valorisait une
Europe plus proche du citoyen. Toutefois, comme l'indiquent Notis
Lebessis et John Paterson, les progrès accomplis jusqu'ici dans le
sens d'une décentralisation effective restent bien en-deçà des
attentes de la société civile ou de ce qu'exige le traitement de
problèmes complexes
[46]
.
La diversité de formes que représente, en Europe, le concept de Région
se traduit dans la place occupée par ces territoires dans les affaires
européennes. Cette place est très inégale et très hétérogène selon les
différents Etats. Elle dépend évidemment de l’autonomie et de
l’influence de la Région dans l’Etat-nation. Afin de représenter au
mieux cette diversité, un éventail d’organisations "porte-parole" des
entités infra-étatique se développe. En effet, les affirmations des
Régions dans l’Europe se manifestent par la multiplication des
structures para-régionales telles que la Conférence des Régions
Périphériques Maritimes d’Europe (CRPM), le Conseil des Communes et
Régions d'Europe (CCRE), l’Union internationale des Pouvoirs locaux (IULA),
la Coordination des Associations mondiales des Villes et des Autorités
locales (CAMVAL), etc. Ces organisations ont pour but de promouvoir la
visibilité et d’accentuer le rôle des régions au sein de l’Union
européenne. Elles sont également très actives dans une fonction de
lobbies et très productive dans des fonctions d’études et de
recherches qui se rapportent aux entités infra étatiques,; ainsi que
dans les différents domaines européens qui touchent directement ou
indirectement les politiques régionales. Ces organisations se posent
en véritables acteurs de la politique européenne, en proposant les
résultats de leurs études comme base de travail pour la Commission
européenne.
Ainsi, malgré une politique intergouvernementale qui empêche une
action unique de l’Europe, il se dessine néanmoins une Europe des
réseaux et des alliances entre des régions, des cités, des firmes et
d'autres acteurs. En effet, les régions sont devenues une dimension
fondamentale du processus d’intégration européenne. Celles-ci peuvent
remplir plusieurs rôles dans une Union européenne élargie. La Cellule
Prospective de la Commission les a relevés :
– gérer une diversité économique, culturelle et politique
grandissante;
– garantir la stabilité et la convivialité dans l’espace européen
élargi;
– assurer une coopération régionale et transfrontalière;
– construire un système européen de gouvernance
[47].
Les collectivités locales – entités fédérées, territoires
décentralisés, régions, métropoles et villes ‑ s'appuient tant sur le
besoin de localisation face à la mondialisation que sur le principe de
subsidiarité pour s’affirmer dans le processus européen. De plus, les
régions, qu'elles soient impliquées indirectement au travers de
l'application des grandes politiques communautaires ou directement
dans la mise en œuvre des fonds structurels, ont trouvé une nouvelle
pertinence dans ce processus européen. Ainsi, le recul de l’Etat
central tend à valoriser les régions comme interlocutrices
privilégiées entre l’Europe et ses citoyens. Le Comité des Régions,
institué par le Traité de Maastricht, organe très faible et très
éclectique par sa composition, n'a toutefois pas été en mesure de
porter une dynamique forte au sein de l'Union.
Face à la mondialisation, les régions font entendre leur voix et
affirment davantage leur autonomie. Chacun de ces phénomènes est
évidemment le produit de circonstances propres. Toutefois il y a bien
des facteurs communs : l’articulation entre ces revendications et des
données économiques et sociales; la remise en cause,
l’affaiblissement ou même l’abandon des mécanismes unificateurs
[48].
En fait, on constate une aspiration à la prise de décision au
plus près du terrain. Des initiatives, comme la CRPM ou celles des
régions à statut constitutionnel/législatif, confirment le
dynamisme d'un certain nombre de régions.
La Cellule de Prospective de la Commission européenne estime que les
Régions doivent être considérées comme une dimension fondamentale
du processus d’intégration européenne
[49].
De même, l’apparition de méso-gouvernements constitue
l’un des principaux changements institutionnels de l’Etat occidental
moderne des deux décennies écoulées [50].
Dans sa déclaration adressée au chefs d’Etats et de gouvernements en
vue du Sommet de Laeken et intitulée Une Europe pour toutes les
Régions : pour une démocratie de proximité, la CRPM a estimé que
la démocratie de proximité n’avait pas pour but de substituer
"l’Europe des Régions" à "l’Europe des Etats" mais davantage que ces
Etats approfondissent la démocratie de proximité avec leurs régions,
afin de mieux impliquer la société européenne dans le projet européen
[51].

C'est Thierry de Montbrial qui soulignait que la construction
européenne avait comme caractère apparemment paradoxal que l'on avait
spontanément tendance à considérer l'Union comme une panacée
permettant l'éradication de tous les maux de l'histoire, sans jamais
cesse de la tourner en dérision
[52].
Pourtant, tout en relevant que les pronostics les plus courants
annonçaient le déclin de l'Europe, Jacques Attali considérait en 1998
que, parmi les nombreux avenirs encore possibles du Vieux Continent,
le plus vraisemblable était la constitution d'une Union fédérale
composée d'une trentaine de pays, disposant d'une monnaie unique et
formant – à partir de 2010 et pour trente ans au moins – la
première puissance économique et politique du monde [53]
.
Les cinq scénarios Europe 2010 de la Cellule de Prospective de
la Commission européenne ont été élaborés de 1997 à 1999 pour
contribuer de manière concrète à la réflexion sur l'avenir de
l'Europe
[54].
Commentant ces scénarios, Hugues de Jouvenel relève que ceux-ci ne
sont pas exempts de défauts, notamment leur manque d'audace. Mais
ils témoignent – faisant preuve au passage d'une heureuse liberté de
pensée – de l’étendue des futurs possibles et, donc, de l’absence de
fatalité [55].
Ce qui frappe toutefois, à leur lecture, c'est qu'ils abordent
davantage le cadre de l'avenir de l'Europe que la dynamique politique
elle-même de son évolution.
Or, les faits comme les débats nous situent clairement dans une
nouvelle démarche de construction politique qui pourrait dépasser le
fonctionnalisme déjà évoqué, renouer avec la société et donner enfin
une teneur à l'Europe. Deux chocs au moins ont ouvert la porte ‑
fermée depuis les années cinquante ‑ de l'espace politique européen
commun, même si, aujourd'hui, les conditions de la création de cet
espace ne sont pas encore remplies. D'une part, la démission de la
Commission Santer, le 16 mars 1999, et le rôle du Parlement européen
dans cette démission ont fait clairement de cette institution l'un des
trois Pôles du système institutionnel européen, ce qu'il n'était pas
précédemment
[56].
D'autre part, la proposition faite par le ministre Joshka Fischer le
15 mai 2000, de mettre en place une Fédération européenne, avec un
gouvernement et un parlement bicaméral – représentant et les Etats, et
les peuples – a brisé un tabou certain et, à défaut d'avoir fait
naître un consensus, a relancé la discussion politique. Ce discours,
tout comme la réponse faite par Jacques Chirac sur l'avenir
institutionnel de l'Union, le 27 juin suivant au Reichstag à Berlin,
ont ouvert la voie à la Convention européenne. Celle-ci n'est
peut-être qu'une première étape. Elle témoigne, en tous cas, d'une
volonté de relance, sinon de réponse à l'essoufflement des
institutions européennes. Les deux axes que constituent la dimension
sociétale et la subsidiarité active pourront être appliqués aux
résultats de ces travaux pour mesurer leur adéquation avec les
nécessités du long terme pour l'Europe.

[1] On
parlait alors de Marché commun : zone de libre-échange fondée
sur la libre circulation des personnes, des services, des capitaux
et des marchandises. Le processus d'Union douanière a été mis en
place en 1968 tandis que l'Acte unique européen de
1986 lui a donné un coup d'accélérateur (suppression des barrières
physiques, administratives et fiscales) pour l'achèvement du marché
unique de 1992, effectivement réalisé en 1993. voir Michel QUEVIT,
Jean HOUARD ea, Impact régional 1992, Les régions de tradition
industrielle, Bruxelles - Louvain-la-Neuve, IRES-RIDER, De
Boeck Université, 1991.
[2]
Philippe MOREAU DEFARGES, L'Union européenne ou l'unité dans la
diversité, dans Thierry de MONTBRIAL et Pierre JACQUET, dir.,
Rapport annuel mondial sur le système économique et les stratégies,
p. 127-129, Paris, Institut français des Relations internationales,
Dunod, 2001.
[3]
Hugues DE JOUVENEL, L’Europe à la carte, dans Futuribles,
décembre 2000, n°259, p. 4
[4]
Zbigniew BRZEZINSKI, Le Grand échiquier, L'Amérique et le reste
du monde, p. 88-90, Paris, Bayard, 1998. Cité par Jean-Marie
GUEHENNO, Le modèle européen…, dans Thierry de MONTBRIAL et
Pierre JACQUET, dir., Rapport annuel mondial sur le système
économique et les stratégies, p. 272, Paris, Institut français
des Relations internationales, Dunod, 2001.
[5] Sur
les motivations originales de la fondation de l'Europe et
l'influence américaine, voir aussi Michel DRANCOURT,
L'Europe oui, mais quelle Europe ?, dans Futuribles
n°263, avril 2001, p. 54-55.
[6] voir
Frédéric BOZO, L'Amérique, l'Europe et l'Alliance : divorce
annoncé ou partenariat renouvelé ?, dans Jacques BELTRAN &
Frédéric BOZO dir., Etats-Unis - Europe : réinventer l'alliance,
p. 11-28, Paris, Institut français des Relations internationales,
2001.
[7]
Jean-Marie GUEHENNO, Le modèle européen…, p. 273.
[8]
Jacques LESOURNE, Ces avenirs qui n'ont pas eu lieu…, p. 290.
[9]
Jean-Marie GUEHENNO, Le modèle européen…, p. 273.
[10]
Michel QUEVIT, Note au Pôle Prospective de l'Institut
Jules-Destrée, 6 février 2002.
[12]
Jacques LESOURNE, Ces avenirs qui n'ont pas eu lieu…, p. 290.
[13]
Joisef JANNING, L’avenir de l’Europe, dans Deutschland,
n°6, décembre-janvier, 2001, p.40
[14]
Philippe MOREAU DEFARGES, L'Union européenne ou l'unité dans la
diversité…, p. 129.
[18]
Cette technique, qui renvoie tout sujet sensible posant débat en
commission restreinte, donne un "pouvoir" à un groupe restreint
d’acteurs bénéficiant d’une forte représentation professionnelle.
[19]
Dominique SCHNAPPER, La communauté des citoyens, Sur l'idée
moderne de la nation, Paris, Gallimard, 1994. – voir aussi
l'analyse de Pierre Muller selon laquelle l'Europe, pour
l'instant, n'a pas entraîné la constitution d'une élite _ ou d'un
ensemble d'élites _ relativement homogène et identifiable.
Pierre MULLER, Gouvernance européenne et globalisation, dans
Revue internationale de politique comparée, Crise de la
gouvernance et globalisation, vol. 6, n°3, Hiver 99, p. 713.
[20]
Philippe HERZOG, Formation d'une société civile européenne et
ouverture du système institutionnel, dans
Olivier DE SCHUTTER, Notis LEBESSIS et John PATERSON éd., La
gouvernance dans l'Union européenne…, p. 233.
[21]
Philippe HERZOG, Formation d'une société civile européenne…,
p. 234.
[22] la
méthode communautaire consiste à considérer que les secteurs
concernés ne dépendent plus uniquement des souverainetés nationales.
Comme l'indique Le Livre blanc sur la gouvernance européenne, la
méthode communautaire garantit à la fois la diversité et
l'efficacité de l'Union. Elle assure le traitement équitable de tous
les Etats membres, des plus grands aux plus petits. Elle fournit un
moyen d'arbitrer entre divers intérêts au travers de deux filtres
successifs : le filtre de l'intérêt général, au niveau de la
Commission ; le filtre de la représentation démocratique, européenne
et nationale, au niveau du Conseil et du Parlement, qui constituent
ensemble le pouvoir législatif de l'Union. Gouvernance
européenne, Un Livre blanc, p. 9, Bruxelles, Commission des
Communautés européennes, 25 juillet 2001 (COM(2001) 428 final).
[23]
Paul MAGNETTE, Gouvernance et légitimité, discours tenu lors
de la Séance inaugurale du DES à la Faculté universitaire
Saint-Louis, Bruxelles, 2O septembre 2001.
[24]
Jurgen HABERMAS, Pourquoi l’Europe a-t-elle besoin d’une
Constitution ?, dans Deutschland, n°6, décembre-janvier,
2001, p. 62.
[25]
Jurgen HABERMAS, Pourquoi l’Europe a-t-elle besoin d’une
Constitution ?…, p. 64.
[26]
Fritz W. SCHARPF, Governing in Europe : Effective and Democratic
?, p. 6, 0xford - New-York, Oxford University Press, 1999.
Fritz Scharpf esr directeur de l'Institut Max Plancq de Cologne. –
Voir aussi les analyses de Renaud Dehousse qui considère que, dans
le cadre européen, la promotion de la légitimation par le peuple
repose sur une vision mécaniste voire simpliste de l'exercice du
pouvoir politique et qui y préfère une approche privilégiant la
procédure, et donc la transparence et la participation. Renaud
DEHOUSSE, Les institutions européennes en quête de légitimité :
nécessité d'une approche privilégiant la procédure, dans Olivier
DE SCHUTTER, Notis LEBESSIS et John PATERSON éd., La gouvernance
dans l'Union européenne…, p. 204sv.
[27]
Jean-Marie GUEHENNO, Le modèle européen…, p. 278.
[28] La
segmentation excessive s'exprime par le fait que la Commission comme
les administrations nationales sont organisées verticalement, chaque
ministère ou direction générale traitant son secteur dans sa propre
logique et indépendamment des autres. L'exemples le plus flagrant
est donné par l'affaire de la vache folle.
[29]
Notis LEBESSIS et John PATERSON, Développer de nouveaux modes de
gouvernance, Les développements récents dans la réforme
institutionnelle et administrative, dans Olivier DE SCHUTTER, Notis
LEBESSIS et John PATERSON, La gouvernance dans l'Union européenne,
coll. Les Cahiers de la Cellule de Prospective, p. 293,
Luxembourg, Commission européenne, 2001.
[30]
Michelle EVERSON et Giandomenico MAJONE, Réforme institutionnelle
: agences indépendantes, surveillance, coordination et contrôle
procédural dans Olivier DE SCHUTTER, Notis LEBESSIS et John
PATERSON, La gouvernance dans l'Union européenne…, p. 139.
[31]
Michelle EVERSON et Giandomenico MAJONE, op. cit., p. 139.
[32]
Jean-Marie GUEHENNO, Le modèle européen…, p. 270.
[34]
Gilles BERTRAND, Besoins d'union…, p. 9-11
[35]
En matière de "nouvelles formes de gouvernance", la Cellule
Prospective a fait sienne la définition de la gouvernance élaborée
par Pierre Calame et André Talmant : La gouvernance, c'est la
capacité des société humaines à se doter de systèmes de
représentation, d'institutions, de processus, de corps sociaux, pour
se gérer elles-mêmes dans un mouvement volontaire. Cette capacité de
conscience (le mouvement volontaire), d'organisation (les
institutions, les corps sociaux), de conceptualisation (les systèmes
de représentation), d'adaptation à de nouvelles situations est une
caractéristique des sociétés humainesPierre
CALAME et André TALMANT, L'Etat au cœur, le meccano de la
gouvernance, p. 19, Paris, Desclée de Brouwer, 1997.
[36]
Notis LEBESSIS & John PATERSON, Développer de nouveaux modes de
gouvernance…, p. 293.
[37]
Notis LEBESSIS & John PATERSON, Développer de nouveaux modes de
gouvernance…, p. 302-317.
[38]
Jérôme Vignon a dirigé la Cellule de Prospective de 1989 à 1998,
puis après un retour à la Datar, a constitué l'équipe Gouvernance.
[39]
Notis LEBESSIS & John PATERSON, Développer de nouveaux modes de
gouvernance…, p. 294.
[40]
Gouvernance européenne, Un Livre blanc, p. 9, Bruxelles,
Commission des Communautés européennes, 25 juillet 2001 (COM(2001)
428 final).
– Voir
l'analyse critique de Fritz W. SCHARPF, European Governance :
Common Concerns vs the Challenge of Diversity, Jean Monnet
Working Paper n°6/01, New-York, New-York University School of Law,
2001. -
http://www.jeanmonnetprogram.org/papers/00/00f0301.html .
[42]
Georges BENKO, La mondialisation n'abolit pas les territoires,
dans Alternatives économiques, hors-série, n°37, 3ème
trimestre 1998, p. 42-44.
[43]
Pierre CALAME, Le principe de subsidiarité active, Concilier
unité et diversité,
dans Olivier DE SCHUTTER, Notis LEBESSIS et John PATERSON éd., La
gouvernance dans l'Union européenne…, p. 246.
[44]
Pierre CALAME, Le principe de subsidiarité active…, p. 249.
[45]
Source : Livre blanc sur la gouvernance européenne, "Approfondir
la démocratie dans l'Union européenne, Participation des échelons
infra-étatiques", Contributions de la CRPM, Audition de l'Equipe
Gouvernance Secrétariat général, Vers une meilleure utilisation de
la subsidiarité et de la proportionnalité, p. 6, Rennes, CRPM,
Février 2001.
[46]
Notis LEBESSIS & John PATERSON, Développer de nouveaux modes de
gouvernance, Les développements récents dans la réforme
institutionnelle et administrative
dans Olivier DE SCHUTTER, Notis LEBESSIS et John PATERSON éd., La
gouvernance dans l'Union européenne…,
p. 291.
[48]
Philippe MOREAU DEFARGUES, Nation, intégration et appartenance
communautaire : quel équilibre ? , p. 53, dans Brigitte KRULIC,
Une Nation une idée dépassée ? dans Problèmes politiques
et sociaux, La Documentation Française, n° 832, 31.12.1999
[50]
L.J SHARPE, L’affirmation du niveau intermédiaire de pouvoir,
dans Jacques PALARD,Vers l’Europe des Régions,
Problèmes politiques et sociaux, n°806, 24 juillet 1998, p. 5.
[52]
Thierry de MONTBRIAL, Perspectives, dans Thierry de MONTBRIAL
et Pierre JACQUET, Rapport annuel…, p. 22, Paris, Ifri--Dunod,
2001.
[53]
Jacques ATTALI, Dictionnaire du XXIème siècle, p. 139-144,
Paris, Fayard, éd. revue et augmentée, 1998.
[54]
Ces cinq scénarios sont les suivant :
– Le scénario 1 : le triomphe des marchés se caractérise,
comme son nom l’indique, par le règne absolu du libéralisme
économique et du libre échange. L’Europe ne se distingue guère du
reste du monde ne formant plus qu’un unique marché planétaire ;
– Le scénario 2 : les cent fleurs, est marqué par la
paralysie croissante (et la corruption) des grandes institutions
tant publiques que privées, le repli des Européens sur le micro
local et l’économie informelle, la multiplication des initiatives
sans aucune logique d’ensemble ,
– Le scénario 3 : les responsabilités partagées repose sur
l’hypothèse d’une métamorphose du secteur public qui, dans une
conjoncture économique favorable, orchestre une politique sociale et
industrielle renouvelée ;
– Le scénario 4 : les sociétés de création, se caractérise
par une transformation profonde de nos systèmes économiques et
politiques sous les sceaux cette fois, de valeurs privilégiant la
protection de l’environnement et le développement humain. Il incarne
un nouvel humanisme sur le fond de développement durable, ouvre la
voie à une "renaissance immatérielle planétaire".
– Le scénario 5 : voisinages et turbulences décrit une Europe
allégée en proie à un environnement géopolitique immédiat perturbé,
à l’Est comme au Sud, par le développement de tensions et de
conflits qui entraînent la création d’un Conseil européen de
sécurité tout entier absorbé par des préoccupations de sécurité et
de défense [54].
Cellule Prospective, Les cinq scénarios de la Commission
européenne, coll. Les cahiers de la Cellule Prospective,
Luxembourg, Edition apogée, 1999. – Gilles BERTRAND et Anna
MICHALSKI, "Scénarios Europe 2010" : gros plan sur la gouvernance,
dans Olivier DE SCHUTTER, Notis LEBESSIS et John PATERSON éd., La
gouvernance dans l'Union européenne…, p. 261-277. – Gilles
BERTRAND, Anna MICHALSKI, Lucio R. PENCH, Europe 2010 : cinq
scénarios, dans Futuribles, Octobre 1999, p. 5. – Michel
GODET, La prospective en quête de rigueur, Portée et limites des
méthodes formalisées, dans Futuribles, Janvier 2000, p.
57-64.
[55]
Hugues de JOUVENEL, Du no future à l'Europe de demain, dans
Futuribles, Octobre 1999, p. 3-4.
[56]
Philippe MOREAU DEFARGES, Institutions européennes, La réforme
place la France devant un choix difficile, dans Thierry de
MONTBRIAL et Pierre JACQUET, Rapport annuel mondial sur le
système économique et les stratégies, p. 268, Paris, Ifri-Dunod,
2000.