 le Nord-Pas de Calais
à l'horizon 2020 |
Séance
publique de lancement des travaux
Schéma régional d'aménagement et de développement du territoire
Horizon 2020
Le
Nord - Pas de Calais et la Wallonie : deux chantiers pour vingt ans
Philippe Destatte
directeur de l'Institut Jules Destrée
|
Lille, le 24 novembre 2001.
Permettez-moi d'abord de rappeler un constat fait par M. Pierre-Jean Lorens,
directeur de la Direction du Plan et de l'Evaluation lors d'un séminaire commun entre le
Nord - Pas de Calais et la Wallonie : depuis que nous apprenons l'un de l'autre
dans les domaines de la contractualisation, de l'évaluation et de la prospective, ce
regard est en tous cas pour nous, en Région Wallonie, tellement
enrichissant, que nous nous demandons comment nous avons pu travailler précédemment,
aveugles à ce qui se passait de l'autre côté de cette frontière de plus en plus
ténue : aveugles, à l'image de ces cartes de la Datar qui s'arrêtent brutalement,
comme si nos territoires débouchaient tous sur des falaises vertigineuses.
Merci donc d'avoir invité le voisin régional wallon que je suis.
Cette affirmation d'identité régionale me permet d'aborder directement le
travail de l'Observatoire interrégional du Politique. Je commencerai par rendre hommage,
une nouvelle fois, à la qualité et à la pertinence des analyses qui y sont menées. Mme
Elisabeth Dupoirier était venue à Mons en octobre 1998 pour ouvrir les débats de notre
quatrième exercice de prospective La Wallonie au
futur. Les quatre ou cinq idées fortes que la directrice de recherches au CNRS y
lançaient constituent la grille de lecture indispensable de nos chantiers actuels, le
vôtre et le nôtre :
1. la proximité, voire la similitude,
des questionnements et des approches entre les régions françaises
particulièrement le Nord - Pas de Calais et la Wallonie, malgré le cadre
institutionnel différent
Je n'évoquerai pas ce cadre
institutionnel qui mettrait immédiatement mon temps de parole KO. Dans le Nord - Pas
de Calais comme en Wallonie, la nécessité d'une identité régionale se fait sentir et
se manifeste comme élément de cohésion et de participation citoyenne. Je suis toutefois
très impressionné par le haut niveau d'adhésion de la population au territoire du
Nord - Pas de Calais, situant votre région dans le peloton de tête des régions
dites historiques, grâce plutôt à une identité de projet, de participation des
habitants. Cet atout est fondamental, et c'est un habitant d'une région à faible
identification qui vous l'assure !

2. La mission du politique est plus que jamais de produire une offre de
sens
C'est bien ce que vous faites ici, Monsieur le Président du Conseil
régional, Mesdames et Messieurs :
- par l'identification et la valorisation des atouts régionaux
On est frappé Mme Béatrice Roy l'a bien montré par la
confiance des habitants en leur Région : 73 % - 15 points de mieux que la confiance
en l'avenir de la France, 58 %. Cette confiance est, chez vous, en progrès constant
depuis 1985 : de 47 à 73 %, même si elle est légèrement plus faible que la
confiance moyenne des régions. Les représentations de la région Nord - Pas de
Calais s'expriment par le dynamisme, la qualité de l'habitat et la situation au sein de
l'Europe, avec la conscience d'habiter dans un espace qui reste marqué, en matières
environnementales et économiques, par les affres de la période industrielle passée.
D'où l'importance des attentes sur ces questions.
par l'offre de sens que produisent les acteurs au travers et au delà
de l'institution régionale, par identification à un projet collectif ouvert et
structuré à la fois
Les acteurs du Nord - Pas de Calais se prononcent d'ores et déjà pour
la réalisation et la valorisation des investissements immatériels en donnant largement
les priorités, pour l'horizon 2020, à l'éducation, à la formation, à l'enseignement
et à la recherche. En cela, les habitants du Nord - Pas de Calais et ceux de la
Wallonie se rejoignent.
3. l'espace de l'action régionale
doit s'ouvrir à d'autres horizons, à l'interdépendance et à la coopération des
territoires, de manière transnationale et transfrontalière.
Cette préoccupation qui est vôtre est aussi nôtre. Ainsi, il n'est pas
anodin de relever que, dans l'enquête wallonne, nous avons inscrit une question relative
aux programmes pluriannuels de développement de notre Région. Lorsque l'on pose la
question de la coopération avec d'autres régions européennes ou belges, on relève une
forte adhésion, surtout pour une coopération avec les régions françaises -
coopération préconisée par 78 % des Wallons, devant la coopération avec la
Flandre mais aussi devant la coopération avec Bruxelles.

4. l'avenir des régions est plus que
jamais dans l'Europe
Cette idée peut être vraie et fausse à la fois. Jean-François Stevens le
relève dans son Petit Guide du Nord - Pas de
Calais 2020 : l'espace régional est désormais européen.
Les Wallons considèrent, à 68 %, que les conditions de vie des
habitants en Wallonie dépendront avant tout de l'Europe. Contre 17 % à la Région
et 14 % à l'Etat fédéral belge. Pourtant, 34 % des Wallons estiment qu'il
serait positif que ces décisions soient prises au niveau de la Région. Vous voyez le
paradoxe. Nous devons être convaincus que notre avenir dépend de nous-mêmes. La
prospective, c'est se donner les moyens d'agir sur sa propre histoire, ce que vous faites
ici, Monsieur le Président, ce que vous faites ici, mesdames et messieurs.
Ainsi, peser demain, mais déjà aujourd'hui - pour le Nord - Pas de
Calais, comme pour la Wallonie -, c'est aussi se valoriser en tant que région dans
l'Europe. Ce qui renforce l'idée de véritable diplomatie
régionale avancée par votre Mission Prospective. Du reste, si j'ai bien compris les
actions menées depuis plusieurs années par vos forces vives sous l'égide de votre
Conseil régional, cette diplomatie régionale est déjà à l'uvre. Elle ne
pourrait que s'amplifier, en dépit de l'absence d'une assemblée européenne qui
représenterait les régions de manière tangible.
Monsieur le Président du Conseil Régional,
Mesdames, Messieurs,
Je ne crois pas aux coïncidences. Sans s'être concertées et avec des
démarches différentes, les Régions Nord - Pas de Calais et Wallonie lancent, à
deux jours d'intervalles, deux exercices de prospective à 2020, ce samedi 24 à Lille et
ce lundi 26 novembre 2001 à Namur.
Que sont
deux jours quand nous osons porter notre regard à l'horizon de 20 ans et que nos
chantiers sont contigus ?