Cette étude comparative, réalisée sur base annuelle depuis 1985 dans
les régions françaises, est effectuée selon le même modèle pour la première fois en
Wallonie. Il s’agit d’une l'initiative de l'Institut Jules Destrée qui a
bénéficié du soutien du gouvernement wallon et plus particulièrement du
ministre-président Robert Collignon, qui était d’ailleurs représenté.
Lorsque l'on examine les résultats de l’étude comparative entre
les régions françaises et la Wallonie, il faut d’abord avoir a l'esprit les
différences de contextes institutionnels entre des régions françaises, qui sont les
fruits d’une décentralisation, et une région belge qui constitue une entité
fédérée (l'exclusivité des compétences en Wallonie – le partage des compétences
en France; l’équipollence des normes en Wallonie – la subordination des normes
en France). Ensuite, il faut se rappeler les différences de contexte des opinions
publiques à l’automne 1998, époque à laquelle a été réalisée
l’étude : une France euphorique alors que la République vibrait encore des
effets de la coupe du monde et d’une vision idyllique de la cohabitation, les
contextes politiques régionaux différents puisque les conseils régionaux venaient
d'être renouvelés en France tandis que, en Wallonie, le Conseil régional achevait son
mandat.

Toutefois, plusieurs comparaisons méritent d’être mises en
exergue :
1. L'identité régionale est faible en Wallonie, comparée aux
régions françaises et surtout à des régions comme la Corse ou la Bretagne. Ce
résultat peut étonner vu la différence de statut entre la Wallonie et les régions
françaises. Cependant, il peut s'expliquer par le niveau global assez faible des
identités territoriales en Belgique francophone, y compris de l'identité nationale
belge, dont l'intensité est beaucoup plus limitée elle aussi que l'identité nationale
française.
2. Les Wallons connaissent mal les mots qui caractérisent leur
région. Ils sont plus ignorants que les Français du nom même de leur région, comme de
celui de sa capitale. En revanche, ils connaissent un peu mieux celui de leur
ministre-président que les Français celui de leur président de région.
3. En Wallonie comme en France, la régionalisation apparaît
inéluctable et peu songent à un retour en arrière. En Wallonie, on est majoritairement
heureux des compétences actuelles de la Région, bien qu'un tiers des Wallons souhaite
encore un approfondissement de la régionalisation.
4. Les identités territoriales ne sont pas indépendantes des
autres identités territoriales, comme celles qui portent sur la nation ou sur l'Europe.
Au contraire, elles paraissent s'emboîter les unes dans les autres de manière assez
harmonieuse.
5. Les régions renvoient d'abord, en France comme en Wallonie, à des
évocations de lieux de culture, d'histoire et de communauté humaine. En Wallonie, on
note cependant une signification largement absente des mentalités françaises :
celle d'un lieu de débat politique. Toutefois, ceux qui s'identifient le plus à la
région le font sans référence particulière à la dimension politico-institutionelle,
ni à l'évaluation des compétences de la région. L'identité régionale n'a pas de
contenu véritablement politique.
6. L'identité régionale n'est cependant pas sans effet, tant en
France qu'en Wallonie : elle augmente les jugements positifs quant à son dynamisme
et son avenir, tout comme elle accroît la demande d'actions sectorielles. Ces attentes
concernent, dans l'ordre, d'abord l'éducation et la formation, puis l'environnement, le
social et les aides au développement économique suivis, en Wallonie, par les nouvelles
techniques d'information et de communication et, en France, par les routes.
L’étude complète, avec les analyses des professeurs Elisabeth
Dupoirier et André-Paul Frognier, sera disponible début mai 1999, à l’Institut
Jules Destrée.