Histoire du mouvement wallon
De la "séparation administrative" au fédéralisme (1912-1950):
quête identitaire du Mouvement wallon?
- (1997)
Micheline Libon
Docteur en Histoire de l'Université
catholique de Louvain
On l'a dit et écrit, le
Mouvement wallon fut un mouvement défensif alors que le Mouvement flamand fut un
mouvement d'affirmation de soi. Mouvement défensif, par rapport à qui ? par
rapport à quoi ? Les "adversaires" une fois identifiés, encore faut-il discerner
sur quoi repose la légitimité ou, à tout le moins, la justification que se donne
le Mouvement au sujet de sa défensive. S'agira-t-il de facteurs purement
négatifs ou, au contraire, d'éléments permettant une identification, le tracé
d'une personnalité, en un mot le discernement et l'affirmation d'une identité ?
C'est l'objet de cet
exposé de tenter une réponse à ces questions. La période couverte sera grosso
modo 1912-1950, avec une attention particulière à l'impact des deux guerres
mondiales quant à la quête identitaire du Mouvement wallon. Les projets
d'organisation des rapports Flamands - Wallons dus à l'initiative du Mouvement
furent-ils significatifs à cet égard, et en quoi ? Par ailleurs, les écrits de
militants wallons aidèrent-ils à cerner davantage une identité wallonne ?
Du point de vue qui nous
occupe, le Congrès wallon de 1905 revêt une importance particulière en ce sens
que la plupart des rapports présentés traitaient de l'originalité de la
Wallonie, de son identité ethnique et culturelle. Un invité de marque, Henri
Pirenne, participait à ces assises. S'il souligna la communauté de civilisation
dans laquelle il était bien difficile de faire la part respective des Flamands
et des Wallons, il releva cependant une dualité dans cette communauté : il y
a certainement, chez nous, deux autres sentiments parfaitement reconnaissables :
le sentiment national flamand et le sentiment national wallon .
(1)
Cela étant acquis ou tout
au moins posé par l'éminent historien, quels sont pour les militants wallons,
les fondements du sentiment wallon ? Une mise au point s'impose tout d'abord.
Dans les années du début du siècle, le terme 'race' est assez couramment
employé, notamment chez les militants wallons. Est-il besoin de signaler qu'à
l'époque, il n'avait pas la charge négative qu'il prit sous le régime nazi dans
l'horrible contexte que l'on sait. Cela étant, au cours du Congrès de 1905, le
paléontologue de l'Université de Liège, Julien Fraipont (2)
mit les choses au point : il n'y avait pas de race wallonne; mieux valait
utiliser l'expression 'type wallon (3). Quelques années
plus tard, le philologue Auguste Doutrepont, l'un des premiers catholiques à
militer dans le mouvement wallon, précisa comment il fallait comprendre le terme
'race'. Il s'agit d'entendre par là, disait-il, tout groupement humain qui,
sans avoir conservé la pureté du sang, en dépit des croisements, s'est acquis à
la longue une même manière de sentir, de penser et de vouloir, en un mot une
âme commune.
L'unité de ce groupement provient de l'uniformité de mentalité et de
culture
et non de la taille ni de la conformation du crâne. La 'race'
ainsi définie est bien plus l'aboutissement intellectuel que le point de
départ matériel (4).
Les Wallons – tout comme
les Flamands – auraient une 'âme commune'; il y aurait donc une âme wallonne.
Encore faudrait-il préciser ce concept d'âme, concept à la réminiscence
chrétienne et qui pourtant est employé lui aussi au Congrès wallon de 1905
lorsque l'âme wallonne
est affirmée. Il est sans doute superflu de rappeler que cette affirmation
s'oppose à celle qui fut proclamée par Edmond Picard, quelques années plus tôt
(1897), à savoir l'âme belge', produit de serre chaude comme le disait le
philologue Olympe Gilbart
(5) . Affirmer l'âme wallonne, tel était précisément
l'un des objectifs du Congrès de 1905. Son président, Julien Delaite, le
précisait en ces termes : Nous l'avons organisé [le Congrès] (...)
pour exalter l'âme wallonne... Nous voulons... mettre en lumière ce que les
Wallons furent dans le passé, ce qu'ils réalisent dans le présent,
ce à quoi ils aspirent pour l'avenir (6) .Si
l'existence de la 'race wallonne' est, à juste titre, niée au profit de l'âme
wallonne' qu'en est-il de celle-ci ? Que signifie-t-elle ? Les congressistes ne
le précisent guère.
Posons comme hypothèse
l'assimilation âme wallonne -identité wallonne sur base d'un exposé du
professeur Ernst Jouthe en juillet 1995. En effet, pour celui-ci, l'identité
est en quelque sorte tiraillée (...) entre ce qui la fonde dans le passé
et ce qui la spécifie dans le présent dans une perspective d'avenir.
L'identité, jamais une donnée première, ni un état permanent, est plutôt une
construction dynamique résultant du travail d'un individu (ou d'un groupe.
note de l'A) qui cherche à se situer, à se positionner, à affirmer une
singularité et une unité face à une réalité multiforme et hétérogène.
Poser la question de l'identité, poursuit l'auteur, c'est poser
fondamentalement la question du sens, dans sa triple dimension : dimension
affective qui réfère au sentiment d'estime de soi, au fait d'être bien dans sa
peau, dans sa langue, dans son pays, dans ses conditions d'existence, dans son
univers matériel et symbolique; la dimension cognitive, qui réfère à la notion
de compréhension de soi, au besoin de comprendre le sens de son histoire
personnelle et collective, de sa vie quotidienne ici et maintenant et de son
avenir; la dimension morale ou éthique, qui réfère à la notion de direction,
d'orientation, de choix, de projet de vie personnelle et de son insertion dans
un projet de société émancipateur (7).

Par rapport à cette
hypothèse, comment les militants wallons du début du XXe siècle, perçoivent-ils,
dans les faits, cette âme wallonne - identité wallonne ? Par delà les
différents patois de Wallonie, la langue française est, sans conteste, ce qui
différencie profondément les Wallons des Flamands. Cependant, ces mêmes
militants wallons estiment que le français, langue de grande culture, ne doit
pas être expulsé de Flandre même s'ils reconnaissent aux Flamands le droit
d'être instruits, administrés, jugés en néerlandais. Cet élément d'identité
qu'est la langue, la langue française en l'occurrence, fera naître dans le
Mouvement wallon, jusque dans les années 20, une opposition énergique et
farouche à toute tentative ou application même limitée du bilinguisme en
Wallonie. En effet, d'une part, l'attachement viscéral à la langue française
était réel; d'autre part, en matière d'emplois à caractère public, le
bilinguisme, pensait-on, favorisant les Flamands, désavantageait naturellement
les Wallons. Mais on peut aussi comprendre le rejet catégorique du bilinguisme
par le souvenir de la politique linguistique de Guillaume d'Orange, bien que
celle-ci ne concernât pas les provinces wallonnes mais qui fut un facteur parmi
d'autres qui amenèrent la Révolution de 1830 où les Wallons jouèrent un rôle non
négligeable (8) . Le libéral Delaite, lors du Congrès
wallon de 1912, le socialiste Destrée, dans sa lettre au roi Albert, y renvoient
explicitement (9) . De cette menace de bilinguisation de la
Wallonie, attentatoire à la langue française, les militants wallons en viennent
à distinguer deux mentalités, plus précisément deux façons différentes de
concevoir la vie politique révélant l'opposition des idéals du Nord et du Sud
(10) . Pour les deux élections partielles de 1908 et 1910, sous le
régime du suffrage universel plural et de représentation proportionnelle, le
Parti catholique avait récolté 763.000 suffrages dans les arrondissements
flamands, 494.000 dans les arrondissements wallons. Les deux autres partis,
partis 'anticléricaux' recueillaient ensemble 759.000 suffrages dans les
arrondissements de langue française, 455.000 dans les arrondissements de langue
flamande. Lors des élections de 1912, les résultats furent similaires. Le parti
au pouvoir récoltait 825.000 (733.097 chez Destrée) suffrages en Flandre,
543.000 (466.927) dans les arrondissements de langue française; l'opposition
453.000 (382.924) au nord, 796.000 (708.056) dans les seconds. C'est bien, à
travers ces résultats, un parallélisme inverse qui se dégage et qui renforce la
conviction des militants wallons d'une profonde différence de mentalité entre le
nord et le sud du pays. Et le combat mené pour l'obtention du suffrage universel
pur et simple n'y changea rien, ainsi que l'avait prévu Destrée. La population
flamande étant plus nombreuse que la population wallonne (11)
et la répartition des sièges à la Chambre étant fonction de cette statistique,
les représentants de la Wallonie resteront minoritaires au sein d'un pouvoir
centralisé tel qu'il existe. De cette situation grosse de danger pour la
Wallonie, de sa 'minorisation pour longtemps', les militants wallons conclurent
bientôt à la nécessaire réforme de l'Etat unitaire et centralisé, sans pour
autant mettre en cause l'existence de la Belgique.
Au tout début de l'année
1912, la Ligue wallonne de Liège, active depuis 1897, prend l'initiative
d'un Congrès à tenir le 7 juillet. En l'annonçant, le Moniteur officiel du
Mouvement wallon de février publie l'ordre du jour de la future réunion. Le
point 9 portait sur l'examen de la question de la séparation administrative
entre la Flandre et la Wallonie, question qui serait traitée au cours de la
matinée. Le Congrès reçut l'adhésion de 298 personnes individuelles et de 23
sociétés (regroupant 5.000 membres). Seuls les délégués des sociétés avaient
droit de vote dans les questions politiques traitées. Le 7 juillet, la quasi
totalité de la journée fut occupée par la question de la séparation
administrative. Certes, il en fut ainsi, en partie tout au moins, en raison du
résultat des législatives de juin, mais peut-être surtout en raison du débat
passionné auquel la question donna lieu. Quatre projets avaient été distribués,
au préalable : deux prônant un accroissement des pouvoirs des Conseils
provinciaux, deux se rapprochant d'un système fédéral dont le plus abouti, celui
de Julien Delaite, servit de base de discussion. Deux parties constituaient ce
texte : la seconde contenait un projet de Constitution révisée et le commentaire
des articles instaurant le fédéralisme. Delaite prévoyait un fédéralisme à trois
régions : Wallonie, région flamande et région brabançonne chacune dotée d'un
Conseil régional, composé en tout ou en partie des membres des Conseils
provinciaux. Dans la première partie, l'auteur s'attachait à justifier le
malaise wallon et la nécessité de mesures à prendre pour l'apaiser. Parmi
celles-ci, il se plut à relever ce que la Ligue qu'il présidait avait déjà
envisagé depuis plus de 10 ans. En décembre 1898, en effet, Delaite présenta un
rapport à la Ligue wallonne de Liège dans lequel il s'exprimait ainsi :
L'état fédératif... est un système qui pourrait peut-être nous être justement
appliqué. (...).

Par le respect des
autonomies locales, le caractère original et propre de chaque peuple fédéré se
manifeste dans ses productions intellectuelles.
(...).
Les Wallons seraient plus attachés à leur
Wallonie, parce qu'ils joueraient un rôle plus actif dans son gouvernement.
Les Flamands et surtout
les flamingants ne nourriraient plus contre nous cette haine étrange (Weg met
dat Wallenras !), parce qu'ils auraient comme nous, le droit de se gouverner,
(...).
Quelle difficulté de
principe voit-on à l'établissement d'un 'conseil régional', pour ne pas dire
'parlement provincial', en Wallonie et d'un autre en Flandre, avec son budget
propre et son self-government. Au-dessus, un Parlement fédéral, composé de
députés wallons et flamands en nombre égal. (...) .
(12)
Quelques remarques
s'imposent à propos de ce texte. Tout d'abord, les résultats des élections de
1912, à l'occasion desquelles libéraux et socialistes avaient multiplié leurs
cartels (6 en 1910, 11 en 1912), ne sont pas les seuls à expliquer l'irruption
du thème 'séparation' dans le Mouvement wallon. Le rapport de Delaite date de
1898, c'est-à-dire l'année même où la loi reconnaît le néerlandais, langue
officielle à l'égal du français. Le suffrage universel plural et le vote
obligatoire de 1894, la représentation proportionnelle bientôt acquise, en 1899,
la population plus nombreuse en Flandre, autant de facteurs qui font craindre la
minorisation de la Wallonie et, partant, suscitent chez les militants wallons un
mouvement
de protection, de défense en envisageant une réforme de l'Etat. La
prédominance des catholiques au pouvoir, liée à la force du parti en Flandre en
opposition avec la majorité 'anticléricale' dominant en Wallonie révèle une
différence de mentalité qui ne fait que confirmer la crainte – sinon la rage –
des militants wallons qui, à l'époque se recrutent principalement chez les
libéraux et les socialistes dans une moindre mesure. Pourtant – c'est la
deuxième remarque –, la légitimité des revendications flamandes n'est pas
contestée, même si l'on regrette l'abandon du français en Flandre. Le rapport de
Delaite, en 1898, en témoigne, comme l'intervention du Liégeois Emile Jennissen,
libéral et militant wallon convaincu, lui-même auteur d'un projet fédéral,
soulignant, au Congrès de 1912, le caractère irrésistible du mouvement flamand
parce qu'il [le mouvement] est l'émanation du suffrage universel. Il est
soutenu par les masses du petit peuple flamand, par sa démocratie .
(13)
A ce même Congrès de
juillet 1912, le débat sur la question de la séparation administrative, sur son
opportunité et la définition de son contenu fut des plus animés. Parmi les
opposants les plus résolus, un délégué bruxellois tenta de prouver, chiffres à
l'appui, que la Wallonie n'aurait rien à gagner d'une séparation d'avec la
Flandre (14) . Même au sein des libéraux liégeois,
l'accord était loin d'être unanime : Delaite et Jennissen, partisans de la
séparation, s'opposaient à Emile Digneffe qui estimait qu'un peuple n'est
grand que quand il a évolué et passé du fédéralisme à la centralisation. Voyez
la France... Quant aux socialistes, si Jules Destrée souhaitait que la
séparation fut affirmée par le Congrès, tout en reconnaissant la difficulté d'en
préciser le contenu, Léon Troclet la voyait déjà sous la forme d'une
confédération des Etats-Belgique-Unis dans lequel [sic] j'irais jusqu'à
comprendre si possible, la Hollande et le Grand-Duché
(15).
Bref, les congressistes
se quittèrent après avoir adopté, par 28 voix contre 5 et 5 abstentions, la
motion présentée par Destrée : ceux-ci émettaient le vœu de voir se réaliser la
séparation entre la Flandre et la Wallonie pour permettre à celle-ci d'être
davantage indépendante vis-à-vis du pouvoir central et ils chargeaient une
commission d'étudier la forme à donner à la séparation. Ladite commission fut
installée le 20 octobre à Charleroi; ce fut l'Assemblée wallonne,
composée en principe d'un membre pour 40.000 habitants (16) .
A propos de l'hypothèse
'âme wallonne - identité wallonne' que peut-on en dire à la veille de la
Première Guerre mondiale ? Quel contenu les militants wallons lui donnent-ils ?
La langue française, on l'a vu, est l'élément qui marque profondément la
différence entre les Wallons et la majorité des Flamands, langue qui fait
participer à la culture française, culture qui imprègne de façon différente les
expressions artistiques de la Wallonie par rapport à celles de Flandre, comme
l'Exposition de 1911 à Charleroi l'avait donné à voir. Du point de vue qui nous
occupe, l'avis d'Elie Baussart paraît exemplatif. L'exposition de Charleroi fut
pour lui un véritable choc culturel, un événement de capitale
importance. Elle fit surgir en lui l'intuition d'une identité wallonne et
sans doute n'est-il pas exagéré de situer là son engagement wallon.

L'Assemblée wallonne
entra en léthargie pendant les quatre années de guerre. Quand elle reprit ses
activités en mars 1919, le climat était à l'union sacrée tandis que du côté
flamand un programme minimum visait à faire reconnaître, en Flandre, l'emploi du
seul néerlandais. Par ailleurs le suffrage universel pur et simple masculin
joint à la représentation proportionnelle et à l'apparentement provincial
allaient bouleverser le paysage politique. C'est bien connu. Toutefois, du point
de vue qui nous occupe, rappelons que, lors des législatives de novembre 1919,
les cantons flamands avaient voté à près de 57 % pour la droite et à près de 40
% pour les gauches; les cantons wallons, à près de 70 % pour les gauches et à
près de 28 % pour la droite; les cantons bruxellois se situant à mi-chemin des
deux régions (17). L'analyse faite par les militants
wallons avant la guerre se trouvait confortée et, surtout, la crainte de
minorisation de la Wallonie renforcée si aucun accommodement n'était trouvé
quant aux institutions de l'Etat unitaire et centralisé. C'est dans ce contexte
qu'il faut situer la démarche de deux sénateurs libéraux, membres de l'Assemblée
wallonne. Alors que la première loi linguistique visant l'emploi des langues
dans l'administration était votée en juillet 1921, la révision de la
Constitution fut entreprise dès 1920. Dans ce cadre, le 22 septembre 1921,
Joseph-Maurice Remouchamps, secrétaire général de l'Assemblée wallonne en
remplacement de Jules Destrée, devenu ministre, déposa une proposition de loi
visant l'introduction du vote bilatéral au Sénat. Pour être admis par celui-ci,
un texte législatif devait recueillir la majorité des voix des sénateurs
respectivement des arrondissements flamands, wallons et de l'arrondissement de
Bruxelles (18). Sur les 88 présents, la proposition fut
rejetée par 64 voix, celles des catholiques, de 11 libéraux dont 2 Wallons et de
4 socialistes dont 1 Bruxellois et 1 élu du Brabant. Parmi les 24 votes
positifs, on comptait 17 libéraux dont 1 élu de Flandre et 7 socialistes
wallons (19). Le texte déposé par le second sénateur
libéral, Charles Magnette, s'attachait au calcul fixant le nombre des députés.
En lieu et place de la fixation du nombre de députés en fonction du chiffre de
la population, il proposait que ce nombre soit fonction du nombre d'électeurs;
autrement dit il suggérait l'adoption d'un quotient unique (10.000 votes = 1
siège). Les députés flamands resteraient majoritaires, mais l'écart entre eux et
les députés wallons se réduirait, passant de 16 à 5 sièges. Sur les 99 sénateurs
présents, 76 rejetèrent la proposition, les catholiques, 9 libéraux dont 7 élus
de Flandre et 2 de Bruxelles, 8 socialistes, 5 Wallons, 2 Flamands et 1
Bruxellois; 23 la votèrent dont 1 seul socialiste wallon et 22 libéraux dont 1
élu de Flandre, 3 de Bruxelles et 3 du Brabant (20).
Ainsi donc, les deux
essais de réforme politique proposés par l'Assemblée wallonne s'avéraient être
un échec. De cette impasse croîtra l'amertume des militants wallons et elle les
confortera dans le sentiment d'être dominés par les Flamands. La conséquence va
bientôt se révéler : l'éclatement du Mouvement wallon. En effet, en juin 1923,
alors que le Parlement discute de la flamandisation de l'Université de Gand pour
aboutir à la solution que l'on sait, l'Assemblée wallonne implose. Quelque
dix-sept membres parmi les pionniers la quittent, tels Auguste Buisseret, Jules
Destrée, Richard Dupierreux, Emile Jennissen. La cause de ce divorce est
essentiellement due à la position des uns et des autres quant à
l'homogénéisation linguistique de la Flandre, question relevant ou non des seuls
Flamands. Pour les dirigeants de l'Assemblée, le maintien de la langue française
au nord du pays est la condition du maintien de l'unité morale et politique de
la Belgique. C'est à l'élite francophone du nord et du sud, pour qui il n'y a
pas de frontière linguistique, que revient ce rôle essentiel, d'où le soutien
inconditionnel à apporter aux francophones de Flandre. Jusqu'à la Seconde Guerre
mondiale, l'Assemblée maintiendra sa position, murée qu'elle est dans un
antiflamingantisme stérile comme l'écrivait Elie Baussart. Par contre, pour
les scissionnistes, bientôt rejoints par Léonie de Waha, Marguerite Delchef,
Emma Lambotte et Georges Truffaut, l'homogénéité linguistique et culturelle de
la Flandre et de la Wallonie est à reconnaître. Une union, librement consentie,
des deux populations vaut mieux qu'une unité imposée; à la centralisation; mieux
vaut substituer des mesures de décentralisation, comme le souligne, notamment
Jules Destrée (21). Bref, dans les premières années de
l'après-guerre, une partie du Mouvement wallon persiste dans la conviction que
langue et culture françaises sont le ciment de la Belgique tandis que d'autres
militants reconnaissent pleinement l'identité de culture flamande en Flandre et
l'identité de culture romane en Wallonie.
Ce sont ces militants,
qualifiés de 'séparatistes' par les dirigeants de l'Assemblée wallonne, qui se
retrouvent dans la Ligue d'Action wallonne. Dans la question qui nous occupe,
c'est à partir des congrès qu'elle organise, (rapports publiés par La
Barricade , organe de la Ligue), que l'on peut tenter de dégager les
éléments qui fondent l'engagement de ses militants.

Les 13 et 14 juillet
1924, la Ligue tient le premier de ses sept congrès annuels; il a lieu à Liège
en présence de cent personnes. L'appartenance de la Wallonie – terre gauloise –
à la civilisation française est réaffirmée ainsi que la nécessité de la défendre
contre toute entreprise de bilinguisation. Aussi l'autonomie wallonne
devient-elle le but que doivent se fixer les Wallons; celle-ci ayant comme
corollaire l'autonomie flamande : d'où le souhait exprimé de voir menées les
négociations libératrices par les représentants qualifiés des deux
peuples. Quelle serait la forme à donner à cette autonomie ? Tout d'abord,
c'est en s'appuyant sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes que ce droit
est reconnu aux Wallons et aux Flamands. Quant à l'application de ce principe,
Buisseret, tout en mettant en garde contre toute hâte, dessine les contours
d'une autonomie progressive : Selon les nécessités du moment, réclamons
l'extension des pouvoirs des communes, des provinces et, quand ce groupement
nouveau pourra être créé, de la région wallonne (22) .
Cette région wallonne,
cette Wallonie, qu'est-ce qui la fonde ? Quelle est son 'identité' ? Un autre
militant wallon – par ailleurs professeur d'histoire au Collège des Pères
jésuites de Charleroi –, Elie Baussart, dégage, dans plusieurs articles de sa
revue, la Terre wallonne, les éléments qui, à ses yeux, constituent la
'personnalité' de la Wallonie. Les Wallons sont un peuple de marche, aux
confins de deux civilisations. Ils ont comme mission de conserver
intactes les acquisitions de la civilisation latine sur leur sol, laquelle les a
faits, en partie, ce qu'ils sont par le moyen du latin d'abord, des dialectes
romans plus tard, de la langue française enfin. La langue française, qui
transcende la diversité des patois, est l'agent quotidien, subtil, immortel
de l'unité wallonne. La langue n'est pas qu'une phonétique, mais
l'expression adéquate et subtile de tout l'intime du moi, de toute l'âme d'un
peuple; la langue est inséparable de la pensée qu'elle exprime,
agissant sur la formation des concepts, leur association et leur ordonnance.
Pourtant la langue n'est pas le peuple, mais un peuple qui perd sa langue ou
la laisse s'éteindre, abdique en même temps que sa personnalité, son droit à
l'existence.
Le deuxième élément
d'identité wallonne est, pour Baussart, une âme commune, c'est-à-dire une
façon bien à soi qu'a le peuple de réagir en face des événements, une manière
personnelle de s'approprier les idées, de les associer, de les traduire. Ame
commune, culture spécifique, c'est tout comme : car une culture c'est un mode
de penser, d'organiser ses idées, de discipliner ses sentiments, de réagir sous
l'événement; c'est une certaine conception du monde, de la morale, de l'art, de
la politique . Pour Baussart, il ne fait aucun doute que, par-dessus les
dissemblances de terroir, ces traits existent qui font la personnalité du
peuple wallon différente de celle du peuple flamand mais également du peuple
français. De cette prise de conscience, doivent se dégager des normes d'action
car Baussart est persuadé, comme tout vrai régionaliste, que le salut de
la Wallonie (...) prendra naissance dans la Wallonie elle-même. C'est le
Wallon, la famille wallonne, l'atelier wallon, la campagne wallonne qu'il faut
réformer ou relever ou réorganiser et c'est de la combinaison de ces
restaurations partielles que sera fait le renouveau de la Wallonie. Aussi
s'impose-t-il de bien connaître sa situation : Il nous faudrait donc des
monographies exactes et fouillées de chaque centre wallon, de chaque industrie
et de chaque métier de chez nous, un inventaire de nos déficits et de nos
ressources, par genre et par espèce, une description sans fard de nos maux .
Passé, présent, avenir : n'est-ce pas ce que Delaite écrivait déjà en 1905 et
que confirment, aujourd'hui, les propos du professeur Jouthe cité plus haut,
quant à la quête identitaire ?
En outre, pour Baussart,
cette région wallonne, cette Wallonie, n'est pas un tout statique (...),
comme tout ce qui vit, [elle] est en perpétuelle transformation
(...); il faut ne la point considérer comme un tout fermé, hérissé vers le
dehors, pour ne point l'isoler et l'anémier (23).
Point de repli sur soi, donc; point de nationalisme.
Lors du Congrès de la
Ligue d'Action wallonne, en 1925, ce sont des propos similaires que tient
Fernand Dehousse. D'entrée de jeu, il souligne combien l'étude de la langue
maternelle, de l'histoire, de la géographie régionales contribue à influencer la
formation mentale du peuple; ce qui implique l'étude du passé et du
présent qui doit contribuer ainsi à l'explication de ce que chacun
ressent. Dans un second temps, le rapporteur s'interroge sur l'éventuelle
antinomie entre l'éducation du sentiment patriotique et la possibilité de
développer l'âme wallonne. Selon lui, cette antinomie est inexistante. D'une
part, s'il est vrai, poursuit l'orateur, que nous nous 'sentons' Wallons
avant de 'comprendre' que nous sommes Belges, d'autre part, il est non moins
vrai que toute éducation de sentiment patriotique commence par l'initiation
au respect, à l'amour du toit familial, de la cité, de la vallée ou de la plaine
et de leurs hôtes. Enfin, la fierté d'être d'une Wallonie laborieuse et
artiste, fleuron inestimable du diadème Belgique n'a rien d'un repli sur
soi, rien de nationaliste. Et Fernand Dehousse de conclure : Et,
souvenons-nous (...) que, parallèlement aux mouvements régionalistes
(...), se développe, avec les moyens de communication rapides, un mouvement
internationaliste irrésistible qui en est la continuation nécessaire, qui en
sera l'aboutissement logique.
Le jour où des
pourparlers sérieux seront entrepris par le gouvernement pour réviser le statut
belge et 'accorder' les trois provinces
[Flandres - Bruxelles - Wallonie], que l'on veille à voir grand, à voir
européen. Et pourquoi la Belgique ne pourrait-elle pas, dès lors, un jour
servir de modèle à l'organisation des Etats-Unis du monde sur la base de
l'autonomie de toutes les nations (24) !
Aussi les militants
wallons persistent-ils à revendiquer au moins une large décentralisation, au
mieux le fédéralisme. L'unité, impliquant l'idée de fusion, qu'elle
soit française ou flamande est
également impossible. Dès lors, l'union, loyalement et librement
consentie, est la seule solution susceptible de dissiper le malaise
grandissant entre les deux peuples et, du point de vue wallon, de supprimer
le problème si angoissant des minorités. Ainsi, la devise de la Belgique
prendra-t-elle son véritable sens, puisque c'est de l'union et non de l'unité
qu'il s'agit (25) .
Baussart, lui aussi, estime qu'un régime de centralisation qui en un
siècle n'a pu donner au pays une véritable paix intérieure doit être
révisé. Tant du côté flamand que du côté wallon, en effet, l'Etat centralisé de
1830 rompait totalement avec leur passé respectif. Toute leur histoire sous
les différents régimes est faite des longs et tumultueux efforts
des collectivités et des principautés pour acquérir et conserver les droits et
les privilèges nécessaires à leur vie libre et féconde. Aussi, affirme-t-il,
le caractère flamand de la Flandre, roman de la Wallonie doivent être
reconnus et les institutions s'y conformer. Et de clore sa longue réflexion
ainsi : La Flandre et la Wallonie ne sont pas faites pour la Belgique; la
Belgique est faite pour la Flandre et la Wallonie. Comme l'Etat est fait pour le
citoyen et non le citoyen pour l'Etat (26).

L'approche du centenaire
de l'existence de la Belgique fut marquée par certains événements ou initiatives
qui allaient constituer un point de non retour en matière d'unilinguisme
régional. Rappelons pour mémoire qu'en mars 1929, à quelques jours de distance,
deux groupes prennent position, d'une part, le Conseil central de la Ligue
nationale des Travailleurs chrétiens (le 13) et d'autre part, 15 Wallons et 13
Flamands, tous députés du POB (le 16) : ils reconnurent l'autonomie linguistique
et culturelle des deux 'régions'. Le 10 décembre, le gouvernement
catholique - libéral déposait un projet de loi visant la flamandisation de
l'Université de Gand (27). Du côté des militants wallons,
un Congrès de Concentration wallonne fut convoqué pour les 27 et 28 septembre à
Liège; il reçut l'adhésion de quelque 300 personnes. Mais il fallait les mettre
d'accord entre elles ! Aussi, ce premier Congrès dont l'objectif était de
réaliser un front wallon unique se conclut-il par la résolution :
Unilinguisme - Egalité - Révision. C'est au Congrès de 1931 que furent
adoptés les principes d'une Constitution prévoyant un Etat fédéral composé de 2
régions et du territoire fédéral de Bruxelles. En cela, les militants wallons
s'opposaient à la proposition des députés frontistes déposée en avril et qui
faisait de Bruxelles la capitale de la Flandre et le siège de son gouvernement
(28). En janvier 1933, La Barricade cède la place à L'Action
wallonne tandis que les Congrès annuels de Concentration se poursuivent (29).
Ils s'attachèrent à évaluer la situation de la Wallonie qui allait en se
précarisant; notons : sa faible représentation au gouvernement, le déplacement
d'entreprises au nord du pays et de bon nombre de leurs sièges sociaux à
Bruxelles, le marasme économique et social qu'elle subit, le danger d'une
situation exposée en cas d'invasion de l'Allemagne faute de réelle défense à sa
frontière de l'Est et, après mars 1936, suite à la rupture de l'accord militaire
franco-belge puis de l'adoption sous la pression flamande de la politique
d'indépendance - neutralité. Et, in fine, cette même année, l'adaptation
du nombre de députés convaincra les militants wallons que l'état
d'infériorité de leur région vient d'être officiellement consacré (30).
Dans le contexte international que l'on sait, le climat de nationalisme exacerbé
en Flandre et ses succès, sans oublier le rexisme, vont renforcer l'inquiétude
des militants wallons.
Pour Elie Baussart, après
le redressement des griefs au nom et par les voies de la démocratie,
c'est l'Etat totalitaire qui est proposé comme terme de l'effort et condition
de salut de la communauté flamande. Aussi, la menace est-elle grosse de
danger pour la Wallonie : c'est d'une part, nos libertés qui sont en cause et
la perspective qui s'éloigne d'un régime de justice sociale par l'élimination du
capitalisme; de l'autre, la vie politique et économique de la Wallonie, vouée à
une subordination contre nature dans un Etat thiois. Bien qu'il reconnaisse
que subsistent en Flandre d'immenses réserves démocratiques, Baussart
insiste sur la réaction des Wallons : Dès lors, défendre la démocratie, c'est
défendre la Wallonie. Et inversement. Les deux causes, si la menace se confirme,
seraient confondues. Pas de doute que les Wallons, sur ces deux questions,
seront intraitables.
Et quelque mois plus tard, il revient sur l'identité des Wallons, peuple
roman, riche d'un passé et d'un patrimoine dont ils commencent à acquérir
la fierté. Mais, à ses yeux, et ce n'est pas contradictoire avec son analyse
rapportée plus haut, il n'y a pas de culture wallonne. Il y a une culture
française assimilée par les Wallons. Elément indéniable d'unité wallonne,
qui n'est peut-être pas suffisant en ces temps troublés par les nationalismes
morbides pour constituer un puissant rassemblement wallon. Faisant
appel à l'histoire, Baussart rappelle la tradition ancienne et assurée
qui fut celle des provinces wallonnes : celle de la liberté. Et avec
force, il affirme : Dictature, totalitarisme, racisme, tout cela n'est pas de
chez nous : quinze siècles d'histoire le prouvent (...) La vieille passion
libertaire est toujours vivace au cœur des individualistes que nous sommes
(31). Relevant ce qu'écrit Baussart, Léon-E. Halkin insiste sur la nécessité
de donner à la communauté wallonne la conscience de son unité morale et
comme le Carolorégien, le Liégeois écrit que cette unité doit se fonder sur
le sentiment d'une tradition historique de liberté; liberté, mot usé, idée
immortelle (32). Et de plaider, l'un et l'autre, pour
une histoire du peuple wallon sans a priori 'wallingant' qui répondrait à
l'a priori 'belgiciste' d'une certaine histoire du pays. Or, en juin
1938, sous l'égide de la Concentration wallonne présidée par l'abbé Mahieu, est
fondée la Société historique pour la Défense et l'Illustration de la Wallonie
qui s'inscrit dans une démarche scientifique identique. L'histoire d'un
peuple, déclarait l'abbé, est l'exposé scientifique, c'est-à-dire
logiquement ordonné des événements et des faits qu'il a vécus ainsi que du
développement qu'il a subi. (...) Elle
(l'histoire) fausserait sa marche et conniverait (sic) à l'erreur si
elle n'était qu'un essai de justification d'une état de fait présent.
L'interprétation a priori des données historiques, dans le but d'asseoir
et d'étayer des situations politiques acquises, est un crime contre la vérité (33).
L'historien namurois FÈlix Rousseau s'incrit, lui aussi, dans cette démarche.
Il est nécessaire et grand temps que les Wallons s'occupent davantage de leur
histoire (34), écrit-il à Maurice Bologne, secrétaire
de la jeune Société historique.
Du côté de la Ligue
d'Action wallonne et de son périodique, L'Action wallonne, on
ferraillait ferme contre la politique d'indépendance que les militants
considéraient de plus en plus 'de neutralité'. Les articles des Buisseret, Rey,
Truffaut ne se comptent plus (35). Parallèlement à cette
opposition visant la politique extérieure qui manifestait, une fois de plus, les
choix différents du Nord et du Sud du pays, la Ligue préparait un projet de
statut fédéral (36), projet assumé principalement par
Georges Truffaut député socialiste depuis 1934 et Fernand Dehousse, à l'époque
chargé de cours à l'Université de Liège. Celui-ci inaugura, par la même
occasion, une rubrique, Propos de doctrine, dont le premier article
s'intitulait : Y a-t-il un "nationalisme" wallon ? En argumentant,
il réfute les éléments essentiels du nationalisme : impérialisme, oppression des
minorités, exclusivisme et il poursuit : Latins, nous nous intégrons
(...) dans la civilisation la
plus universaliste qui soit. Le Mouvement wallon est un mouvement de
défense : de défense de la culture et de l'autonomie de la Wallonie en Belgique.
Et Fernand Dehousse de conclure en invoquant, pour le Mouvement wallon, le
parrainage du Mouvement national tchèque de Thomas Masaryk : Avec lui, nous
avons en commun l'amour de la démocratie et l'attachement à la liberté sous
toutes ses formes (37).
L'invasion du pays, une
nouvelle fois, suspendait l'activité des organes du Mouvement wallon. Mais bon
nombre de militants allaient se retrouver dans la Résistance, hormis ceux des
leurs – tels Georges Truffaut, Luc Javaux, notamment – fauchés dans leur combat
contre le nazisme et la perspective de voir l'Ordre nouveau imposé à l'Europe,
et hormis ceux des leurs retenus en Allemagne comme quelque 70.000 de leurs
compatriotes wallons – tels Joseph Merlot (38) et Jean
Rey. Comme Marie-Françoise Gihousse l'a montré, les militants wallons restés ou
rentrés au pays se retrouvent dans les premiers mois de l'occupation et forment
de petits groupes d'où vont émerger au fil du temps trois mouvements
principaux : Wallonie libre, Wallonie catholique et Wallonie
indépendante (39). Si les orientations idéologiques
respectives sont marquées, progressivement s'est dégagée une position commune
quant à l'avenir de la Wallonie, comme l'annonce le clandestin catholique en
avril 1944 : Il y a (...) à l'heure présente, unanimité parmi les
mouvements wallons militants pour doter, après la guerre, la Wallonie d'un
statut d'Etat fédéral (40). La décision de tenir un
Congrès wallon à la Libération est prise et des contacts sont noués pour son
organisation.
Fin 1944, l'historien
Félix Rousseau publie sous les auspices de Wallonie catholique,
une brochure intitulée La Wallonie, son histoire, son avenir. Il
réaffirme avec force que la Wallonie est une terre latine et française et
rien que latine et française, et il s'agit qu'elle le demeure
intégralement. En conséquence, le cadre étroitement unitaire est à rejeter
si l'on ne veut pas que la Wallonie soit étouffée sous le poids flamand qui a
pour lui la loi du nombre.

Le problème communautaire
est loin d'être résolu au sortir de la guerre. La Question royale va révéler,
une fois de plus, que les choix sont majoritairement différents au Nord et au
Sud du pays. Le rassemblement d'un certain nombre d'intellectuels catholiques –
et non des moindres – au sein de Rénovation wallonne, issue de
Wallonie catholique, est significatif à cet égard. Même les syndicats,
souligne Baussart, travaillent un prolétariat [wallon] si dissemblable
du prolétariat flamand et qui défendent des intérêts qui sont conditionnés pour
une part qui n'est pas mince par des conditions régionales (41).
Par ailleurs, l'aggravation de la situation démographique wallonne (42),
conséquence pour une bonne part de la captivité des soldats wallons, accentue la
minorisation de la Wallonie au sein de l'Etat unitaire et centralisé; s'ajoute
encore au marasme la situation économique se dégradant et entraînant
d'inéluctables séquelles sociales.
Précédé d'une ample
campagne de presse (43), le Congrès wallon se tint les 20
et 21 octobre 1945, date anniversaire de la fondation de l'Assemblée wallonne en
1912. La centaine de participants des Congrès de l'Entre-deux-guerres s'était
élargie à quelque 1.500. Ce Congrès est trop connu pour que l'on s'y attarde
longuement (44). Toutefois il est à noter qu'il baigna
dans la ferveur à l'égard de la France de de Gaulle, la France Libre.
Parmi les quatre formules proposées pour l'avenir de la Wallonie, la formule
fédérale fut adoptée à la quasi unanimité; elle avait été défendue
principalement par Fernand Dehousse, Henri Glineur au nom du Parti communiste,
par Léopold Levaux au nom de l'UDB et Jean Rey, porte-parole de la Fédération
libérale liégeoise. Pour Dehousse, le fédéralisme est la forme suprême de la
démocratie, en ce sens qu'à côté de toutes les libertés individuelles (...),
elle en ajoute de nouvelles qui sont des libertés locales ou régionales.
Pour Rey, seule la solution fédérale était susceptible de réaliser l'unité
des Wallons, unité des Wallons indispensable pour que la Wallonie, libre
de disposer d'elle-même, forme une communauté majeure qui ne subisse
l'hégémonie ouverte ou larvée de personne, fût-ce de certains
compatriotes, ceci selon Levaux. Tous étaient d'avis que le fédéralisme était un
dernier essai de vie en commun dans le cadre belge, même si, pour y
atteindre, il faudrait beaucoup de courage et beaucoup d'efforts
(45).
Une commission pluraliste
fut chargée de couler la décision du Congrès en forme de proposition de révision
de la Constitution. Dix-sept mois plus tard, six députés (2 socialistes, 2
libéraux, 2 communistes) déposèrent le texte prévoyant deux Etats régionaux et
la Région fédérale de Bruxelles comprenant les 19 communes de l'agglomération.
Saluant la vitalité remarquable du Mouvement flamand qui avait amené la
constitution d'une Flandre, véritable communauté, les auteurs insistaient sur le
profond malaise pesant sur la Wallonie au point de vue politique,
économique, culturel et psychologique, malaise reconnu lors du débat à la
Chambre en novembre 1945. Aussi, pour les signataires de la proposition, le
maintien du régime unitaire faisait-il violence à l'histoire et au sentiment
des populations. Seul le fédéralisme permettait de concilier la nécessité de
maintenir l'unité de l'Etat avec celle d'assurer aux régions et aux
populations l'autonomie à laquelle elles aspirent. Et de conclure : La
liberté politique est la démocratie des individus : le fédéralisme, c'est la
démocratie des peuples (46).
Toutefois, un écueil à la
recevabilité du texte se présentait : la Constitution ne pouvait être révisée
sous la Régence. Pour les signataires de la proposition, s'appuyant sur l'avis
du juriste Henri Rolin (47), les travaux préparatoires
pouvaient être considérés comme exclus de cette interdiction. Or, souvent, ils
étaient longs et dans cette perspective, la Régence aurait pris fin. En effet,
pour les militants wallons, opposés au retour du roi Léopold III, septembre
1948, moment de la majorité du prince Baudouin lui permettant de remplacer son
père, n'était guère éloigné. Le 19 novembre 1947, suite à la consultation de
sept professeurs d'université, dont six se prononcèrent pour l'application
stricte du texte constitutionnel, la Chambre vota dans le même sens, ce qui
revenait à refuser la prise en considération de la proposition. Scrupule
juridique ou non, prétexte ou non, la répartition des votes avait l'apparence
d'un vote 'communautaire'. Les votes négatifs se répartissaient comme suit : sur
les 71 députés flamands présents, 50 catholiques, 15 socialistes et 3 libéraux;
sur les 24 Bruxellois présents, 11 catholiques, 4 socialistes et 1 libéral.
Quant au vote contraire, des 64 Wallons présents, 23 socialistes, 15 communistes
et 2 libéraux s'opposèrent aux conclusions de la Commission. L'amertume fut
grande chez les militants wallons et correspondait bien à ce que le catholique
Levaux évoquait dès le Congrès wallon de mai, c'est-à-dire que le rejet du
fédéralisme provoquerait une émotion profonde (...), et peut-être, et
certainement, [le] sentiment d'une injure qui nous serait faite et comme
un défi qui nous serait porté (48)
.
La Wallonie, marche du
nord de la civilisation française ! Telle est l'identité que les militants
wallons ont contribué à définir, à maintenir et à défendre tout au long de la
période envisagée et cela d'autant plus que s'affermissait la conscience
flamande, voire le sentiment national flamand. Par ailleurs, les institutions
unitaires et centralisées jointes, au lendemain de la Première Guerre, au
suffrage universel – jamais mis en question – permettaient une prédominance
certaine des Flamands dans l'Etat au sein duquel les Wallons, même alliés aux
'francophones' de Bruxelles, constituaient une minorité. Très tôt, le Mouvement
wallon prend en compte cette donnée d'ordre politique, ce qui explique que, très
tôt, la revendication du fédéralisme est à l'ordre du jour. Au lendemain de la
Seconde Guerre mondiale, l'audience du Mouvement wallon s'accroît. Si l'identité
romane de la Wallonie reste d'actualité, de nouveaux problèmes se posent tels le
déficit démographique aggravé, le déséquilibre économique par rapport à la
Flandre. Malgré la préexistence d'autres solutions possibles, l'unité du
Mouvement wallon se fait sur la revendication du fédéralisme... avec, en 1947,
le résultat négatif que l'on sait au niveau parlementaire.
En fin d'analyse, une
relation théorique intéressante semble apparaître entre l'évolution des faits
ici rappelée et l'affirmation du professeur Jouthe : poser la question de
l'identité, c'est poser fondamentalement la question du sens. La triple
dimension qu'il évoque – dimension affective, cognitive et éthique – se retrouve
chez les militants wallons avec une intensité variable de l'une ou de l'autre
selon les époques. Les dimensions affective et cognitive sont davantage
présentes au cours de la période de législation linguistique (années 20),
marquée par le bilinguisme. Dans les années 30, par contre, les dimensions
cognitive et éthique sont plus affirmées quand le fascisme menace la démocratie.
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale prédomine également la double
dimension cognitive et éthique dans une perspective de sauvegarde de l'identité
culturelle de la Wallonie et de son avenir politique et économique.
* Micheline LIBON (Antheit,
1938) est docteur en philosophie et lettres (Histoire) de l'UCL depuis 1986. Sa
thèse de doctorat était intitulée Elie Baussart (1887-1965), l'identité
wallonne et le Mouvement wallon.

Notes
1. Congrès wallon.
Compte rendu officiel, Liège 1905; Chantal KESTELOOT, Mouvement wallon et
identité nationale. C.H. CRISP, n°1392, 1993, p.17.
2. Il ne faut pas confondre Julien FRAIPONT (1857-1910) avec
Charles de FRAIPONT (1883-1946), lui aussi anthropologue et qui fut élu sénateur
rexiste de Liège en 1936.
3. Sur ce Congrès de 1905, voir Arnaud PIROTTE, L'apport des
courants régionalistes et dialectaux au Mouvement wallon naissant. Une enquête
dans les publications d'action wallonne de 1890 à 1914. Mémoire de licence en
Histoire. UCL, 1993. Dactylographié.
4. Archives A. Doutrepont. Manuscrit d'une conférence sur
l'ethnographie, la langue et la littérature wallonnes, [Liège], [1912]. – Voir,
sur tout ceci, M. LIBON, "Raciner" les Wallons. Elie Baussart. Ecrits politiques
wallons, vol. n° 6, Institut Jules Destrée, 1993, p. 18-20.
5. Cfr A. PIROTTE, L'apport des courants..., op. cit., p.
49-50, 135.
6. Cité dans C. KESTELOOT, Mouvement wallon..., op. cit.,
p.17, note 35. C'est nous qui soulignons.
7. E. JOUTHE, Citoyenneté, identités et immigration. dans
Pratique de la Citoyenneté et Identités. Actes de la Treizième Conférence des
Peuples de Langue française, Liège 13-15 juillet 1995, Charleroi, 1996, p.
58-59.
8. La vision de la Révolution de 1830 est quelque peu
différente chez Auguste Vermeylen dans sa Kritiek der Vlaamsche Beweging paru en
1896. Il écrit en effet : la Flandre se laissa entraîner dans la révolution de
l'année 30 : jamais révolution plus stupide ne fut déclenchée à la suite
d'influences étrangères ! (cité dans Textes et Documents. Documents d'histoire
de Belgique, t. II, 1978, p. 148.
9. Congrès wallon de 1912. Etude d'un régime séparatiste en
Belgique. Rapport présenté par J. Delaite, Liège, 1912, p. 18; J. DESTREE,
Lettre au Roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre dans Revue de
Belgique, 15 août - 1er septembre 1912, p.744, 754. Destrée signale quelques
exemples de cette introduction du flamand en Wallonie, tels les panneaux
indicateurs : Solre Sint-Goorinckx, Hoei, Marchiennes Ter Brug. – Sur le rôle
des Wallons en 1830, voir André CORDEWIENER, 1830 en Wallonie dans La Wallonie.
Le pays et les hommes. Histoire - Economies - Sociétés sous dir. H. HASQUIN,
t.II, p. 11-22.
10. Congrès wallon de 1912..., op. cit., p. 19; J .DESTREE,
Lettre au Roi..., op. cit., p.751-753. Pour les élections de 1912, la différence
des données entre les deux auteurs vient du fait que Delaite a, notamment,
comptabilisé les votes de l'arrondissement de Bruxelles moitié pour la Flandre,
moitié pour la Wallonie.
11. En 1831, la population wallonne représentait 39,7 % de
la population belge; en 1900; 41 %. Institut de Démographie, UCL cité dans F.
DOCQUIER, La démographie wallonne : histoire et perspective d'une population
vieillissante dans Wallonie. Atouts et références d'une Région, Liège, 1995, p.
112.
12. Congrès wallon de 1912, op. cit., p. 10-11.
13. Congrès wallon organisé par la Ligue wallonne de Liège,
7 juillet 1912, Liège, 1912, p. 40.
14. Ce délégué était Maurice de Miomandre. Après la
parution de la Lettre au Roi de Jules Destrée, de Miomandre publia, dans la même
Revue de Belgique, pas moins de quatre articles Contre la séparation
administrative (1er novembre 1912, 15 février, 15 mars et 15 avril 1913).
15. Sur ces discussions, voir Congrès wallon organisé...,
op. cit., passim.
16. La composition idéale de l'Assemblée wallonne devait
être la suivante : 31 Hennuyers, 23 Liégeois, 6 Luxembourgeois, 10 Namurois, 4
Brabançons wallons, 5 représentants de l'agglomération bruxelloise.
17. R.E. DE SMET, R. EVALENKO et W. FRAEYS, Atlas des
élections belges. 1919-1954, Bruxelles, 1958, p. 22.
18. Documents parlementaires. Sénat. Session 1920-1921, n°
279, 22 septembre 1921. Révision de l'art. 39 de la Constitution. La proposition
était signée par 7 libéraux et 1 socialiste. Documents parlementaires. Sénat.
Session 1920-1921, n° 294, 7 octobre 1921. Rapport de la commission de révisions
de la Constitution.
19. Annales parlementaires. Sénat. Session 1920-1921.
Séance du 19 octobre 1921, p. 1305-1313.
20. Documents parlementaires. Sénat. Session 1920-1921, n°
276, 20 septembre 1921, p. 251-254. Révision de l'article 49 de la Constitution.
– Annales parlementaires. Sénat. Session 1920-1921. Séance du 13 octobre 1921,
p. 1289-1292.
21. Voir notamment Annales parlementaires. Chambre. Session
1922-1923, Séance du 14 février 1923, p. 717-718 et J. DESTREE, Wallons et
Flamands. La querelle linguistique en Belgique, Paris, 1923, p. 171 et ss.
22. A. BUISSERET, Après le Congrès et A. BUISSERET, Les
principes directeurs du mouvement autonomiste. Rapport au premier Congrès de la
Ligue d'Action wallonne dans La Barricade, n° 18, août 1924, p. 1-4; 14-16. Dans
ce projet, l'auteur propose que Bruxelles et son agglomération constituent un
district fédéral. Quant aux négociations avec les Flamands, elles devraient
envisager un règlement équitable de la situation des minorités francisantes...,
sans toutefois donner aux Flamands l'impression d'une ingérence indiscrète.
23. Pour cette synthèse, voir M. LIBON, "Raciner" les
Wallons, op. cit., p.35-37, 46-47, 66-69.
24. 2e Congrès de la LAW, Rapport de M. Dehousse.
L'autonomie et la question scolaire dans La Barricade, n°30-31, p.9-14. – Voir
également Philippe DESTATTE, Y a-t-il un nationalisme wallon ? Communication au
Colloque Vlaamse Eigenheid - Identité wallonne, Anvers, 14 décembre 1992.
Inédit.
25. Notre cinquième Congrès, 7-8 juillet 1928. Le
fédéralisme et l'organisation administrative. Rapport d'Yvon Pâris dans La
Barricade, n° 61, septembre 1928, p. 151; Discours de J. Destrée dans Annales
parlementaires. Chambre Session 1927-1928, Séance du 27 juillet 1928, p.
1885-1889.
26. E. BAUSSART, 1930 verra-t-il la faillite de 1830 dans
La Terre wallonne, octobre 1928, p. 5-24.
27. La loi sera promulguée le 16 avril 1930.
28. Deuxième Congrès de Concentration wallonne, Liège, 18
octobre 1931, p.7-8. – Voir aussi P. HENRY, Examen du projet frontiste pour la
réorganisation de la Belgique suivi par Avant-projet de Statut fédéral dans La
Barricade, n° 92, août - septembre 1931, p.9-25.
29. Jusqu'en 1936, les sept Congrès furent présidés par le
socialiste François Van Belle, qui n'hésitait pas à déclarer : Nous savons,
nous, fils de Flamands, comment nos parents ont été accueillis en Wallonie. Nous
savons que si nos parents ont quitté leur lieu d'origine, c'est qu'ils ne
trouvaient plus là le pain nécessaire à leur existence; ils sont venus le
chercher en Wallonie, où ils ont trouvé des écoles, un milieu d'émancipation,
une atmosphère telle qu'elle leur a fait comprendre la liberté. – Cfr Deuxième
Congrès..., op. cit. p.10

30. Votez wallon ! dans L'Action wallonne, 15 mai 1936.
Voir aussi F. VAN BELLE, La Wallonie écrasée. A propos du nombre des députés
dans L'Action wallonne, 15 février 1936.
31. Le Provincial [E. Baussart], En face d'un totalitarisme
flamand dans La Terre wallonne, février 1937, p. 302-304; E. BAUSSART, Quelques
considérations sur le problème wallon dans La Terre wallonne, octobre et
novembre 1938, p. 17-26; 81-87. – Voir également Ph. DESTATTE, Le Mouvement
wallon contre le fascisme et M. LIBON, Des intellectuels wallons, catholiques et
démocrates. L'aventure de la 'Terre wallonne' dans l'Entre-deux-guerres.
Communication des deux auteurs au Colloque de la Fondation Baussart, Défendre la
Démocratie, Défendre la Wallonie, Charleroi, 5 juin 1993. Textes inédits.
32. Léon-.E. HALKIN, La Wallonie devant l'histoire dans La
Cité chrétienne, 20 mai 1939, p.423.
33. Cfr Bulletin de la Société Historique pour la Défense
et l'Illustration de la Wallonie, n° 1, 1939.
En 1960, la Société se muait en Institut Jules Destrée.
34. L.-E. HALKIN et F. ROUSSEAU se retrouveront au sein de
la Commission d'histoire de l'APIAW. Cette Commission publiera, en 1948,
L'Enseignement de l'histoire en Wallonie. Trois ans auparavant, F. ROUSSEAU
avait publié La Wallonie. Son histoire. Son avenir , Bruxelles, [1945]. Cfr Ph. DESTATTE,
Félix Rousseau et Léon-E. Halkin. Ecrire la Wallonie avec quelques mots simples,
comme celui de liberté dans Félix Rousseau, La Wallonie, Terre romane suivi de
L'Art mosan, Charleroi, 1993, p. 7-40.
35. Déjà en 1933, la Ligue wallonne de Charleroi avait
publié deux brochures d'A. CARLIER, prônant le maintien et le renforcement de
l'entente militaire avec la France.
36. Le projet de statut fédéral prévoyait 3 régions. Il fut
ratifié, en avril 1938, par le Conseil général de la Concentration wallonne,
encommissionné par le Congrès des socialistes wallons, en juillet; cependant, il
avait été déposé à la Chambre, le 1er juin, par trois socialistes. La prise en
considération fut rejetée, le 2 février 1939, par 112 non, 62 oui et 4
abstentions. Les votes négatifs comptèrent tous les catholiques, tous les
libéraux y compris Jennissen, 33 socialistes, 1 communiste et 3 rexistes ; les
votes positifs se répartirent comme suit : 33 socialistes, 6 communistes, 14
nationalistes flamands et 9 rexistes.
37. F. DEHOUSSE, Y a-t-il un "nationalisme" wallon ? dans
L'Action wallonne, 15 octobre 1937.
38. J. MERLOT en tant que prisonnier politique.
39. Marie -.Françoise.GIHOUSSE, Etude des Mouvements
wallons de Résistance, mai 1940 - septembre 1944. Mémoire de licence en
Histoire. UCL, 1982. IDEM, Mouvements wallons de résistance. Mai 1940 -
septembre 1944, Institut Jules Destrée, Charleroi, 1984.
40. Cfr La Wallonie catholique, n°12, 15 avril 1944.
41. E. BAUSSART, Ce que devrait être le mouvement wallon
dans La Cité nouvelle, 8 juin 1946.
42. A. DELPEREE, Faits d'économie régionale dans Nouvelle
Revue wallonne, t. I., p.33-35. L'auteur compare la situation démographique de
1947 par rapport à celle de 1939. Les quatre provinces flamandes et le Brabant
ont un solde positif allant de + de 17000 jusqu'à plus de 43.000, les 4
provinces wallonnes, un solde négatif allant de + de 30.000 pour le Hainaut et
Liège, à + de 5.000 pour le Luxembourg et à + de 2.000 pour Namur.
43. Cfr L'Opinion wallonne, n° 3, août - septembre; n° 4,
octobre - novembre 1945. Pour sa part, E. Baussart publie 10 articles entre le
31 mai et le 17 octobre dans La Cité nouvelle., le journal de l'éphémère U.D.B.
44. Ph. RAXHON, Histoire du Congrès wallon d'octobre 1945.
Un avenir politique pour la Wallonie ? Collection Notre Histoire, Institut Jules
Destrée. Charleroi, 1995. L'Institut Jules Destrée a également publié un dossier
pédagogique et une cassette vidéo consacrée à l'interview de douze participants
au Congrès d'octobre 1945.
45. Le Congrès de Liège des 20 et 21 octobre 1945. Débats
et résolutions, Liège, s.d., p.43-58.
46. Documents parlementaires. Chambre. Session 1946-1947,
t. III, 25 mars 1947, n° 257.
47. ibidem. H. Rolin s'était exprimé de la sorte à la
tribune du Sénat, le 9 avril 1946 : Cfr Annales parlementaires. Sénat. Session
1945-1946, p.54. Cette interprétation fut contestée par 3 des 7 professeurs
d'université consultés par la Chambre : Cfr Documents parlementaires. Chambre.
Session 1946-1947, t.V, n° 534, p.16, 23-25.
48. Le Congrès de Namur des 3 et 4 mai 1947. Débats et
résolutions, Liège, s.d., p. 86.
Micheline Libon, De la "séparation
administrative" au fédéralisme (1912 - 1950) :quête identitaire du Mouvement
wallon ? dans Cahiers d'Histoire du Temps perdu, Hors série - Foyoüs d'Istwére
dè Tins pièrdou, Numèrö spéciål, IJD, Namur - Nameûr, 1998

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