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Imaginons
la Wallonie !
Discours prononcé
au monument Arille Carlier dans le cadre de la fête de la Wallonie
Charleroi, le 17 septembre 1999 par Jean-Pol Demacq
Président de lInstitut Jules Destrée |
Concours d'affiches
des fêtes de Wallonie 1999
Imaginons la Wallonie. Ce thème de
la fête de la Wallonie 1999 est particulièrement adéquat à rappeler ici, devant cette
stèle dédiée à Arille Carlier et à tous les militants qui durant des
décennies ont envisagé un statut constitutionnel pour garantir lexistence
de notre région française, tous ceux qui ont conçu des institutions régionales,
démocratiques et représentatives, et de surcroît tous ceux qui ont cru en
cette Wallonie et en la capacité de sa population dy prospérer.
Dès lors, laissez-moi évoquer avec vous rapidement trois idées.
La première est un hommage. Celui que nous devons à cette immense personnalité que fut
Aimée Lemaire-Bologne. Immense parce que présente avec tellement de pertinence sur
tellement de plans. Militante wallonne et disciple dArille Carlier, de lAbbé
Mahieu et de Jules Destrée, certes, mais aussi militante pour la femme, pour la
démocratie, pour la dignité, pour le monde et surtout, surtout, pour
lintelligence. Chaque jour, nous la découvrons plus grande encore depuis sa triste
disparition du 20 décembre dernier. Chaque jour, nous nous réjouissons davoir
connu une dame de cette qualité qui, aujourdhui et longtemps encore, constituera un
exemple à suivre pour les femmes et les hommes de ce pays.

La deuxième idée que je veux partager aujourdhui avec vous est
celle du deuxième sens de limagination, celui de lanticipation, de la
prospective, de la pro-activité. Le congrès La Wallonie au futur de Mons, en
octobre 1998, a constitué une nouvelle étape de ce travail engagé depuis 1986-1987 qui
veut constituer une sorte de pilotage de la Région par ses forces vives.
Au delà des outils innovants de gestion régionales préconisés dialogue social
et contractualisation, évaluation, prospective , nous devons également avoir en
tête les contenus des politiques qui y ont été affirmés avec force. Ainsi, lorsque
nous répétons que nous voulons que la Wallonie au futur signifie plus de démocratie et
un meilleur développement, nous voulons définitivement rompre avec une vision romantique
de la nation dont beaucoup nous affublent encore pour adopter une vision
citoyenne de la région, cest-à-dire une démocratie wallonne plus partagée, plus
participative, plus impliquante, plus mobilisatrice parce que plus motivante.
Ainsi, l'idée de construire une démocratie exemplaire est-elle porteuse de sens,
particulièrement à l'heure d'une nouvelle émergence de la société civile. Cest
pourquoi nous avons affirmé que la Déclaration universelle des Droits de l'Homme
constitue bien l'horizon politique de notre projet wallon.
Quant au meilleur développement, nous lattendons de lentreprise en tant
quinitiatrice et partenaire d'une démarche de qualité totale telle que Michel
Foucard, ce Wallon de lannée 1998, la bien promue. Vous le savez, cela ne
pourra se faire que par une nouvelle dynamique de développement local qui stimule la
fonction "réseau" entre les entreprises, les universités et les centres de
recherche ainsi qu'entre les entreprises elles-mêmes, par agglomération, par communauté
urbaine, par pays et par bassin demplois.
Troisième idée. Imaginer, enfin, cest inventer, élaborer,
combiner des idées : cest la créativité artistique comme inventivité
scientifique. Cest le pouvoir de limagination que Etienne Bonnot de Condillac
qualifiait à raison de sans borne et dont son ami, Jean-Jacques Rousseau, disait
quelle étendait la mesure du possible. Doit-on encore plaider pour dire
combien nous espérons de cette imagination et combien nous croyons que léducation
et la culture constituent les axes majeurs de la reconversion de notre Région, les axes
majeurs du redéploiement de la Wallonie.
Dès lors, notre expérience politique est, elle aussi, à ouvrir, à reconstruire, à
revisiter. Lheure est dailleurs intéressante, au lendemain dun
bouleversement du personnel législatif et au moment où lon sinterroge sur le
rôle et sur la fonction de nos partis politiques et de ceux qui doivent les incarner.
Après être allé, à la suite de Pierre Rosanvallon à la recherche du ce peuple
introuvable, peut-être est-il temps de profiter des circonstances particulières qui
sont les nôtres pour rendre ou laisser aux institutions elles-mêmes et à
leurs responsables, toute lautonomie et la toute souveraineté républicaine qui
leur ont été conférées par le suffrage universel constitutionnel. Laissant alors le
pouvoir aux responsables de lintérêt général, les partis pourraient à nouveau
se consacrer à cette fonction première et essentielle que constituent léducation
et la mobilisation citoyenne.
Cest ce quaurait exigé Jules Destrée, cest ce quaurait plaidé
Arille Carlier, cest ce quaurait argumenté Maurice Bologne. Permettez-moi de
le demander avec insistance et conviction.
Bonne fête de la Wallonie, de Mouscron à Welkenraedt, mais aussi de Bruxelles à Paris
et de Montréal à Tokyo, puisque, désormais, les belles affiches de la lauréate
Pierre-Anne Demoulin y fleuriront également.
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