Septembre 2000,
La démocratie ...par à coup
Déception...quand les médias ont
annoncé que près de 25% délecteurs potentiels dorigine dun des pays
de lunion européenne s étaient inscrits pour participer aux élections
communales du 8 octobre.
Déception plus grande encore chez
ceux qui depuis 1970 se sont fait promoteurs de ce droit de vote comme revendication
primordiale pour engager la société vers une reconnaissance politique de la présence
des travailleurs immigrés et la mener vers une démocratie représentée, ainsi par
lensemble de la population.
Bien des questions se posent et il
faudra les aborder si on ne veut pas perdre cette avancée, ou plutôt cette demi avancée
démocratique puisquon a délibérément, écarté une part importante de la
population ne faisant plus partie de lUnion Européenne, alors quelle a aussi
pour sa part contribué économiquement et démographiquement à son essor.
1.
Sest-on trompé dobjectif ? Peut-être que
davoir écarté, depuis 50 ans, les communautés immigrée du domaine politique et
les avoir confinées dans un rôle purement économique et démographique, les ont aussi
démobilisées de la revendication du droit politique : " Travaille et
tais-toi " ne la-t-on pas assez dit sur tous les tons ?
Préoccupée à satisfaire les
besoins premiers de la vie, écrasée par les soucis de leur avenir, auraient-elles pu
sintéresser à un domaine qui leur échappe et qui leur est étranger ?

2.
Peut-être navons nous pas assez convaincu nos compatriotes
de limportance de ce droit démocratique qui concerne tout citoyen ?
Peut-être avons nous consacré
plus de temps à convaincre les responsables politiques et sociaux quà mobiliser la
population, préoccupée quelle était de son droit de séjour, de la sauvegarde de
son emploi, dassurer lavenir de leurs enfants de faire la sourde oreille aux
propos racistes et xénophobes : "ils viennent manger notre pain, ce
sont des profiteurs de mutuelle, à cause deux les caisses de chômage sont
vides , ils ont beaucoup denfants pour profiter des allocations de
chômage... "
Et pour ce qui est des candidats
réfugiés, il y a la variante "à peine descendu davion, ils ont droit au
CPAS "
A force de nous boucher les
oreilles, nous ne nous sommes pas aperçus quils sont devenus sourds et nont
plus le courage de défendre leurs droits et leur dignité !
3. Il est vrai
que les responsables politiques ont montré trop dinertie et ont manqué
dempressement à accorder ce droit fondamental.
Il a fallu les directives et les
menaces de sanction européennes pour réviser la constitution et laisser tomber des
critères qui dénotaient une peur de lélectorat étranger qui aurait menacé de
changer léchiquier politique des communes (et larrivée délus peu
fiables)
De plus, ajouter lobligation
de sinscrire préalablement...cétait une gageure !
La non volonté politique de
certains partis, la peur de lextrême droite ont fait plus reculer la démocratie
quelles ne lont renforcée.
Car la meilleure manière de donner
plus de vigueur à la démocratie, cest faire participer politiquement
lensemble des citoyens .
Pouvait-on attendre le premier
Ministre quil impulse une mobilisation générale en faveur de linscription,
puisque lui-même, alors député VLD a voté contre ce droit ?
Même la nouvelle loi sur
lacquisition de la nationalité (loi du 1 mars 2000) qui aurait pu amener certains
à acquérir ce droit, a été boycotter soit par certaines administrations communales,
soit par linertie des Parquets.

4. Il faut
reconnaître que certaines personnes ont parfaitement jouer le jeu et ont invité chaque
personne concernée par lettre.
Mais une lettre ne suffit pas à
convaincre les indécis, les méfiants, les indifférents .
Pourquoi navoir pas crée des
équipes qui auraient été de maison à maison, de quartier à quartier, expliquer les
enjeux de ce nouveau droit. Cela sest fait aussi en 1973 à Liège, lors de
lélection au suffrage universel du premier Conseil Communal Consultatif. Cest
ce quà fait magnifiquement lasbl Démocratie sans frontière, en allant dans
les centres.
5. Le monde
associatif a bougé, mais faute de moyen na pas été au delà de ses membres .
On estime que les associations
regroupent environ 10% de la population. Il y a près de 18 % dinscrits. Et les
autres, qui peut les toucher,, eux qui font aussi de la démocratie ?
Certains articles dans les journaux
ont sonné lalarme, des tracts ont été distribué, mais peut-être
nétaient-ils pas assez mobilisateurs ? ne détaillant pas lintérêt de
ce droit ?
Deux vidéos ont été réalisées
sur le sujet, mais arrivées avec du retard, elles nont pas pu être suffisamment
utilisées. Pourquoi ne sont elles pas passées à la Tv aux heures e grande
écoute ?
Pourquoi navoir pas octroyé
des subsides exceptionnels pour engager du personnel qui se serait consacré à ce travail
de sensibilisation, comme cela sest fait pour la régularisation des sans
papiers ?

6. Si le droit de
vote communal a fait vibrer un moment limmigration, actuellement cela nest
plus suffisant pour résoudre les problèmes.
Il faut aller au moins
jusquau vote régional et même fédéral.
Le droit de séjour et le droit au
travail restent un pouvoir fédéral.
Le permis de travail et la
politique dintégration ressortent du pouvoir régional.
Les différentes conceptions de la
démocratie et les objectifs différents des partis font que le pays élabore
difficilement les instruments légaux pour se donner une démocratie ouverte, généreuse
et sans exclusive .
Une asbl sest donné comme
dénomination : Démocratie sans frontière, tant il est vrai que lorsque lon
établit des frontières ou que lon met des exclusives, on va uniquement vers une
démocratie ...par à coup
La démocratie est un droit qui
saccorde et non qui se mérite.
Létranger nest pas
encore perçu comme un enrichissement social, culturel, économique et même politique.
Le peu denthousiasme des
électeurs de lUnion Européenne ne va t-il pas induire les responsables politiques
à ne pas aller au delà de cette démarche et en autre, à laisser tomber le droit de
vote des non-européens
La constitution prévoit, pour eux,
la possibilité de participer aux élections communales en 2006 mais il est nécessaire de
voter, pour cela, une loi après 2001.
Verrons-nous les citoyens belges et européens se
mobiliser pour que tous les citoyens puissent avec certitude, sans attendre la veille des
élections ni le bon vouloir du gouvernement de ce moment-là, être considérés comme
des citoyens à part entière et participer pleinement à la constitution dune
démocratie ouverte et généreuse soucieuse avant tout du bien être de toute la
population.

Des élus non - belges à la
commune...pour faire quoi ?
Enfin après trente ans dattente, il y
aura des élus non belges originaires des 15 pays de lunion européenne dans
les conseils de certaines communes du pays, en octobre prochain.
Du moins, si les électeurs le
veulent !
A moins que ce ne soit , comme pour
les femmes et les enfants : il a fallu attendre longtemps pour que leur présence
soit significative.
1. Les
partis démocratiques nont pas eu trop de difficultés pour trouver des candidats
pour leurs listes.
Cétait mal connaître les
immigrés que de croire quils allaient tous se concentrer sur un parti ; bien
quils aient connu les mêmes causes et les mêmes vicissitudes qui ont provoqué
leur immigration et ils ont vécu ces périodes avec des options et des sensibilités
différentes .
Et certains rapidement ont choisi
dêtre des leaders dans des différents engagements suivant leurs affinités
sociales, culturelles ou politiques dorigine ou découvertes en Belgique.
Certains candidats nont pas
toujours été mis en ordre utile sur les listes ou mis simplement comme porte voix au
parti...à moins que la suppression partielle de la dévolution des voix de la case de
tête napporte des surprises désagréables aux représentants traditionnels des
partis.
2. Certains
candidats ont un passé qui laisse bien augurer des compétences acquises au cours de
leurs engagements syndicaux ou de leur responsabilités dans des associations sociales ou
culturelles.
Dautres ont pour eux leur
renommée dans le milieu belge ou immigré. Mais ce sera le secret des urnes qui fera la
répartition. Car certains, tout en ayant fait preuve de combativité et dinitiative
dans leur syndicat ou dans leur mouvement, ne sont pas toujours très connu de la
population. Il aurait été dommage quils navaient pas été mis en ordre
utile sur les listes .
Il est à espérer que même non
élus, ils puissent montrer leur dynamisme et leur compétence au sein du parti
quils ont choisi .
Cest bien là la question,
élus ou non, comment vont-ils continuer à manifester leur présence au service de qui
vont-ils mettre leur compétence ?

3. La
tentation sera grande de réduire lactivité de ces nouveaux élus au service de la
vision particulière des problèmes de limmigration des partis ou à des intérêts
personnels en vue de leur promotion.
Après plus de 50 ans de politique
migratoire, de connaissance des problèmes et la perspective de nouvelle migration, il est
nécessaire de redéfinir une nouvelle politique dimmigration et une nouvelle
politique du droit dasile.
Au niveau européen, les
responsables envisagent une nouvelle approche du problème. Et le ministre de
lintérieur, Antoine Dusquene veut, à loccasion de la présidence Européenne
de la Belgique, un grand débat sur une nouvelle vision de limmigration et du droit
dasile.
Officiellement, lEurope
sest définie multiculturelle. Et cela est vrai non seulement pour lEurope,
mais aussi pour chaque pays, chaque région, chaque province, chaque commune . La
nouvelle politique sera donc darriver à un dialogue des cultures pour
lenrichissement de tous .
4.
Cest pour les nouveaux élus, une occasion de démontrer
que les immigrés ne doivent plus être vus comme des cas sociaux à résoudre, ou des
fruits de certains journaux à sensation, mais comme un enrichissement réciproque, en
valorisant les apports culturels et sociaux, en mettant en place les structures
nécessaires à lépanouissement des valeurs humaines et du dynamisme économique et
social.
Le dialogue interculturel postule
des choix politiques qui permettent à tous de se reconnaître, participant au même
projet dune société ouverte, généreuse et capable de favoriser le bien-être de
tous.

5. Puisque
les immigrés non européens nont pas pu participer aux élections, il est un devoir
essentiel, pour les élus, dêtre la voix de toute la population immigrée et
surtout la plus fragile, cest à dire, les candidats réfugiés, les sans papiers,
les clandestins.
Lexemple des élus bruxellois
dorigine maghrébine est à suivre, qui ont pris fait et cause pour les
sans-papiers, qui ont visité les Centres fermés et qui se sont trouvés à
laéroport de Zaventem pour vérifier comment se déroule laccueil ou
lexpulsion des candidats réfugiés.
Il est à espérer que les élus
dorigine européenne vont illustrer par des initiations parlementaires au communale
dans le débat politique en faveur de toute limmigration.
6. Le
travail ne manque pas pour accentuer la politique communale en faveur des immigrés. On
peut citer quelques exemples :
- Lattitude de certains
CPAS vis-à-vis des sans papiers ou réfugiés laissent à désirer.
- Les services de la population
(délivrance de papiers administratifs, inscription...)
- Les services de la population,
les écoles mieux adaptées à la population, la promotion de la langue et de la culture
(dans les bibliothèque...), les mairies de quartier, les antennes de CPAS etc.
- Lengagement du personnel
compétent connaissant la langue et les coutumes et dautres initiatives semblables
donneraient la possibilité à la Commune de se créer une image de marque plus
accueillante et plus souciante du bien-être de tous les habitants.
- Laménagement de la
voirie, la sécurité, lamélioration de lhabitat, la création de plaines de
jeux, despaces verts ...finiraient par casser les soi-disant ghettos des
immigrés.
- Une politique culturelle, le
soutien effectif aux diverses associations qui travaillent pour la convivialité et les
rencontres interculturelles mettraient en évidence les différences culturelles dans leur
apport enrichissant, dans leur effort de dialogue et dans leur lutte contre les préjugés
et le racisme. Cest la meilleure manière de lutter contre la petite délinquance,
la dégradation du bien public...et lextrême droite.
Rêve ou utopie, peut-être,
mais la tâche est enthousiasmante pour que ce qui est, au départ, une erreur politique
(ne laisser participer à lélection communale que ceux dorigine européenne)
devienne une chance pour toute limmigration et surtout pour une démocratie où
toute la population participe à lédification dune cité accueillante et
généreuse .