"Wallonie 2020", Institut Jules Destrée, Cinquième congrès La Wallonie au futur

 

Wallonie 2020 - Deuxième phase : Des futurs souhaitables aux futurs possibles

Rapport du groupe 2
Rapporteur : Joseph Charlier - Animateur : Philippe Destatte

9, 18 novembre et 3 décembre 2002

"Wallonie 2020", Institut Jules Destrée, Cinquième congrès La Wallonie au futur  
Avant-propos

Les travaux proprement dits de la seconde phase de Wallonie 2020 ont été précédés par un bref exposé introductif de Philippe Destatte qui en a précisé l’objet : formuler les souhaitables pour chacun des quatre nœuds de futur déterminés dans la première étape [1] ; imaginer les futurs possibles ; examiner les rapports entre ces souhaitables et possibles dans une matrice ad hoc.

Il était demandé aux participants de respecter trois principes dans la formulation de ces souhaitables et possibles : les principes de vraisemblance, de pertinence, et de cohérence.

Trois réunions, dont la première d’une journée ont été nécessaires pour réaliser ces travaux. Au cours de la première réunion (formulation des souhaitables et possibles), les participants ont réalisé un bref travail individuel sur fiches ; ces fiches ont été confrontées ; des rapprochements ou des écartements ont été opérés ; suite à des échanges riches et animés, le groupe est parvenu à définir ses souhaitables et ses possibles pour la Wallonie à l’horizon 2020. Enfin, lors des deux dernières réunions, le croisement des souhaitables et possibles a permis de considérer les effets des possibles sur les souhaitables identifiés et de réadapter ou de compléter ces derniers.

Le présent rapport [2] se limite à mettre brièvement en relief les lignes de force des échanges qui ont conduit à définir ces souhaitables et possibles, ainsi que la dynamique de leurs rapports. Il comporte aussi la liste des souhaitables initiaux, des possibles, des souhaitables complémentaires, ainsi que la matrice identifiant leurs rapports[3]

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Les participants

Les douze participants, dont une participante, à ce groupe de travail provenaient d’horizons professionnels variés ; sauf l’un d’entre eux, sans emploi, tous occupaient des postes de niveau « moyen à supérieur » : fonctionnaires, enseignants, cadres du secteur privé, attaché parlementaire, consultant, architecte, etc… Toutes les sous-régions wallonnes étaient représentées, sauf erreur, mise à part la province de Luxembourg.

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"Wallonie 2020", Institut Jules Destrée, Cinquième congrès La Wallonie au futur  
Identification des souhaitables pour chacun des quatre nœuds de futur / enjeux

 

Solidarité, société et culture

L’essentiel des échanges concernant ce nœud de futur a porté sur la nécessaire implication, individuelle et collective de toutes et tous, quels que soient leur âge, leur nationalité, leur groupe social, leur organisation, leur type de culture (s), à la définition des valeurs à la base de l’action politique dans (et de) la société wallonne. 

Cette implication ne peut se concevoir sans que soit garanti l’accès de toute la population aux besoins vitaux, en matière économique, sociale, culturelle (il s’agit de réinventer le « contrat social »). Il est souhaité qu’un revenu suffisant, décent, basé sur une certaine redistribution des ressources, soit assuré à tous afin d’écarter le risque d’une paupérisation d’une fraction importante de la population. L’implication du citoyen, de l’habitant, de tout acteur, demande l’adoption d’une attitude critique et informée, prenant en compte la diversité des points de vue : afin de remplir cette exigence, l’accès à l’information, aux savoirs devrait être assuré à tous. Il serait nécessaire que soient créés, ou/et multipliés, des lieux d’échanges, de rencontres entre habitants et citoyens à partir du niveau local. Enfin, la distance entre l’habitant, le citoyen, avec l’administration, avec le politique devrait être la plus réduite possible ; la délibération devrait prendre mieux en compte la participation, et, dans ce dessein, un espace normatif public (régi par la clarté des enjeux, des procédures, avec des règles transparentes)) compréhensif par tous devrait être instauré.

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Variables

S1. Impliquer tous les acteurs (habitants, citoyens et organisations) de la société wallonne dans la définition des valeurs.

S2. Élaborer et mettre en œuvre avec tous les acteurs un cadre (normes, institutions, « État ») et une action politique au sens large, dans le respect des valeurs.

S3. Créer un réseau permanent de lieux de rencontres et d’échanges physiques d’idées.

S4. Réinventer un contrat social qui permette l’accès de tous aux besoins vitaux, y compris les champs culturels, professionnels et économiques.

S5. Reconnaître et prendre en compte la diversité des points de vue et adopter une attitude informée et critique.

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Apprendre et entreprendre

Les participants ont insisté sur le décloisonnement des secteurs de l’éducation, de la formation, de la recherche, sur la simplification, la réduction, des infrastructures d’enseignement. En reprenant une formule connue de beaucoup de pédagogues à propos de la finalité de l’enseignement : « apprendre à apprendre », ils ont souligné, ô combien il était important de promouvoir un apprentissage participatif (un « méta-apprentissage »), dès l’école primaire en vue de former, d’éduquer les enfants, les jeunes, au choix, à la prise de décision, garantie de liberté…

En vue d’assurer le développement de la société wallonne, une relation forte entre l’école et l’entreprise (sans que pour autant la première soit subordonnée aux seuls intérêts de la seconde) est indispensable. L’aspiration de toute personne à l’emploi, au bonheur, nécessite une formation de qualité, exigeante, donnant à chacun l’accès aux nouvelles technologies. La formation scolaire ne suffit pas, la société évolue, elle requiert des compétences et des qualifications ad hoc, la formation continue devrait être adaptée et davantage valorisée.

Un aspect particulier, mais central a été fortement mis en valeur, à savoir l’éducation aux principes démocratiques et aux droits de l’homme : « On ne naît pas démocrate… » Peut-être aussi, afin de balancer l’affirmation de la nécessaire adéquation de l’école à l’entreprise, à la société, le souhait de « rendre à l’université sa fonction critique » rappelle-t-il utilement que cette institution doit contribuer non seulement à former des cadres, des dirigeants compétents, mais aussi des citoyens critiques, éclairés s’aidant et aidant la société à toujours se questionner sur ses finalités ?…

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Variables

S6. Décloisonner et mettre en réseaux les normes, les infrastructures et les secteurs de l’éducation, de la formation et de la recherche.

S7. Faire évoluer l’enseignement de manière à permettre à chacun d’avoir une place dans la société (y compris l’accès aux nouvelles technologies) et un accès au bonheur.

S8. Adapter la formation continuée à l’évolution de la société.

S9.Reconnaître et mettre en place un programme de formation au méta-apprentissage et à la prise de décision dès l’enseignement obligatoire.

S10. Appliquer dans toute activité d’éducation, d’enseignement et de formation les principes démocratiques et ceux des Droits de l’Homme afin d’y sensibiliser les enseignés.

S11. Rendre à l’Université sa fonction critique.

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Stratégie et proactivité

La sélection des souhaitables relatifs à la stratégie et à la proactivité a permis de dégager, peut-être pour la première fois dans ces échanges, la volonté commune que se construise, portée par tous les acteurs, une stratégie pour un projet wallon incluant les dimensions européenne et internationale. Cette ambition forte, demandée avec insistance au pilote wallon (le gouvernement wallon), devrait s’appuyer sur une conception du développement («  durable », incluant en particulier tout le potentiel de créativité du secteur non marchand) fondée tant sur les aspirations individuelles que collectives.

Construire un tel projet va de pair avec l’acquisition partagée d’une vision prospective, de ce que nous avons appelé une « culture prospective », alimentée par la prise de conscience du potentiel de créativité gisant dans la société wallonne, et par un effort de définition collective des besoins à long terme de celle-ci. Cette culture prospective (individuelle et publique) ne naîtra pas spontanément. En vue de l’encourager, de la diffuser, d’y faire participer tous les acteurs publics, privés, citoyens, il importe que des outils structurels à caractère normatif soient élaborés, que des institutions, un organisme prospectif pérenne soit instauré par le gouvernement wallon, que les législations intègrent cet aspect prospectif. En fait, toute la gestion publique devrait être porteuse (et être portée par) de cette volonté prospective, et intégrer systématiquement les obligations d’information et d’évaluation.

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Variables

S12. Construire une stratégie pour se donner un projet ambitieux incluant une vision internationale et européenne s’appuyant sur la concertation de l’ensemble des acteurs et intégrant des aspirations collectives et individuelles.

S13. Mettre en place un organisme de prospective permanent et indépendant organisant la participation de l’ensemble des acteurs.

S14. Diffuser une culture de l’évaluation, de la prospective et de la gestion publique dans le long terme.

S15. Inscrire systématiquement dans chaque législation l’obligation d’informer, d’évaluer, d’élaborer des prospectives relatives aux politiques publiques.

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Ajustement des sphères publiques

La reconnaissance de l’Etat comme autorité collective, plus largement la légitimité des sphères publiques passe par la redéfinition d’un « nouveau contrat démocratique ». En effet, la distance (au sens où on l’a déjà évoqué plus haut) entre le citoyen et le politique et /ou l’administration ne sera réduite, et plus largement la revivification de la démocratie réamorcée, qu’à partir du moment où des changements importants et visibles seront perceptibles dans le fonctionnement du politique et de l’administration et dans leurs interrelations.

En ce qui concerne l’administration, dont la dépolitisation (au sens partisan du terme) est souhaitée, il est demandé qu’elle obéisse aux principes suivants : simplification des formalités, des procédures, des réglementations ; formation (dans des écoles appropriées) et responsabilité accrue des fonctionnaires ; fourniture de services de qualité à la population ; bonne gestion des ressources.

Ces exigences pour l’administration valent aussi pour les élus, les responsables publics. C’est la notion même de représentativité qui doit être « repensée », et pour le moins revalorisée. Cela passe nécessairement par une responsabilisation plus grande des mandataires publics, la redéfinition de leur rôle en fonction de l’intérêt collectif, surtout par l’obligation du contrôle de la politique menée, par l’instauration d’une culture permanente du « rendre compte » qui garantisse de manière continue des critères de rigueur, de cohérence, de transparence auxquels la population est de plus en plus sensible.

La démocratie sera vitalisée si elle s’appuie sur des territoires recomposés s’appuyant sur une dynamique de projet (communautés urbaines plutôt que des intercommunales) partagée par tous les acteurs et fondée sur ces mêmes critères de transparence, d’accessibilité, etc...

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Variables

S16. Appliquer dans la sphère publique avec rigueur, cohérence et transparence, des valeurs définies contractuellement par la société.

S17. Évaluer et élaborer des prospectives relatives au contrat démocratique.

S18. Réaffirmer le service au public dans le cadre de l’intérêt collectif (simplification administrative, démarche qualité, meilleure gestion des ressources, écoles d’administration).

S19. Repenser le rôle des élus, leur responsabilisation et leurs rapports avec l’Administration en fonction d’un nouveau contrat démocratique et de l’intérêt collectif.

S20. Recomposer les territoires (provinces, etc…) et les parapublics de niveau communal (intercommunales, etc.), en fonction des critères de démocratie et de pertinence (visibilité, clarté, accessibilité, transparence, etc…)

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Identification des possibles en considérant globalement les quatre nœuds de futur / enjeux

 Au cours d’une discussion plus brève que pour les souhaitables, huit possibles ont été identifiés :

P1. Modifications du paysage institutionnel
P2. Renforcement des relations internationales de la Wallonie
P3. Une Wallonie actrice dynamique de l’Europe
P4. Délitement de la société wallonne et de ses institutions
P5. Nouveaux rapports au travail
P6. Intégration horizontale du développement durable dans les différents secteurs
P7. Risques sur l’écosystème wallon
P8. Vieillissement démographique

Si on les reprend un à un, le débat a mis en relief les éléments suivants :

- En ce qui concerne les modifications du paysage institutionnel, c’est la disparition de l’Etat Belgique, la fusion de la Communauté française et de la Région, la suppression de la monarchie qui étaient évoquées comme possibles. Ces (r ?) évolutions s’inscriraient dans un contexte où l’Union européenne verrait son autorité, son poids s’accroître (en particulier celui de son administration) d’aucuns soulignant que cela aurait pour conséquence une prise en compte moindre des problèmes des citoyens.

- En relation avec le point précédent, et concomitamment à un processus possible de disparition, d’effacement d’autres Etats, et régions, la Wallonie développerait des synergies internationales avec d’autres régions, en particulier les régions transfrontalières, notamment en matière de gestion des ressources naturelles. D’autre part, vu sa situation stratégique au cœur de l’Europe du Nord-Ouest, la Wallonie jouerait un rôle essentiel dans les communications routières, fluviales, etc…

- Le rôle d’acteur de la Wallonie au sein de l’Europe devrait s’accroître, encouragé en cela par une dynamisation interne acquise grâce à un rôle accru de ses habitants, en particulier par l’extension du droit de vote à tous ses habitants à tous niveaux de pouvoir, mais aussi par un ressaut ou une volonté affirmée de solidarité et le respect de règles de bonne gouvernance.

- Toutefois, à cet horizon positif se voyait opposée une alternative pessimiste : le délitement possible de la société wallonne et de ses institutions. Qu’entendait-on par là ? Etait avancée l’hypothèse que la Région wallonne serait incapable de se mettre en marche autour d’un projet fédérateur, minée en cela par le sous-régionalisme et la politisation, qu’elle verrait ses moyens financiers diminuer, son économie se désagréger avec la multiplication de faillites d’entreprises ayant pour corollaire l’augmentation drastique du taux de chômage. Plus grave, le désintérêt d’une part croissante des Wallons pour la chose publique pourrait éventuellement se traduire par la mise en cause de la démocratie…

- Par contre, en contrepoint, la disparition d’anciens secteurs lourds de son économie, en particulier l’industrie lourde, entraînerait une diminution de la population active, se répartissant dans de nouveaux secteurs. De nouveaux rapports au travail s’instaureraient, et même facteur apparemment positif, le temps libre des travailleurs irait s’accroissant leur donnant la possibilité de participer davantage aux loisirs, et modifiant les manières et les styles de vie.

- Autre possible avancé : l’affirmation que la notion de développement durable s’appliquerait à l’ensemble des différents secteurs. Sous l’impulsion de cette conception durable du développement, mais aussi suite à la baisse des stocks mondiaux d’hydrocarbures, la Wallonie renoncerait au nucléaire, et développerait son autonomie énergétique par l’utilisation des énergies renouvelables : éoliennes, biométhanisation, carburants bio, etc…

- Toutefois, il n’était pas certain que le développement durable gagne la partie à temps. La conjonction de facteurs dépassant d’ailleurs le cadre wallon (tels les changements climatiques, les pluies acides, etc…), et internes à celui - ci, entraînerait un accroissement des pollutions et provoquerait de graves dommages à l’écosystème wallon.

- Enfin, le vieillissement de la population wallonne n’excluait pas que de graves tensions surgissent concernant la garantie des soins de santé et la sécurité sociale de l’ensemble de la population. D’autre part, ce phénomène de vieillissement démographique s’il n’était enrayé pouvait aussi constituer un frein au dynamisme de la population et par conséquent au redressement de la société wallonne.

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Variables

P1. Modifications du paysage institutionnel

P1.1. Poids accru de l’Union européenne.

P1.2. Disparition de l’État-Belgique.

P1.3. Abolition de la Monarchie.

P1.4. Fusion de la Communauté française et de la Région wallonne.

P2. Renforcement des relations internationales de la Wallonie

P2.1. Développement des synergies avec d’autres régions et pays

P2.2. Mobilité et infrastructures : une Wallonie au centre des axes de communication de l’Europe du Nord-Ouest.

P2.3. Gestion transfrontalière des ressources naturelles de la Wallonie avec les régions voisines.

P3. Une Wallonie actrice dynamique de l’Europe

P3.1. Une Wallonie créative, pivot / interface d’une Europe interculturelle, sociale et démocratique (gouvernance)

P3.2. Une Wallonie dynamique et solidaire, gérée dans la gouvernance.

P3.3. Une Wallonie où le droit de vote a été étendu à tous les habitants pour tous les niveaux de pouvoir.

P4. Délitement de la société wallonne et de ses institutions

P4.1. Incapacité pour la Région de se mettre en mouvement.

P4.2. Réduction des moyens financiers de la Région wallonne.

P4.3. Une Wallonie minée par le sous-régionalisme et la politisation à outrance.

P4.4. Désintérêt voire rejet du politique par une part de plus en plus grande des Wallons et mise en cause de notre démocratie.

P4.5. Taux croissant de faillites et diminution drastique de la population active (chômage).

P5. Nouveaux rapports au travail

P5.1. Disparition de l’industrie lourde.

P5.2. Diminution de la population active et nouvelle répartition de l’emploi.

P5.3. Augmentation du temps libre des travailleurs et développement de moyens de délassement.

P6. Intégration horizontale du développement durable dans les différents secteurs

P6.1. Augmentation de l’autonomie énergétique de la Wallonie par le développement des énergies renouvelables (éolien, biométhanisation, carburants biologiques).

P6.2. Suppression du nucléaire.

P7. Risques sur l’écosystème wallon

P7.1. Perte d’une partie importante de l’écosystème wallon.

P7.2. Augmentation de la pollution de l’eau par les acides (pluies, etc.)

P8. Vieillissement démographique

P8.1. Effets négatifs sur le dynamisme de la population wallonne du vieillissement démographique.

P8.2. Tensions sur les soins de santé et déficit de la sécurité sociale.

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"Wallonie 2020", Institut Jules Destrée, Cinquième congrès La Wallonie au futur  
Révision des souhaitables à la lueur des possibles identifiés

On ne procède pas ici à un relevé point par point de chaque croisement particulier entre possibles et souhaitables repérés, se fiant en cela à la sagacité du lecteur pour appréhender la lecture de la matrice présentée ci-dessous. Par contre, on relève quelques grands axes identifiés, les principaux éléments de ce qui a pu faire davantage débat, ainsi que ce qui nous a conduit à préciser de nouveaux souhaitables suite à la lecture/débat pointilliste à laquelle nous avons participé.

On relèvera encore que les observations contradictoires des participants ont surtout fusé au début de l’édification de cette matrice ; par la suite, pressés par le temps, mais aussi par une pratique plus détachée ou plus expérimentée, peut-être progressivement plus consensuelle, les accords ont été bien plus rapides pour établir un score positif, négatif ou nul au croisement des possibles avec les souhaitables. Aussi, il y a eu évolution au cours de nos entretiens à propos de l’attribution de la cote négative qui n’a été utilisée qu’à la dernière réunion. L’attribution de la cote 0 (neutre) a parfois posé question : celle-ci devait-elle être le résultat mécanique du comptage des plus et des moins s’équilibrant, ou bien l’affirmation d’un : « Je ne sais pas… », ou bien d’une indifférence… ?

Wallonie 2020 - Phase 2 - Rapport Groupe 2 - Révision des souhaitables à la lueur des possibles identifiés

Lorsqu’on considère les résultats figurant dans la matrice ci-dessus, on s’aperçoit immédiatement que trois possibles identifiés par les participants ont une incidence positive remarquable sur un très grand nombre de souhaitables. Il s’agit surtout des deux possibles P.3.1. « Une Wallonie créatrice, pivot/interface d’une Europe interculturelle, sociale et démocratique » (on a relevé que ce possible était « très général ») ainsi que le P.3.2. «  Une Wallonie dynamique et solidaire, gérée dans la gouvernance » qui, à l’unanimité des participants, ont récolté tous deux un score positif maximum[4].

 Il faut y ajouter, dans une mesure un peu moins élevée le score très positif attribué au P.1.1. « Poids accru de l’Union européenne ». L’incidence du possible P.1.1. sur : « l’implication des acteurs de la société wallonne (…), S.1., a fait l’objet d’un débat contradictoire, certains considérant cet impact du poids accru de l’U.E., comme positif, d’autres comme négatif (d’où le résultat « neutre »), tous s’accordant pour dire que « l’implication des acteurs (…) » ne se réaliserait qu’à la condition expresse que l’Union européenne soit plus proche du citoyen, qu’elle soit moins technocratique, plus « démocratique » qu’aujourd’hui (la notion de « souveraineté du peuple » a été avancée). De plus, si le poids accru de l’U.E. s’accroissait aux plans social, culturel, etc…, il pourrait être positif pour la « réinvention d’un contrat social permettant l’accès de tous aux besoins vitaux (…)  », S.4. Cet échange nous a amené à formuler un souhaitable d’éclaircissement complémentaire défini comme suit : S.21 : « Renforcer la démocratie européenne en prenant en compte les dimensions sociales, culturelles et éducatives ».

 Suite à l’ajout de ce nouveau souhaitable, et en corrélation avec celui-ci, le poids de l’U.E. P.1.1. (corrigé par ce qui en est dit ci-dessus) pouvait dès lors être considéré comme positif sur les souhaitables S.7. « Faire évoluer l’enseignement (…) », S.10., « Appliquer (…) les principes démocratiques (…) », et « Evaluer et élaborer des prospectives relatives au contrat démocratique », S.17. D’autre part, l’effet positif de ce possible poids accru de l’U.E. sur « la prise en compte de la diversité de points de vue (…) », S.5, était souligné. Par contre, l’effet de ce possible sur « l’application dans la sphère publique des valeurs définies par la société », S.16. - à corréler avec « l’implication des acteurs (…) dans la définition des valeurs », S.1., ainsi que la « discussion sur le politique dans l’administration (…) », S.19. - entraînait un certain scepticisme.

 On ne s’étonnera pas que le versant pessimiste des possibles exprimé par le possible P.4. « Délitement de la société wallonne et de ses institutions », et en particulier les possibles P.4.1. « Incapacité pour la Région de se mettre en mouvement », P.4.3. « Une Wallonie minée par le sous-régionalisme et la politisation à outrance », et, dans une mesure relativement moindre, P.4.4. « Désintérêt voire rejet du politique par une part de plus en plus grande des Wallons et mise en cause de notre démocratie », soit perçu par les participants (à l’unanimité pour le P.4.1. et le P.4.3.), comme ayant une incidence extrêmement négative sur quasi tous les souhaitables identifiés.

 L’influence du possible P.4.4. sur certains des souhaitables a cependant fait l’objet d’une controverse en ce qui concerne sa pertinence (il y a été répondu positivement). Une possible mise en cause de la démocratie aurait une incidence négative sur la « fonction critique de l’université », S.11. (on a discuté ici de la présence du Vlaamse Blok en Flandre, et de son impact sur le « rejet du politique »), ou empêcherait de « construire une stratégie pour un projet ambitieux (…) », S.12.

 A contrario des extrêmes positifs et négatifs exprimés, il faut maintenant porter le regard vers ce qui a été qualifié de neutre. Relevons ici, surtout ceux qui, au total (ligne des possibles), ont obtenu un score nul. Il s’agit des possibles P.1.3. « Abolition de la Monarchie », P.5.1. « Disparition de l’industrie lourde » (on a hésité sur l’impact de ce possible sur le souhaitable S.8. « Adapter la formation continuée à l’évolution de la société »), P.6.1. « Augmentation de l’autonomie énergétique (…) », P.6.2. « Suppression du nucléaire », et enfin P.8.2. « Tensions sur les soins de santé et déficit de la sécurité sociale ». Concernant ce dernier possible, on a évoqué son impact sur la « réinvention du contrat social (…) », S.4., pour conclure qu’il serait nul ; il en a été de même en ce qui concerne son influence finalement considérée à jeu nul sur « l’ajustement des sphères publiques », S.16. à S.20.

 Sur tous ces points, l’unanimité s’est dégagée très rapidement (excepté le point relatif à l’abolition de la Monarchie qui a entraîné une forte discussion conclue toutefois par le consensus) pour affirmer que ces possibles (au vu des critères de cohérence, pertinence, vraisemblance) étaient sans influence sur la totalité des souhaitables exprimés[5].

 Après avoir relevé les cotes positives et négatives extrêmes, ainsi que les cotes nulles des totaux de la corrélation « possibles à souhaitables », nous nous attardons maintenant uniquement sur les quelques points ayant fait l’objet d’hésitations, d’échanges contradictoires ou problématiques, ou, en revanche, de points que l’on a considérés comme forts, importants....

 L’influence du possible P.1.2. « Disparition de l’Etat - Belgique » sur « l’implication des acteurs de la société wallonne (…) », S.1., est considérée par certains comme positive, car elle donnerait plus de pouvoir aux Wallons, ce qui ne va pas de soi pour d’autres (d’où, somme nulle). De même, en ce qui concerne la relation entre ce possible et le souhaitable S.5. « Reconnaître et prendre en compte la diversité des points de vue (…) », les uns avancent que la situation actuelle de cohabitation avec « les Flamands » nous oblige à réfléchir, à admettre une diversité de points de vue ; mais, en définitive, on ne sait pas si la disparition de l’Etat - Belgique aurait vraiment un effet sur ce souhaitable. L’avènement de ce possible aurait une incidence positive sur la « construction d’une stratégie pour se donner un projet ambitieux (…) », S.12., ainsi que sur la réaffirmation du service au public dans le cadre de l’intérêt collectif, du fait que l’administration régionale devrait être plus proche des citoyens qu’une administration fédérale. Plus même, il obligerait à « repenser le rôle des élus, leur responsabilisation (…) », S.19.

 Il semblerait pour d’aucuns que la « fusion de la Communauté française avec la Région wallonne », P.1.4., en un seul organisme aurait un effet positif concernant « l’élaboration et la mise en œuvre avec tous les acteurs d’un cadre (…), et d’une action politique (…) dans le respect des valeurs », S.2., mais ce n’est pas l’avis de tous (cote nulle). L’effet du possible P.1.4. sur la « création d’un réseau permanent de lieux (…) », S.3., devrait, pour les mêmes raisons, être positive (accord de tous). L’incidence de cette fusion possible des deux institutions sur la « réinvention d’un contrat social (…) » , S.4., pousse les participants à réfléchir sur le sens de cette fusion : « Signifierait-elle la disparition de la Région wallonne ? » Ne faudrait-il pas définir un nouveau souhaitable, affirmant le « droit à la Wallonie pour un avenir sans la Communauté ? » Peut-être, si ce P.1.4. se réalise, serait-il plus facile de « faire évoluer l’enseignement (…), S.7. ; les Wallons auraient plus de forces pour « construire une stratégie (…) », S.12. Il y aurait un « effet de simplification du service au public dans le cadre de l’intérêt collectif (…) », S.18., une rationalisation des ministères, et cela permettrait de « repenser le rôle des élus (…) », S.19. (mais ce point ne fait pas l’unanimité, d’où somme nulle).

 L’implication des possibles P.2.1. « Développement des synergies avec d’autres régions (…) », et P.2.2. « Mobilité (…) », sur le souhaitable S.20. « Recomposer les territoires (…) » a prêté à discussion. Celle-ci s’est conclue, dans le premier cas, P.2.1., par un effet positif, et dans le second, P.2.2., par une somme nulle (ce n’est pas sûr qu’il y ait un impact …). La discussion du possible P.2.3. « Gestion transfrontalière des ressources (…)  » - dont on a souligné qu’il devait être pris en considération positivement pour « l’implication des acteurs (…) dans la définition des valeurs », S.1. -, en corrélation avec l’ensemble des souhaitables, a conduit à la formulation d’un nouveau souhaitable S.22 « Rétablir un réseau de mobilité respectueux de l’environnement et accessible à tous. »

 L’incidence du possible P.4.2. « Réduction des moyens financiers de la Région wallonne » sur les souhaitables est intéressante. En effet, on s’aperçoit que les participants ont soit donné une cote neutre (= 0), soit une cote négative, dans quatre cas, à cette incidence. Concernant le S.1. « Impliquer tous les acteurs (…)  » certains allaient jusqu’à affirmer que : « Si on n’a plus de moyens, on va se réveiller… ! » ; à propos de S.2. « Elaborer et mettre en œuvre (…) », des participants affirmaient que le manque de moyens allait crisper les acteurs, tandis que d’autres considéraient que cette situation pouvait être « fédératrice ». Le lien entre l’absence ou la présence de moyens financiers n’était pas évident à propos de S.4. « Réinventer le contrat social (…) » . Concernant le souhaitable S.18. « Réaffirmer le service au public (…) », la cote négative traduisait le sentiment que si la Région avait moins de moyens, le service au public serait moins bon, on irait plus encore vers le privé. Aussi, on pensait que la « recomposition des territoires (…) », au sens du souhaitable S.20. « ne devrait pas coûter beaucoup d’argent… » ?  Réfléchissant aux résultats de cette corrélation, les participants se posaient la question : « L’argent n’aurait-il pas d’influence en Wallonie ? Avons-nous bien réfléchi ? » Toutefois, ils relativisaient leur jugement comme suit : « Nos souhaitables ne sont pas tellement coûteux… ! »

 En P.4.5. « Taux croissant de faillites et diminution drastique de la population active (chômage) », les seuls points ayant fait l’objet de discussions ont été le lien de ce possible avec le souhaitable S.1. « impliquer tous les acteurs (…)  », une crise économique pouvant avoir, suivant les avis, des impacts positifs ou/et négatifs sur cette implication, et, pour les mêmes raisons, avec le souhaitable S.4. « Réinventer un contrat social (…) », cette « réinvention du contrat social » étant, à la limite, sans rapport avec une crise économique.

 On a souligné que les possibles P.5.2. « Diminution de la population active (…) » et P.5.3. « Augmentation du temps libre (...) » n’avaient qu’un impact limité sur les souhaitables exprimés.

 L’impact des possibles ayant trait aux risques sur l’écosystème wallon, en P.7.1., notamment sur S.1. « Impliquer tous les acteurs (… ) » et P.7.2. étaient un peu plus élevés sur les souhaitables, en particulier sur les souhaitables relevant de l’enjeu « Stratégie et proactivité ».

 On notait aussi un effet négatif des possibles relatifs au vieillissement démographique, surtout en P.8.1., sur : « l’implication des acteurs (… ) », S.1., « l’élaboration (…) d’un cadre et d’une action politique dans le respect des valeurs, S.2., et « la construction d’une stratégie pour se donner un projet ambitieux (…) », S. 12. En P.8.2., la relation entre ce possible concernant « les tensions sur les soins de santé et le déficit de la sécurité sociale » sur le souhaitable S.4. « Réinventer un contrat social (… ) » a fait l’objet d’une courte discussion, le positif finalement s’annulant avec le négatif.

 Arrivés au terme de cette exploration, plutôt de cette analyse, les participants ont relevé que cette confrontation des possibles avec les souhaitables avait donné lieu à l’expression de deux nouveaux souhaitables d’éclaircissement (voir ci-dessous en S.21. et S.22.)

 Ils se sont posé la question : « Quels seraient finalement des souhaitables globaux ? » Un participant remarquait qu’il manquait un souhaitable concernant l’accès à l’emploi, au bien-être, à la satisfaction des besoins. Dans l’échange qui s’ensuivait, certains soulignaient « qu’il ne faut pas nécessairement avoir un emploi pour avoir une place dans la société », qu’il importe surtout de « satisfaire les besoins de tous »…

 Finalement, en considérant les totaux (voir la matrice, bas de colonne) des souhaitables ayant obtenu le maximum de cotes positives, à savoir S.1., S.3., S.4., S.5., S.8., S.12. et S.20., les participants décidaient de formuler trois souhaitables fédérateurs, structurants : SST1. « Construire une région économiquement forte », SST2. « Réactiver la culture politique par l’implication et la participation des acteurs, et SST3. « Répondre aux besoins vitaux de tous ».  

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Formulation de souhaitables complémentaires

Deux souhaitables d’éclaircissement

S21. Renforcer la démocratie européenne en prenant en compte les dimensions sociales, culturelles et éducatives.

S22. Rétablir un réseau de mobilité respectueux de l’environnement et accessible à tous.

 

Trois souhaitables structurants

SST1 : Construire une région économiquement forte.

SST2 : Réactiver la culture politique par l’implication et la participation des acteurs.

SST3 : Répondre aux besoins vitaux de tous.

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Notes

[1] Pour des précisions sur ces nœuds de futur, la « boussole de 2020 » qui en ressort, se reporter à Wallonie 2020, Rapport transversal des synthèses des quatorze groupes de travail, octobre 2002.

[2] Je prie Philippe Destatte et les participants à ces réunions d’être bienveillants à l’égard de ce rapport qui ne reflète que très partiellement la richesse de leurs réflexions, et je leur demande de procéder aux compléments et aux rectifications nécessaires s’il y a lieu.

[3] Ces listes élaborées en cours de réunions ainsi que la matrice ad hoc m’ont été transmises par Philippe DESTATTE - que je remercie ici - et intégrées à ce rapport.

[4] Commentaire du rédacteur : ne faudrait-il pas voir à l’arrière-plan de ces deux cotes maximum, un souci extrêmement fort que cela ne soit pas seulement possible que la Wallonie devienne et :»  créatrice… », et « dynamique… », mais surtout que cela soit éminemment souhaitable afin que le type de Wallonie ainsi dessiné réalise l’ensemble des souhaitables exprimés ?

[5] N.D.L.R. Curieux…, lorsqu’on sait combien ces questions très diverses ont alimenté et alimentent aujourd’hui bien des débats, touchent des fractions importantes de la population, ou constituent de dangereux brûlots qu’on voudrait écarter.

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 Troisième phase
Wallonie 2020

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