Débats avec les
participants
Willy Burgeon, Président de l'Union des
Villes et des Communes de Wallonie, Député wallon :
Nous ne devons pas être frileux en matière de
politique culturelle. Je suis un partisan de la Communauté française mais je voudrais
dire ceci à propos de la politique culturelle wallonne : est-ce que Pagnol, Mistral,
Giono ont fait du repli sur soi pour la Provence ? N'ont-ils pas projeté la Provence
dans le monde entier, parce quils défendaient des valeurs et des uvres
valables ? Est-ce que Joyce, quand il se promène dans les rues de Dublin, na
pas valorisé lIrlande et montré la richesse culturelle de lIrlande ?
Alors nayons pas peur de ce que nous sommes.
Quand on parle didentité, depuis un an, à
la suite dailleurs du dépôt de ces propositions sur lhymne wallon qui était
foulé du pied par beaucoup, la Wallonie vit un débat extraordinaire. Je peux vous dire
que, par mes fonctions, je voyage souvent dans toutes les régions dEurope. Je crois
quil ny a pas un lieu pour le moment en Europe où on parle autant de
lidentité, de son développement, de son devenir, de son présent, de son passé
aussi, des erreurs peut-être quon a faites, mais c'est un lieu qui se remet en
question. Cest quelque chose dessentiel dans lhistoire de la Wallonie et
lancien militant wallon que je suis depuis 1960 na jamais connu ce débat.
Hier, ce débat-là existait pour la Catalogne, et regardez ce que la Catalogne est en
train de devenir. Aujourdhui il existe pour la Wallonie. La campagne électorale va
souvrir, le thème majeur sera la Wallonie, son identité, son avenir. Je suis un
Wallon heureux.
Jacques Defay, Economiste :
Ce débat a démarré sur un problème
dindustries culturelles et a dérivé vers la gestion de la culture.
Lindustrie, quelle soit culturelle ou charbonnière, est une compétence
régionale. Par conséquent, ce problème du soutien aux auteurs de films, en particulier
parce que cest un domaine important et cher, je ne parle pas ici du soutien
à lactivité culturelle diffuse que nous souhaitons tous, jusquy compris dans
les villages , cest un soutien à lindustrie. Quil y ait une
direction dans le ministère de la Région wallonne et une filiale à la SRIW, tout à
fait normal. Quil y ait la même chose à Bruxelles, tout à fait normal dans le
cadre de la Région bruxelloise, quelle fasse des coproductions, cest
absolument dans lère du temps. Il ny a vraiment aucun problème. Pourquoi
est-ce que nous avons dérivé de lindustrie culturelle vers la gestion de la
culture ?

Michel Fromont, Directeur général La
Meuse - La Nouvelle Gazette :
Après avoir entendu presque enterrer la Wallonie
tout à lheure, par plusieurs intervenants dont le leitmotiv était le repli wallon,
je vais essayer de rester calme.
Quand on parle despace Wallonie
Bruxelles et quand on parle de dialogue, jai toujours imaginé que, pour un
dialogue, il faut au moins être deux. Et quun vrai dialogue, cest quand
chacune des deux personnes peut saffirmer et être soi-même.
Jai entendu quon rejetait la
solidarité francophone : il ne faut pas du tout, nous en aurons bien besoin. Quand
on est deux on est plus forts que quand on est quà quun, comme disait
André Cools.
La Communauté française; cest à peu près
ceci : il y a Bruxelles dun côté dont lidentité est tout à fait
affirmée depuis longtemps et il y a la Wallonie qui soutient la Communauté française.
Je trouve qu'un fronton avec deux piliers, Bruxelles plus la Wallonie, cest une
force colossale pour le futur.
Ce qui est une tare presque incurable dun
certain nombre de nos représentants politiques, cest quils ne veulent pas
écouter les citoyens. Ce matin, on a entendu une citoyenne intéressante, elle venait de
France, Mme Elisabeth Dupoirier. Elle pourrait nous mettre tous daccord si tout le
monde voulait bien lécouter. Elle a dit une chose tout à fait importante :
lidentité collective est un levier essentiel de développement. Si les Wallons ont
le droit de sidentifier, ils ont le droit dexister. Cela sera déjà vital
pour le développement dun nouvel esprit dentreprendre en Wallonie.
Un constat : les Wallons rencontrent
aujourdhui la même difficulté à affirmer leur identité que les Flamands dans la
Belgique de la première moitié de ce siècle.
Pour ce qui est de lindustrie culturelle, je
pense que cest une idée formidable et quil faut la développer. Jai
entendu parler dune filiale sectorielle, public privé, pour donner les
moyens du développement de la culture. Je trouve cela très positif et très
intéressant, mais noublions pas que la culture ne se limite pas à
laudiovisuel et au multimédia. Les écrits restent. En Belgique, il y a un habitant
sur deux qui lit tous les jours un journal; en Région wallonne, il y a, tous les jours,
1.500.000 citoyens qui lisent un journal. La presse régionale représente deux tiers des
lecteurs en Wallonie. Cest la raison pour laquelle jai dit que, pour
participer au redéveloppement de la Wallonie, lui rendre le courage et
lenthousiasme, la presse régionale avait un rôle fondamental à jouer :
jespère que tous les journaux pourront et auront les moyens dassumer ce rôle
dans le futur.

Jean-Marie Klinkenberg :
Je remercie tous les intervenants qui prouvent au
moins une chose, cest que, comme dans les volcans, il y a ici une formidable
réserve dénergie. Je vais me tourner pour une dernière fois vers le panel
politique et lui poser une ultime question. Si le gouvernement wallon devait prendre
linitiative de rédiger, dans les jours qui viennent, avec laide de
représentants de la société civile, une charte de la culture wallonne, quel serait
larticle que vous voudriez y voir figurer en priorité ?
José Happart :
Je dirai seulement quil faut commencer tous
les articles en disant : Attendu que la Wallonie ne pourrait exister quen
toute autonomie.

Jacky Morael :
Je changerai dabord le titre en disant :
Manifeste des cultures de Wallonie. Ça me paraît beaucoup plus riche, et moins
réducteur. Si je devais y mettre un article : ce serait les projets doivent être
analysés et soutenus pour leurs qualités intrinsèques, pour ce quils portent et
non pas parce que cela fait plaisir à telle ou telle stratégie, à tel ou tel
responsable.
Pino Carlino :
Une culture accessible, une culture pour tous et
des moyens pour que ceux qui sont aujourdhui à côté puissent accéder à cette
culture un peu élitiste dont on a beaucoup parlé aujourdhui.

Joëlle Milquet :
Je mettrais trois paragraphes dans larticle
1 :
- que laccès est garanti et doit être promu,
cest le nerf de la guerre;
- que la politique culturelle doit assurer la
diversité tant locale qu'extérieure;
- quil faut aussi veiller à la qualité.

Daniel Ducarme :
Tout dabord, si vous négociez avec le
gouvernement wallon, jaimerais autant que vous attendiez quon y soit.
Ceci étant : le fait régional est
incontournable, dans le développement de lEurope, à la Wallonie de saffirmer
en tous secteurs, y compris la culture.
|