La
Wallonie dans la Belgique fédéralisée,
dans l'Europe et dans le monde
Jacques DEFAY
Economiste
1.
Introduction
Si la fédéralisation de
la Belgique aura pris plus de trois décennies à travers des compromis longs et
difficiles, c'est parce que les objectifs du nord et du sud ne coïncidaient
guère. Les Wallons revendiquaient une autonomie économique et les Flamands une
autonomie culturelle. D'où la complexité des institutions et la perpétuation des
difficultés.
Dès 1961, la Wallonie,
qui se savait menacée du déclin économique à cause d'une structure industrielle
vieillie, craignait que la majorité unitariste d'alors n'ajourne indéfiniment
l'action nécessaire pour enrayer ce déclin. Selon leur implantation électorale,
les composantes de cette majorité manifestaient en effet de l'indifférence ou de
l'hostilité à l'égard de la Wallonie et de son avenir économique.
A Bruxelles
l'indifférence était teintée de libéralisme manchestérien : le déclin d'une
région était considéré comme aussi inéluctable qu'une perturbation
météorologique et le projet de l'enrayer par une politique économique
volontariste laissait sceptique les traditionalistes du centre et de la droite.
En Flandre l'hostilité était de nature ethnique, dans la mouvance du CVP, à tout
ce qui renforcerait la Wallonie. Il se dégageait de cette diversité de
motivations un consensus pour ne rien faire en vue de conjurer le péril. La
Belgique unitaire était devenue un piège institutionnel pour la moitié sud du
pays. Celle-ci devait s'en libérer pour oeuvrer ensuite à son propre
redressement.
L'effondrement industriel
de la Wallonie est survenu en 1975, alors que la réforme des institutions était
encore dans une phase préliminaire. De toutes les régions d'Europe, la Wallonie
fut l'une des plus durement touchées par la crise de désindustrialisation. La
détresse de Liège et de Charleroi ne fut dépassée sans doute que par celle de
Liverpool, Birmingham et Manchester. Le pouvoir régional wallon, inscrit dans la
Constitution dès 1970, fut mis en place tardivement par les lois à majorité
spéciale des 08.08.1980 et 08.08.1988. Il ne put que s'atteler sans désemparer à
la reconstruction de l'emploi industriel dévasté. Si les entreprises sauvées du
décès ont été nombreuses à retrouver une santé à la fin des années
quatre-vingts, les emplois perdus ne sont pas revenus et n'ont pas été compensés
- ou pas suffisamment - par des créations nouvelles ou par des jeunes pousses du
vieil arbre. Un septième (certains disent un sixième) de la population wallonne
active ou potentiellement active est resté sans emploi suffisant, même durant la
haute conjoncture 1987-1990. Tel est le problème majeur des années nonante.

Sortir du sous-emploi
structurel exigera une volonté lucide et un stratégie précise de la Région. Les
secteurs économiques dans lesquels des emplois peuvent être créés avec une
certaine probabilité par dizaines de milliers ne sont plus en 1992 ceux qu'on
pouvait choisir en 1960 ou 70. Il ne s'agit plus d'industries de masse, mais au
contraire de fortes branches du tertiaire marchand, appuyées sur une culture
technologique de pointe. Ces fortes branches, la Wallonie ne les possède pas
encore et sa culture scientifique et technologique, quoique ancienne et bien
enracinée, n'est pas assez pointue. Elle ne possède pas non plus les effectifs
de travailleurs des disciplines scientifiques et tertiaires, formés aux
exigences de compétence et de professionnalité que posent les employeurs du
"tertiaire européen". La qualité existe sans doute, mais pour que la force de
travail offerte par la Wallonie soit réellement attractive, il faudra ajouter le
nombre à la qualité.
Pour préparer les jeunes
en nombre suffisant aux offres d'emplois qui pourront exister en 2000 et au
delà, il est urgent de modifier les proportions entre les différentes
orientations de l'enseignement. En d'autres termes, il faudra déplacer le centre
de gravité du secteur de l'enseignement en direction de technologies de pointe
et des spécialisations tertiaires à haute exigence (en particulier en ce qui
concerne la connaissance des langues).
La structure présente de
ce secteur est à l'image de ce qu'était la structure de l'emploi au lendemain de
la Seconde Guerre mondiale : plus de 60 % des emplois se situaient dans la
production de matières et de marchandises : l'industrie, les mines et
l'agriculture. Actuellement, c'est dans les secteurs tertiaire (services) et
quaternaire (recherche et création) qu'on trouve semblable prépondérance. Le
changement de structure est donc profond. Il n'est pas terminé. En 2000, les
deux derniers secteurs cités offriront entre les deux tiers et les trois quarts
des emplois.
Le niveau moyen de
qualification et la durée de formation à ces emplois dépasseront largement
celles des "opérateurs de productions banalisés" qui caractérisaient la
structure économique vieille effondrée en 1975. Il subsiste de cette époque une
culture technologique de base qui est très présente dans la population wallonne
et qui constitue un bon point de départ. Il existe aussi quelques centres
d'excellence dans des spécialités plus récentes sur lesquels pourra s'appuyer un
programme régional de modernisation de la force de travail.
L'étendue de la tâche est
telle que le coût de la formation de la jeunesses grandira en pourcentage du
produit intérieur régional, même si la structure du secteur de l'enseignement
devient optimale (adéquation du secteur à l'offre d'emplois attendue et
fermeture d'écoles ou de sections en surnombre) et si l'efficacité pédagogique
fait un bond en avant par un usage approprié de l'informatique, entre autres
moyens.
Or, la compétence
relative à l'enseignement n'appartient pas aux régions mais aux communautés, et
celles-ci n'ont pas de pouvoir fiscal (quoique le gouvernement ait le projet de
leur en faire donner; voir ci-dessous).

Par ailleurs, le pouvoir
économique avec lequel une région autonome négocie son programme de redressement
économique n'est plus, comme en 1960, le gouvernement national, ou n'est plus
principalement celui-ci. C'est désormais le pouvoir européen qui fixe les normes
que la région autonome devra respecter et qui lui fournit l'aide nécessaire. Or,
dans l'état actuel des institutions, l'Europe privilégie encore les
Etats-nations comme interlocuteurs et certains de ces derniers (dont la
Belgique) ont tardé à habiliter pleinement leurs régions autonomes à traiter
directement avec la CEE et plus encore à intervenir dans le processus de
décision européen. Toutefois la tendance est à élargir la place des régions dans
ce processus, même si le glissement de "l'Europe des Etats" à "l'Europe des
Régions" peut paraître très lent.
Ainsi se trouvent définis
les deux problèmes institutionnels, l'un interne à la Belgique quasi
fédéralisée, l'autre externe, qui peuvent entraver la Région wallonne dans la
réforme de sa structure économique par la modernisation du facteur humain, (la
force de travail). Cette réforme est nécessaire pour atteindre l'objectif
régional prioritaire : l'éradication du sous-emploi structurel. En 1991 il est
difficile de concevoir une autonomie économique efficace dont le facteur humain
ne ferait pas partie. Vues sous l'angle de ce critère, les structures belges
sont déjà désuètes.
Toutefois, entraver n'est
pas synonyme d'empêcher. Les réformes institutionnelles profondes sont souvent
longues à obtenir et des arrangements provisoires qui permettent d'agir et
d'avancer sont souvent préférables en attendant que les temps deviennent
favorables à la réforme véritable. C'est ainsi que l'Europe se fait et que se
fera sans doute aussi le visage de la Belgique au siècle prochain. Il est clair
que la Wallonie ne peut accepter que la mise entre parenthèses des matières
dites culturelles ou personnalisables - dont l'enseignement fait partie -
paralyse son programme de redressement régional en privant la région d'outils
essentiels du développement intégré, ou en laissant ces outils sans financement.

2. Le financement de
l'enseignement
Le réseau 10 n'avait pas
à aborder la manière de restructurer l'enseignement, mais bien la façon de
financer cette restructuration. Je vais situer d'abord comment le problème se
posait avant l'été, quand le réseau l'a abordé. J'examinerai ensuite les
ouvertures faites par le gouvernement au début d'août.
De lege lata, les régions
ont un pouvoir fiscal et les communautés n'en ont pas. Celles-ci sont financées
par une dotation du budget central, indexée mais non évolutive. Il y a
impossibilité pratique de consacrer à l'enseignement une part croissante du PIB,
puisque l'enseignement absorbe la majeure partie de la dotation de chaque
communauté.
Toutefois, la Communauté
flamande, en fusionnant son budget avec celui de la Région flamande, s'est donné
la possibilité de lever dans cette région les impôts nécessaires à l'expansion
des dépenses culturelles ou personnalisables. La Communauté française pourrait,
par symétrie, fusionner son budget avec celui de la Région wallonne. Certains
partis ont préconisé cette "fusion" avant même que l'enseignement ait été ajouté
au paquet des compétences communautaires, mais les problèmes du financement des
écoles ont surgi depuis et rendu cette apparente symétrie beaucoup moins
tentante pour les contribuables wallons. Voici pourquoi.
Si la "fusion" se
réalisait, les enfants des contribuables francophones bruxellois bénéficieraient
d'un enseignement amélioré au même titre que ceux des contribuables wallons, ces
derniers étant seuls cependant appelés à combler l'insuffisance de la dotation
communautaire. Or, les contribuables bruxellois, moins atteints par la
dépression 1975-85 et bénéficiaires plus précoces du "tertiaire européen", ont
en moyenne des revenus très sensiblement supérieurs à ceux des contribuables
wallons. On verrait donc dans la Communauté française les citoyens les moins
riches appelés à payer plus d'impôts pour assurer des services améliorés aux
plus riches. C'est la solidarité à l'envers. Comme le souligne Michel Quévit
dans sa contribution au réseau 10, on se trouverait dans une situation de
fédéralisme inversé où la composante la plus faible paierait pour la plus forte.
Ce n'est certainement pas la meilleure manière de consolider une communauté de
vie et d'intérêts entre les Wallons et la majorité francophone bruxelloise...
S'il en est ainsi,
pourquoi les Flamands s'accommodent-ils de la fusion? Il reste à prouver qu'ils
s'en accommoderont vraiment, car le problème du financement des écoles n'est
devenu brûlant que depuis 1990. Toujours est-il que la fausse symétrie belge
rend tiède pour eux ce qui est brûlant pour nous. Il est aisé de montrer
pourquoi.
A Bruxelles, les
néerlandophones sont quatre fois moins nombreux que les francophones; en Région
flamande, les contribuables à l'IPP sont près de deux fois plus nombreux qu'en
Région wallonne. Un fardeau quatre fois plus petit partagé entre deux fois plus
d'épaules est huit fois moins lourd. Par ailleurs, le revenu moyen par tête à
Bruxelles est supérieur à ce qu'il est dans les deux autres régions, mais
l'écart avec la Région flamande est moindre qu'entre Bruxelles et la Wallonie,
car le sous-emploi wallon a fortement creusé ce dernier écart. Si l'écart de
revenu est doublé pour nous, l'injustice que crée la "fusion" est seize fois
plus criante (8 x 2 = 16).
Notre réseau a pris
position contre une solution qui donnerait un pouvoir fiscal aux Communautés. Il
y voyait une dérogation inadmissible au principe selon lequel un citoyen ne
choisit pas le régime fiscal qui lui est applicable, dérogation qui ouvrirait
une possibilité d'abus politique à la Communauté flamande : celle-ci, en créant
un régime fiscal plus avantageux pour les contribuables bruxellois qui se
déclareraient néerlandophones, pourrait obtenir par ce procédé vénal des
déclarations d'appartenance inexactes. Rien ne permet d'affirmer que cette
possibilité serait exploitée, ni qu'elle serait du goût de la Région flamande.
Mais on doit juger malsain un texte qui rendrait la manoeuvre possible. Le rêve
de reconquérir Bruxelles n'est pas mort dans le mouvement flamand et il serait
dangereux de l'alimenter.

Selon ce qu'on sait du
projet gouvernemental, une ingénierie fiscale subtile permettrait de tourner
cette difficulté : d'après les informations publiées, l'accord réalisé au sein
du gouvernement sur des centimes additionnels à l'impôt des personnes physiques
au profit des communautés ne laisserait aucun choix de régime fiscal au
redevable : le produit des centimes additionnels perçus à Bruxelles serait
partagé entre les communautés française et flamande dans la proportion de 80 et
20 respectivement, de sorte que chaque contribuable bruxellois financerait les
deux communautés dans cette proportion et n'aurait donc pas à choisir entre
elles. Les résidents du nord et du sud ne financeraient qu'une seule communauté.
Le nombre des centimes
additionnels à prélever en Région bruxelloise serait calculé en multipliant par
0.8 les centimes votés par le Conseil de la Communauté française et par 0.2 les
centimes votés par le Vlaamse Raad et en faisant la somme de ces produits. Si
les centimes "flamands" étaient sensiblement moins lourds que les centimes
"francophones", les centimes "bruxellois" seraient aussi inférieurs à ces
derniers, quoique légèrement. On voit que cette ingénierie subtile ne fait pas
disparaître l'inéquité dans le couple Wallonie-Bruxelles. Mais elle la rend
moins certaine et moins criante que dans le cas de la "fusion" tout en rendant
celle-ci inutile. (NB : pour la redevance radiophonique, régionalisable en 1993,
le même système est prévu, à ceci près que le calcul ne s'applique pas à des
centimes additionnels, mais au montant de l'impôt lui-même, qui est payé par les
pauvres au même titre que les riches, à l'instar de la "pool tax" qui mit fin à
la carrière de Mrs Thatcher).
On notera en passant que
Jean-Luc Dehaene, l'un des pères de la formule, ne paraît pas gêné par une
fixation définitive à 20 % de la présence flamande à Bruxelles, sans doute parce
que ce pourcentage est supérieur à la réalité présente (environ 17 %) et à la
réalité attendue (compte tenu d'une forte immigration non flamande qui adopte la
langue "de la ville"). Le CVP accepte en quelque sorte - et contre espèces
sonnantes - de contresigner le constat de décès d'un rêve. D'après la presse,
Jaak Gabriëls aurait revendiqué pour la Volksunie le mérite de cette vente d'un
rêve flamand contre une rente perpétuelle (égale à au moins 3 % du produit des
centimes additionnels communautaires à l'IPP dans la Région bruxelloise). A la
Wallonie d'en prendre acte. Un jour viendra peut-être, Michel Quévit en évoquait
la possibilité en décembre 1990, où on envisagera une fusion des Régions
wallonne et bruxelloise. Cette vision est-elle prophétique? Le réalisme des
politiciens de l'autre communauté en août 1991 a augmenté en tout cas son indice
de crédibilité.. dans le long terme!
Mais la problématique
wallonne n'est pas celle-là dans l'immédiat, car la Wallonie a besoin de trouver
en elle-même les forces de son renouveau et il lui est nécessaire de renforcer
son identité pour y parvenir. Elle n'est pas à la recherche d'une fusion, mais
d'un partenariat efficace avec Bruxelles. D'autre part, étant la région la plus
déprimée du nord-ouest du continent, elle a beaucoup à attendre d'une politique
régionale européenne qui ferait à l'avenir des choix plus nuancés. (Le programme
1990-92 traite les désindustrialisés du nord de la CEE moins généreusement que
les non-industrialisés du sud). Autant pour sa cohésion interne que pour son
financement externe, la Wallonie aura besoin, pendant deux décennies au moins,
d'une identité renforcée et devrait donc refuser toute fusion qui affaiblirait
le sentiment d'appartenance d'un peuple en lutte contre l'adversité et solidaire
dans cette lutte.

3. La Région wallonne et
la Communauté française.
L'accord réalisé début
d'août au sein du gouvernement, s'il trouvait au Parlement la majorité
nécessaire, serait de nature à prolonger l'existence des communautés mise en
péril par la crise du financement de l'éducation. Il faudra davantage cependant
qu'un pouvoir fiscal accordé aux communautés pour réussir la modernisation de ce
secteur en Région wallonne, dans le cadre d'un programme régional d'éradication
du sous-emploi. Le problème que la crise scolaire a fait surgir dépasse
d'ailleurs les limites du secteur des écoles et concerne l'ensemble des matières
culturelles et personnalisables, c'est-à-dire presque tout le secteur non
marchand de l'économie.
En mettant hors atteinte
du pouvoir régional l'ensemble de ces matières, les auteurs de la réforme de la
Belgique ont rendu impossibles (peut-être involontairement) les transferts entre
les chapitres "matérialistes" du budget de développement (autoroutes, zonings
industriels, investissements des entreprises) et les chapitres qui concernent le
progrès du facteur humain. Ceux des régionalistes qui ont envisagé la
disparition de la Communauté française n'étaient-ils pas surtout irrités de voir
les institutions issues du compromis de 1980 bloquer la Wallonie dans sa
recherche d'une politique de développement moins archaïque?
Quoiqu'il en soit, la
disparition des communautés est une solution radicale qui n'est plus à l'ordre
du jour d'ici 1994 dans le parti où cette proposition s'est manifestée,
puisqu'une thèse intermédiaire y a été adoptée à l'unanimité, pour trois ans,
par les socialistes wallons (Ans, 9 février 1991). Il importe dès lors de
trouver des arrangements permettant une gestion régionale de certains des
chapitres "humanistes" faisant partie du budget communautaire ainsi qu'un autre
équilibre entre les dépenses "matérialistes" qui pourraient être réduites dans
le budget régional et les dépenses plus directement utiles à la reconversion de
la force de travail et à la création d'emplois, qui devraient être augmentées.
On trouvera, dans la
contribution de Michel Quévit au réseau 10 (aux paragraphes 3.3 et 4), des
propositions inspirées d'exemples suisses, américains et allemands notamment,
pays fédéraux dont la réussite est indiscutée et dans lesquels des entités
fédérées passent contrat entre elles pour cogérer et cofinancer certaines de
leurs compétences. Dans de tels cas, c'est le contrat qui détermine leurs parts
respectives de financement et qui répartit les tâches d'exécution entre les
parties contractantes et un organe commun éventuel. De tels contrats pourraient
donc intervenir entre la Région wallonne, la Région bruxelloise et la Communauté
française pour des matières qui resteraient constitutionnellement dans la
compétence des communautés. Les "accords de coopération" en question pourraient
maintenir une gestion commune de certains actes administratifs et régionaliser
la gestion des autres actes. Ils pourraient aussi rendre plus équitable la
charge du financement. On rappelle à cette occasion les accords Dehousse -
Persoons pour le financement de la culture française en Wallonie et à Bruxelles,
tout au début de la décentralisation.
Si des textes légaux
normatifs sont nécessaires (pour la ratification d'un accord nouveau ou pour la
gestion d'un accord en cours d'exécution), ils devraient être votés par les
corps législatifs respectifs des entités associées, afin que soit respectée la
séparation des deux pouvoirs.
La réforme nécessaire des
lois à majorité spéciale n'est pas considérable, puisque la loi de 1980 prévoit
déjà le principe d'accords de coopération entre les entités décentralisées. Il
importera d'autoriser explicitement le transfert de compétences et de moyens
financiers entre les régions et communautés associées ainsi que la possibilité
de conférer le pouvoir d'ordonnancement à des organes communs (pouvoirs que les
lois actuelles n'ont pas prévus, sauf pour permettre une fusion globale
communauté-région, "à la flamande").
Des modifications sont à
apporter complémentairement au statut de la Région bruxelloise. Il convient en
effet que les accords de coopération entre cette région, la Région wallonne et
la Communauté française soient conclus, ratifiés et exécutés par les élus et les
organes francophones de la Région bruxelloise, afin que toute ingérence de
l'autre communauté soit évitée. Il est possible que les élus flamands de cette
région souhaitent pareillement la non-ingérence de la majorité francophone dans
leurs relations avec le Vlaamse Regering. Une ébauche de ce régime existe sous
la forme des Commissions communautaires francophone (CocoF) et flamande.
Celles-ci devraient recevoir le pouvoir d'ordonnancement, tandis que les membres
francophones et flamands de l'Exécutif et du Conseil bruxellois devront siéger
et délibérer séparément pour ce qui concerne ces accords, (cf par 4.3 du rapport
Quévit).
Les solutions
institutionnelles ainsi esquissées sont également valables, soit que les
"centimes additionnels communautaires" trouvent au Parlement la majorité
requise, soit qu'ils ne la trouvent pas.
Il est essentiel, en
toute hypothèse, que soient régionalisées les compétences communautaires à
caractère social ou économique (tutelle des CPAS, tourisme, transports
scolaires, politique de la jeunesse, etc). Il convient de rappeler aussi, dans
ce chapitre consacré pour l'essentiel aux relations communauté-région, que le
pouvoir central a gardé indûment dans la deuxième phase de la décentralisation
des compétences d'une nature on ne peut plus territoriale, comme l'agriculture
et les lois organiques des pouvoirs locaux, ou certains aspects de la politique
de l'énergie. Le pouvoir régional n'est plus dans l'enfance et il a fait ses
preuves. Il faut lui rendre la plénitude de sa capacité à la plus prochaine
révision des lois à majorité spéciale.

4. La Région wallonne,
l'Europe et le monde
Dans les années
quatre-vingts, on pouvait encore lire dans les textes légaux et constitutionnels
comme dans les actes des hommes politiques flamands la volonté de ces derniers
de garder la haute main sur les relations extérieures grâce à la position quasi
inexpugnable du CVP dans le pouvoir central. Une dissymétrie avait été créée, en
vertu de laquelle les communautés pouvaient conclure des accords internationaux,
mais les régions ne le pouvaient pas. Y avait-il une volonté d'enfermer
l'autonomie wallonne dans une liberté surveillée, une sorte d'assignation à
résidence pour un peuple ? Où était-ce la séquelle d'un vieux rêve anversois
d'acheter des droits ou des facilités de navigation aux Hollandais en échange
d'eau wallonne ? Toujours est-il que les composantes de la majorité
gouvernementale se sont mises d'accord en août 1991 pour que la prochaine
réforme constitutionnelle mette les communautés et les régions sur pied
d'égalité en ce qui concerne les relations internationales. La Volksunie (qu'un
certain monopole du CVP à l'intérieur du monopole flamand exaspère) réclamait
récemment encore le vote de la loi d'application de la disposition existante
pour les communautés avant la fin de la législature. La promulgation de cette
loi aurait accéléré fortement la mise en vigueur de la compétence nouvelle des
régions, au lendemain de la réforme constitutionnelle promise. Elle n'aura pas
lieu avant les élections.
S'il ne faut pas
nécessairement y voir une intention dilatoire, il importe aux Wallons d'être
vigilants, tant pour le calendrier que pour le contenu de cette loi future. En
Belgique, une norme de haut niveau est sans effet jusqu'à ce que les mesures
d'applications soient prises. La Région wallonne et la Région bruxelloise
figurent dans la Constitution depuis 1970 et ont attendu, l'une dix ans, l'autre
vingt ans les lois d'applications qui leur ont permis d'exister.
De toute récente promesse
de réforme constitutionnelle concernant les relations internationales confirme
une évolution favorable des attitudes. Le rapport de Philippe Suinen, Directeur
général des Relations extérieures au Ministère de la Région wallonne, indique
une amélioration sensible des relations de travail entre le pouvoir central et
les régions dans la préparation des réunions internationales.
L'innovation par la loi
spéciale du 08.08.1988, quoique dans une formulation encore pleine de réserves,
d'une compétence régionale en matière de politique des débouchés et des
exportations, témoigne de cette évolution qui se traduira bientôt dans la
Constitution. Des accords de coopération ont pu être conclus entre la Région
wallonne et des régions autonomes et pays voisins ou lointains. D'autres part la
Région commence à être représentée dans des organisations internationales dont
l'objet est de compétence régionale exclusive et dont la Belgique est membre? Un
chemin important reste cependant à parcourir avant que les Régions soient seules
à s'exprimer (avec la réserve du respect de certains intérêts diplomatiques
nationaux, centrés essentiellement sur la sécurité de nos compatriotes) dans les
matières de leur compétence exclusive.
La coopération au
développement et l'agriculture sont des compétences qui ont été revendiquées
pour les régions au précédent congrès de l'Institut Jules Destrée et qui
figurent depuis dans les programmes politiques de partis francophones. La
gestion de ces matières entraîne des relations extérieures d'une aussi grande
importance pour la région que celle de l'eau ou de l'environnement qui lui
appartiennent déjà.
On sait la place que
l'agriculture a occupée et occupe encore dans la politique économique de la
communauté européenne. On sait aussi que l'agriculture wallonne a des
caractéristiques très différentes de celle du nord du pays et que la CEE confie
souvent aux pays-membres l'exécution de décisions communautaires. Les régions
belges n'ont en ce domaine qu'une compétence marginale. Il en résulte que c'est
le Ministère central de l'Agriculture qui participe aux décisions de la
politique agricole européenne et est chargé ensuite de les exécuter. Placée
comme chacun sait sous l'influence des puissances économiques de l'autre région,
l'action de ce ministère est ressentie comme portant un préjudice important aux
agriculteurs wallons. Une représentation directe de la Wallonie (conséquence
attendue de la régionalisation de la compétence) dans la préparation et la prise
des décisions européennes, est devenue urgente. L'importance exceptionnelle de
ces décisions dans les années de la réforme de la politique agricole commune ne
permet plus de différer ce transfert de compétence du pouvoir central aux
régions.
Dans le cadre d'une
politique étrangère générale (c'est-à-dire non sectorielle) conçue et décidée en
concertation par le gouvernement national, les régions et communautés, il est
important que les entités fédérées aient une entière liberté d'action au dehors
pour les politiques particulières ou sectorielles qui sont de leur compétence
exclusive. Il importe de même qu'elles jouissent d'une pleine autonomie de
représentation dans les organisations internationales lorsque celles-ci traitent
de sujets qui relèvent de ces politiques. La loi d'application de la disposition
constitutionnelle relative aux relations extérieures des régions et communautés
devra être explicite sur ces points.
Il conviendra aussi de
limiter au strict minimum les compétences concurrentes ou partagées, encore
fréquentes dans les lois spéciales, dans la mesure où elles permettent
l'ingérence dans des politiques sectorielles décentralisées (et la survie) de
ministères centraux inutiles. C'est notamment dans les relations entre la
Wallonie et l'Europe que cette ingérence est pernicieuse.

Un partenariat
CEE-Wallonie pour le développement intégré
Dans deux domaines qui
touchent de très près au "défi de l'éducation" (autrement dit à la modernisation
de la force de travail), la Wallonie aura besoin de relations très intenses avec
la Communauté européenne. IL s'agit de la politique de développement régional et
de la politique de recherche technologique. Il faut ajouter la politique
agricole commune, déjà citée.
La solidarité économique
interrégionale est morte en Belgique. Elle s'est considérablement renforcée, en
revanche, entre les régions d'Europe. Les régions qui souffrent de
désindustrialisation (c'est notre cas) et de sous-industrialisation sont aidées
par la Communauté et le seront sans doute davantage encore à l'avenir, car un
rassemblement de peuples dans un pouvoir politique commun ne peut se faire (et
se maintenir) que par la cohésion qui naît de la solidarité dans le
développement.
La très grave crise des
villes et des banlieues, d'une part, le développement rural intégré d'autre
part, appellent beaucoup plus qu'un subventionnement européen des
infrastructures. Cette approche traditionnelle est en train d'être remplacée par
un partenariat entre la CEE et les acteurs du développement de la région aidée,
seule méthode applicable d'ailleurs au facteur humain.
La Wallonie, par l'acuité
de ses problèmes urbains et les potentialités évidentes de ses terroirs, comme
par la dépression de son PIB par tête, peut se qualifier comme région pilote
pour de nombreuses actions européennes, à la condition de mériter la confiance
de la Commission par une valorisation exemplaire de l'aide. Cela suppose une
stratégie du développement urbain et rural définie avec précision et entièrement
modernisée dans une relation directe avec les services de la CEE. S'il est
évidemment nécessaire d'obtenir des quotas d'aide satisfaisants dans le cadre
des objectifs 2 (zones urbanisées en crise) et 5B (zones rurales), l'absence de
stratégie modernisée aurait pour résultat que les fonds européens obtenus
aillent en majorité aux dépenses d'infrastructures et au soutien d'industries de
type ancien. Les subsides européens et les dépenses régionales correspondantes
contribueraient alors fort peu à la modernisation structurelle de l'emploi. De
nombreuses régions en difficulté ont eu cette déception.
La situation présente de
la relation CEE-Wallonie, très évolutive depuis la réforme des fonds européens
structurels, laisse encore à désirer tant pour les délimitations des zones
aidées et les quotas (la France et la Grande Bretagne se sont mieux
débrouillées, et avec plus l'objectivité que la Belgique) que pour le contenu
des actions subsidiées, qui n'est que partiellement modernisé.

Haute technologie
européenne et initiative industrielle
En matière de recherche
technologique de pointe, dont dépendent pour la Wallonie la présence et la
croissance d'un secteur industriel de haute technologie, la grande industrie
wallonne a été très affaiblie par la longue dépression 1975-1985. Dans les
consortiums industriels qui se constituent autour du programme-cadre européen et
d'Eureka, l'industrie wallonne est insuffisamment présente. Cette lacune est
fort heureusement compensée par le dynamisme de nos équipiers universitaires,
dans bien des cas acceptés comme partenaires à défaut d'équipes industrielles.
Cette compensation doit nous réjouir sans nous rassurer, car la transposition
industrielle des résultats de la recherche européenne en Wallonie est mal
assurée en l'absence d'un partenaire industriel wallon. Ne faudrait-il pas
trouver, dans le cadre de la SRIW et des INVEST, le moyen de faire naître de
tels partenaires en aval des équipes universitaires, en cours de recherche,
voire après coup. La mise à l'étude d'une stratégie régionale d'initiative
industrielle en haute technologie européenne serait bienvenue.
Un meilleur couplage
entre la recherche européenne et le développement régional est l'un de ces
problèmes que nous partageons avec bien d'autres régions d'Europe et qui
interpelle directement la CEE depuis que celle-ci est en charge du retard
européen en technologie et simultanément des disparités régionales.
Coopération
transfrontalière et "tertiaire européen"
La coopération
transfrontalière avec les Régions françaises, les Länder allemands, le Limbourg
hollandais et le Grand Duché, (puis grâce au tunnel, avec le Kent), a pris
racine depuis bien des années déjà. Elle paraît appelée à un bond en avant lors
de l'effacement des frontières au 01.01.1993. L'Institut wallon a fait apport
aux travaux du réseau 10 de réflexions qui lui ont été utiles également lors
d'une étude effectuée à la demande du groupe MHAL (Maastricht, Hasselt, Aachen,
Liège), groupe qui associe les villes principales de l'EUREGIO, une association
transfrontalière de sous-régions fortement touchées par la crise industrielle et
que leur manque d'attractivité inquiéte. Cette étude révèle les potentialités
qui résulteront de la suppression des formalités douanières aux frontières pour
des sous-régions qui se sont trouvées jusqu'à présent en bout de ligne ou en
cul-de-sac de leur marché national. Cette analyse concerne en premier lieu les
centres d'éclatement de marchandises et de service après vente appartenant à des
groupes transnationaux et les professions tertiaires qui gravitent autour de ces
centres. Des sous-régions qui étaient périphériques deviennent centrales dans un
nord-ouest européen décloisonné et peuvent offrir des localisations très
attractives pour des centres technico-commercial. Le "tertiaire européen"
technico-commerciaux recèle des occasions d'emploi à terme rapproché,
pratiquement pour toutes les régions frontalières de Wallonie.
Une autre branche du
"tertiaire européen" en pleine expansion est constituée par les états-majors de
groupes, que la loi fiscale appelle centres de coordination. Ce tertiaire
européen "de commandement" pourra s'intéresser à Liège, point d'arrêt sur l'axe
Londres-Berlin, lorsque les affaires en direction de l'Est auront pris de
l'ampleur. Dans l'immédiat il concerne surtout d'autres régions de Wallonie dans
la mouvance de Bruxelles, vers lesquelles une déconcentration est amorcée ou
attendue.
L'étude évoque aussi
l'attirance des centres d'enseignement supérieur sur les centres de recherche de
groupe et les PME de haute technologie, dont Louvain-La-Neuve offre un exemple
probablement reproductible en plusieurs endroits de Wallonie.
La connaissance des
langues aura une place importante dans la préparation des jeunes et des
demandeurs d'emplois pour ces professions tertiaires. Une intense coopération
interrégionale en vue notamment du multilinguisme reste à organiser : une forme
très concrète, beaucoup moins institutionnelle que les précédentes et beaucoup
plus conviviale des relations de la Wallonie avec son contexte.

6. Conclusions
La crise de financement
de l'enseignement aura aidé les Wallons à voir sous un jour nouveau leurs
problèmes institutionnels en Belgique et en Europe, au moment où ils éprouvent
le caractère structurel de leur sous-emploi et où ils découvrent que les emplois
nouveaux, ceux pour lesquels il faut préparer la jeunesse et reconvertir les
chômeurs et les chômeuses, sont beaucoup plus "tertiaires" et beaucoup plus "high
tech" en moyenne que ceux de la génération précédente. Il faudra moderniser
l'offre de force de travail et cela coûtera beaucoup d'argent. Il faudra que les
Wallons apprennent les langues et cela coûtera beaucoup d'efforts.
Il faudra en outre
attirer ou susciter les créateurs d'emploi et cela exigera une stratégie bien
intégrée dans laquelle tous les organes et acteurs wallons, y compris le Forem
et les écoles, auront leur partition à jouer. Or les écoles dépendent de la
Communauté. Et la Communauté n'a pas d'argent. Et les autres actions de
développement régional seront tributaires d'une aide de la CEE, avec laquelle la
Région est privée de relations (agriculture) ou manque encore de relations
directes et reconnues. Cela paraissait inextricable, à première vue.
En faisant le tour de ces
problèmes, il est apparu cependant qu'aucun d'eux n'est sans issue, ou sans
arrangement acceptable pour les années qui viennent. Une sortie du sous-emploi
exigera certes des Wallons une forte cohésion dans leurs institutions
régionales, et celles-ci des qualités de rationalité, de cohérence, de stratégie
difficiles à réaliser dans la dispersion présente des attributions. Mais cette
dispersion n'est pas sans remède en dehors des solutions extrêmes. La Communauté
française pourra subsister, dotée ou non d'un pouvoir fiscal (mais plus
certainement dans le second cas), pourvu que les transferts de compétences, de
moyens financiers et des tâches administratives soient possibles par des accords
de coopération entre les régions wallonne et bruxelloise et la Communauté
française.
Certaines compétences
administratives nécessaires à la Wallonie devront être reprises du pouvoir
central, (ce qui exige une loi spéciale), d'autres de la Communauté (ce qui
pourra se faire aussi par une loi spéciale, mais également, après la réforme,
par des accords politiques successifs entre francophones).
Toutefois les deux
groupes linguistiques du pouvoir bruxellois, tant législatif qu'exécutif,
devront être autonomes pour la conclusion, la ratification et l'exécution des
accords en question.
En un premier temps, il
se dessine une préférence pour limiter la Communauté aux trois secteurs de
l'Enseignement, de la Recherche non appliquée, et de l'Audio-visuel. Mais dès
lors que ce partage serait devenu une affaire interne de la francophonie belge,
il ne serait plus indispensable de le solenniser, ni d'en débattre avec l'autre
communauté. Rien ne devrait le rendre définitif.
L'octroi aux régions
d'une compétence internationale devra se concrétiser dans de brefs délais, car
il est grand temps que la Wallonie se dote, en plein accord avec les services de
la CEE, d'un programme de développement intégré. Le tertiaire européen ne nous
attendra pas. D'autre part, personne n'aidera la Wallonie dans sa reconversion,
si ce n'est la CEE et le peuple wallon lui-même. C'est pourquoi le réseau 10
propose des solutions qui, croit-il, sont de nature à rassembler, non à diviser,
les Wallons. Elles permettront aussi d'intensifier les "partenariats", tant avec
Bruxelles qu'avec les autres régions d'Europe.

Complément au rapport du
réseau 10
La discussion du 4
octobre au sein de l'atelier 10 a apporté les précisions et compléments suivants
:
-
La modernisation de
la population active wallonne qui est nécessaire pour mettre fin au sous
emploi, sera coûteuse même si la rationalisation de l'éducation était
accomplie et si la participation des entreprises était adéquate, elle
demanderait des ressources publiques accrues en % du produit intérieur brut.
Les lois actuelles ne le permettent pas. Les institutions doivent être
réformées pour rendre ce financement possible.
-
La disposition des
compétences entre la Communauté française et la Région wallonne est
paralysante. Une plus grande unité ou unicité institutionnelle est
nécessaire pour une gestion rigoureuse des moyens en vue d'atteindre les
objectifs ambitieux qui ont été définis.
La troisième phase de la fédéralisation doit tenir compte de cette exigence
et la réaliser dans toute la mesure du possible.
Il faut abandonner l'idée désuette d'une symétrie entre les structures
flamandes et wallonnes.
Si des entités distinctes étaient maintenues, il conviendrait qu'un groupe
de travail wallon précise les objectifs et les moyens de la modernisation de
la force de travail wallonne et présente ses conclusions à un groupe mixte
Communauté à Région au niveau politique.
-
Le rapport a été
écrit avant les événements des deux dernières semaines. Il se situe donc
dans une perspective de troisième phase de la fédéralisation de la Belgique
susceptible de trouver un consensus analogue à celui qui existait dans le
gouvernement Martens VIII avant l'épisode des licences d'exportation
d'armes. L'accélération des surenchères flamandes a provoqué la crise
actuelle et se poursuivra peut être durant la campagne électorale. Il est
impossible de prédire si, lors des négociations prégouvernementales qui
suivront les élections, il sera encore possible ou opportun de déboucher sur
une solution apportant des retouches aux institutions Communauté et Région
dans l'esprit du mois de septembre.
-
fiscalité propre
des Communautés (initiation Moureaux-Dehaene)
-
accords
contractuels entre Communauté française, Région wallonne et Région
bruxelloise comportant, s'il y a lieu des transferts de compétences et
de moyens afin d'assurer l'unité des politiques de reconversion dans
tous les domaines où la dispersion des compétences paralyse l'action
(proposition Michel Quévit)
-
autonomie des
élus francophones de la Région bruxelloise et de la COCOF pour la
conclusion et la ratification de tels accords (proposition Michel Quévit).
L'atelier a envisagé
le cas où une continuation de la surenchère mettrait en cause la solidarité
nord-sud en matière de sécurité sociale. Il est d'avis que la rupture de
cette solidarité entraînerait la fin de la Belgique et une situation très
difficile pour la Wallonie, à laquelle cependant tous les Wallons doivent
être prêts à faire face .
-
L'atelier a aperçu la
nécessité de mieux connaître, en Wallonie, la problématique de l'équilibre
recettes - prestations de la sécurité sociale et de disposer de chiffres
plus sûrs dans un dialogue qui s'annonce dangereux.
-
La Wallonie, région
d'Europe, doit être mise en mesure de participer de façon autonome aux
décisions européennes dans les domaines de compétences régionales et de
négocier un partenariat avec le pouvoir européen. Inversement, toutes les
politiques européennes (et pas seulement les subsides de FEDER et de FEOGA)
doivent avoir une dimension régionale; car l'atténuation ou l'élimination
des disparités économiques régionales est un objectif majeur du pouvoir
européen.
L'idée d'un parlement européen bicaméral, complété par un Sénat des régions,
a été évoquée.
-
Une politique
wallonne de valorisation industrielle (notamment par la SRW et les INVEST)
des résultats des programmes européens de recherche (programme cadre et
Eureka) est nécessaire.
-
Proposition de
Jacques Hoyaux que l'atelier fait sienne :
La Région wallonne
participera, voire prendra l'initiative, d'une politique d'information et de
concertation sur les problèmes d'intérêt commun avec les Communautés de
Langue française d'Europe - Jura, Romandie, France, Val d'Aoste, Bruxelles -
et d'Amérique - Québec, Nouveau-Brunswick -. Il sera prioritairement
question d'une politique d'affirmation et de rayonnement de la langue
française.
(Octobre 1991)

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