Institut Destrée - The Destree Institute

               Accueil

Organisation

Recherche scientifique

Education permanente

Conseil

Action

Evénements

 

 

 

Deuxième congrès La Wallonie au Futur
1991 -
Le Défi de l'Education

Congrès permanent La Wallonie au futur - Index des congrès

 
 

Contribution au Congrès La Wallonie au Futur 1991

Benoît Dadoumont
Service Éducation pour la santé

   

Lorsqu'on analyse les messages d'éducation nutritionnelle diffusés dans nos écoles, il n'est pas rare de constater une certaine discordance entre le contenu des approches théoriques (leçons) et le contenu des approches plus pratiques (vente de collations, type de repas chauds servis).

En mars 1990, dans le cadre du concours "Je mange bien à l'école", le SPEOL (Secrétariat permanent de l'Enfant des Organisations liégeoises) nous livrait les premiers résultats de "l'enquête sur l'environnement nutritionnel des écoles de la province de Liège".

Certains chiffres de l'enquête sont très évocateurs quant à cette discordance entre les messages théoriques et les messages pratiques; prenons par exemple le cas des collations vendues au sein des écoles :

+/- 80 % des établissements qui vendent des collations proposent diverses pâtisseries industrielles du type gaufre - frangipane.

+/- 60 % proposent de la limonade et/ou cola

+/- 30 % proposent des fantaisies chocolatées (Raider, Mars, Bounty, ...)

+/- 25 % vendent des bonbons

+/- 20 % vendent des chips

- de 20 % proposent épisodiquement des fruits

- de 10 % proposent des yaourts.

Dans le même temps, nous constatons que la grande majorité de ces établissements prônent dans leurs activités théoriques d'éducation nutritionnelle, la réduction de consommation des pâtisseries, friandises chocolatées, de bonbons, de snacks salés, des limonades ainsi qu'une consommation journalière de fruits, de produits laitiers et d'eau.

Comment peut-on s'expliquer ce dérapage entre théorie et pratique ?

Diverses hypothèses peuvent être avancées ici mais si nous nous en tenons aux réponses qui nous sont données à cette question par les enseignants, il apparaît que pour la très grande majorité d'entre eux, c'est la confrontation avec un problème d'ordre financier qui les contraint à mettre théorie et pratique en discordance.

Payer le leasing de la photocopieuse, payer l'entrée à la piscine, financer le voyage de fin d'année en primaire et le voyage de fin d'études secondaires sont tant d'éléments qui peuvent pousser enseignants et direction à faire des compromis. Ne se permettant qu'une très petite marge bénéficiaire, les écoles doivent proposer des produits qui se vendent bien, si elles veulent pouvoir en tirer un profit suffisant.

Bien évidemment, il existe d'autres solutions pour alimenter "la caisse noire" des écoles (Fancy-fair et organisations diverses) mais elles semblent beaucoup plus difficiles à mettre en oeuvre (car elles impliquent d'autres personnes que les enseignants) et récoltent beaucoup moins souvent les suffrages des professeurs.

 

  • Dans le cadre du concours SPEOL, les conseillers méthodologiques qui étaient mis à disposition des écoles participantes ont essayé de répondre au problème en informant les enseignants sur les produits de qualité nutritionnelle acceptable, susceptibles d'être appréciés par les enfants, et ... achetés.

Donc, pas question de promouvoir uniquement des produits tels que tartines de fromage blanc maigre, yaourts nature et pommes mais bien d'élargir ce choix vers des produits de "qualité nutritionnelle intermédiaire", de faible coût et prisés par les enfants.

  • On demande de plus en plus aux enseignants de se poser comme spécialistes en toutes sortes de disciplines ainsi que de suppléer les parents dans diverse tâches; l'alimentation n'échappe pas à ce phénomène et on trouve bon nombre de professeurs assez désappointés face à des notions d'équilibre alimentaire que le seul bon sens ne suffit pas à débrouiller car tout comme leurs élèves, ils sont sans cesse confrontés à des informations tout à fait contradictoires sur ce thème - publicités commerciales, magazines féminins, revues soit disant spécialisées, informations scientifiques, ...)

Les conseillers méthodologiques du concours se sont donc attelés à, d'une part, aider les enseignants à y voir plus clair dans cet embrouillamini d'informations ainsi qu'à, d'autre part, sensibiliser les professeurs à l'importance de mettre leurs messages pratiques et théoriques en cohérence afin qu'à école, au moins, les élèves ne reçoivent qu'un seul type de message

 

Annexe :

Le modèle LECLERCQ (1) ou le processus de décision individuelle conduisant à l'adoption d'un nouveau comportement (ce modèle montre l'importance de rester cohérent dans nos messages).

Comment un individu décide-t-il de se comporter de telle ou de telle manière? Le professeur D. Leclercq décrit un modèle qui fait intervenir cinq facteurs de production d'une conduite.

 

1. La motivation :

C'est le premier élément du modèle. Elément essentiel car sans motivation, on ne passe pas à l'acte. Le degré de conscience des problèmes est ici capital.

Exemple : un enseignant qui n'a pas pris conscience de l'importance de l'éducation nutritionnelle pour ses élèves n'abordera pas correctement le problème.

2. La compétence :

C'est un élément nécessaire mais certainement pas suffisant pour aboutir au comportement souhaité.

Exemple : un enseignant peut être convaincu de l'intérêt d'un bon équilibre alimentaire pour ses élèves mais ne pas maîtriser suffisamment les règles de cet équilibre pour pouvoir les leur enseigner.

3. L'auto-évaluation :

C'est un élément essentiel du processus de production d'une conduite. Il faut s'estimer capable de résoudre un problème avant de se décider à agir. Il faut pouvoir s'auto-évaluer.

Exemple : un enseignant peut maîtriser les bases d'une alimentation correctement équilibrée mais s'en sentir incapable.

4. Les préférences

L'individu fait intervenir son système de valeurs; il décide d'agir sur base de ses connaissances, de ses compétences, les préférences reflètent la conscience de l'auto-responsabilité.

Exemple : un enseignant peut avoir d'autres priorités dans les matières qu'il enseigne dans sa classe.

5. La réalisation

Adopter un comportement dépend aussi de l'habileté, de l'aisance qu'a l'individu à réussir une performance.

Exemple : un enseignant maîtrisant mal la notion de pédagogie éprouvera de fréquentes difficultés à faire passer les messages vers ses élèves.

Selon le professeur Leclercq, ce modèle fonctionne comme un produit arithmétique : si l'un des facteurs est nul, le produit sera nul, donc le comportement ne se réalisera pas.

Lors de la construction d'un module de formation, il ne faudra jamais perdre de vue qu'il faut, pour arriver à la modification de comportements souhaitée, actionner tous les éléments considérés comme facteurs de production de la conduite.

 

Notes

(1) REGINSTER-HANNEUSE G., LECLERCQ D., Education : des objectifs ... dans L'école par le menu, et Actes du colloque de l'école nutritionnelle de santé publique, Paris, éd. ENSP, 1989..

  Ce texte est extrait de : QUEVIT Michel (sous la direction de), La Wallonie au Futur, Le défi de l'éducation, Actes du Congrès, Institut Jules Destrée, Charleroi, 1992.

 


 

 

L'Institut Destrée L'Institut Destrée,
ONG partenaire officiel de l'UNESCO (statut de consultation) et 
en statut consultatif spécial auprès du Conseil économique et social
des Nations Unies (ECOSOC) depuis 2012
  The Destree Institute The Destrée Institute,
NGO official partner of UNESCO (consultative status) and 
in Special consultative status with the United Nations Economic
and Social Council (ECOSOC) since 2012 

www.institut-destree.eu  -  www.institut-destree.org  -  www.wallonie-en-ligne.net   ©   Institut Destrée  -  The Destree Institute