Une Maison de
l'Urbanisme, maison du cadre de vie
Louis Leduc
Centre culturel du Brabant
wallon, Maison de l'Urbanisme
De la formation à la
participation à la participation formative
Une triple dynamique a donné lieu à la
création d'une Maison de l'Urbanisme en Brabant wallon.
Une première expérience de coordination
sous-régionale à l'occasion de l'enquête publique sur les plans de secteurs.
Campagne précédée de formations d'animateurs relais et de la constitution
d'outils pédagogiques (montages dias, dossiers...). Vaste opération (plus de 120
réunions locales et sous-régionales) menée avec l'ensemble des acteurs concernés
(économiques, sociaux, culturels, populations locales, vie associative...). Deux
campagnes menées par la Maison de la Culture de Nivelles à l'origine du Centre
culturel du Brabant wallon.
Une deuxième action dont il faut retenir
l'apport fut la réalisation de plusieurs cycles de séminaires sur la démocratie
participative au niveau communal.
La troisième dynamique est celle
enclenchée à l'occasion de l'année internationale de l'environnement au cours de
laquelle fut intégrée une campagne de sensibilisation à la participation à
l'aménagement du territoire. Opération liée à la relance des commissions
consultatives communales d'aménagement du territoire (CCAT) par le Ministre de
la Région wallonne Albert Liénard.
Une première formation à destination des
membres des CCAT a été organisée et une brochure éditée.
Suite à cette action avec les
participants, un programme d'action a été élaboré; il peut-être traduit comme
celui préfigurant une Maison de l'Urbanisme.
Des conventions avec le Ministère de la
Région wallonne ont appuyé ces initiatives. Parallèlement, 5 cycles de
formations similaires au premier, furent organisés dans 5 régions de Wallonie en
collaboration avec l'ERCAP- GSW, à la demande du Ministre.
Depuis deux saisons, un programme
d'activités a été élaboré à partir des propositions formulées par les
participants à cette action et le comité d'accompagnement créé pour mener à bien
le projet de Maison de l'Urbanisme.
Ce programme comprend différents types
d'initiatives dont nous prendrons pour exemple d'analyse, la saison 90/91
exposée ici sous forme synthétique.

* Midis de l'Urbanisme :
11.90 : Le Plan wallon de déchets
- 12.90 : l'Extension des zones industrielles en Brabant wallon -
01.91 : Sécurité routière d'Aménagement du territoire - 02.91 :
Etude des déplacements et aménagements des Espaces publics - 03.91 :
Quel avenir pour les Espaces publics ? - 04.91 : Sentiers et chemins
en Brabant wallon - 05.91 : Revitalisation des Centres urbains.
* Conférences-débats en soirée :
- 5 conférences-débats organisées en
collaboration avec ADESA sur "L'enquête publique de révision partielle
du plan de secteur concernant les zones industrielles" à Jodoigne,
Nivelles, Wavre, Ottignies-LLN, Tubize.
- 1 conférence-débat organisée en collaboration avec ADESA sur "La RN 204
Ittre-Rebecq"
- 2 conférences-débats organisées avec ADESA à Braine-le-Château, l'une sur
les sentiers et chemins, l'autre sur la traversée de
l'agglomération.
* Tables Rondes
En coproduction avec ADESA, deux tables
rondes ont été programmées, l'une sur le "Plan des déchets", l'autre
sur "l'extension des zones industrielles en Brabant wallon".
* Visites guidées
Une visite guidée a été organisée
concernant les Espaces publics et circulation routière - centres urbains et
traversées d'agglomération : Kessel-Lo, Rillaer, Aarschot, Westerlo.
* Journée Inter-CCAT
La Maison de l'Urbanisme a apporté sa
collaboration à l'organisation et l'animation de la journée Inter-CCAT
organisée à l'initiative du Ministre Albert Liénard le 4 mai à Perwez
* Formation
Des collaborations ont été apportées à
l'organisation et à la réalisation de deux cycles de formation. L'une
organisée par le Ciep-Moc et Vie Féminine (4 x 2 jours) et l'autre par le
PAC. Diverses interventions dans des formations organisées en Wallonie ont
également été réalisées à la demande de partenaires.
* Séminaires de formation
A destination des agents communaux de
l'AT du Brabant wallon, deux premiers séminaires ont été organisés avec leur
amicale, l'un sur les "sentiers et les chemins", l'autre sur les "études
d'incidences".
* Accompagnement de projets - Suivi de
dossiers
Réalisés à la demande de communes ou
associations de : Braine-le-Château, Chastre, La Hulpe, Archennes,
Court-St-Etienne, Ittre, Braine-l'Alleud, Rixensart, Genappe, Lasne...
* Interventions
Démarches d'aides conseils, de
renseignements pour : les CCAT, des communes, des associations, des
habitants.
* Dossiers
- des dossiers de synthèse ont été
publiés dans Espace Vie ;
- des dossiers plus conséquents ont été
réalisés, notamment sur les sentiers et chemins, les centres urbains et
traversées d'agglomération, les études d'incidences...
- une brochure a été éditée sur le thème "Pensez deux roues dans votre
commune".
* Permanences - infos - conseils
Le service fonctionne de manière
continue.

* Documentation
- Découpe de presse réalisée.
- Collecte et classement de documentation en cours.
* Espace-Vie
Périodique mensuel de 16 pages diffusé
à 1800 exemplaires soit 10 numéros parus cette saison. S'adresse aux
décideurs (élus locaux, administratifs), aux professionnels et aux membres
des CCAT et des associations.
Double objectif : assurer l'information
et promouvoir la réflexion sur les sujets d'actualité en Brabant wallon.
Trois facteurs contribuent de manière
déterminante à rendre possible cette importante action :
- Un comité d'accompagnement se
réunissant régulièrement (plus ou moins toutes les 3 semaines) et dont la
composition est largement pluraliste et pluridisciplinaire.
Il se compose tout à la fois d'experts (architectes, urbanistes...), de
représentants de la vie associative centrée sur les problématiques
d'aménagement du territoire et d'environnement, de délégués des mouvements
d'éducation permanente, de citoyens actifs, d'animateurs socio-culturels...
Personnes travaillant en toute indépendance avec pour préoccupation
l'intérêt collectif et soucieuses de prendre en considération tous les avis
et les différentes parties concernées par les problématiques abordées.
- Un outil d'information "Espace-vie".
Le moyen de communication qui permet d'informer largement les acteurs de
l'Aménagement du Territoire en Brabant wallon est une importante courroie de
transmission permettant de cerner l'actualité régionale, de sensibiliser aux
nouvelles perspectives et expériences, de bénéficier de l'apport de
réflexions et de propositions des différentes forces vives du Brabant
wallon.
- Le support de l'institution : le
Centre culturel du Brabant wallon (CCBW), à l'origine de cette initiative.
La conjugaison des préoccupations et missions d'information, d'éducation
permanente et de formation, d'une part, et les convergences en terme
d'actions en faveur de la qualité de la vie, d'autre part, en font la base
d'une coopération privilégiée en faveur de la promotion d'un bon aménagement
du territoire.
La conjugaison des moyens limités de part
et d'autre n'est pas une des moindres raisons contribuant aux bons résultats
enregistrés.

Un toit pour la Maison de l'Urbanisme.
Une autre donnée de l'actuelle réussite
de la dynamique entamée en Brabant wallon est la perspective d'un lieu, d'une
infrastructure comme support à l'action.
Plusieurs associations et services sont
directement intéressés à l'ouverture du bâtiment (ancien foyer populaire
jouxtant l'ancien dispensaire des usines Henricot où le CCBW est installé) qui
sera mis à disposition de la Maison de l'Urbanisme par la commune de
Court-Saint-Etienne avec l'aide du Ministère de la Région wallonne.
Une sous-région en mutation.
Une dernière donnée nous paraît
essentielle à relever. C'est celle liée aux caractéristiques du Brabant wallon.
Sous-région en forte expansion démographique, en développement économique, en
mutation sociologique, en tiraillement entre deux zones de forte attraction,
Bruxelles, d'une part, la Wallonie, d'autre part.
Brabant wallon dont les diversités
socio-culturelles sont soulignées, dont l'identité est en voie de création et
s'établit sur base de sa dynamique contemporaine, dont la reconnaissance en tant
qu'entité fait l'objet des enjeux politiques actuels de la Wallonie et de la
Belgique de demain dans l'avenir européen.

Des choix, des priorités...
Dans ce contexte, les choix en matière
d'aménagement du territoire prennent une importance particulière et la
concertation entre tous les partenaires devient une exigence pour répondre au
mieux aux besoins relevés et qui sont notamment :
- la préservation de nos sites naturels
et de leurs composantes (eau, flore, faune);
- la promotion d'une esthétique urbaine
et paysagère s'appuyant sur nos valeurs environnementales;
- la valorisation de notre patrimoine;
- la réalisation prioritaire d'une
politique de logement à destination des revenus moyens et modestes;
- la création ou le renforcement des
centres urbains afin de favoriser la reconnaissance d'un lieu rassembleur
dans les entités fusionnées;
- la définition d'une politique de
déplacement permettant une circulation ralentie dans les centres et
traversées d'agglomération;
- le frein au phénomène de conurbation
constatée au nord de l'arrondissement, en périphérie de la capitale;
- le renforcement d'une politique de
transports établissant des liaisons entre les différentes entités et
notamment dans l'axe est-ouest du Brabant wallon;
- l'intégration du développement
économique dans une politique d'aménagement privilégiant la mixité des
fonctions.
Des moyens...
Des moyens sont indispensables pour
concrétiser un choix :
- une politique foncière locale et
régionale efficace pour lutter contre la spéculation foncière effrénée
constatée;
- la constitution d'une charte, d'un
guide de l'aménagement du territoire en Brabant wallon;
- la structuration d'une concertation
permanente entre les forces vives de notre arrondissement (économique,
social, politique, culturel).
La Maison de l'Urbanisme est un lieu
privilégié pour contribuer au rassemblement des forces vives, au partenariat des
différents acteurs, pour atteindre l'objectif d'un aménagement du territoire
conçu avec et par ses acteurs locaux, privilégiant un développement intégré
s'appuyant sur un patrimoine bâti et des paysages mis en évidence.

Les enjeux de cette expérience
Les plus importants nous semblent ceux
liés à la détermination : - de nouveaux rapports entre les acteurs de
l'aménagement du territoire établis sur des bases de meilleure communication
réciproque, de dialogue, d'échange, de concertation, de nouvelles pratiques
politiques où la participation est considérée comme un élément de démocratie
culturelle communale, de démocratie participative. Il s'agit ici de sortir du
système traditionnel de relation de pouvoir autoritaire et/ou paternaliste
n'engendrant que des rapports dualistes, rapports de forces coûteux pour les
collectivités locales.
Il nous semble qu'une opportunité
"historique" est à saisir à l'occasion du décret "décentralisation-participation".
La décentralisation rencontre les desiderata des municipalistes wallons soucieux
de gérer avec plus d'autonomie et d'efficacité leur entité.
La participation répond aux
préoccupations de ceux qui sont soucieux d'oeuvrer avec les mouvements
associatifs pour renforcer leurs options. Double préoccupation qui répond aux
aspirations de tous ceux qui souhaitent contribuer à une politique communale
afin que, dans notre pays aussi, on opte pour plus de transparence et pour un
modèle de développement répondant non seulement aux intérêts particuliers mais
également à ceux de l'ensemble de la collectivité.
Le pari des Maisons de l'Urbanisme est
pareil à celui des Maisons de la Culture, des Foyers socio-culturels; il s'agit
de rompre avec les schémas de dualisation. C'est l'introduction du troisième
terme dans la dialectique sociale. Entre le service public et l'initiative
privée vient s'insérer comme tiers médian le concept d'utilité publique inscrit
dans l'action sociale et culturelle.
Si le bon aménagement du territoire
nécessite effectivement la participation de tous les acteurs concernés et ce y
compris de la population locale, l'enjeu est aussi de doter celle-ci de la
capacité de comprendre, de maîtriser et d'agir pour un développement qualitatif
de son cadre de vie prenant en considération l'intérêt collectif.
Pour ce faire, entre le pouvoir politique
légalement institué et les groupes de pression légitimement justifiés, il est
des outils à mettre en place au service des uns et des autres. Instruments
susceptibles de favoriser de nouveaux types de dialogues, de solutions, de faire
apparaître des "inédits possibles" rencontrant les diverses attentes.
Dans ce contexte, la Maison de
l'Urbanisme du Brabant wallon, partie d'une démarche de formation et
d'information descendante, est dans sa dynamique actuelle davantage orientée
vers une pratique favorisant l'échange interactif.
Le pari actuel est d'impliquer davantage
tous les acteurs dans le processus de développement pour que l'échange
d'information soit mutuellement formatif, enrichissant. Cette démarche n'empêche
pas de prolonger des formations spécifiques sous forme d'académies-ateliers ou
d'apprentissages acquis à partir d'élaboration de projets ou d'alternatives. Il
s'agit également de répondre à la demande renforcée d'information, de
documentation, d'échanges, de formation dans l'action.
Actuellement, la place des Maisons de
l'Urbanisme n'est guère officialisée. Elles ne bénéficient d'aucun statut légal.
Leur existence est précaire et leur champ de compétences trop réduit pour leur
permettre d'obtenir les moyens d'un fonctionnement efficace. Actuellement, ces
moyens, notamment pour la formation, sont extrêmement réduits.
Leur existence est diversement perçue :
- certains considèrent qu'elles
remplissent le rôle que devraient jouer les fonctionnaires d'un service
public;
- d'autres craignent qu'elles ne
détournent des moyens qui pourraient être attribués à la vie associative
organisée au sein de l'éducation permanente;
- d'autres encore imaginent qu'elles
sont à la solde des pouvoirs publics ou, par contre, le véhicule des options
de groupes de pression;
- il en est d'autres qui pourraient
souhaiter récupérer leur dynamique au profit d'intercommunales, de services
directement liés à un échevinat ou d'institutions privées agrées et
soutenues politiquement.
Il est donc particulièrement important
que leur rôle d'utilité publique soit reconnu par l'ensemble des partenaires
publics et privés.
Leur travail, lorsqu'il est mené de
manière intègre, promotionne la notion de démocratie culturelle, de démocratie
participative qui ne rencontre pas actuellement l'approbation de tous les
décideurs politiques mais qui peut la recevoir demain.
En Brabant wallon, la dynamique actuelle
bénéficie du crédit d'un nombre certain d'acteurs du monde associatif,
administratif, d'experts, de décideurs politiques malgré l'aspect "dérangeant"
de son action. Celle-ci semble bien perçue comme un élément utile au
développement intégré d'une sous-région en profonde mutation.

Autre problématique
Dans le contexte politique actuel, les
différentes préoccupations liées à l'aménagement du territoire, l'environnement,
le patrimoine, la protection de la nature, l'eau... sont dispersées, éclatées,
dépendantes de diverses compétences ministérielles.
Sur le terrain, ces problématiques se
rejoignent, s'entrecoupent et les habitants ne perçoivent pas nécessairement les
distinctions politiques qui ont justifié les séparations administratives.
Une Maison de l'Urbanisme, devrait en
conséquence être une maison du cadre de vie, offrant information, documentation,
aide-conseil, animation, formation... sur chacun de ces aspects. Cela
permettrait d'autre part de conjuguer les efforts financiers pour assurer le
minimum de moyens pour un fonctionnement démocratique et efficace.
Les Maisons de l'Urbanisme comme outil
de développement régional
Le statut qui sera accordé aux Maisons de
l'Urbanisme doit offrir un certain nombre de garanties sur :
- leur pluralisme,
- leur autonomie,
- leurs missions (comme décrit dans
l'expérience),
- leur champ de compétences (élargies à
l'ensemble des matières liées au cadre de vie),
- leur lien avec les autres acteurs de
l'aménagement du territoire, (décideurs publics, administratifs, monde
associatif, experts, habitants)...
- leurs moyens en personnel,
infrastructure, subsides, équipement...
Leur mission médiatrice et formatrice
doit encore être reconnue par leurs différents partenaires.
Des rôles d'information,
d'expérimentation, d'organisation d'échanges avec l'étranger devraient pouvoir
leur être confiés pour dynamiser les pratiques régionales et ouvrir des
perspectives nouvelles en matière de politique et d'action locales,
sous-régionales et régionales.
Leur autonomie et leur pluralisme
garantis, elles pourraient jouer un rôle important de concertation et de
coordination sous-régionales. Leur souplesse et leur ouverture les positionnent
comme un outil privilégié dans les sous-régions. Leur action doit être jugée
comme complémentaire.
Leur possible association avec une
institution culturelle peut favoriser l'émergence d'une politique de qualité de
la vie associant les aspects qualitatifs du cadre de vie (aménagement du
territoire, environnement, nature, patrimoine...) et ceux liés au milieu de vie
(identités, cultures, modes de développement...).
Les Maisons de l'Urbanisme en tant que
Maisons du Cadre de Vie, auront à s'affirmer comme lieu privilégié de la
concertation en aménagement du territoire et comme soutien à une dynamique
régionale de démocratie participative.

|