Les politiques
d'insertion des jeunes
Pierre Georis
Coordinateur du réseau AID,
Centre d'Information et d'Education populaire
(CIEP - MOC)
Un des faits
marquants dans la gestion de la crise durant les années 80 en
Wallonie et à Bruxelles a été la permanence du débat "formation-emploi".
Le mot-clé de ce débat a sans conteste été celui "d'insertion",
auquel on a le plus souvent joint le double qualificatif "sociale et
professionnelle". Lié à ce débat, on a vu se multiplier des
initiatives se positionnant de façon distincte des grands systèmes
s'adressant de longue date (au moins pour une partie de leurs
publics) aux demandeurs d'emploi : la formation professionnelle de
l'Onem (puis du Forem) et l'enseignement de promotion sociale.
Ce remue ménage n'a pas
été sans effets législatifs. Parmi ceux-ci, le décret de la Communauté française
sur l'insertion socio-professionnelle et la formation continuée (17 juillet
1987) et l'Arrêté de l'Exécutif de la communauté sur les "Entreprises
d'apprentissage professionnel" (23 janvier 1987).
Les lignes qui suivent
n'ont aucune ambition exhaustive. Elles cherchent plus modestement à donner au
lecteur quelques éléments lui permettant de repérer ce qui a été en débat (et
l'est généralement toujours à ce jour !) à propos de ce décret, ainsi que
quelques-uns des problèmes qu'il faudra affronter ces prochaines années en la
matière.
1. Les formations par le
travail
Aux formations
professionnelles de l'Onem puis du Forem se sont progressivement ajoutés les
dispositifs de "mise à niveau" et d'alphabétisation ("Lire et Ecrire") initiés
par le secteur de l'éducation permanente, souvent dans un esprit pluraliste,
ainsi que de nouvelles offres spécifiques de la part de l'enseignement de
promotion sociale.
La plupart des
dispositifs existants ne s'adressaient cependant qu'à des chômeurs complets
indemnisés, à l'exclusion de très nombreuses autres personnes sans emploi,
souvent usagères des Centres publics d'Aide sociale (CPAS)
(1). Lorsque des
dispositifs sont mis en place qui sont plus souvent destinés à ces derniers (par
exemple dans le cadre de la campagne d'alphabétisation de "Lire et Ecrire") ils
s'appuient sur la demande volontaire des personnes. Or, nous savons que la
préoccupation des plus exclus n'est généralement pas d'abord de se former : ils
veulent avoir un revenu, pour pouvoir manger tous les jours, et si possible
obtenir ce revenu grâce à un travail utile (parce que c'est plus digne que de
faire la file à différents guichets). Si on veut initier des formations pour un
public qui a de telles difficultés, il faut d'abord répondre à ses desiderata
concrets : le travail et le revenu. C'est pourquoi, de 1983 à 1986, se sont
multipliés les chantiers et ateliers de "formations par le travail".
Ces "formations par le
travail" regroupent une grande diversité de situations. Elles ont cependant
toutes pour caractéristique d'offrir d'abord du travail et au moins une petite
rémunération par l'intermédiaire d'une activité en atelier ou sur chantier, qui
s'adresse à un marché. On navigue ainsi du grand potager qui permet de vendre
quelques légumes ou du magasin de vêtements de seconde main au projet de
création d'emplois dans une entreprise coopérative (par exemple dans le secteur
de la construction), en passant par des formations professionnelles sur le mode
du compagnonnage (les stagiaires apprennent en mettant directement la main à la
pâte, en étant accompagnés dans tous leurs gestes par un professionnel du
métier. C'est un système qui, pour être efficace, n'autorise en vérité que des
petits groupes, de 3 à 5 personnes autour du technicien). La durée horaire de
l'opération (un temps plein, ou quelques heures par jour), et la plus ou moins
grande formalisation des projets pédagogiques contribuent à opérer des
distinctions. Avec cette nuance cependant que, plus on approche d'une opération
à temps plein, plus grande est la probabilité que l'horaire inclue de façon
explicite des séances de formation stricto sensu (le plus souvent de la mise à
niveau des connaissances).

2. Au sein des projets,
deux crises possibles peuvent être identifiées
Ces projets cherchent à
combiner tellement de contraintes à la fois qu'il n'est pas étonnant de les voir
traversés de crises. "Trouver ses marques" n'a rien d'évident. Deux crises
possibles peuvent être identifiées : d'une part, celle qui se joue autour de
l'équilibre à trouver entre le social et l'économico/pédagogique (accueille-t-on
n'importe qui pourvu qu'il soit en difficulté ou n'accueille-t-on parmi les
personnes en difficulté que celles qui font une démarche volontaire vers la
formation/insertion en renvoyant les autres vers des services sociaux plus aptes
à répondre à leurs demandes premières ? L'activité de production sert-elle un
objectif d'insertion professionnelle ou est-elle présente en soutien à une
action sociale, par exemple à l'égard de toxicomanes ?). L'autre crise possible
se joue autour de l'équilibre à trouver entre le socio/pédagogique et
l'économique (jusqu'où pousse-t-on la logique économique ? L'activité économique
est-elle au service d'un projet socio-pédagogique ou bien est-elle une fin en
soi, amenant parfois à renoncer à toute formation au profit de la rentabilité
d'une production ? Ce n'est pas si simple à trancher dès lors que l'on constate
que plus les stagiaires sont placés dans des contraintes qui s'apparentent à
celles de l'entreprise réelle, plus forte est leur motivation - ils apprécient
grandement qu'on fasse avec eux autre chose que du bricolage -, plus grande
aussi est la probabilité de réussite dans l'insertion professionnelle).
3.Entreprises
d'apprentissage professionnel (EAP) et Actions intégrées de Développement (AID)
Evidemment, ce
développement posait différents problèmes dont les moindres n'étaient pas : quel
est le statut des personnes engagées ? comment éviter la concurrence déloyale ?
quel est le statut des expériences ?
Pour les initiateurs, il
fallait régler ces problèmes par l'intermédiaire de la loi qui, au moins,
pourrait placer différents garde-fous. Mais il n'y a pas de loi qui naisse de
"génération spontanée" : il a fallu faire connaître le phénomène et proposer des
solutions.
Pour cela, certains ont
fait "cavalier seul"; d'autres se sont regroupés. L'origine des pouvoirs
organisateurs était différente selon les cas : la formulation des logiques
d'action pouvait donc différer très sensiblement, même si les dispositifs et
résultats concrets sont fort semblables.
La concurrence et les
logiques différentes ont fait émerger une série de termes. L'un de ceux-ci,
"Entreprise d'apprentissage professionnel" (EAP), a eu plus de succès et s'est
donc relativement imposé, mais il coexiste avec une série d'autres ("actions
intégrées de développement AID."; école de production; entreprise intermédiaire;
asbl d'insertion; ...).
De façon générale, la
distinction entre les deux termes les plus utilisés aujourd'hui s'explique par
la mécanique de cette époque :
-
"l'entreprise
d'apprentissage professionnel" (EAP) apparaît dans les milieux de l'aide
sociale. On y réfléchit d'abord dans les termes de "l'alternative au travail
social traditionnel". La formation n'est qu'induite de cette réflexion. Mais
dans les faits, des opérations d'aide sociale acquièrent des réflexes
d'éducation permanente;
-
"l'action intégrée de
développement" (AID) apparaît dans un milieu d'éducation permanente
(2). On
cherche d'abord à offrir une formation adaptée aux publics les plus en
difficulté. Et on en arrive à devoir acquérir aussi, de façon induite, des
réflexes de travail social.
Ces deux mondes (le
travail social et l'éducation permanente) s'ignoraient très largement. Le
cloisonnement a généré des dispositifs distincts. Détail piquant : chacun des
deux mondes à développé son dispositif en l'accompagnant d'un discours à propos
d'un décloisonnement entre lui-même et le monde économique. Celui-ci se fait
très difficilement. Tandis que sur le terrain s'est opéré un réel
décloisonnement, en définitive peu mis en évidence par les acteurs eux-mêmes,
entre le travail social et l'éducation permanente.

4. Un débat très confus
Toujours est-il qu'avant
toute législation sur la question, le terme EAP a eu le plus gros succès
d'utilisation. Mais il a été utilisé dans des sens fort différents, qui ont
entraîné beaucoup de confusion.
Dans beaucoup d'esprit en
effet, EAP recouvre l'ensemble des formations par le travail. En soi, ce n'est
pas une difficulté, sauf si on veut formuler des propositions légales concrètes.
Il n'y a en effet presque
rien de commun entre les problèmes :
-
de ceux qui ont pour
projet d'abord de créer quelques emplois pour des personnes en difficulté
(la question est celle de la mobilisation de capitaux dans un milieu qui
n'en a guère);
-
de ceux qui créent
des "ateliers éducatifs" dans lesquels les gens peuvent venir travailler
quelques heures par jour ou par semaine, en gagnant un peu d'argent de
poche, le temps de "faire le point", se ressaisir; (ainsi qu'on en trouve
dans les maisons d'accueil et maisons maternelles);
-
de ceux qui appuient
des formations sur des activités économiques concrètes.
En fait, les "formations
par le travail" se situent dans un espace délimité par trois pôles : le revenu,
le travail/emploi, la formation. Toutes les initiatives ne se situent pas au
même endroit dans cet espace. L'expérience a montré que tous ceux (y compris en
son temps l'auteur de cet article) qui ont abordé la question ont commis la même
erreur initiale, celle de croire qu'un seul dispositif législatif permettrait de
résoudre les problèmes de cet espace, alors qu'on peut y repérer trois
sous-ensembles spécifiques : les solutions qu'on dégage pour l'un ne conviennent
pas à l'autre. Il a fallu que la réflexion collective puisse se décanter pendant
plus d'une année (en 1984-1985) pour que ses participants admettent ce fait. En
1986, la Fondation Roi Baudouin a proposé le résultat des travaux de décantation
: "EAP" ne désignait plus qu'un des trois sous-ensembles des "formations par le
travail", celui qui est guidé prioritairement par une logique de formation.
C'est dans cette optique que quelques scénarios étaient proposés qui avaient
pour principal mérite de montrer qu'il était possible de rencontrer les
contraintes relevées (statut des jeunes; concurrence loyale; ...). Bien entendu,
il n'y a pas lieu de faire preuve d'un fétichisme particulier à l'égard de ces
scénarios : toute autre proposition qui rencontrerait les mêmes contraintes est
admissible (3).
Il s'avère cependant que,
malgré le travail de clarification, une série de nuances n'ont été intégrées que
par quelques spécialistes : quand il s'agit de débattre des EAP, la confusion
reste souvent totale : les uns désignent toujours l'ensemble des "formations par
le travail" et font un grand mélange de considérations contradictoires; les
autres désignent le sous-ensemble "formation" (ce sera notre cas); mais d'autres
encore désignent les "ateliers éducatifs" qu'ils appellent, avec une nuance très
péjorative, "ateliers occupationnels". Ces derniers vont dénoncer l'EAP "qui ne
résout rien, retient les gens dans la misère, contribue à aménager la société
duale en aidant les gens à s'y adapter". Là-dessus, au titre d'alternative, ils
vont construire un dispositif qui ressemble furieusement à la définition de l'EAP-formation,
tout en lui donnant un autre nom !
C'est dire que dans tous
les débats sur les EAP, on n'est jamais loin de la situation surréaliste; des
discours se croisent sans se rencontrer, parce qu'ils ne parlent pas de la même
chose; mais des gens vont s'invectiver violemment parce qu'ils utilisent les
mêmes mots.
A la confusion générale
du vocabulaire, s'est rapidement ajoutée une seconde difficulté. Si l'on voulait
rencontrer la question, cela nécessitait des décisions prises à trois niveaux de
pouvoir en même temps : Etat central (sécurité sociale des jeunes, et
attribution de personnels d'encadrement); communautés (reconnaissance de la
formation); régions (soutien à l'investissement, et plus généralement à
l'économie sociale).
Seule la Communauté
française a vraiment manifesté sa volonté de faire un pas en direction des EAP.
Dès lors, la législation de la communauté, en 1987, a généré un étonnant
paradoxe : au moment où la situation des EAP s'est améliorée (elles peuvent être
reconnues), elle s'est aussi dégradée (plus rien ne se décidait du côté de l'Etat
central pour l'octroi de personnel dans le cadre du TCT, ni pour le
renouvellement de personnel temporaire de type CST, et aucune alternative
n'apparaît. Certaines EAP bénéficient de subventions du Fonds social européen.
Mais celles-ci sont étroitement conditionnées au fait que - préalablement - il y
a aide de l'Etat belge, l'aide européenne ne pouvant en aucun cas dépasser
l'aide belge. La non décision de l'Etat central en matière d'aide en personnel a
pour effet ricochet de pénaliser aussi très substantiellement l'EAP auprès du
Fonds social européen, qui diminue d'autant le montant de son intervention).
(Notons par ailleurs, que le décret PRIME voté par le Conseil régional wallon en
1990 a ajouté au désastre et à la confusion. Mais ceci est un "saut dans le
temps").
On a ainsi vu, dans
certains cas, la petite subvention de fonctionnement allouée par la Communauté
française dans le cadre d'un agrément ne servir qu'à financer la fermeture d'un
centre.
On ne peut reprocher à la
communauté le fait que les autres niveaux de pouvoir n'ont pas pris leurs
responsabilités. Il n'empêche, à la base, surtout en 1987-1988, la confusion est
à nouveau totale : comme la situation s'est objectivement dégradée, le seul
pouvoir qui a fait un pas se retrouve victime de la mauvaise humeur générale.
C'est un nouveau paradoxe.

5. La législation de
1987
La législation de la
Communauté française se compose de deux volets : un décret sur l'insertion
socio-professionnelle et la formation continuée donne un cadre pour une série de
dispositif relevant de la Communauté française. Complémentairement, un arrêté de
l'Exécutif définit ce qu'il faut entendre par "Entreprise d'apprentissage
professionnel" et les modalités de reconnaissance.
Si le fait de légiférer
sur l'EAP est une avancée philosophique importante, la définition que donne de
l'EAP la Communauté française est tellement restrictive qu'elle pose de nombreux
problèmes nouveaux.
Ainsi :
-
l'EAP ne peut
s'adresser qu'à des jeunes sans allocation de chômage (pourquoi ne pas
appeler EAP tout dispositif "lourd" d'une trentaine d'heures/semaine
utilisant la méthode de la formation par le travail, indépendamment du
statut administratif de la personne concernée ? Une série d'initiatives sont
des EAP qui n'ont pas le droit de s'appeler EAP simplement parce qu'elles
s'adressent majoritairement à des chômeurs indemnisés !);
-
l'EAP est une
initiative privée (du coup, des initiatives de CPAS ne peuvent être
reconnues);
-
l'EAP s'adresse à la
tranche d'âge des 18-25 (pourquoi de plus âgés, sortant de prison, ou
relevant de maisons d'accueil ne peuvent-ils pas avoir accès à cette formule
d'insertion ?);
-
Ces difficultés
obligent la plupart des dispositifs mixtes à se désigner d'un autre nom
(quitte d'ailleurs à se faire reconnaître comme EAP pour une partie du
public seulement). Ce fait est à l'origine de la survivance, après l'arrêté
définissant l'EAP, de l'appellation AID;
-
enfin, la communauté
a mis à disposition quelques moyens financiers. Mais ceux-ci restent
faibles. Aussi arrive-t-il que des dispositifs qui sont des EAP au sens de
la définition de la communauté n'introduisent même pas de demande
d'agrément, considérant qu'il s'agit d'un travail administratif
disproportionné aux résultats qu'on peut en escompter.
Quant aux autres niveaux
de pouvoirs :
-
l'Etat central a pris
le 31 décembre 1986 un désolant arrêté permettant de limiter la sécurité
sociale des jeunes impliqués dans des structures EAP aux allocations
familiales et à l'assurance maladie-invalidité. Les EAP ayant fait appel à
cette possibilité se comptent sur les doigts de la main;
-
ces dernières années,
la Région wallonne s'est caractérisée par son total immobilisme dans le
domaine du soutien réel à l'économie sociale (hormis l'installation d'un
Conseil wallon de l'Economie sociale, comme conseil consultatif), puis par
sa contribution active au démantèlement du secteur en 1990 (suppression des
TCT, qui n'ont été que partiellement remplacés par du personnel PRIME, plus
coûteux pour les promoteurs).
En tout état de cause, le
fait de la législation n'a pas supprimé les malentendus entre les asbl et leur
environnement. On en pointera trois (ce n'est pas exhaustif) :
-
La confusion
conceptuelle continue à régner (EAP, AID, asbl d'insertion et autres
dénominations) alors qu'il serait simple de réaménager le décret dans le
sens d'une plus grande clarté en désignant par exemple du nom de EAP toutes
les structures de "formation par le travail" fonctionnant à temps plein, et
s'adressant à des demandeurs d'emploi peu qualifiés, indépendamment de leur
statut administratif : chômeurs indemnisés ou usagers de CPAS.
-
Tous les projets
intéressants ne sont pas agréés dans le cadre du décret bien loin de là ! La
Communauté française est pauvre : les nouvelles subventions sont distribuées
très chichement.
-
Pour mémoire, des
malentendus subsistent avec les administrations dont les critères
correspondent souvent assez peu avec les réalités vécues sur le terrain avec
ces publics difficiles.

6. Bilan de l'opération
Le bilan de l'opération
est-il bon ? Comment ne pas manifester d'abord de la perplexité, tant les
problèmes restent nombreux. On se gardera bien cependant de jeter la pierre à un
unique acteur : on a vu que les difficultés actuelles sont sans doute d'abord le
résultat d'un "effet de système", combinant tout à la fois une grande dispersion
des compétences et une absence de coordination entre les niveaux du pouvoir, un
phénomène social d'une grande complexité à saisir (ce qui favorise les
malentendus) et la pratique du lobbying sur ce terrrain-là aussi.
Reformulons à cet égard
quelques propositions générales en guise de conclusion :
-
Il y a beaucoup
d'incertitudes à propos de l'évolution du marché de l'emploi :
retrouverons-nous de l'emploi comme auparavant ? N'en retrouverons-nous plus
jamais autant ? Le partage du temps de travail est-il praticable ? Quels
créneaux faut-il investiguer ? Personne ne peut répondre à ces questions.
De toute évidence, il
n'y a pas de "recette-miracle" pour la sortie de crise. Cela signifie que,
pour l'instant, la priorité dans l'action des pouvoirs publics devrait être
de réserver des espaces de libertés, dans lesquels puissent s'expérimenter
une série de choses.
-
Occuper un espace de
liberté ne signifie pas que l'on puisse y faire tout et n'importe quoi. En
d'autres termes, il ne faut pas laisser le champ libre à des escrocs. Il
faut des balises clairement définies, qui rencontrent divers ordres de
contraintes. Les deux principales contraintes semblent être :
A. il faut un statut convenable pour les jeunes engagés;
B. il faut éviter la concurrence déloyale.
Donc, il faut des
moyens publics qui permettent l'expérimentation, mais dans un champ balisé.
-
Les asbl d'insertion
ne doivent pas être des ghettos pour marginaux. Les jeunes engagés ne
doivent pas s'y retrouver comme dans un cul-de-sac. Cela impose que des
concertations, et si possible des collaborations puissent s'organiser au
niveau local ou sous-régional. Le principe-guide de ces concertations est
celui de l'itinéraire. Il faut que quiconque formule un projet de formation
ou d'emploi ait la possibilité de le réussir parce que toutes les
passerelles existent entre les différents dispositifs (un analphabète doit
pouvoir réussir un projet de qualification professionnelle).
Alphabétisation, formations par le travail, remises à niveau, formations
finalisées (par un diplôme ou un emploi) sont autant de dispositifs qui ont
leur pertinence. Il importe que ces différents pôles se coordonnent de façon
interne (si on trouve important que l'analphabète des villes ait accès à une
formation, il n'y a pas de raison de trouver cela moins important pour
l'analphabète des campagnes). Ensuite, les interlocuteurs de chacun des
pôles doivent se rencontrer pour aménager toutes les passerelles utiles.
(Octobre 1991)
Notes
(1)
Depuis 1987, les formations professionnelles de l'Office national de l'Emploi (Onem)
puis du Forem, se sont, heureusement, ouvertes à tous les demandeurs d'emploi.
Cependant l'offre de formation ne suit pas la demande : les postes disponibles
sont d'un niveau généralement inaccessible pour les moins formés de nos
concitoyens. Si un "bouchon" législatif a sauté, la situation concrète des
usagers des CPAS à l'égard des formations de l'Onem/Forem n'a pas encore
vraiment changé.
(2) En l'occurrence, AID désigne un réseau de 12 centres de
formation dans les pouvoirs organisateurs desquels est impliqué le Centre
d'Information et d'Education populaire, service d'éducation permanente du
Mouvement ouvrier chrétien. Les pouvoirs organisateurs associent souvent
d'autres partenaires au niveau local.
(3) Développement exhaustif dans Pierre GEORIS, Les
entreprises d'apprentissage professionnel, Fondation Roi Baudouin,
Bruxelles, 1986.
Commentaire plus général sur la pédagogie des "formations par le travail" :
Pierre GEORIS, Myriam POELMAN, Jeunes et Exclusion, Fondation Roi
Baudouin, Bruxelles, 1988.

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