Les Femmes prévoyantes
socialistes et l'éducation permanente
Claire
LEGRAND
Secrétaire des Femmes
prévoyantes socialistes de Charleroi
C'est vers le
milieu des années 20 que se développe et s'unifie un mouvement
mutualiste, né de la solidarité révélée indispensable entre les
travailleurs,au sortir d'un 19è siècle de misère et d'exploitation.
Petit à petit les femmes jouent un rôle spécifique dans ce mouvement
de solidarité. Les femmes et les enfants sont les premières victimes
de la misère, et des femmes s'organisent, apportent une aide
matérielle, des conseils, une éducation sanitaire aux mères de
famille. De cette organisation, de ce rassemblement naîtront "Les
Femmes prévoyantes socialistes", mutualité socialiste féminine, avec
ses avantages, ses services.
L'aspect éducation des
femmes, les FPS vont le poursuivre tout au long de leurs 60 années d'existence,
dans différents domaines: création de services tel que le planning familial,
création d'une école de promotion sociale... C'est ainsi que tout naturellement
lorsque le décret du 8 avril 1976, organisant l'éducation permanente a été voté,
notre mouvement a été reconnu. Et plus particulièrement en son chapitre 2 qui
concerne précisément l'éducation permanente dans les milieux de travailleurs. Il
faut dire en effet que si les travailleurs ne vivent plus dans la détresse du
début du siècle, il n'en demeure pas moins qu'ils restent une classe socialement
défavorisée et que c'est au sein de celle-ci que les FPS ont toujours poursuivi
leur travail.
Actuellement, l'action
d'éducation permanente a pris différents visages. Certain services demeurent et
prennent même de l'extension; le centre de planning, l'école de
coupe-couture-cuisine. Les avantages évoluent avec leur temps: dictionnaire aux
enfants prévoyants, livre sur la ménopause aux FPS après un certain nombre
d'années d'affiliation. Des actions plus ponctuelles sont menées; formation à la
santé, formation d'animateurs relais contraception, formation d'animatrices
ménopause, cours d'alphabétisation...

La crise n'a rien arrangé
pour les couches défavorisées de notre société et plus particulièrement pour les
femmes. Si, une évolution a eu lieu: les petites filles vont à l'école comme les
garçons, les femmes ont les mêmes droits salariaux que les hommes... on se rend
compte que dans la réalité des faits les femmes sont encore toujours les plus
mal loties. Les orientations scolaires pour les filles les mènent tout droit au
chômage. Si elles ont légalement le droit de faire un métier "d'homme", ce n'est
pas évident du tout de suivre une formation dans un milieu uniquement masculin.
Et surtout, c'est à la sortie des études ou de l'apprentissage que toutes les
portes se ferment.
D'un "salaire d'appoint",
la femme passe à une "allocation de chômage d'appoint". Les mentalités se
durcissent: "il y a déjà si peu de travail, laissez-le aux hommes". Et les
hommes se lancent dans de nouveaux créneaux dans des formations d'avenir:
l'informatique,... alors que plus que jamais les femmes sont piégées dans des
formations où les débouchés, de faibles deviennent inexistants.
Les Femmes prévoyantes
socialistes réagissent:
-
des formations aux
nouvelles technologies sont organisées. Le but: ne pas laisser un domaine
d'avenir uniquement aux mains des hommes, donner des outils de base pour
accéder à une formation plus importante;
-
des formations de
base pour les chômeuses se mettent en place. Origine: le désarroi, la
culpabilisation, la déqualification des femmes qui se retrouvent au chômage.
Le but: remettre ces femmes "sur les rails", leur ouvrir des portes.
Tout ceci c'est pour
aujourd'hui mais demain et plus tard? La formation des femmes devrait prendre
une place de plus en plus importante, pour que la société future soit une
société où femmes et hommes prennent ensemble les responsabilités de celle-ci,
pour que les lois qui veulent concrétiser cette égalité de la femme puissent
être intégrées dans les mentalités.
Cette formation, vu
l'évolution actuelle des techniques, ne pourra se limiter à une formation de
base, bien que celle- ci soit primordiale. Il faudra qu'elle puisse se
poursuivre tout au long de la vie pour permettre à la femme non seulement
d'évoluer au niveau de son travail mais aussi pour la faire accéder à une
meilleure conscience du monde, de la société dans laquelle elle vit, de la place
qu'elle y occupe, des enjeux politiques, économiques et sociaux. Pour qu'elle
puisse devenir "une citoyenne active" dans tous les sens du terme, de la société
de demain. Bien entendu, les FPS veulent oeuvrer dans ce sens.
Que notre monde de demain
soit une société de "plein emploi", de "loisirs à mi-temps" ou qu'elle suive une
voie encore bien différente, la formation permanente sera un moyen privilégié
d'accès à la vie culturelle, sociale, politique.
(Octobre 1987)

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