Rapport de l'atelier n°9
:
L'enjeu des médias et des industries culturelles
Rapporteur:
Robert WANGERMEE
Deux types de
communications ont été faites, les unes décrivant la situation
actuelle, les autres se référant à un contexte de développement
technologique à l'échelon européen, voire mondial. Le tout, bien
qu'apparemment disparate, peut être situé dans une perspective
unique afin d'évaluer correctement l'enjeu des médias et des
industries culturelles et, surtout, la politique que la Wallonie
devrait suivre en cette matière.
Le dossier est assurément
complexe: on assiste, en effet, dans le domaine de la communication, à une
interpénétration de la technique et du contenu des messages, de l'économique et
du culturel, des divers niveaux de prise de décision qui s'échelonnent du local
au mondial en passant par le régional, le communautaire, le national et
l'européen.
Comment la Wallonie
doit-elle se situer dans cet environnement mouvant, complexe, et qui, à première
vue en tout cas, la dépasse?
1. Elle doit sans aucun
doute veiller à préserver ses acquis.
Dans le contexte
concurrentiel que le câble a introduit en télévision, la RTBF a certainement une
carte importante à jouer en faisant valoir ses spécificités, ses originalités
par rapport à l'invasion étrangère, notamment commerciale.
Ce qui la distingue de
ses concurrents, c'est sa production propre et, à l'intérieur de celle-ci, les
Centres wallons de la RTBF remplissent et doivent continuer à remplir un rôle
important.
Créateurs d'emplois (+ de
600 en Wallonie), créateurs de flux économiques et commerciaux, créateurs de
culture, ils constituent certainement un atout pour la Wallonie de demain. Grâce
à eux, l'information relative aux régions est traitée par les journalistes du
cru (et les sondages réalisés, notamment à La Louvière et à Charleroi, montrent
que cette politique est payante puisque c'est essentiellement vers la RTBF et
non vers RTL-TVi que le public de ces deux villes se tourne pour obtenir son
information). Grâce à eux, la réalisation de programmes d'intérêt national n'est
pas laissée à Bruxelles. La production d'origine wallonne compte pour beaucoup
dans la grille des programmes de la RTBF.
Autre élément non
négligeable dans les activités du Service public: sa participation à la chaîne
francophone par satellite TV5. Jusqu'à présent distribués uniquement en Europe,
les programmes de TV5 devraient bientôt être repris au Canada et en Afrique. La
RTBF, tout comme les chaînes françaises, suisses et canadiennes, dispose d'une
soirée par semaine sur TV5, soirée alimentée par ses productions propres et
notamment par les réalisations des Centres Régionaux. Les activités de la RTBF
en Wallonie trouvent ainsi un débouché mondial.
Les télévisions locales
et communautaires doivent jouer un rôle complémentaire à celui de la RTBF;
télévisions de participation, de proximité, elles doivent s'orienter vers
l'information locale et aussi vers des activités éducatives. Ces missions leur
donnent leur originalité et leur raison d'être dans le contexte concurrentiel du
câble. En situation précaire, institutionnellement et financièrement, elles
doivent éviter l'écueil de leur participation éventuelle à des chaînes
régionales à vocation commerciale, ce qui dénaturerait leur fonction.
2. Mais
la Wallonie ne doit pas se contenter de préserver ses acquis; elle doit aussi
faire preuve de dynamisme, d'esprit d'entreprise. Si elle veut se montrer
audacieuse, elle peut jouer un rôle dans le développement futur des industries
culturelles.
L'utilisation du câble
est restée embryonnaire; il y a là un potentiel énorme non encore exploité et
qui devrait l'être dans les années futures. La télévision payante implique
l'usage de décodeurs. Pourquoi ne pas développer un décodeur wallon qui pourrait
servir à la future chaîne à péage et, pourquoi pas, conquérir ensuite les
marchés mondiaux. La BD, le dessin animé, le cinéma devraient se développer et
déborder de nos frontières.
Mais dans tous ces
domaines où la technique, l'économie et le culturel sont étroitement mêlés, des
interventions publiques sont nécessaires, non pas sous forme de subventions mais
par la mise en place de mécanismes d'incitation aux investissements culturels.
Des exemples existent à
l'étranger et notamment en France (abris fiscaux, fonds communs d'investissement
dans les produits culturels, organismes donnant des garanties en cas d'emprunts
destinés à des activités culturelles,...).
Ces mécanismes sont
nécessaires chez nous, à la fois pour promouvoir les activités culturelles et
pour développer les activités industrielles qui y sont liées. Leur création
nécessite une politique volontariste qui dans le contexte institutionnel de la
Belgique relève de différents pouvoirs. Cette complexité n'est pas faite pour
aider la Wallonie, mais elle ne peut être une justification à une inaction qui
situerait notre région en dehors des marchés européens et mondiaux.
(Octobre 1987)

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