Rapport de l'atelier 6 :
Politiques culturelles et interculturelles.
Rapporteur
Jacques DUBOIS
1. En
matière de politique culturelle, comment lever la toile de
fond confuse qui risque d'embrumer l'espace même des possibles
wallons? Comment définir les rapports avec Bruxelles, avec la
francophonie, avec Paris, avec l'Europe, avec le monde? Comment
avancer, c'est-à-dire changer?
Plusieurs constats
s'imposent d'emblée:
-
la Wallonie
revendique une plus grande autonomie, celle qui lui est nécessaire pour
assumer sa culture et construire son image;
-
l'identité wallonne
est un fait vécu et ressenti mais il ne s'est pas mué encore en conscience
collective;
-
il est urgent de
consolider deux espaces culturels, l'Europe et la francophonie;
-
les Wallons doivent
renoncer à un folklore désuet et prendre en charge une histoire spécifique,
significative, en rupture avec les clichés usés des manuels;
-
il faut tenter de
définir une politique culturelle qui, prenant appui sur un inventaire
méthodique des ressources, mettrait en oeuvre des structures et des outils
adéquats, tels une grande université ouverte favorable à la mobilité des
étudiants et des enseignants, une presse spécifique, un système de
reconnaissance et de promotion des créateurs;
-
il s'agit enfin de ne
pas donner dans le romantisme: la culture massifiée est un fait, la culture
élitaire en est un autre: cherchons un espace d'entente, tirons parti de ce
qui existe.

2. Propositions:
2.1. Développement de
pratiques qui mettent en évidence et fassent fructifier la culture plurielle des
Wallons, qui est leur richesse: celle des régions, celle des immigrations, celle
des groupes sociaux, celle de l'opposition zones industrielles - zones rurales.
2.2. Développement d'une
culture réellement démocratique conforme aux aspirations d'un peuple,
c'est-à-dire une culture ouverte à tous, appelant à la participation et à la
création, nourrie des traditions locales. Cette culture se voudrait dépassement
du clivage qui se creuse aujourd'hui entre culture d'élite et culture massifiée
et "multinationale".
2.3. Création d'un
véritable espace culturel wallon fondé en premier lieu sur des collaborations et
échanges entre sous-régions, provinces, villes, etc..., et en second lieu sur la
constitution de réseaux tantôt informels tantôt institués comme celui qui
tisserait des liens étroits entre les différents centres universitaires qui vont
de Mons à Liège, en troisième lieu sur la consolidation d'organismes porteurs
tels que le CACEF, l'Institut Jules Destrée, les organisations du mouvement
ouvrier, etc...
2.4. Rôle de base et rôle
moteur dévolus à l'Ecole dans le développement: familiarisation hâtive des
jeunes avec les spécificités culturelles et avec la création, renforcement à cet
égard de la formation des instituteurs, initiation à l'histoire - une histoire à
écrire - et aux langues et dialectes parlés en Wallonie.
2.5. Avec la perspective
d'une ouverture plus intense aux créations et aux créateurs de partout,
reconnaissance active des artistes appartenant à la communauté de Wallonie et
soutien apporté à toutes les formes d'innovation sur fond d'imaginaire
spécifique. Dans le même mouvement, place de plus en plus grande et attention de
plus en plus aiguë accordées à la dimension productive et industrielle de la
culture.
2.6. Action dialectique
du va-et-vient entre grandes et petites institutions. D'un côté, renforcer et
sauvegarder la régionalisation de la RTBF, de l'autre, favoriser le pluralisme
audiovisuel et spécialement les télévisions communautaires. D'un côté, prévoir
un grand ensemble théâtral, de l'autre, défendre et soutenir les dramatiques
locales, etc...
2.7. Pouvoir accru des
Wallons sur les instances culturelles et éducationnelles qui les expriment et
les représentent et, pour l'immédiat, rééquilibrage méthodique de leur présence
dans les différents lieux de décisions de la Communauté française (commissions,
jurys et autres) où ils sont la plupart du temps minoritaires.
(Octobre 1987)

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