Rapport de l'atelier n°4
:
La formation de demain
Rapporteur
Christine CAVOY
Nos travaux
de ce jour m'amènent à vous présenter une synthèse des différentes
idées qui ont été débattues hier dans mon atelier et qui pourraient
être les lignes maîtresses à soutenir au niveau de la formation de
demain dans notre Wallonie.
Nous passons actuellement
d'une société de production, en fait de reproduction, à une société de création
dans laquelle les matières premières stratégiques sont désormais l'intelligence
et l'innovation. Cette transformation est fondamentale et elle postule comme
condition évidente, une grande liberté de réflexion et d'expression.
L'exploitation des
possibilités accrues par la technologie passe par l'épanouissement de ce que
l'homme possède de plus précieux et qui constitue sa personnalité. C'est un
point fondamental et toute formation à la prospective doit être centrée sur cet
élément. Il semble donc nécessaire de repérer, de reconnaître les compétences
culturelles utiles au citoyen pour les années à venir, d'envisager aussi les
prochaines décennies avec de nouvelles valeurs dans une société où l'emploi ne
sera plus la porte prioritaire, mais où l'individu devra être un humain,
c'est-à-dire un agent de réflexion, de participation et de production.
Notre enseignement
évitera donc des spécialisations trop hâtives chez les jeunes mais leur
apportera plutôt une connaissance et une découverte d'eux-mêmes. La formation de
demain exigera donc une formation permanente de l'homme, concept qui englobe sa
formation totale selon un processus qui va se poursuivre la vie durant. Elle
doit impliquer un système complet cohérent et intégré, offrant les moyens
propres à répondre aux aspirations d'ordre éducatif et culturel de chaque
individu et conforme surtout à ses facultés. Elle doit s'instituer comme
accompagnement des transformations technologiques et sociales de notre société
Forcée ou contrainte,
l'école doit s'ouvrir aux réalités du monde extérieur afin d'éviter un
analphabétisme technologique. Elle se rend compte de la nécessité de placer le
jeune en situation de travail, d'autant plus que les moyens financiers
diminueront et qu'il ne sera donc plus possible d'investir en moyens
hypersophistiqués pour assurer des formations spécifiques.

Il nous paraît donc utile
de préconiser la formation professionnelle en alternance dans les dernières
années des écoles techniques et professionnelles. Une nécessité s'impose: créer
une relation très suivie enseignement-entreprise qui, allant plus loin que ce
qui existe actuellement, permettrait d'affiner les profils professionnels,
permettrait une participation aux crédits et aux biens d'équipement, permettrait
surtout d'assurer la formation continuée de nos enseignants et d'élaborer une
politique cohérente de formation.
L'examen de l'évolution
de notre système d'enseignement montre actuellement un cloisonnement vertical et
horizontal de nos formations, en fait, un cloisonnement de la formation en
général. On favorise ainsi un élitisme vertical en même temps que se développe
un élitisme horizontal.
Comme chaque filière à
besoin d'usagers pour se développer, obtenir des moyens, nourrir ceux qui
l'entretiennent, justifier son existence et sa spécificité, elle va consacrer
une part importante de son énergie à convaincre qu'elle est plus performante. Il
est donc nécessaire dès à présent, de modifier l'opinion qui présente comme
inévitable les restrictions budgétaires à opérer dans le domaine de
l'enseignement et de la formation, alors que partout des doubles et des triples
emplois se multiplient.
Au niveau universitaire,
face aux défis de tous genre que nous avons à relever, nous appelons à un
regroupement des énergies et à une collaboration collective entre centres de
recherches et institutions d'enseignement.
A l'heure de
l'informatique, force est de constater que bon nombre de nos concitoyens sont
encore incapables de lire et d'écrire, c'est-à-dire incapables de mener une vie
sociale, économique et culturelle compatible avec leur environnement. Veillons
donc à ne pas les exclure de nos concepts de formation et permettons leur ainsi
d'assurer leur propre développement ainsi que celui de leur communauté. Des
outils et des techniques d'individualisation des apprentissages doivent être
créés par la recherche pédagogique et mis en pratique par la formation initiale
et continuée des enseignants.
Cela implique la prise en
considération d'un triple rôle au niveau du formateur; en effet, l'appropriation
du savoir par l'élève passe nécessairement par la maîtrise des moyens qui
servent à le véhiculer. Un rôle de médiateur avec une relation d'assistance
technique nous paraît donc primordial. Le deuxième type de rôle serait un rôle
d'assistant pédagogique au niveau d'une guidance et d'une orientation: les
formateurs se trouveraient être ainsi les garants de la cohérence interne de la
formation de chaque individu. Enfin un rôle d'assistant au niveau des aptitudes.
En effet, l'enseignant a toujours sa place, et sûrement maintenant plus que
jamais: il doit proposer à l'élève l'image d'une personne à laquelle il aura
tendance à s'identifier, avec laquelle il va tisser un réseau de relations
affectives au moins aussi importantes que les connaissances qu'il en retirera.
Le pari est sur l'Homme.
Exigeons que les questions relatives à la formation à tous les niveaux pour tous
les publics soient abordées en milieux pluriels, non cloisonnés, non partisans.
Il nous faut construire des stratégies, sans renier nos valeurs et je crois que
là est notre rôle actuellement.
Je remercie vivement tous
les membres de l'atelier qui, hier, nous ont donné de belles notions
d'humanisme.
(Octobre 1987)

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