Discours
Michel
QUEVIT
Rapporteur général du Congrès
Mesdames,
Messieurs,
Il me revient à présenter
et à vous dire ce que nous allons faire pendant deux jours. Mais je voudrais au
départ, remercier ici les deux cents contributeurs qui nous ont fait part de
leur réflexion.
Cela fait maintenant un
an que l'idée a été lancée. Nous n'aurions jamais cru, il y a un an, Monsieur
Moreau en particulier, que nous aurions pu réunir deux cents personnes venant
des milieux scientifiques, des milieux de l'enseignement, des milieux
économiques, des milieux sociaux, des milieux culturels qui disent "oui, nous
sommes preneurs avec vous, d'une réflexion fondamentale sur la Wallonie" et je
voudrais ici les remercier.
Je voudrais aussi remercier le comité scientifique que nous avons créé: pas
moins de seize rapporteurs qui déjà ont accepté de faire une première synthèse
qui devrait servir à nos travaux. Deux cents contributeurs, seize rapporteurs,
deux mille cinq cents pages à la base de nos travaux, c'est vous dire qu'il y a
de la matière. Mais pourquoi?
Jacques Delors disait
récemment, à propos de l'Europe "Sans réfléchir sur nous-mêmes, sans
réfléchir sur notre modèle de société, nous n'existerons plus". Et bien
cette phrase revêt une signification particulière et plus grande encore si elle
est appliquée à la Wallonie et elle convient bien à nos travaux. Notre congrès
est un congrès de réflexion. Il n'est pas directement orienté vers l'action et
c'est chose rare, en ces temps, mais attention, il devra préparer car, en vous
présentant ce congrès, je vous annonce déjà que nous allons vous mettre à
contribution après ce congrès, puisque notre ambition, au terme de ces deux
jours, c'est de dégager des grands axes d'action, des grands axes de réflexion
qui doivent, en fait, se traduire par des actions concrètes et peut-être,
l'Institut Jules Destrée vous donnera-t-il un autre rendez-vous plus tard.
Mais trois raisons
peuvent à mon sens expliquer pourquoi nous prenons, aujourd'hui, le temps de la
réflexion.
La première part d'une
constatation. La constatation que la Wallonie, qui fut pourtant le siège de la
première révolution industrielle, forte d'un passé prestigieux, n'est pas le
lieu où émerge spontanément ce qu'on appelle aujourd'hui la troisième révolution
industrielle. Et ce fait nous interpelle tous.
Si nous sommes d'accord
de reconnaître que l'évolution de la société est étroitement liée aux
modifications du système de significations et de valeurs qui régit toute les
manifestation de sa culture - au sens très large du terme -, cette question
fondamentale appelle une réflexion.
La Wallonie peut-elle,
pourra-t-elle, rompre avec les paradigmes de la société ancienne, dans le but
non seulement de s'adapter aux mutations économiques, technologiques,
culturelles, sociales de la société nouvelle? Mais notre ambition va au-delà,
elle a pour but de les précéder, de les maîtriser, de les réorienter.
La seconde raison qui
appelle à la réflexion est plus directement liée aux propos de Jacques Delors. A
savoir, l'ouverture d'un grand marché unifié européen déjà à l'horizon de 1992.
Cette perspective nouvelle de l'espace européen modifiera, nous en sommes sûrs,
bien des comportements sociétaux. Et le moment est important de nous interroger
sur la place et le rôle que peut prendre une région comme la Wallonie dans ce
nouvel espace économique et politique qui est aussi un espace de vie, un espace
de société.
C'est la troisième raison
et non la moins fondamentale qui nous réunit aujourd'hui. La Wallonie est certes
une région importante qui veut s'affirmer dans l'Europe de demain. Mais elle est
aussi une collectivité humaine avec son histoire, ses particularités et sa vie
en société. C'est pour cela que notre démarche d'aujourd'hui sera une démarche
difficile et non banale. Nous voulons dans nos travaux poursuivre ce que
j'appellerai une démarche d'enracinement. Nous voulons, à partir de la vie
quotidienne en Wallonie, cerner quel sera son devenir économique, social,
scientifique, culturel, institutionnel. Mais notre démarche se voudra, se veut
aussi être une démarche d'universalité. Nous voulons d'emblée placer l'examen de
cette question à la dimension des mutations de la société contemporaine.
Et c'est pour cela que
nous avons voulu que nos travaux s'effectuent en deux phases. Dans une première
phase, nous aurons deux carrefours. Deux carrefours dont le but est justement de
montrer combien les problèmes sont liés les uns aux autres dans une société,
donc de montrer combien la démarche multidisciplinaire est fondamentale si l'on
veut comprendre et bâtir le devenir de cette société.
Ces deux carrefours: l'un
traitera du thème économie-culture , et le second carrefour traitera d'un
problème non moins important: technologie-formation-société.
Il est heureux de voir
que ces deux thèmes en fait ont traversé toutes les contributions que nous avons
reçues et c'est pour cela que nous avons voulu d'emblée vous inviter à ce type
de réflexion avant d'entamer, je dirais, une réflexion plus spécifique, plus
fine, sur une série de domaines.
Pas moins, je vous
disais, de quatorze ateliers. Chaque atelier aura un rapporteur. Je remercie
aussi les personnes qui ont accepté d'être le secrétaire de ces ateliers. Nous
avons souhaité qu'il y ait des secrétaires parce que nous sommes convaincus que
nous aurons à aller puiser, dans le futur, dans l'après-congrès, dans son suivi,
dans l'ensemble des réflexions, qu'avec, à côté des contributeurs, vous,
participants, allez nos apporter.
Ces ateliers, brièvement,
je vous en donne les titres: devenir économique de la Wallonie, développement
des technologies de la recherche, l'avenir de l'enseignement, la formation de
demain, les nouvelles valeurs et l'identité culturelle dans la société wallonne,
les politiques culturelles et interculturelles, les pratiques culturelles, le
patrimoine culturel et la mémoire collective, l'enjeu des médias et des
industries culturelles, emploi-travail et solidarité, logement et qualité de la
vie, la Wallonie dans l'Europe et le monde, l'agriculture et le développement
rural, les relations sociales. C'est dire que nous n'avons oublié aucun aspect
de la société de demain.
Après le travail en
atelier, les rapporteurs seront chargés de faire une synthèse sur ce qui est
apparu comme tout à fait déterminant dans des axes possibles à la fois de
réflexion et d'action.
Enfin, il m'appartiendra,
bien modestement, de tirer les conclusions de ce congrès et les grandes lignes
de notre réflexion. Nous entendrons ensuite l'allocution du Ministre Wathelet et
de Monsieur Riccardo Petrella que certains connaissent, qui est directeur du
programme F.A.S.T. de la Communauté. Le programme F.A.S.T. c'est un programme
qui était chargé, depuis sept ans, d'évaluer, au niveau de la Communauté
européenne, quels seraient les retombées et le futur de la science et de la
technologie. Ce programme a réuni pas moins de sept cents chercheurs sur
l'ensemble de la Communauté et Monsieur Pétrella a accepté de nous donner une
synthèse de ses travaux dans la perspective de l'objectif de notre congrès.
Voilà Mesdames,
Messieurs, ce que nous allons faire: je vous invite à aller au travail...
(Octobre 1987)

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