Discours
Louis AOUST
Directeur du Cabinet de
Philippe Monfils
Ministre-Président de l'Exécutif de la Communauté française
Monsieur le
Bourgmestre, Mesdames, Messieurs les Parlementaires et les
Mandataires provinciaux et communaux, Mesdames, Messieurs,
Il est sans doute
significatif que l'intitulé de ce congrès que nous ouvrons aujourd'hui adopte un
mode plus affirmatif qu'interrogatif. Le fait de la Wallonie et l'existence
authentifiée de notre communauté culturelle une fois confirmée dans la
conscience de chacun, il nous appartient en effet, de mettre ces réalités en
perspective, de doter la Communauté française d'un programme cohérent d'action
par lequel elle confirmera dans les années à venir, la place qui lui revient sur
la scène internationale. Qu'il s'agisse de production économique,
d'enseignement, ou de culture, il nous faut répondre, dès aujourd'hui, aux
exigences de notre ère technologique sous peine de nous voir refuser demain la
voie au chapitre des communications et des échanges internationaux. Dans
l'élaboration d'un tel programme, nos universités sont invitées à mettre en
commun leur potentiel intellectuel et leur faculté d'analyse, en collaboration
avec la Communauté française. Déjà, à la faveur de contacts internationaux, ou
de sommets comme ceux des chefs d'Etat de la francophonie de Versailles ou de
Québec, cette synergie produit ses effets. Ainsi, par exemple, les universités
participent aux négociations lancées par la Communauté française dans
l'informatisation des circuits du livre et des ressources des bibliothèques.
Parallèlement, la
Communauté française a établi avec la France, par la jonction entre les systèmes
Electre et Osiris une étroite collaboration en vue de l'informatisation des
circuits du livre, éditeurs et libraires qui devrait s'étendre (cette
informatisation) à l'ensemble des pays francophones créant ainsi un véritable
marché commun du livre de langue française.
Le dialogue
international, dimension fondamentale du concept d'entreprise culturelle est
aussi le vecteur des projets que la Communauté française défend dans le réseau
de la culture et des communications du Sommet.
Et c'est pourquoi, nous
voulons co-financer l'extension de TV5 à toute l'aire francophone en augmentant
notre participation de vingt à quarante millions. Du côté des industries de la
langue, la Communauté française a collaboré aux études d'opportunité et de mise
en marché des produits technologiques du traitement de la langue. Des bourses de
travail, offertes par la Communauté française permettront de former des
ingénieurs linguistes selon les exigences universitaires les plus élevées. Nos
compétences dans les projets interdisciplinaires de pointe pourront également se
voir confirmées par la prise en charge dans le secteur de l'information
scientifique et technique, dans le secteur de la promotion active du français,
dans les échanges juridiques et financiers internationaux. La constitution de
banques de données élémentaires et terminologiques, ainsi que la diffusion de
références fondamentales dans les pays du Sud, sont autant de missions qui
situent la Communauté française à la pointe des communications de demain.
L'ouverture sur la scène
internationale ne doit, cependant pas faire perdre de vue les besoins et les
voeux exprimés dans nos villes même, pour une instance exécutive à la fois plus
proche, plus simple et plus adaptée. Le nouveau décret pour la conservation et
la gestion du patrimoine vise tout particulièrement ces objectifs puisqu'il
simplifie les procédures de classement en tenant compte de la collaboration du
mécénat privé. De même la clarté est le maître mot du décret de l'audio-visuel
où chaque instance publique ou privée joue désormais un rôle propre, avec des
compétences nettement définies, pour assurer au sein du réseau médiatique de
demain la cohérence et le sens des responsabilités. Car il importe en 1987
d'insister sur une responsabilité accrue des institutions culturelles pour une
saine gestion de leurs moyens. Sans exclure le principe du subside classique, il
faut veiller à ne pas muer ce principe en assistance pure et simple. La sublime
gratuité de l'art ne signifie pas l'irresponsabilité dans la pratique
socio-économique qu'est la culture.
C'est ainsi notamment ,
qu'a été revue la situation du théâtre dans la Communauté française, car
l'examen qui en a été fait, avec l'aide du Conseil supérieur de l'Art dramatique
avait pour premier critère le service au public. Et pour répondre aux attentes
les plus variées, l'activité de nos théâtres a été redéfinie en fonction d'un
équilibre des genres et des répertoires. Par ailleurs, des conventions sont
établies, ou en voie de l'être, entre la Communauté française et les
institutions culturelles afin de procéder à un apurement définitif de leur
déficit. En souscrivant à cette procédure, ces organismes se reconnaissent
entreprises culturelles responsables.
Il ne paraît pas inutile
d'évoquer au début de ce congrès la Communauté française tant dans son
intégration à l'intérieur de la francophonie mondiale que dans l'authenticité de
sa décentralisation. Mais il faut que l'on y insiste aussi sur ce que la
Wallonie au futur s'inscrit déjà dans une entité plus vaste de quelque deux
cents millions de francophones, entité plus vaste qui prend conscience de son
existence et qui se veut concrètement un espace économique.
Que l'on y insiste sur ce
que les conférences des chefs d'Etat et de gouvernement des pays qui ont en
commun le français soulignent avec force combien le devenir du français est lié
au développement technologique et économique des Etats. Que l'on y insiste sur
ce que la Communauté française de Belgique s'y montre attentive à la nécessité
de créer, notamment un espace financier francophone pour favoriser l'utilisation
de la langue française dans les échanges financiers. Que l'on y insiste qu'elle
attache aussi, par exemple, beaucoup d'importance aux questions de l'arbitrage
international, Nord-Sud notamment, et plus particulièrement de l'arbitrage
commercial international. Que l'on y insiste encore les nombreuses raisons
concrètes que l'on a de considérer que la Francophonie est plus qu'un symbole et
qu'elle est désormais un enjeu économique qui interpelle les entreprises
wallonnes.
Finalement, évoquer ici
la Communauté française telle qu'elle est en train de se déterminer dans son
existence politique nouvelle, c'est dire combien vous avez eu raison de vouloir
un paradigme nouveau pour la Wallonie de demain. Et ce paradigme nouveau, il
faut le chercher au présent dans la diversité de l'activité car, paraphrasant
Goethe, je crois pouvoir dire que l'on ne devient que ce que l'on est déjà et
qu'il faut d'abord être pour devenir, et qu'il faut vivre intensément la
Wallonie d'aujourd'hui si on veut qu'elle s'inscrive bien dans le futur.
Je vous remercie
(Octobre 1987)

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