Avec
la généralisation des congés payés en 1936, le tourisme devient un secteur
économique promis à une expansion considérable. À cette époque, deux
associations existent en Belgique : le Touring Club de Belgique (TCB) au
niveau national, et, en Flandre, le Vlaamse Toeristenbond (VTB), qui,
fondé au début des années vingt, compte plus de 100.000 membres.
Afin
de veiller à la sauvegarde des intérêts touristiques de la Wallonie et de
faciliter à ses membres la visite des beautés naturelles et artistiques de
la Wallonie et de la France et les voyages en pays étrangers, des
cheminots affiliés à l’Association wallonne du Personnel de l’État fondent
le Touring Club wallon ou Tourisme wallon (on trouve les deux noms pour
désigner cette asbl). Un groupement organisant des voyages (Tourista) y est
affilié. Il existe aussi un Tourisme en Wallonie, avec lequel le TCW n’a
aucun lien.
Créée à l’initiative de François Simon, qui était agent de voyages, l’Association
touristique de Wallonie n’a aucune activité avant l’occupation. Ses statuts
datent en effet du 2 mai 1940 et paraissent au Moniteur le lendemain
de l’invasion du pays. Son Conseil d’administration est présidé par Maurice
Bologne et est composé d’Alfred Heine, vice-président, Achille Berger,
trésorier-général, Adrien Bouvet, Albert Dechesne ainsi que de François
Simon, secrétaire-général, Jules Debay, Gaston Harvent et Jules Van Binst.
Elle vise à favoriser le développement du tourisme en Wallonie et à
être le pendant du VTB. Ses statuts prévoient également que seuls les
Wallons peuvent faire partie du Conseil d’administration (Art. 6), mesure
qui figurait déjà dans les statuts du TCW. Aucune rivalité n’existe entre
ces deux associations, Berger et Debay étant membres fondateurs du TCW et
Van Binst, président du Tourista.
Si
l’ATW se refuse à toute activité durant la guerre, elle sert à plusieurs
reprises de paravent à la Wallonie libre, où l’on retrouve, dès 1940,
Bologne, Simon, Berger et Bouvet. C’est notamment sous le couvert d’une
réunion de l’ATW que se tient à Namur le conseil général de la Wallonie
libre le 14 avril 1941. Ajoutons que l’ATW n’a pas participé à la rédaction
du rapport intitulé La Question du tourisme en Wallonie examiné par
le Conseil économique wallon clandestin avant décembre 1943.
Conscient des coups portés au patrimoine touristique wallon par quatre
années de guerre, Berger ranime l’ATW dès janvier 1945. Pris par d’autres
tâches, Bologne et Simon lui en laissent la direction effective jusqu’à
l’élection d’Adrien Bouvet à la présidence en juillet 1945. L’ATW obtient
non sans peine le soutien de l’Association wallonne du Personnel des
Services publics, car les cheminots défendent le TCW. Par contre, l’ATW ne
peut se faire admettre comme Commission du Tourisme de l’Association pour le
Progrès intellectuel et artistique de la Wallonie car celle-ci estime que le
tourisme n’est pas une activité culturelle, mais économique et qu’elle ne
peut soutenir qu’une Commission s’intéressant de manière scientifique à la
protection de la nature. Des contacts pris en vue d’investir le Touring Club
de Belgique n’aboutissent pas, sans que l’on puisse déterminer si le refus
vient du TCB ou de l’ATW.
Se
plaignant de la désaffection de la Wallonie libre, l’ATW, présidée par Émile
Foucart, organise des voyages et des conférences. Elle édite, à partir de
janvier 1946, un bulletin intitulé Relais de Wallonie. Consacrant des
articles aux métiers d’art, aux villes et attractions touristiques des
provinces wallonnes, ce périodique paraît sous différents titres jusqu’en
1962. Maurice Bologne, Émile Lempereur, Félix Rousseau, Émile Chermanne,
Paul Caso et bien d’autres y collaborent occasionnellement. Georges Sion en
est rédacteur en chef de 1949 à 1950. Les statuts de l’association sont
revus le 8 décembre 1946 et le 3 juillet 1949. Ces modifications reflètent
les distances que prend l’ATW vis-à-vis du mouvement politique wallon.
L’article 6 disparaît. Le but est de favoriser le développement en
Belgique, et tout spécialement en Wallonie, du tourisme sous toutes ses
formes. Dans le même temps, un rapprochement s’opère avec le Touring
Club de Belgique. Souhaitant aussi un rapprochement avec l’APIAW, l’ATW se
joint au Congrès national wallon et au Conseil économique wallon pour
organiser six journées d’études consacrées au tourisme en 1952 et 1953. À
l’approche de l’Exposition universelle de Bruxelles (1958), l’ATW multiplie
les démarches afin d’amener les touristes étrangers vers la Wallonie. L’ATW
se rapproche à cette occasion de la Fondation Plisnier naissante.
Recrutant
l’essentiel de ses membres à Bruxelles et dans le Brabant wallon ainsi qu’à
Charleroi, où une section existe dès 1948 et édite son propre bulletin de
1955 à 1958, l’ATW ne parviendra jamais à s’implanter dans toute la
Wallonie, la région liégeoise restant particulièrement sourde à ses appels.
La section de Charleroi qui est présidée par Leroi et dont le secrétaire est
Jean Deterville n’aura plus d’activité après 1962. Il est vrai que, dans le
même temps, la Fondation Charles Plisnier crée une Commission du Patrimoine
et du Tourisme.
Corinne Godefroid