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Cette section propose la liste des notices contenues sur le cédérom de l'Encyclopédie du Mouvement wallon. Les notices accessibles en ligne sont datées : le carré jaune indique les mises à jour, le carré rouge signale les nouvelles notices.

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Presse d’action wallonne

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PIRON Maurice

   

Né à Liège le 23 mars 1914,
décédé à Liège le 24 février 1986

Sa vie, Maurice Piron la consacre à la défense de la littérature et des dialectes wallons. Étudiant en humanités gréco-latines à l’Athénée de Liège, docteur en philologie romane de l’Université de Liège en 1938 (sa thèse portait sur L’œuvre poétique et dramatique d’Henri Simon), élève assistant de Jean Haust (1936-1938), chercheur FNRS (1939-1944), primé par l’Académie de Belgique pour une monographie consacrée à Tchantchès, il réalise un stage à l’École pratique des Hautes Études à Paris (1946). Maurice Piron assume la direction de La Vie wallonne au moment de sa renaissance d’après-guerre (1947-1948) mais doit passer rapidement le témoin en raison de la charge académique de plus en plus lourde qu’il remplit à l’Université de Gand depuis 1946 ; chargé de cours dès la fin de la guerre, professeur invité à la Sorbonne (1950), il est nommé professeur à l’Université de Gand, en 1950. Outre deux années comme professeur à l’Université officielle du Congo belge et du Rwanda-Urundi (1957-1959), il y enseigne la philologie française et la dialectologie wallonne jusqu’en 1963. Cette année-là, il est invité à l’Université de Laval, au Québec, et, parallèlement, devient professeur à l’Université de Liège où il inaugure un cours de littérature québécoise. Professeur à l’Université de Laval (Québec, 1967-1970), professeur à l’Université de la Sorbonne (Paris, 1976-1979), titulaire de la chaire de philologie et de littérature françaises à l’Université de Liège, il est admis à l’éméritat en 1976. C’est à lui que l’Université de Liège doit la création du Centre d’Études québécoises.

Déjà membre de la Société de Langue et de Littérature wallonnes (1949, président en 1980-1981), membre (1960) puis vice-directeur de l’Académie de Langue et de Littérature françaises (1961-1967), membre de la Commission de Toponymie et de Dialectologie ainsi que président de la Commission de la promotion des lettres dialectales de Wallonie et vice-président du Musée de la Vie wallonne, Maurice Piron crée le Centre d’Études Georges Simenon en 1976. En 1961, il publie à Paris, chez Gallimard, un recueil intitulé Poètes wallons d’aujourd’hui, dans la Collection Unesco d’œuvres représentatives, faisant ainsi connaître les poètes wallons au niveau international. Il est l’auteur de l’Anthologie de la littérature wallonne (prix Albert Counson). Folkloriste wallon, il collabore à de nombreuses revues scientifiques de dialectologie, d’histoire et de folklore, auxquelles il dédie des travaux et des recherches consacrés notamment à l’étymologie, à l’histoire des littératures dialectales (littérature wallonne), aux problèmes culturels et d’enseignement. L’œuvre publiée de Maurice Piron comporte une dizaine de volumes et plus de deux cents articles. Trois lignes de force s’en dégagent : la littérature dialectale, l’image littéraire de Liège et de l’Ardenne liégeoise, le français de la Belgique romane. À cela s’ajoute un apport théorique et méthodologique important.

L’influence de Maurice Piron sur le Mouvement wallon est également tangible. Membre du comité de la Société historique pour la Défense et l’Illustration de la Wallonie (1938), Maurice Piron écrit des articles pour les journaux d’action wallonne : L’Action wallonne et Le Carré wallon (1938) ; il est aussi critique littéraire dans La Défense wallonne. Dans le numéro spécial de La Cité chrétienne consacré aux problèmes wallons (20 mai 1939), Maurice Piron traite de l’aspect culturel. Cinq titres balisent son exposé : origines romanes, participation à la culture française, apport des dialectes, traditions, avant de se clore sur Culture et politique. D’une part, se réjouissant du renouveau wallon qui s’affirme avec intensité dans divers domaines de la culture régionale, il déplore, d’autre part, l’atmosphère peu sympathique de la Belgique officielle à l’égard du développement de la vie wallonne : Vu de Bruxelles, le régionalisme wallon (quand on daigne s’apercevoir de son existence) apparaît médiocre et digne tout au plus d’une estime purement verbale. Après nous avoir jeté des fleurs… asphyxiantes, on passe à des choses plus sérieuses. Par ailleurs, Maurice Piron constate qu’il est impossible d’asseoir le renouveau wallon sur les mêmes bases que le Mouvement flamand que nous respectons (cela va de soi) et que nous admirons assez souvent mais dont la mentalité, les aspirations profondes et l’idéal ne correspondent pas à notre tempérament. Et il poursuit : Le Mouvement wallon est avant tout d’essence politique. Lui a-t-on assez reproché l’étroitesse de ses objectifs, son manque de dynamisme et d’envergure ? Décentralisation administrative, délimitation exacte de la frontière linguistique, résistance au bilinguisme, accords économiques et militaires qui garantissent la vie et la sécurité du pays wallon, etc. (…) Tout cela, aux yeux de certains, manque un peu de panache. Nous nous félicitons, pour notre part, de cette orientation. Les buts limités, précis et immédiats suffisent à l’action politique, et l’on ne saurait trop se méfier des peuples qui ont, jusqu’à l’enivrement collectif, le sens de leur grandeur. Rappelant l’article de Fernand Dehousse dans L’Action wallonne d’octobre 1937 qui interrogeait Y a-t-il un nationalisme wallon ?, la réponse, entièrement fondée, fut négative souligne Maurice Piron. Et d’insister : Aussi longtemps que les tâches essentielles du Mouvement wallon coïncideront avec la lutte pour la liberté, pour le respect des droits de la personne contre l’accaparement de la “ communauté ”, pour la défense de nos ouvriers et de nos industries menacées, le mouvement restera fidèle à sa vocation démocratique. Il servira au lieu de dominer. Et c’est très bien ainsi.

Posant la question de la culture en Wallonie, Maurice Piron affirme que la culture wallonne n’existe pas, mais qu’il y a un apport wallon à la culture et qu’il importe que les Wallons puissent déterminer la situation de leur culture dans une Wallonie qui se révèle de plus en plus. Et les Wallons ont un certain nombre de griefs à faire valoir car le pouvoir central ne se préoccupe pas des dialectes wallons (malgré une grande production littéraire et dramatique) ; il lèse les Wallons en matière de radiodiffusion ; les programmes d’histoire omettent la Wallonie ; enfin, les Wallons sont confondus avec les francophones et sont donc sous-représentés dans de nombreux organismes scientifiques et parastataux. En attribuant aussi une responsabilité de cette situation aux Wallons eux-mêmes, en raison de copinages malsains, Maurice Piron encourage à la formation d’une élite wallonne (La Défense wallonne, n° 8, août 1939, p. 2).

Membre de l’Association pour le Progrès intellectuel et artistique de la Wallonie, membre-fondateur de Rénovation wallonne (1945), membre de son comité provincial liégeois (1945) et de son comité consultatif central, Maurice Piron participe à l’expérience UDBiste et est rédacteur en chef de Forces nouvelles (1945-1946). En cette période de Libération, il estime que Pour les gens qui vivent aujourd’hui en Belgique romane, bâtir le monde nouveau auquel nous aspirons tous, c’est nécessairement et premièrement, construire la Wallonie. (…) construire la Wallonie ne signifie pas détruire la Belgique. À ses yeux, seule la reconnaissance de la Wallonie peut assurer l’avenir tant de la Belgique que des Wallons. Et il en appelle à penser les questions politiques, sociales, économiques et culturelles à la lumière de la réalité wallonne et des besoins de la Wallonie ; il appelle aussi les Wallons à prendre leur destin en mains en chassant la médiocrité et en prouvant leur savoir-faire (Forces nouvelles, 7 avril 1945).

En 1948, Rénovation wallonne publie une étude de Maurice Piron sur l’aspect culturel du problème wallon. En substance, il y aborde trois problèmes, celui de la langue, celui de l’enseignement et celui de l’encouragement à la vie culturelle en Wallonie : il faut donner au français la place qui lui revient par un apprentissage de qualité à tous les niveaux de l’enseignement, primaire et secondaire ; d’autre part, il préconise de rendre obligatoire, dans les universités (faculté de droit et de philosophie et lettres), un cours d’histoire culturelle des provinces wallonnes, d’autoriser des cours facultatifs de wallon dans l’enseignement primaire, il exige la liberté absolue du choix de la seconde langue dans l’enseignement moyen et souligne la nécessité d’adapter l’histoire nationale à une vue plus objective du passé et à une plus juste compréhension de nos traditionnels particularismes régionaux. Enfin, pour dynamiser la vie culturelle, il formule dix revendications à mettre en œuvre d’urgence, parmi lesquelles la mise à disposition d’une longueur d’onde radio wallonne autonome, le développement et le financement d’institutions capables de mettre en valeur le patrimoine wallon, et des frais d’édition de grands travaux. Encourageant l’aide aux théâtres et l’ouverture de bibliothèques décentralisées, il réclame la mise en chantier d’une encyclopédie illustrée des connaissances relatives à la Wallonie, dirigée et rédigée par des spécialistes avertis. On retrouve l’ensemble de ses idées dans les conclusions du deuxième Congrès culturel wallon qui se tient à Liège, en octobre 1955, et auquel il participe activement.

En 1962, Maurice Piron se mobilise contre les projets linguistiques du gouvernement ; avec d’autres représentants de Rénovation wallonne, il mène la lutte pour le maintien des Fourons en province de Liège. Membre du Comité d’Action wallonne (1962-1964), il participe au Congrès d’Action wallonne, en mars 1963, à Namur, et devient l’un des membres du Collège exécutif de Wallonie (1963-1965) et du comité liégeois de patronage au pétitionnement (1963). Au sein du Collège exécutif de Wallonie, il ne représente pas Rénovation wallonne comme telle, mais la tendance chrétienne, au même titre que Joseph Bercy et Pierre Rouelle.

Membre de la Commission culturelle de Rénovation wallonne, avec Félix Rousseau et Léopold Genicot notamment (1963), il préside une grande journée culturelle organisée par Rénovation wallonne, et placée sous le signe d’un hommage à la culture française ; symboliquement organisée à Bruxelles, elle permet d’entendre des intellectuels de haut rang et de rappeler un certain nombre des revendications déjà énoncées en 1948. Membre de la Défense des Libertés démocratiques (1962), membre de la commission des questions culturelles et linguistiques de Rénovation wallonne (1963), il est fait membre d’honneur de Rénovation wallonne en 1966. Aux élections du 31 mars 1968, il occupe la septième et dernière place sur la liste du Rassemblement wallon au Sénat, dans l’arrondissement de Liège, liste conduite par Marcel Thiry dont il est aussi le premier suppléant.

Au lendemain de la réforme de 1970 qui inscrit les régions et les communautés dans la Constitution, Maurice Piron publie un dossier de 19 pages, au Cacef, intitulé Une autonomie culturelle, pour quoi faire ? Cette réflexion volontairement limitée, lucide et précise, se veut une orientation pour les Conseils culturels. Ce dossier est en fait une présentation étoffée des conclusions du huitième congrès de Rénovation wallonne organisé à Namur, en mars 1972. Insistant sur le fait que la Communauté française est unie par sa langue, une langue internationale qui n’a aucune raison de lutter contre les dialectes, il précise que ceux-ci font aussi partie de ce qui donne à la Wallonie son visage et son âme. Lorsque Maurice Piron traite de la Wallonie, il pense aussi à la partie francophone de Bruxelles, Bruxelles qui est le point sur le i de la Romania. Ce n’est pas que Bruxelles avec son agglomération ne soit une entité particulière qui ait ses besoins distincts, notamment en matière de politique et d’économie. Mais l’autonomie culturelle s’appuie sur les communautés et non sur les régions. Maurice Piron considère comme une erreur le fait que l’on a confié aux seuls parlementaires le soin de régler la politique culturelle et appelle de ses vœux un organe de consultation sérieux et institutionnalisé. Préconisant la coopération culturelle internationale, tournée vers la France, de façon non exclusive, il revendique un projet d’enseignement, la démocratisation des études, une plus grande autonomie pour les universités et surtout une amélioration de l’apprentissage de la langue française. Le Conseil culturel ne sera pas ingrat à l’égard de Maurice Piron, puisqu’il lui remet, en 1976, le tout premier prix littéraire de l’institution.

En juin 1976, Maurice Piron figure parmi les signataires de la Nouvelle Lettre au roi pour un vrai fédéralisme rédigée à l’initiative de Fernand Dehousse, Jean Rey et Marcel Thiry, notamment, et qui vise à dépasser la régionalisation pour instaurer un fédéralisme véritable, fondé sur le respect des droits de l’homme et de l’égalité des citoyens, fondé sur l’égalité politique des communautés et des régions qui ont des pouvoirs véritables, un fédéralisme où Bruxelles est reconnue comme région à part entière.
 

 Paul Delforge

 

 

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