Avec une
formation d’instituteur (1943) puis de régent scientifique (1946) à l’École
normale de l’État à Nivelles, ce fils de mineur, orphelin à 16 ans, devient
instituteur à l’Athénée de Soignies (1947) puis professeur de sciences et de
mathématiques à l’École moyenne de Houdeng-Aimeries (1948) et à l’École
industrielle des apprentis mineurs (1961). Militant syndical CGSP et
militant socialiste, farouche opposant au retour de Léopold III durant la
Question royale, secrétaire régional CGSP enseignement, Léon Hurez participe
aux travaux de la Commission permanente du pacte scolaire.
Durant l’hiver
’60-’61, Léon Hurez participe intensivement au mouvement de grève contre la
Loi unique. Le 9 janvier, il invite et accueille André Renard à La Louvière.
L’activité du jeune Hurez est remarquée par Hector Roland, secrétaire
fédéral de l’arrondissement de Soignies du PSB qui lui propose la troisième
place sur la liste socialiste (derrière Joseph Martel et Marcel Collart).
Hurez est élu député socialiste de l’arrondissement de Soignies (1961). Il
exercera son mandat pendant vingt ans (1981).
Membre et
responsable de la propagande de la régionale du Centre de Wallonie libre
(1962), membre du comité central d’Action wallonne dans la région du Centre
(1962-1964), vice-président de la régionale du Centre du Mouvement populaire
wallon (mai 1962, septembre 1963), président d’honneur de la section de
Houdeng-Aimeries du MPW (mai 1962), Léon Hurez participe au Congrès d’Action
wallonne de Namur (23 mars 1963) ainsi qu’à la manifestation du 26 mai à
Charleroi. Durant tout le printemps 1963, il participe d’ailleurs à de
nombreux meetings et conférences où il explique le programme du Mouvement
populaire wallon. Léon Hurez est l’un des cinq représentants officiels du
MPW au sein du Collège exécutif de Wallonie (1963-1964) qui organise le
pétitionnement de l’automne 1963.
Avec Freddy
Terwagne, André Cools, Ernest Glinne et Fernand Massart, il apparaît comme
l’un des rebelles fédéralistes wallons du PSB du début des années soixante.
Membre du groupe La Gauche et du Mouvement populaire wallon, Léon
Hurez est exclu du groupe parlementaire socialiste pendant deux mois pour
avoir voté contre la loi sur le maintien de l’ordre. Il sera aussi concerné
par la motion de double incompatibilité votée par le PSB en décembre 1964, à
l’égard des affiliés actifs au MPW et dans le groupe La Gauche. Sans
renier ses options, Hurez choisit de demeurer membre du Parti socialiste
belge.
Député socialiste
de Soignies, il ne cache pas qu’il souhaite le dépassement du provincialisme
et la reconnaissance légale de deux communautés, la Flandre et la Wallonie,
ainsi que d’une entité bruxelloise. La révision institutionnelle, utile pour
préserver la Wallonie de sa minorisation dans l’État belge, ne lui paraît
cependant pas suffisante pour assurer la reconversion et la modernisation de
l’industrie wallonne. Face à l’impuissance du néocapitalisme et le
décrochage des groupes financiers, il estime indispensable d’instituer une
initiative industrielle publique, sous la forme d’une Société wallonne de
Développement et d’Investissement. L’exemple de pays non-socialistes montre
que l’idée est réaliste et applicable (1967).
Demeuré fidèle au
PSB malgré les mesures prises par ce dernier contre les responsables du MPW,
Léon Hurez contribue à l’évolution de l’idée wallonne au sein du parti
socialiste et il lui revient le mérite, partagé notamment avec Freddy
Terwagne, d’avoir donné leur orientation wallonne aux congrès socialistes
wallons de Tournai et de Verviers (1967). En 1969, Hurez devient membre du
Comité permanent d’un Congrès national wallon qui vit ses derniers instants
(1969-1971). Lorsque Joseph-Jean Merlot devient vice-Premier ministre
(1968), Léon Hurez le remplace à la présidence du comité des Fédérations
socialistes wallonnes. Très proche de Freddy Terwagne et d’André Cools,
Hurez accepte notamment d’être le rapporteur de la loi Terwagne sur la
planification et la décentralisation économique.

Conseiller
communal (1964-1988), bourgmestre de Strepy-Bracquegnies (1965-1976) puis du
Grand La Louvière (1977, 1979-1984), membre de la Commission de l’Éducation
nationale et de la Culture, auteur d’une proposition de loi modifiant
l’article 54 du Code des impôts sur les revenus, rapporteur sur le projet de
loi organique du pouvoir d’investigation statistique de l’État, questeur à
la Chambre (25 novembre 1971-27 janvier 1972), il est nommé ministre
francophone de l’Éducation nationale dans le gouvernement Eyskens-Cools
(1972-1973) ; Léon Hurez qui ambitionne de promouvoir l’idée d’une école
pluraliste quitte alors la présidence du comité des Fédérations wallonnes
avant de la retrouver, en février 1973. Ce comité avait acquis, entre-temps,
un caractère “ légal ” au sein du PSB.
Au lendemain des
élections du 10 mars 1974, Léon Hurez est le négociateur officiel du Parti
socialiste belge lors de la mission exploratoire de Léo Tindemans.
Considérant qu’il ne dispose pas de garanties suffisantes en matière de
réformes économiques (initiative publique) et institutionnelles (application
de l’accord FGTB-PSB relatif à la régionalisation), il refuse toute
participation gouvernementale du PSB. À la tête du Comité permanent des
socialistes wallons, il réclame les moyens indispensables au fonctionnement
de la Société de Développement régional, un transfert de l’administration
vers les régions et une rationalisation des services provinciaux. Cette
décision conduit le PSB dans une cure d’opposition de quatre années au cours
desquelles le Rassemblement wallon tentera d’instaurer une régionalisation
transitoire.
Wallon résolu,
Hurez contribue à l’orientation fédéraliste du PSB. Il encourage une
régionalisation accrue de son parti et apporte aussi une forte contribution
à l’élaboration des projets de réforme institutionnelle au sein du comité
permanent des Fédérations socialistes wallonnes. En juin 1976, le PSB
s’accorde avec la FGTB sur un projet de révision constitutionnelle qui
servira de référence durant toute la période de négociations conduisant à la
réforme de 1980 ; ce projet prévoyait la suppression des provinces, des
conseils culturels et du Sénat ; il créait trois régions (Wallonie, Flandre,
Bruxelles) dotées de réels pouvoirs politiques (exécutif et législatif
distincts du national) et financiers. Les compétences des trois régions
recouvraient la politique d’expansion économique, l’emploi, la législation
industrielle, la politique foncière, le logement, l’agriculture,
l’infrastructure touristique, la politique familiale et démographique,
l’hygiène, la chasse, la pêche, l’urbanisme et la restructuration, et le
renforcement des pouvoirs locaux.
Vice-Premier ministre dans le
gouvernement Tindemans II et ministre de la Fonction publique (1977), en
contact étroit avec le président de son parti, André Cools, ainsi qu’avec
Guy Spitaels et Jean-Maurice Dehousse, Léon Hurez participe aux longues
négociations portant sur la réforme de l’État et aboutissant au pacte d’Egmont-Stuyvenberg.
Il sera cependant pris de court par le Premier ministre Tindemans qui
annoncera la démission de son Cabinet en septembre 1978. Vice-Premier
ministre dans le gouvernement Vanden Boeynants (1978-1979), Léon Hurez
poursuit son combat en faveur de l’inscription dans les textes de loi des
revendications du Mouvement wallon ; il obtient notamment la décision de
réaliser le canal du Centre et donc de construire l’ascenseur pour bateaux
de Strépy-Thieu, ainsi que l’accélération de la route Binche vers
l’autoroute. Il se montre aussi intransigeant en matière d’amnistie. Il
contribue enfin à la réussite de la réforme de l’État de 1980.
Président du
Conseil culturel de la Communauté française (avril 1979), Léon Hurez
devient, le 6 novembre 1980, le premier président du premier Parlement
wallon officiel. Alors appelé Conseil régional wallon, le pouvoir législatif
wallon était issu des lois d’août 1980. Il s’agissait là du couronnement
d’un parcours politique axé notamment sur la défense de la Wallonie.
Paul
Delforge