Né à Ohain, petit village du Brabant wallon,
Robert Goffin est élevé auprès de son grand-père qui lui transmet le culte
de la Wallonie, de Napoléon et de Victor Hugo. Témoin en 1904 de
l’inauguration du monument à l’Aigle blessé, son attachement à la Wallonie
et à la France s’ancre dans les premières années de son existence. Après des
études primaires à l’école communale d’Ohain, il commence ses humanités au
petit séminaire de Basse-Wavre et les termine en 1916 à l’Athénée communal
de Saint-Gilles. L’Université libre de Bruxelles ayant fermé ses portes
durant l’occupation, c’est en 1919 qu’il entame ses études universitaires et
fréquente les cours de philosophie et lettres préparatoires au droit. Il se
mêle aux jeunes milieux littéraires de l’époque, se lie d’amitié avec René
Purnal, Charles Plisnier, Odilon-Jean Périer et découvre une musique
nouvelle, le jazz, dont il deviendra un grand spécialiste. Reçu docteur en
droit en juillet 1923, il est inscrit au tableau des avocats de la Cour d’Appel
de Bruxelles le 15 septembre 1926. Avocat, il publie en 1927 un Code
élémentaire des agents de change, en 1928 un Code élémentaire de la
banque et en 1930 un Manuel de Droit financier. C’est pourtant le
jazz, la littérature et la poésie qui restent sa raison de vivre.
Amené au Mouvement wallon par le poète namurois
Ernest Moerman, il fréquente l’Avant-Garde wallonne et rencontre l’abbé Mahieu.
C’est à Waterloo qu’il fera la rencontre de Charles Plisnier. En 1938, il
publie Chère espionne !, roman de l’amitié franco-belge, dédié à
tous nos amis de Belgique qui luttent pour la France éternelle. En 1939,
il crée l’hebdomadaire Alerte, opposé à la neutralité et qui réclame
une alliance avec la France. Il écrit aussi dans La Faluche, périodique
du Cercle des Étudiants wallons de l’ULB, un vibrant article sur la
Grandeur de la France. Ses activités pro-françaises et les articles
virulents qu’il signe contre Degrelle et les nazis l’obligent à quitter le
pays lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate. Il gagne la France, l’Espagne
puis le Portugal avant de s’embarquer pour New York. Aux États-Unis, sur
l’intervention de son ami et ancien condisciple Paul-Henri Spaak, il devient
l’interprète des services belges de la propagande, chargé de faire connaître
le pays et l’attitude du chef de l’armée. Il publie l’ouvrage Le roi des
Belges a-t-il trahi ?, rédigé en deux semaines en novembre 1940, dans
lequel, bien que partisan de l’union avec la France et pour éviter de semer la
zizanie parmi les Belges, il tente de justifier l’attitude de Léopold III.
Pour Robert Goffin, en juillet 1940, le roi a été trahi par De Man.
Goffin explique le refus de Léopold III de quitter le pays et d’accompagner
son gouvernement par sa volonté de partager le sort de son armée.

Durant les cinq années passées aux États-Unis,
Robert Goffin publie plusieurs romans d’aventure, un roman consacré à la
résistance en Belgique et divers ouvrages sur le jazz. Citoyen d’honneur de la
Nouvelle-Orléans, il est nommé professeur d’histoire du jazz à la New
School for Social Research à New York. Dans le cadre de la propagande
belge aux États-Unis, il sillonne le pays et donne en anglais des conférences
sur la guerre et la résistance en Europe. C’est lors de ce séjour qu’il publie
également la première édition d’un ouvrage consacré aux Wallons fondateurs de
New York, ouvrage réédité en 1970 par l’Institut Jules Destrée.
De retour en Europe, en 1945, Robert Goffin se
consacre essentiellement à la poésie. Conférencier, journaliste, auteur à
succès, il est publié régulièrement aux États-Unis et traduit en de nombreuses
langues. L’attachement de Robert Goffin à la Wallonie et à la France et le
sentiment de participer à une communauté de pensée sont présents dans toute
l’œuvre de Goffin, sans pour autant jamais tomber dans le nationalisme ou le
chauvinisme. Le 21 juin 1959, il prend la parole à Waterloo en même temps que
Jean Fillée, Eugène Pauly et Christian Bilquin. Rappelant que son bisaïeul
était propriétaire de la ferme de Plancenoit, Goffin rend hommage à la culture
wallonne, déplore qu’elle ne soit pas suffisamment connue et souligne sa
filiation à la culture française.
Le 25 octobre 1954, il est reçu à l’Académie de
Langue et de Littérature françaises par Marcel Thiry. Président du PEN Club
français de Belgique puis vice-président du PEN Club international, il
réalisera plusieurs tours du monde dans les années cinquante et soixante.
Président du groupe CCE du Mouvement fédéraliste européen (1970), il mène
campagne en faveur de l’élection directe du Parlement européen. Membre de la
Société historique pour la Défense et l’Illustration de la Wallonie avant la
Seconde Guerre mondiale (3 avril 1940), Robert Goffin devient l’un des
administrateurs de l’Institut Jules Destrée de 1973 à 1980 et est nommé
administrateur honoraire (1981-1984). Dans la collection Figures de
Wallonie, dudit Institut, trois ouvrages lui sont consacrés : une
biographie Robert Goffin, le poète au sang qui chante, par Jean-Marie
Horremans, en 1976 et deux ouvrages de souvenirs, Souvenir à bout portant.
Poésie. Barreau. Jazz (1979) et Souvenirs avant l’adieu (1980).
Jean-François
Potelle