Davantage
intéressé par la musique et les beaux-arts que par les études, Willy Bada
rate cependant un examen au Conservatoire et entre comme employé à
l’Espérance Longdoz (1930) où il travaille jusqu’au début de la guerre ;
fréquentant le cercle polyglotte, il y étudie le secrétariat, l’esthétique
et la pratique de la langue française ; il lui arrive aussi de suivre en
cours libre des cours de littérature française et surtout ceux d’Olympe
Gilbart sur l’art wallon à l’Université de Liège ; sur les bancs des cours
du soir à Seraing, il rencontre André Renard. Fait prisonnier de guerre en
mai 1940, il reste dix-huit mois en captivité en Poméranie. Dès son retour à
Liège, il est membre du Front de l’Indépendance, délégué au comité
clandestin de Wallonie libre dont il est aussi membre depuis 1942 ; c’est là
qu’il rencontre Fernand Schreurs ; résistant connu sous le pseudonyme de
Girondin, il est notamment l’auteur d’un article contre Léopold III.
Visiblement
influencé par des personnalités comme Englebert Renier et Fernand Pieltain,
de même que par l’article de Jean Duvieusart, publié, en 1938, dans la
Revue catholique des Idées et des Faits, ainsi que par le numéro spécial
de La Cité chrétienne de 1939 consacré aux problèmes wallons, il
participe à l’action clandestine du Mouvement wallon catholique.
Collaborateur au clandestin Wallonie catholique, il s’associe à la
réalisation de la brochure intitulée La Wallonie, son Histoire, son
Avenir, édition du Mouvement wallon catholique, en 1945. Au moment de la
Libération, il parvient à dénicher un imprimeur qui permet à la Wallonie
libre de sortir un numéro le 20 septembre 1944, le numéro de la
Libération. Membre du comité de la section de Seraing de la Wallonie libre
(juin 1945), Willy Bada est aussi membre du comité provincial liégeois et du
comité de presse de la Wallonie libre (1945).
Partisan de doter
la Wallonie d’un statut d’État fédéral, il aspire à un rassemblement des
forces wallonnes en un même mouvement. Il donne d’ailleurs de nombreuses
conférences en 1945, pour expliquer la doctrine, les buts et le
fonctionnement de Wallonie libre. En mai 1945, il dénonce fermement la
politique de flamandisation qui continue en terre wallonne, et plus
spécialement dans les communes de Fourons-Mouland. Secrétaire de rédaction
de Wallonie libre (1945), rédacteur liégeois au journal Le Gaulois
(1944-1945), il est aussi directeur-rédacteur avec Georges Quint du
Relais de Wallonie (1946), organe de l’Association touristique de
Wallonie créée peu avant la guerre.
Mais l’action
militante wallonne de Willy Bada semble s’interrompre au lendemain du
Congrès national wallon de Liège (1945) ; davantage attaché à la langue
wallonne qu’à l’action politique wallonne, cet auteur dialectal regrette
l’échec du Mouvement wallon au sortir de la guerre 1945, car il aurait pu
aboutir à la modification en profondeur des structures belges. Willy
Bada considère que l’avenir de la Wallonie passe par l’Europe, le seul
moyen, à ses yeux, de se rapprocher de la France. Il se définit d’ailleurs
comme étant un rattachiste “ concret ”. À partir de 1945, Willy Bada
travaille en tant qu’attaché de presse de la société Lepage, société belge
de l’azote, à Liège ; attaché de presse au Centenaire de l’AILg (1947), il
est ensuite attaché de presse de l’IRSIA (1948), puis agent en publicité ;
il fait carrière à la SBA-PCM et dans ses filiales (chef de département puis
fondé de pouvoir).
En 1942, il avait
publié en wallon, un poème, sorte de méditation, intitulé Li voye del
creu (1942). La critique d’une revue spécialisée fut assassine à l’égard
de son auteur qui ne devait jamais plus produire le moindre texte en langue
wallonne. Il resta pourtant attaché à la vie dialectale ; lauréat du
Concours international de la Nouvelle (dans le cadre de l’exposition
internationale de l’eau en 1939), poète, critique et romancier, il collabora
à quelques journaux locaux avant-guerre, mais surtout, après la Libération,
à L’Epi wallon, au Relais de Wallonie, au Gaulois en
tant que rédacteur liégeois, et à Spectacle (édition de Seraing).

Auteur d’une
monographie sur le peintre Ludovic Janssen (1988), il aime à ramener à la
mémoire d’aujourd’hui les réalisations du passé. Grand connaisseur et
collectionneur de gravures anciennes et modernes relatives à Liège, il
apparaissait comme un véritable expert en la matière. Collecteur de
souvenirs et animateur du périodique Seraing-Ougrée-Jemeppe au passé,
il est l’un des fondateurs de la revue annuelle La Passerelle ”
(1998). Dans le même esprit, il publie, en collaboration avec Luce Minet, un
recueil de documents photographiques L’entité de Seraing (Mémoire en
images). Soucieux d’honorer la mémoire de Noël Ruet, poète serésien
reconnu à Paris mais oublié dans sa cité natale, il contribue à la création
d’une association de mémoire, “ La Trace ”, qui obtient des autorités
communales sérésiennes qu’on rende un hommage officiel à la personnalité de
l’écrivain et que son nom soit donné à la salle de lecture de la
bibliothèque du Jardin-Perdu. Conjointement paraissait un livre Noël Ruet
(Seraing, 19.12.1898 – Paris, 05.04.1965) ; viendront ensuite, en 2000,
une plaquette de vers d’un jeune fils d’émigré italien, Dante Libralesso,
Jeu d’écriture poétique (coll. Tétracorde) et, l’année suivante, la
suite poétique en langue wallonne, Calipsô, d’Albert Maquet.
Prix Richelieu de
la nouvelle en 1994, Willy Bada figure parmi les douze lauréats dont la
prose est publiée dans le recueil collectif, Quatre éclats de Meuse et
autres nouvelles. Encouragé par ce succès, il reprend la plume et
raconte des scènes de la vie quotidienne du début du XXe siècle.
Le recueil fut imprimé à un très petit nombre d’exemplaires sous le titre
Contes des Hautes Communes. Le lendemain même de la sortie de presse,
Willy Bada tirait sa révérence.
Paul Delforge
Cfr
Maquet Albert,
Le cercle
des poètes effacés (6)