Les
relations internationales de la Wallonie (3/3)
Partie
1 -
Partie
2
Philippe
Suinen
Directeur général de la
Direction générale des Relations extérieures de la Région wallonne
Le centre et
l'est de l'Europe
La Wallonie ne pouvait
rester sans réaction face à la formidable mutation qui a résulté, au centre et à
l'est de l'Europe, de la chute du rideau de fer et du mur de Berlin, et en
prenant en compte au moins deux enjeux fondamentaux :
-
tout d'abord,
l'Europe a pour fond commun un système de valeurs dans lequel un rôle
essentiel est assuré par les droits de l'homme. Un demi-siècle sépare ainsi
les deux "Europes";
-
d'autre part, passer
d'un système étatique et monolithique à un système d'économie de marché a
été présenté par des observateurs de l'ouest - cyniques mais pertinents -
comme aussi difficile que le chemin inverse au trajet de l'aquarium vers la
bouillabaisse. Sans formulation aussi extrême, il est incontestable que les
notions de concurrence, de profit et de liaison rentabilité - emploi ne
s'improvisent pas au niveau de la mise en oeuvre.
Face à ces enjeux, la
Région wallonne a entendu participer au système de vases communicants évoqué par
Branislaw Geremek tout en valorisant les capacités et expertises de ses
entreprises et centres de recherche dans la rencontre des besoins de ces pays :
"Avant qu'une authentique
intégration européenne soit viable, il faudra que se mette en route un mécanisme
de vases communicants : nous devons unifier les standards politiques, sociaux et
économiques, nous devons constituer des systèmes bancaires qui nous permettent
d'entrer dans la structure financière européenne, ainsi que des technologiques
qui autorisent notre incorporation à la division du travail en Europe; nous
devons élaborer des instruments d'intégration des sociétés, ouvrir les
frontières aux personnes et aux idées"
(4).

Les cinq principaux
partenaires de la Wallonie en Europe centrale et orientale sont, par ordre
chronologique de formalisation des relations, la Géorgie, le Comté hongrois de
Baranya, la province de Cracovie, la Slovaquie et la Slovénie. Trois de ces cinq
entités sont par la suite parvenues à l'indépendance, ce qui n'a pas remis en
cause les orientations retenues. Les accords partagent en fait, au niveau des
lignes directives, les objectifs d'échanges d'expériences et d'efforts
d'expertises ainsi que de mise au point de positions conjointes par rapport à la
construction et aux institutions européennes. Au niveau des modalités, on
retrouve la mise en contact des entreprises et centres de recherche, la
diffusion des opportunités et l'organisation de stages aux frais de la partie
d'accueil pour les coûts de logement et de séjour.
Avec la Géorgie, les
secteurs retenus prioritairement au titre du partenariat bilatéral sont
l'agriculture et les biotechnologies y afférentes, l'énergie et l'environnement.
Des accords de transfert de technologie et de savoir faire ont ainsi pu être
signés, au niveau d'entreprises et centres de recherche dans les domaines de la
biologie industrielle (fermentation) et de la pisciculture. A la demande de la
Géorgie, la Wallonie a aussi envoyé des observateurs aux premières élections
multipartites.
Un programme conjoint de
travail a été établi le 14 septembre 1990 avec le Comté de Baranya en Hongrie.
On y retrouve, parmi les modalités particulières :
-
l'organisation
annuelle de journées de contact (technologies de l'environnement,
technologies agricoles, agro-industrie, biotechnologie, informatique,
construction mécanique) ;
-
la coordination
d'actions de promotion de produits agro-alimentaires sur le territoire de
l'autre région;
-
l'organisation d'une
information et d'une formation sur les structures et le fonctionnement des
programmes européens ainsi que sur le marché unique européen ;
-
l'organisation
d'échanges au niveau des cadres d'entreprises et leur participation à des
stages professionnels.
En Pologne, la
coopération avec la voïvodie (province) de Cracovie concerne la
production des matériaux de construction, les économies d'énergie dans le
logement, la préservation des monuments historiques, sans oublier l'organisation
de forums d'entreprises axés sur la recherche de joint ventures et la mise à
disposition d'expertise pour la restructuration et la reconversion de la
sidérurgie.
La Wallonie a été la
première entité publique étrangère à conclure un accord international avec la
Slovaquie, ce le 23 novembre 1990. L'essentiel de l'action est axé sur les
partenariats impliquant les entreprises et centres de recherche. Parmi les
secteurs et filières retenus, on notera l'énergie, le perfectionnement des
cadres d'entreprises, le soutien à la formation de PME, la modernisation et la
reconversion industrielle, le secteur agro- alimentaire, les monuments et sites,
les eaux et forêts, le traitement final du bois, le règlement des problèmes liés
à la privatisation de grandes entreprises, la géologie et les richesses du
sous-sol.
Au titre du suivi, il
faut noter l'organisation de stages de longue durée en Wallonie pour des experts
slovaques, ce dans le secteur des automatismes et des questions d'environnement
liés à l'énergie. En outre, le "programme Slovaquie-Wallonie de stages de jeunes
cadres" vise à l'accueil en Wallonie de cadres slovaques pour des stages
professionnels de confrontation avec le travail et l'économie de marché.

Comme elle l'a fait pour
la Slovaquie, la Région wallonne a contribué, modestement mais concrètement, au
processus d'émancipation de la Slovénie, notamment lorsqu'il s'agissait
d'installer une représentation slovène à Bruxelles. L'accord de coopération avec
Ljubljana, conclu en janvier 1991, mentionne comme thèmes principaux les
partenariats industriels, commerciaux et technologiques, ainsi que les
technologies de protection et de préservation de l'environnement. La Wallonie a
également consacré sur les années 1992 à 1994, une somme de 20 millions de
francs à une aide humanitaire, via la Croix Rouge, à des camps de réfugiés
bosniaques en Slovénie.
De manière plus globale,
la Wallonie a aussi mis en place des programmes de perfectionnement à l'entrepreneuriat,
comprenant formation au marché (marketing international) et stages en
entreprises sur son territoire, ce pour des cadres des Régions et Etats amis.
Enfin, l'Assemblée des
Régions d'Europe (A.R.E) a mis en place un Comité de suivi est/ouest auquel la
Wallonie a participé activement, notamment en organisant avec le Jura et la
Slovaquie un fort intéressant séminaire à Bratislava, du 16 au 18 janvier 1992,
sur le thème "Fédéralisme : état et perspectives". Nous croyons que la Wallonie
montre ainsi sur le terrain l'efficacité et la pertinence de l'action régionale.
Comme le dirait François Lachat, Président de la République et Canton du Jura
devant l'A.R.E. en décembre 1990, "il n'y a rien de plus homogène politiquement
et de moins hégémonique souverainement que la Région".
L'Amérique du
Nord
Le Québec constitue, en
termes chronologiques, le premier partenaire de la Wallonie, avec une
déclaration commune signée à Namur le 13 décembre 1980 lors d'une rencontre
Levesque-Dehousse. On notera à nouveau le soin particulier pris par les deux
délégations de ne pas qualifier juridiquement leur acte de traité tout en
soulignant le caractère "privilégié" de la coopération.
Des instruments ont
rapidement été créés pour, en plus de l'aspect politique de valorisation des
spécificités respectives et des valeurs communes comme la francophonie, donner
un caractère économique concret à cette coopération : le Comité permanent
Wallonie- Québec, organe de programmation se réunissant annuellement, et le
groupe d'orientation de la coopération économique, chargé de l'examen des
dossiers économiques et technologiques.
Plusieurs autres textes
contractuels ont par la suite été signés entre les autorités du Québec et de
Wallonie à propos de thèmes sectoriels, comme les échanges d'information dans le
domaine du transfert de technologies, l'accès réciproque aux banques de données
industrielles, l'énergie et l'optique. On peut dire que, malgré les aléas des
fluctuations monétaires, la coopération Wallonie-Québec a créé un cadre de
confiance pour les entreprises et centres de recherche. Cela a permis
d'augmenter le volume des échanges, notamment dans les créneaux des matériaux
composites, des biotechnologies, des logiciels, des transports publics et des
spécialités agro-alimentaires.
Ainsi, une dimension
proche de l'emploi a pu être donnée dès le début à une relation malgré tout
"sentimentale" entre communautés francophones. Cette approche pragmatique a pu
s'adapter aux mutations commerciales en soulignant le rôle de portes d'entrées à
de vastes marchés que peuvent jouer le Québec et la Wallonie. Il s'agit bien
entendu de la zone de libre échange nord-américaine (ALENA) et du marché unique
européen.

Des liens de coopération
scientifique et technologique avec une autre province canadienne, l'Alberta, ont
été formalisés par une déclaration d'intention signée le 30 août 1990 par les
Ministres Fred Stewart et Albert Liénard. L'objectif principal en est de
promouvoir les actions conjointes de scientifiques afin de déboucher sur des
projets commerciaux communs. Les principaux thèmes retenus sont
l'optoélectronique, les télécommunications, les biotechnologies, les
technologies de l'environnement et la micro-électronique.
Aux Etats-Unis, l'Etat
partenaire de la Wallonie est d'abord le Maryland, avec comme première
réalisation conjointe la tenue à Baltimore, en septembre 1988, d'un symposium
international sur les biotechnologies. La Wallonie a joué, à cette occasion
comme à d'autres, un rôle de relais européen puisque les industriels et
scientifiques de quatre autres régions européennes y ont participé à son
invitation : Catalogne, Lombardie, Nord-Pas-de-Calais et Rhône-Alpes.
La coopération avec le
Maryland, reposant sur un accord de coopération du 16 juin 1989, comprend un
volet scientifique et technologique, avec les modalités classiques d'échanges de
scientifiques et d'informations, de missions et d'accès aux banques de données.
Les secteurs mentionnés à ce titre sont, outre la biotechnologie, la
micro-électronique, l'intelligence artificielle, les nouveaux matériaux, les
télécommunications, la rénovation urbaine et l'architecture. Des accords
impliquant des centres de recherche et parfois des entreprises ont ainsi pu être
conclus, notamment en matière de développement et de commercialisation de
poissons transgéniques ainsi qu'au niveau des échanges de produits
biotechnologiques d'application en agriculture.
Un volet économique est
également prévu, avec notamment la volonté conjointe de "favoriser et appuyer
des accords" entre "commerciaux et scientifiques".
Le monde en
développement
Les Wallons ne
considèrent pas le développement de technologies ultra-sophistiquées avec des
partenaires américains ou japonais comme la seule et unique manière de
s'affirmer dans la course planétaire à l'innovation. La Région wallonne a en
effet concrétisé vers les pays du sud une démarche originale basée sur les
éléments suivants :
-
les pays du sud
disposent d'un génie inventif et de ressources locales valorisables;
-
combinée à cet atout,
l'expérience industrielle et artisanale des Wallons permet, en partenariat
avec des intervenants du sud, de mettre au point des technologies
appropriées au développement, générant des productions locales dans le
Tiers- Monde;
-
le caractère
approprié de ces technologies se traduit par la valorisation des ressources
locales (par exemple la terre comme matériau de construction), le respect de
l'environnement, l'absence de dépendance énergétique, la simplicité
d'élaboration, de mise au point et d'utilisation, ainsi que la forte
utilisation de main-d'oeuvre;
-
le partenariat ainsi
forgé entre industriels du nord et du sud répond aux grands enjeux du
développement (auto-suffisance alimentaire, lutte contre la désertification,
réduction de la dépendance énergétique, santé publique, logement, etc.). Il
contribue, par l'exportation, à l'augmentation des recettes en devises des
pays du sud tout en permettant aux entreprises du nord d'étendre leurs
marchés.
On peut citer comme
exemples la production de briques, de peintures et d'appâts anti- rongeurs, le
séchage industriel du poisson, la fabrication rationnelle du charbon de bois. Ou
encore la commercialisation en Europe du marbre soudanais.
Un axe complémentaire
d'action de la Wallonie vers le monde en développement tient en des
contributions à l'édification de "foyers de développement". Ceux-ci doivent
disposer des compétences, des ressources et d'une localisation permettant la
valorisation du potentiel endogène de zones excentrées par rapport aux grands
centres urbains. Cette philosophie active du désenclavement prend notamment la
forme de tables rondes du développement, réunissant opérateurs locaux et wallons
ainsi que les différents bailleurs de fonds - bilatéraux et multilatéraux - ce
afin d'établir la cohérence entre les actions des uns et des autres.

Cet esprit des
technologies appropriées au développement et du partenariat avec le Sud s'est
traduit par la conclusion, dès le 17 juin 1986, d'un protocole d'accord entre la
Région et le C.D.I. (Centre pour le Développement industriel ACP - CEE),
institution relevant directement des Conventions de Lomé. Les parties
signataires s'y engagent à financer conjointement, chacune à concurrence d'un
tiers, les actions de développement industriel impliquant des partenaires de la
zone Afrique-Caraïbes-Pacifique et de Wallonie. Peuvent ainsi être pris en
compte des études de faisabilité et de marché, des projets-pilotes, les
déplacements et séjours nécessaires à la négociation et à la finalisation de
projets, le démarrage et la maintenance des unités de production réalisées, des
missions d'expertise, de diagnostic ou de promotion de projets de réhabilitation
ou d'expansion d'entreprises existantes.
La collaboration implique
également les antennes que compte le C.D.I. dans chacun des pays A.C.P. et qui
sont souvent gérées par les pouvoirs publics ou les chambres de commerce. La
Région wallonne entretient des contacts suivis avec plusieurs d'entre elles,
notamment au Sénégal et en Guinée, afin de disposer rapidement d'informations
sur les partenariats industriels et technologiques recherchés.
Au niveau des textes
bilatéraux liant la Wallonie, il convient également de citer : l'accord de
partenariat du 8 juillet 1990 avec le Congo, signé en suivi de la Table ronde du
Développement de la Cuvette. La Région s'y est engagée à mettre des jeunes
experts en initiative industrielle à la disposition de la Société de
Développement régional de la Cuvette et à prendre en charge le coût et la
réalisation, dans la zone de la Cuvette, d'un bâtiment en terre stabilisée.
Sans y être tenue par ce
texte bilatéral, mais conformément à sa politique des "foyers de développement",
la Région a participé au capital de la Société de Développement régional de la
Cuvette et a consenti une ligne de crédit en sa faveur;
-
le plan d'action
conjoint du 25 octobre 1988 avec la République Islamique de Mauritanie,
signé à Zouerate en suivi de la Table ronde sur le Développement du Tiris
Zemmour (partie nord de la Mauritanie). En vertu de ce texte, la Région met
des jeunes experts à la disposition des autorités mauritaniennes pour la
mise en oeuvre du plan de développement régional et des programmes
sectoriels résultant de la Table Ronde. La coopération porte également, dans
le cadre de la francophonie multilatérale, sur la valorisation des eaux
saumâtres à des fins agricoles;
-
avec la Tunisie, une
ligne de crédit de 30 millions de francs a été mise en place afin de
stimuler les projets de partenariat. La coopération avec ce pays implique
également la Banque nationale de Développement agricole (B.N.D.A.) et
l'Agence de Promotion de l'Industrie (A.P.I.);
-
plusieurs protocoles
et accords signés avec la Province chinoise du Henan et prévoyant notamment
: l'échange d'experts dans le secteur des matériaux de construction, de
l'énergie, de la construction mécanique, de l'agro-industrie, de la
rénovation d'entreprises existantes et du commerce de compensation ainsi
qu'un programme d'échanges d'étudiants, chargés d'identifier les
opportunités de coopération entre entreprises et centres de recherche.

V. La Région et
l'Union européenne, la Région et le multilatéralisme
On peut affirmer que la
Wallonie se comporte depuis sa naissance institutionnelle en véritable
partenaire des institutions communautaires européennes. Si l'Union européenne
apparaît comme un acteur essentiel du développement économique et social, le
principe de subsidarité, confirmé par le Traité de Maastricht, invite à
l'organisation de la cohérence avec les autres niveaux de pouvoirs, les Etats
comme les Régions.
Néanmoins, les autorités
communautaires ont longtemps ignoré les Régions en ne reconnaissant que les
Etats comme interlocuteurs pour ce qui concerne la politique régionale
européenne. La Wallonie a ainsi fait partie du groupe de pionniers faisant
entendre auprès des gouvernements et des autorités européennes la voix des
régions afin qu'il soit dialogué avec elles et que les politiques communautaires
prennent leurs besoins en compte.
Cette pression régionale
a été le fait de l'Assemblée des Régions d'Europe (A.R.E), dont l'assemblée
constitutive s'est tenue en 1985 à Louvain-la-Neuve (et donc en Wallonie, ce qui
n'était pas un hasard). Présidée à sa naissance par Edgard Faure, Président de
Franche- Comté - et avec notamment le Wallon Jean-Maurice Dehousse comme
Vice-Président -, l'A.R.E. s'est donné pour objectifs de renforcer la
représentation des régions auprès des institutions européennes et de faciliter
leur participation à la construction de l'Europe et à la vie communautaire pour
tout ce qui les concerne. Les statuts de l'A.R.E. indiquent que cette action
comporte la perspective d'une représentation régionale institutionnalisée
dans les cadres européens.
Le bilan est loin d'être
négligeable puisque d'une part, bon nombre de programmes interrégionaux se sont
concrétisés dans le cadre de l'A.R.E. ou à son initiative, comme Eurodyssée
(expérience professionnelle à l'étranger pour les jeunes) ou Ouverture
(assistance aux Régions de l'est européen), sans oublier Interreg (coopération
transfrontalière). La Wallonie s'est impliquée dans chacun d'entre eux; d'autre
part, une fonction consultative pour les régions a progressivement pris forme
dans le processus décisionnel européen, avec l'instauration en 1988 d'un comité
consultatif des collectivités régionales et locales.
Le Traité de Maastricht
vient compléter positivement ce bilan par ses articles 198 et 146.
L'article 198 institue le
Comité des Régions qui a remplacé avantageusement le Comité consultatif des
collectivités régionales et locales et fait partie des institutions de l'Union
européenne, au même titre que le Conseil, la Commission ou le Comité économique
et social. Le Comité des Régions est ainsi consulté obligatoirement dans le
domaine de l'enseignement, de la culture, de la santé publique, des réseaux
transeuropéens, des fonds à finalité structurelle, du fonds de cohésion et des
autres actions spécifiques menées au titre de la cohésion économique et sociale.
Il peut également être consulté sur d'autres sujets par le Conseil ou la
Commission et émettre d'initiative des avis sur les points examinés par le
Comité économique et social.
Le Comité des Régions se
compose de 189 membres, dont 12 Belges. Parmi ceux-ci, deux membres du
Gouvernement régional wallon.
Mais la Wallonie se
distingue d'une énorme majorité des autres régions européennes par l'application
donnée en Belgique à l'article 146 du Traité de Maastricht. Selon cet article,
la représentation de l'un ou l'autre Etat au sein du Conseil peut être le fait
d'un Ministre régional. Cette formule logique en Belgique compte tenu du
caractère exclusif des compétences régionales, y a donné lieu à un ingénieux
système démarrant à l'occasion de l'exercice de la présidence européenne par la
Belgique (second semestre 1993) et classifiant quatre scenarii possibles:
Modalités de
représentation de la Belgique Types de Conseil visés 1. Représentation fédérale
exclusive Affaires générales, Ecofin, Justice, Budget, Télécommunications,
Consommateurs, Développement 2. Représentation fédérale avec un Agriculture,
Pêche, Marché intérieur, nté, Ministre assesseur des entités Santé, Energie,
Environnement, Transports fédérées (Communautés ou Régions Affaires sociales
selon le cas) 3. Représentation par les entités Industrie, Recherche fédérées
avec assesseur fédéral 4. Représentation exclusive par les Logement, Aménagement
du territoire et entités fédérées Tourisme (Régions), Culture, Education,
Jeunesse (Communautés).

L'originalité de cette
formule tient, pour les Conseils relatifs à des compétences mixtes, intéressant
deux niveaux de pouvoir, à l'instauration d'une fonction de ministre assesseur.
Celui-ci peut assister le ministre siégeant, et, en accord avec lui, prendre la
parole pour les matières de sa compétence.
Ces éléments ont été
présentés pour indiquer la participation active - et institutionnellement
reconnue - de la Wallonie à la construction européenne.
On a ainsi vu le
Président du Gouvernement wallon, en l'occurrence Guy Spitaels, présider un
Conseil informel des ministres de l'aménagement du territoire. La Wallonie a
aussi pu défendre les intérêts des travailleurs de l'industrie sidérurgique en
participant au Conseil Industrie.
La Région compte par
ailleurs un délégué auprès de l'Union européenne, intégré dans la représentation
permanente de la Belgique.
Les mêmes modalités de
collaboration entre les régions et l'Etat fédéral, ainsi que de valorisation de
l'autonomie régionale, sont appliquées mutatis mutandis au secteur
multilatéral. L'ensemble des organisations internationales ont fait l'objet
d'une étude conjointe identifiant celles qui ne concernent qu'un niveau de
pouvoir et les autres, en fait la majorité, qualifiées d'organisations mixtes :
leur champ d'activités couvre les compétences aussi bien régionales que
fédérales.
C'est ainsi que le siège
belge sera occupé par les régions par exemple, aux travaux de l'O.C.D.E. sur le
développement rural ou de l'O.I.T. sur l'emploi. D'ailleurs, dès 1990, la
Région, aux côtés de la Communauté française, signait à Turin un accord de
collaboration avec le Centre international de Perfectionnement professionnel et
technique de l'O.I.T. (organisation de stages en Wallonie pour les participants
à des formations dispensées par le Centre).
Il a déjà été signalé que
la Wallonie comptait également des chargés de mission auprès de l'ONUDI, de la
Banque mondiale, de la Banque africaine de Développement et de la Banque
asiatique de Développement.
La Wallonie participe en
outre à la francophonie multilatérale en fonction de ses compétences dans les
domaines économique, agricole, environnemental et énergétique ainsi qu'au niveau
des industries de la langue. La Région et ses industriels participent ainsi
activement au Forum francophone des Affaires (F.F.A.). D'autre part, on peut
citer comme projets menés par la Région dans le cadre multilatéral francophone :
-
le développement de
l'observatoire wallon des industries de la langue;
-
la mise en place à
Dakar d'un atelier international des technologies de fermentation
industrielle;
-
la création à Labé
(Guinée) d'un centre environnemental pour toute la zone du Fouta Djalon;
-
la constitution d'une
banque d'images pour le programme ISTRA de formation en agronomie tropicale;
-
la caractérisation
par télédétection de domaines agricoles au Sahel.
Comme cela a été souligné
à plusieurs reprises, les relations internationales de la Wallonie constituent
autant une réalité incontournable sur le plan juridique qu'une volonté
prioritaire sur le plan politique.
Représentant grosso modo
un Européen sur cent - il s'agit de l'Union européenne - et un % du commerce
mondial, la Wallonie veille à ce que son autonomie s'exprime en termes
d'ouverture sur le monde, plutôt que de se replier sur elle-même. Car, au lieu
de subir les événements du monde, il vaut mieux agir - certes modestement - sur
ce monde.
Les relations
internationales de la Wallonie sont arrivées dans leur phase de maturité et les
possibilités de développement en résultant sont légion, aux niveaux tant des
relations bilatérales - avec des Etats comme des Régions - que de l'Union
européenne et du multilatéralisme.
La Wallonie n'entend pas
traverser l'histoire en somnambule. Les Wallons vous attendent avec l'impatience
d'un ami.

Orientation
bibliographique
4.
Pour l'Europe, Liber, n° 1, mars 1990, p. 2.
Partie 1 -
Partie 2
Philippe Suinen, Les relations
internationales de la Wallonie, dans
Wallonie. Atouts et références d'une
Région, (sous la direction
de Freddy Joris),
Gouvernement wallon, Région wallonne, Namur,
1995.