2. La phase de reconversion
La restructuration
terminée, il fut possible d'aller plus loin dans la seconde phase, celle de la
reconversion. Encore en cours, elle se réalise autour de deux processus:
-
une réorientation des
filières traditionnelles vers l'aval en privilégiant les innovations
technologiques et la recherche de produits à plus haute valeur ajoutée;
-
une plus grande
diversification des activités productives vers des secteurs à haute valeur
ajoutée et à forte intensité technologique. Il s'agit principalement des
secteurs de la pharmacie, des plastiques, des arts graphiques et des
nouveaux matériaux (matériaux composites et néocéramiques). La modernisation
de ces secteurs s'est effectuée par l'apport de technologies venant soit des
laboratoires de recherche régionaux soit de l'extérieur.
Cette phase qui a
réellement démarré vers la moitié des années quatre-vingts est en voie
d'accomplissement malgré le retournement conjoncturel survenu en 1990.
La période entre 1986 et
1991 a été d'une très grande intensité pour l'économie régionale, comme pour la
plupart des autres régions européennes : d'une part grâce à la croissance
retrouvée de l'économie occidentale, d'autre part en prévision de l'achèvement
du Grand Marché intérieur européen. On peut affirmer qu'au cours de cette
période la Wallonie est sortie de sa première phase de restructuration défensive
et a réalisé des ruptures culturelles importantes qui lui ont permis d'intégrer
dans son approche de développement les nouvelles réalités de son environnement
économique : globalisation, nouveaux modes de production, primauté des facteurs
immatériels,...
Nous illustrons cette
phase de reconversion à la fois par quelques données chiffrées et par quelques
exemples concrets relatifs à l'évolution du tissu productif wallon.

Quelques indications chiffrées de
la reconversion
Les données ci-dessous
montrent l'intensité de l'activité économique wallonne au cours des années
1986-91 : accroissement continu de l'investissement industriel, création
importante d'emplois, intensification et diversification des investissements
privés en Recherche et Développement.
- L'évolution des
investissements :
Avant le retournement de
conjoncture, soit de 1986 à 1990, on a assisté à une forte croissance des
investissements dans presque tous les secteurs industriels et de services : plus
de 10% annuellement (source : INS).
- L'évolution de l'emploi
:
Graphique n° 7. Variation sectorielle de
l'emploi total en Wallonie entre 1986 et 1991.
En l'espace de cinq ans,
l'emploi s'est accru de 77.313 unités, soit un différentiel positif de 8 %.
Cette progression constante de l'emploi se répercute tant dans l'emploi salarié
qu'indépendant. D'un point de vue sectoriel, ce sont les services qui font la
différence avec une création nette de 88.682 emplois tandis que les secteurs
agricole et industriel connaissent une légère baisse : perte de 2.215 emplois
pour le premier et de 9.154 pour le second.
On notera que
l'accroissement de l'emploi dans les services publics est beaucoup moins marqué
que par le passé par un gonflement de la fonction publique : l'ensemble des
services marchands (commerces et restauration, transports et communications,
banques et assurances, services aux entreprises) et des services aux personnes
expliquent 86% de l'accroissement d'emploi dans les services contre 14% à la
fonction publique (enseignement et administration).
Du côté de l'industrie,
la baisse de l'emploi entre 1986 et 1991 ne doit pas masquer la hausse de trois
secteurs : l'industrie chimique (+1057 emplois), l'industrie agro-alimentaire
(+1035 emplois) et l'industrie du bâtiment (+9121 emplois).
- Les dépenses des
entreprises en Recherche et Développement :
Tout à fait
caractéristique d'une évolution des mentalités en Wallonie, on constate entre
1987 et 1991 un accroissement des dépenses des entreprises de la région en
Recherche et Développement qui est supérieur à celui de la Belgique : +21,3%
contre une moyenne nationale de +20% (source : SPPS). Ainsi les entreprises
wallonnes investissent dans leur avenir par des achats d'équipements,
l'engagement de chercheurs et le financement de recherches externes qui leur
permettent de réaliser des innovations des modes de production (donc un
accroissement de compétitivité) et des innovations de produits (donc une
diversification et / ou un élargissement de leurs marchés).
Graphique n° 8. Parts sectorielles des
investissements en R&D des entreprises wallonnes - 1991.
D'un point de vue
sectoriel, le graphique n 9 indique clairement la diversification de la
recherche et développement des entreprises situées en Wallonie : 32% en chimie,
12% en produits pharmaceutiques, 5% en services (secteur dans lequel la R&D
était nulle cinq ans plus tôt). C'est également bon signe, les secteurs plus
traditionnels participent à l'investissement en recherche et développement :
dans le domaine de l'électronique (17% du total), de la mécanique (15%) et des
métaux (11%).

Illustrations de la reconversion
- La reconversion des
grandes entreprises :
La plupart des
entreprises des filières traditionnelles qui se sont lancées dans des
productions en aval sont parvenues à rétablir des bilans positifs en terme de
profit.
A ce titre, la
reconversion du Groupe Cockerill-Sambre est véritablement exemplaire. Sa santé
retrouvée, l'entreprise sidérurgique la doit à une reprise en mains énergique et
marquée du sceau de la clairvoyance : là où d'autres adoptaient une attitude de
repli défensif, Cockerill-Sambre s'est résolument tourné vers l'avenir. En
partant de la constatation fondamentale que ses richesses et ses potentialités
essentielles de progrès étaient à trouver au sein de sa clientèle, de ses
ressources humaines et de la recherche / développement sur des produits nouveaux
et des procédés toujours plus fiables pour la qualité.
Une diversification de la
production a donc été opérée vers des produits plus proches des marchés et des
besoins spécifiques de la clientèle. C'est depuis 1988 qu'un centre de
recherches interne travaille à l'avenir du Groupe en partenariat avec d'autres
sidérurgistes, des clients, les universités wallonnes ou les pouvoirs publics
régionaux.
Devant les incertitudes
du marché et les difficultés rencontrées pour la nécessaire restructuration de
la sidérurgie européenne, le Groupe Cockerill-Sambre est conscient qu'il doit
jouer sur ses atouts, la valeur de sa main d'oeuvre en premier lieu. La qualité
des produits reçoit dès lors une attention toute particulière. Pour ce faire,
travailleurs et ingénieurs se réunissent dans des cercles de qualité et de
progrès dans lesquels sont analysées les forces et faiblesses des processus de
production. Des décisions sont alors prises au niveau de chaque poste de travail
pour en accroître l'efficacité.
Enfin, le Groupe s'est
donné les moyens de sa stratégie en intégrant différentes branches liées de près
ou de loin à l'activité sidérurgique : la distribution de ses propres produits à
travers l'Europe, le bâtiment, l'équipement automobile, la mécanique,
l'environnement ou les services rendus aux entreprises.
- L'investissement
étranger en Wallonie :
On enregistre une
véritable explosion des investissements étrangers autres qu'américains en
Wallonie (croissance de 230% entre 1987 et 1990, source OFI / MRW), en
particulier dans des activités à haute technologie et dans les services aux
entreprises. La proximité des institutions européennes aidant, on constate une
forte concentration de ces firmes multinationales (FMN) au sud de Bruxelles même
si Charleroi, Liège ou le Sud-Luxembourg ont également bénéficié de
l'accroissement de l'investissement étranger.
La firme Mobil Plastics
installée au zoning de Latour à Virton est un exemple de filiale de FMN qui
témoigne de stratégies porteuses pour le redéploiement de leur territoire-hôte.
D'un point de vue
quantitatif, cette implantation a généré des centaines d'emplois et des
investissements substantiels dans une région économiquement déshéritée suite à
la crise de l'industrie sidérurgique lorraine.
Mais elle représente
également un atout qualitatif pour la région. Cette entreprise occupe en effet
une position stratégique dans son groupe, puisqu'elle est responsable, à tous
les niveaux de la chaîne de production, d'un groupe de produits performants et
sophistiqués pour tout le marché européen et même au-delà. Elle est dès lors peu
suceptible de faire l'objet d'une décision de délocalisation "sauvage" de la
part des actionnaires étrangers. L'autonomie de décision dont elle bénéficie au
sein du groupe est élevée, ce qui lui permet de préférer des relations de
proximité avec des fournisseurs locaux, lorsque ceux-ci offrent des conditions
compétitives pour leurs produits. Les dirigeants de la filiale américaine,
belges pour la plupart, sont en outre investis dans nombre de structures
locales, en particulier dans des organismes qui réunissent représentants du
monde de la formation et de l'industrie. C'est ainsi que l'on peut dire qu'elle
contribue de façon non négligeable à la redéfinition de filières de formation
plus adéquates pour le redéploiement industriel de la région.
Enfin, Mobil Plastics se
prête volontiers au jeu de la défense de l'image de marque de la région auprès
d'autres investisseurs étrangers potentiels, et constitue ainsi un "produit
d'appel" de première force pour le Sud-Luxembourg belge.
De manière générale on
peut dire que :
-
les FMN ont un
impact positif et de long terme pour la reconversion de l'économie wallonne
: il n'est pas faux d'affirmer que certaines d'entre elles lui apportent
même les germes d'un développement durable;
-
les FMN participent
aux objectifs de croissance de la région, qu'elle soit mesurée en termes
d'emplois ou d'investissement;
-
toutefois l'ampleur
de l'impact positif des FMN en Wallonie dépend grandement du répondant que
leur donnent les acteurs économiques, politiques et sociaux de la région :
les FMN perdureront chez nous à la condition de trouver un environnement
dynamique.

3. De la trajectoire historique
d'hier aux trois trajectoires de développement pour demain
Après avoir décrit le
passé lointain et proche de l'économie wallonne, il est temps d'en venir à
aujourd'hui et aux perspectives de développement pour demain.
De ce qui précède, nous
voulons retenir quatre éléments qui caractérisent bien l'économie wallonne.
-
il n'était pas
inutile de rappeller combien la Wallonie a pu être une région leader du
développement du capitalisme industriel belge et européen;
-
axée sur une
mono-industrie (le couple carbo-sidérurgique), la trajectoire historique de
la Wallonie a cependant pesé fort longtemps sur ses chances de reconversion,
sur sa faculté à rester une économie performante et porteuse de
développement productif, social et culturel;
-
la reconversion en
cours se fonde à la fois sur l'industrie traditionnelle et sur de nouvelles
activités qui diversifient le profil de l'économie wallonne : chimie, agro-
alimentaire, services,...
-
la diversification
est aussi réelle sur le plan territorial que sur celui des secteurs : le
noeud de l'activité productive n'est plus concentré comme avant sur le
traditionnel sillon Sambre-et-Meuse.
Une évidence découle de
ces éléments : le tissu productif wallon n'est pas (n'est plus) un ensemble
homogène, il présente une mutation à plusieurs visages, à plusieurs
trajectoires.
En schématisant, nous en
distinguons trois :
-
la trajectoire de
rupture/filiation propre aux bassins de tradition industrielle tels
Charleroi, Liège ou le Sud-Luxembourg;
-
la trajectoire basée
sur la science et la production de haute technologie, type de développement
que l'on trouve de façon caractéristique au sud de Bruxelles;
-
la trajectoire
s'appuyant sur les capacités endogènes du milieu local, voie présente dans
les zones rurales de la région.

II. Les trajectoires du tissu productif wallon
La trajectoire de rupture/filiation
Le développement régional
basé sur une stratégie de rupture/filiation est propre aux régions de tradition
industrielle comme le Nord-Pas de-Calais, la Nord-Rhein Westphalie ou la
Wallonie. Elle part des entreprises qui veulent rompre avec des produits, des
procédés et des modes d'organisation obsolètes tout en ne détruisant pas
entièrement l'appareil productif existant.
Cette trajectoire
concerne essentiellement les secteurs qui, après une phase de restructuration,
ont progressé vers l'aval de leurs filières de production, et qui donc se sont
rapprochés des marchés. Elle vise tant les grandes entreprises que d'autres de
taille petite ou moyenne; la plupart proches des secteurs traditionnels
d'activité, mais aussi parfois en rupture plus nette avec ceux-ci.
1. Contraintes à la mise en oeuvre
de cette trajectoire
Les exigences du marché
(modification des goûts des consommateurs, normes de qualité, pressions de
concurrents étrangers) et la capacité d'innovation constituent les principaux
déterminants de cette trajectoire. Ainsi le marché (qui est devenu global,
rappellons-le) pousse les entreprises à adapter leurs produits, leurs modes de
production et d'organisation. Pour ce faire, les entreprises doivent être
constamment innovantes, l'innovation devant ici être comprise dans toutes ses
dimensions :
-
sur le plan technique
pour faire évoluer l'outil à la mesure des changements technologiques,
-
sur le plan du
Marketing pour définir les innovations de produits les plus porteuses;
-
sur le plan
organisationnel de telle manière que la structure de l'entreprise soit
suffisamment souple pour répondre aux défis qui se présentent à elles.
Le territoire local
s'appuyant sur cette trajectoire doit dès lors comporter un certain nombre de
facteurs d'une importance primordiale pour sa réussite :
-
une main d'oeuvre
offrant un savoir-faire technique de haut niveau;
-
un esprit
entrepreneurial polyvalent plus orienté qu'auparavant vers les marchés et
l'organisation de l'entreprise;
-
une capacité de
financements, entre autres pour les investissements de Capital- risque;
-
une offre de services
aux entreprises dans les domaines du marketing, de l'organisation, de la
gestion, de la Recherche & Développement,...soit une gamme de services
stratégiques pour la survie et le développement des firmes;
-
l'insertion des
entreprises dans des réseaux de niveau international (entre
entreprises, avec des centres de recherche) qui leur donnent accès aux
marchés et aux technologies.
2. L'action des pouvoirs publics
Les autorités locales et
régionales seront particulièrement attentives à la présence des facteurs cités
ci-dessus, et plus particulièrement :
-
à la qualité des
réseaux d'enseignement et de recherche : répondent-ils aux attentes des
entreprises, les jeunes qui en sortent sont-ils "outillés" pour concevoir,
innover, produire, vendre,... et ainsi jouer un rôle plein pour le
développement de l'entreprise;
-
à l'encadrement des
entrepreneurs pour leur offrir les ressources nécessaires au développement
de leurs projets : locaux, terrains, laboratoires, télécommunications,
services divers;
-
à la disponibilité de
sources de financement : banques et sociétés de financement - qu'elles
soient privées ou publiques- doivent être en mesure de soutenir le lancement
des projets des entrepreneurs régionaux et étrangers;
-
à la constitution
d'une offre privée des services qui permettent aux entreprises de concevoir
une stratégie de développement.

3. En Wallonie
Traditionnellement
orienté vers les marchés à l'exportation, le tissu productif wallon est à même
de s'inscrire dans la logique de la "rupture / filiation", mais cette
trajectoire rencontre les aléas de l'ancienne culture industrielle et la
difficulté des entreprises de fonctionner "autonomement" par rapport à une
industrie-motrice telle que l'a été la sidérurgie.
La reconversion des
bassins hennuyers et liégeois s'inscrit principalement dans une logique de
filiation avec le tissu industriel.
-
Ainsi une tranche de
l'industrie wallonne des métaux se caractérise par une évolution vers
des matériaux plus sophistiqués, en aval de la filière, par une
restructuration des procédés de fabrication, par une spécialisation et une
recherche constante des avantages différenciés. Certaines firmes ont montré
une aptitude remarquable au renouvellement tant de leur appareil productif
que de leur gamme de produits. Elles se sont engagées tôt dans la mutation
technologique et ont aujourd'hui un impact économique important: ce secteur
présente de nombreuses niches, c'est-à- dire des marchés spécifiques dont
l'accès est limité en raison de la maîtrise technique qu'ils imposent à
leurs fournisseurs. Proche de productions "sur mesure", ces marchés
présentent cependant une croissance potentiellement très forte. (Programme
Mobilisateur Nouveaux Matériaux / RW / 1990).
-
Les nouvelles
céramiques sont un autre domaine d'activité porteur pour l'avenir : au
niveau mondial, leur marché devrait tripler en volume au cours des années
nonante grâce à un vaste éventail de débouchés potentiels. Les entreprises
fabricants des poudres pourront bénéficier de ce potentiel de croissance. A
travers les néocéramiques, la Région wallonne peut donc exploiter un autre
secteur porteur. Fer de lance de cette activité en Wallonie, la firme
Néocéram fabrique exclusivement des produits en néocéramiques. Néocéram, qui
concrétise les efforts de plusieurs sociétés par le développement de ces
matériaux, est en phase d'expansion, mais possède les équipements pour
aborder les petites et moyennes séries de pièces à haute valeur ajoutée.
(Programme Mobilisateur Nouveaux Matériaux/ RW / 1990).
-
Dans le secteur du
verre, l'innovation de produits est également de mise : une entreprise comme
Glaverbel, fortement implantée en Wallonie, réalise 30% de son chiffre
d'affaires actuel en fabriquant des produits qui n'existaient pas sur le
marché il y a quinze ans. La même firme développe dans le bassin
carolorégien un produit high- tech dont les applications
industrielles devraient se multiplier: les micro-billes de verre (Programme
mobilisateur Nouveaux Matériaux/ RW/ 1990).
Dans d'autres zones de la
Région, les activités se développent plus en rupture avec les industries
traditionnelles : ainsi en va-t-il par exemple dans le sud-Luxembourg, le
Hainaut occidental, la Basse-Sambre, le sud de Bruxelles et la province de
Liège.
-
Suite à l'arrivée de
plusieurs grandes firmes multinationales qui sont venues étoffer un tissu
régional composé essentiellement de PME, la filière chimique a pris ces
dernières années un essor particulier en Wallonie. Elle représente
aujourd'hui 11% de l'emploi manufacturier régional (ONSS 1992). Ainsi, la
chimie de base, implantée pour l'essentiel dans la Basse-Sambre, constitue
pour la zone un véritable pôle avec la présence d'importants investisseurs
étrangers qui y mènent tout autant des activités de production que des
activités de recherche. Pour le long terme, le potentiel de croissance de ce
secteur semble élevé (SGP 1993).
Il en est de même de l'industrie
pharmaceutique dont l'évolution offre d'excellentes possibilités de
croissance aux exportations wallonnes : ce secteur comporte un éventail de
"niches" potentielles particulièrement porteuses sur lesquelles certaines
entreprises de la Région se sont déjà positionnées. Ainsi la firme
Eurogentec (Liège) qui a récemment mis au point un vaccin anti-viral, une
substance anti-stress et une protéine permettant le transfert direct et sans
mortalité des saumons en mer. Ce type de produits d'aquaculture de haute
technologie va permettre de répondre à des besoins appelés à croître de
manière exponentielle vu l'important développement des fermes d'élevage de
poissons. Il existe en effet très peu de produits curatifs ou préventifs
pour l'aquaculture (SGP 1993).
Signe d'une
volonté de poursuivre leurs activités en Wallonie, les entreprises des
industries chimique et pharmaceutique investissent de façon considérable
dans le développement de nouveaux produits et modes de production : ells
représentent ensemble pas moins de 44% des dépenses privées en Recherche
et Développement effectuées sur le sol de la Région (source : SPPS).
-
Parmi les entreprises
liégeoises qui investissent dans la Recherche et Développement, nous
constatons qu'à côté des grandes entreprises liées au secteur de la
métallurgie, il coexiste une grande diversité d'entreprises (souvent de
petite dimension) qui investissent dans les secteurs nouveaux de
l'électronique, de la chimie, de l'agro-alimentaire, de la mécanique de
précision ou des télécommunications. En 1992 et 1993, les entreprises
liégeoises représentaient 40 à 50% des firmes bénéficiant d'une avance
récupérable de la Région pour le développement de nouveaux produits et
procédés.

La trajectoire de création technologique
Le développement régional
basé sur la science et la production de haute technologie est une trajectoire
pour laquelle le potentiel technologique de la région est central. Elle s'appuie
sur un fort potentiel de recherche scientifique fondamentale et pré-compétitive
et se place d'emblée dans la compétition technologique mondiale. Son succès
dépend dès lors de conditions très précises qui ne la rendent accessible qu'à un
nombre très limité de régions.
D'un point de vue
territorial, ce type de développement induit l'apparition du phénomène
technopolitain, soit la constitution de parcs d'activités scientifiques et
technologiques où se mêlent université, petites entreprises innovatrices
d'initiative locale et laboratoires de groupes industriels mondiaux.
1. Contraintes à la mise en oeuvre
de cette trajectoire
Les contraintes de la
trajectoire de création technologique sont liées :
-
à la capacité de
maîtriser l'incertitude engendrée par la recherche : tous les programmes de
recherche n'aboutissent pas aux résultats scientifiques escomptés, ni à
fortiori à une application porteuse de développement;
-
au coût élevé des
investissements matériels (laboratoires, équipements) et immatériels
(personnel de recherche, acquisition de connaissance, mises en réseaux);
-
à la nécessité
d'atteindre une masse critique minimale : la maîtrise d'une spécialité
technologique nécessite un investissement minimal en termes de temps et de
finances publiques et privées.
Les facteurs impératifs à
la réussite de cette trajectoire seront dès lors :
-
la présence de
laboratoires de niveau universitaire dont la renommée internationale est
reconnue dans au moins deux ou trois spécialités;
-
une longue tradition
de recherche dans les domaines ciblés : il faut vingt ans à une équipe de
chercheurs pour être performante;
-
un investissement
public massif sur des cibles de recherche bien définies, aucun phénomène
technopolitain ne pouvant surgir sans engagement durable des pouvoirs
publics.
2. L'action des pouvoirs publics
Comme il vient d'être
souligné, le soutien public est vital au succès de cette trajectoire. Il se
concentrera sur :
-
une subsidiation à
long terme de la recherche fondamentale et pré-compétitive sur des cibles
précises présentant une opportunité réelle d'atteindre un niveau
d'excellence;
-
une stimulation des
liens entre centres de recherche et l'industrie via des instruments tels que
les cellules d'interface;
-
l'offre des facteurs
constituant un environnement favorable au développement technopolitain :
télécommunications de pointe, services publics et réseaux d'enseignement de
qualité, activités culturelles et de loisirs, environnement naturel
préservé,...
.../...
Michel Quévit, Vincent
Lepage, La Wallonie, une région économique en mutation, dans
Wallonie. Atouts et références d'une
Région, (sous la direction
de Freddy Joris), Gouvernement wallon, Namur, 1995.