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Charles Bertin Ecrivain
Mons 05.10.1919 -
Rhode-saint-Genèse le 21 octobre 2002 |
Ce texte est extrait de
l'ouvrage
Cent Wallons du siècle
Institut Jules Destrée,
Charleroi, 1995
Index |
Neveu de Charles Plisnier
auquel il consacre un essai en 1964, Charles Bertin touche, dès son adolescence,
à l’ensemble des domaines de l’activité littéraire : poète, journaliste et
critique sensible et cultivé, analyste lucide des profondeurs amères, homme de
théâtre au métier sûr, Bertin est un écrivain dont l’écriture, souple et ferme,
claire et simple, est exemplaire. Ne s’intéressant qu’à l’individu, Charles
Bertin est, avant tout un moraliste. Ses premières œuvres seront rapidement
appréciées. Dans la plupart de celles-ci, avec un ton et dans un contexte
renouvelés, se retrouve le thème de la solitude d’un destin hors série. La
solitude de l’amour apparaît dans Psaumes sans la Grèce, et Don Juan
où elle est particulièrement bien mise en évidence. La solitude du pouvoir
et de l’aventure apparaît dans Christophe Colomb. La solitude de la mort,
quant à elle, est brillamment exprimée dans Je reviendrai à Badenburg. À
chaque reprise, l’homme qui est à la recherche de lui-même échoue et est
davantage un désespéré qu’un libertin. Dans le roman Journal d’un crime,
Charles Bertin décrit la solitude de la responsabilité intérieure, involontaire
mais angoissante. Dans le Bel âge, l’hostilité d’une ville provinciale
effraye le héros. Représentation métaphorique de notre civilisation, Les
jardins du désert fait se dérouler l’action au
xxie siècle sur une île calcinée où se sont
regroupés, sous l’égide d’une sorte de despote éclairé, les survivants d’un
cataclysme. S’écartant de ces thèmes, Charles Bertin tourne en dérision le
sérieux affiché par le monde adulte, avec une sorte de Caligula dérisoire (Le
roi Bonheur). Il adapte également des œuvres classiques comme Macbeth
ou L’oiseau vert. Romancier révélé par ces Jardins du désert, au
début des années ’70, Charles Bertin donnera la preuve de sa maîtrise narrative
dans son Voyage d’hiver ainsi que dans La vieille dame en son jardin
de Bruges (1995), son plus grand succès public. En 2000, il publie des
nouvelles Jadis, si je me souviens bien. Membre de la Commission
permanente de la RTBf, président du Comité belge de la Société des Auteurs,
dramaturge, Charles Bertin est membre de l’Académie de Langue et de Littérature
françaises depuis 1967. Une solide amitié le liait à Marcel Thiry dont il a
commenté des textes et contribué à conserver la mémoire. Se considérant comme un
écrivain œuvrant dans une province française, l’écrivain Charles Bertin avait
conservé, sa vie durant, cette part de militantisme qui, au cours de ses études
de droit et de sciences politiques à l’Université libre de Bruxelles, l’avait vu
collaborer au journal La Faluche, organe du Cercle des Étudiants wallons
de l’ULB (1939), dont il était membre.
Docteur en droit (1941),
Charles Bertin avait entamé une carrière d’avocat à Mons (1942-1947), était
devenu chef de Cabinet adjoint du ministre du Travail et de la Prévoyance
sociale (1947-1949) avant de devenir l’un des conseillers juridiques de la FGTB
(1949-1952). De 1952 à 1984, il est d’ailleurs le secrétaire général du Conseil
professionnel du Métal. Établi à Rhode-Saint-Genèse au début des années
cinquante, il mène un long combat en faveur de la défense des droits culturels
des francophones de la « périphérie ». En juin 1976, avec 141 autres
personnalités, Charles Bertin signe la Nouvelle Lettre au roi pour un vrai
fédéralisme rédigée à l’initiative de Fernand Dehousse, Francis Delperée,
Joseph Hanse, Maurice Leroy, Jean Rey et Marcel Thiry. Dépasser la
régionalisation pour instaurer un fédéralisme véritable, fondé sur le respect
des droits de l’homme et de l’égalité des citoyens, fondé sur l’égalité
politique des communautés et des régions qui ont des pouvoirs véritables, un
fédéralisme où Bruxelles est reconnue comme région à part entière, tel est le
message des signataires qui ne souhaitent pas que la réforme constitutionnelle
reste bloquée à mi-chemin du simple fait des Flamands qui ont obtenu leur
autonomie culturelle. Jusqu’à sa mort, Charles Bertin restera un défenseur
ardent et attentif de la langue et de la civilisation françaises.
Paul
Delforge
Cinquante ans de théâtre en Belgique
(1973)
Delforge P.,
Cent Wallons du Siècle, Namur (Institut Jules Destrée), 2e
éd., 1995
Ethnie française,
septembre 1976, p. 188-193
FHMW Fonds Andrien, 179-205
Forces wallonnes,
19 juin 1976
Le Soir,
23 octobre 2002.
On se
reportera à la notice qui lui est consacrée dans l’Encyclopédie du Mouvement
wallon,
sous la direction scientifique de Paul
Delforge, Philippe Destatte
et Micheline Libon, Charleroi,
2000, tome 1, p. 146
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