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La Wallonie, une région en Europe

La coopération transfrontalière - (1995)

Barbara Destrée
Attachée à la Direction générale des Relations extérieures de la Région wallonne

 

 L'initiative communautaire INTERREG

Les initiatives communautaires sont un des instruments de la politique structurelle européenne. Treize programmes spécifiques sont en effet proposés par la Commission européenne à ses Etats membres pour soutenir des actions qui contribuent à résoudre des problèmes ayant une incidence particulière au niveau européen. Citons par exemple la reconversion de bassins charbonniers et sidérurgiques (initiatives RECHAR et RESIDER), la reconversion de zones fortement dépendantes du textile (RETEX), ou le renforcement des liens transfrontaliers (INTERREG). Ces actions interviennent en complément des objectifs de développement (objectif 1, objectif 2, etc.) qui ont été définis par l'Union européenne dans le cadre de sa politique de renforcement de la cohésion économique et sociale des Etats membres de l'Union.

 

Pourquoi une initiative communautaire spécifique à la coopération transfrontalière ?

Les régions frontalières de l'Union européenne occupent 15% de son territoire et représentent 10% de sa population. Ces régions sont bien souvent hétérogènes en termes de densité de population et de développement économique. On peut cependant remarquer que le taux de chômage y est généralement supérieur aux autres régions du pays tandis que les revenus par tête d'habitant sont, eux, généralement inférieurs.

La Commission a, dès lors, décidé, en 1990, de lancer une initiative spéciale pour promouvoir le développement économique de ces régions et les aider à tirer profit au mieux de l'intégration européenne. C'est l'initiative communautaire INTERREG. Une des particularités de l'initiative INTERREG est que le budget n'est pas alloué aux Etats membres mais bien aux différentes frontières qui les séparent, ce qui oblige les gouvernements nationaux ou régionaux à travailler en partenariat lors de l'élaboration même des programmes transmis à la Commission.

Zones éligibles

Toutes les régions frontalières internes et externes de l'Union sont éligibles à INTERREG. Certaines zones éligibles à INTERREG comportent en outre des parties qui ont été reconnues éligibles à l'un ou l'autre des objectifs de développement. En Région wallonne, durant INTERREG I, certaines zones étaient éligibles à l'objectif 2, d'autres à l'objectif 5B. La Commission, suivant une logique de concentration des fonds, a attribué le plus de moyens aux frontières bordant ces zones. Une nouveauté importante en ce qui concerne INTERREG II en Région wallonne a été l'éligibilité du Hainaut à l'Objectif 1, qui a entraîné une augmentation importante des fonds accordés à sa frontière commune avec la France. Toutefois, les zones frontalières n'étant pas éligibles à l'un de ces objectifs de développement peuvent bénéficier d'une aide communautaire au titre de l'article 10 du règlement du FEDER, qui prévoit une intervention communautaire pour les projets qui présentent un caractère original ou novateur, notamment en matière de coopération transfrontalière. Le niveau de délimitation administrative retenu pour cette action est le NUTS III (1), qui correspond en Belgique aux arrondissements. Certaines zones adjacentes aux zones frontalières peuvent également bénéficier d'INTERREG dans la mesure où ces actions impliquent un niveau élevé de coopération transfrontalière et ne mobilisent pas, en règle générale, plus de 20% de la dépense totale du programme concerné.

INTERREG est un programme qui peut bénéficier des différents fonds structurels, en Région wallonne, les programmes font appel tant au FEDER (Fonds européen de Développement régional), au FSE (Fonds social européen) qu'au FEOGA (Fonds européen d'Orientation et de Garantie agricole).

Il faut enfin souligner qu'INTERREG a souvent permis la formalisation de coopérations pré-existantes, elles-mêmes parfois financièrement soutenues par l'Union européenne.

 

Objectifs principaux poursuivis par INTERREG (2)

  • aider les zones frontalières intérieures et extérieures de l'Union européenne à surmonter les problèmes spécifiques en matière de développement découlant de leur isolement relatif, dans les économies nationales et dans l'Union européenne dans son ensemble; dans l'intérêt des populations locales et d'une manière compatible avec la protection de l'environnement;

  • encourager la création et le développement de réseaux de coopération de part et d'autre des frontières intérieures et, le cas échéant, l'établissement de liens entre ces réseaux et de plus vastes réseaux communautaires, dans le cadre de l'achèvement du marché intérieur de 1992;

  • favoriser l'adaptation des zones frontalières extérieures à leur nouveau rôle de zones frontalières d'un seul marché intégré.

 

Types d'actions éligibles dans le cadre de cette initiative :

  • la programmation et la mise en oeuvre conjointes de programmes transfrontaliers (des exemples concernant la Région wallonne seront évoqués dans ce présent document);

  • l'introduction de mesures visant à améliorer les flux d'information de part et d'autre des frontières et entre les régions frontalières, entre institutions publiques, organisations privées et organismes volontaires à l'intérieur des zones concernées;

  • la mise en place de structures institutionnelles et administratives communes pour soutenir et encourager la coopération.

Les programmes mis en oeuvre tendent donc à développer les synergies entre opérateurs économiques, technologiques, scientifiques et industriels. Mais ils connaissent aussi de nombreuses applications touchant à la vie des personnes : protection de l'environnement, aménagement du territoire, tourisme, insertion sociale, transports,...

INTERREG I en Europe

Depuis 1991, trente et un programmes ont été approuvés par la Commission, impliquant une contribution financière communautaire de 1.034 millions d'Ecus pour une période de programmation s'étendant de 1991 à 1993 (3). Parmi les pays ayant le plus profité de cette initiative, citons la France, qui a participé à treize programmes, suivie de l'Allemagne (douze programmes), des Pays-Bas et de la Belgique (sept programmes), de l'Italie (cinq programmes). Le Royaume-Uni, le Luxembourg et l'Espagne n'ont participé qu'à deux programmes, tandis que la Grèce, l'Autriche, le Portugal et l'Irlande n'ont participé eux qu'à un programme INTERREG.

La Commission a publié, le 30 juillet 1994, la communication relative à INTERREG II. La période de programmation a été doublée, elle est maintenant de six ans. J'y reviendrai à la conclusion de ce document.

 

Participation de la Région wallonne à INTERREG I

La Wallonie a l'avantage de disposer de frontières communes avec quatre autres pays de l'Union européenne : la France, l'Allemagne, les Pays-Bas et le Luxembourg. La Région wallonne a souhaité mettre à profit cette situation géographique privilégiée. Quatre programmes de coopération transfrontalière ont donc été présentés à la Commission.

Dans les lignes qui suivent, je vais brièvement présenter ces différents programmes et développer certains projets particulièrement significatifs qu'ils ont permis de mettre en oeuvre. Un retour en arrière sera également effectué afin de présenter l'état de la coopération entre les différentes régions préalablement à la mise en place de l'initiative INTERREG. On verra d'ailleurs qu'INTERREG a été largement tributaire des coopérations pré-existantes, qu'elle a amplifiées et structurées, mais que lorsqu'aucune habitude d'échange ou de coopération n'existait entre les régions, le principal mérite d'INTERREG I aura été d'apprendre aux gens à se connaître et de leur donner, nous l'espérons, l'envie de développer des projets communs dans le cadre d'INTERREG II.

 

1. Programme EUREGIO Meuse-Rhin (EMR)

Couverture géographique : les provinces de Liège et du Limbourg en Belgique, la région d'Aachen et le Sud Limbourg hollandais.

Budget global INTERREG I (4) : 49,94 mécus

Précurseur en la matière, l'EMR a entamé la coopération transfrontalière dès 1976. Ces premiers échanges ont conduit, en 1986, à l'établissement et à la publication d'un programme d'action transfrontalier (PAT), réalisé en partie grâce au soutien financier de l'Union européenne. Celui-ci servira d'ailleurs de base à l'élaboration du programme déposé par les parties au titre d'INTERREG I, les thèmes principaux y étant déjà abordés. Les objectifs du PAT visaient à réaliser la convergence économique entre les régions : suppression des obstacles dus aux frontières, amélioration de la position concurrentielle eurégionale, suppression des goulots d'étranglement en matière d'infrastructure, préservation de l'environnement et coordination des études urbanistiques.

 

Exemples de projets mis en oeuvre dans le cadre de l'EMR :

Les partenaires ont réalisé une large étude envisageant l'aménagement du territoire dans la zone de l'Eurégio d'une manière globale. Le projet MHAL (Maatricht, Hasselt, Aachen, Liège) a en effet permis de dégager de nombreuses pistes en matière d'aménagement du territoire transfrontalier qui seront ensuite mises en pratique dans le cadre d'INTERREG II ou des politiques nationales en la matière.

Divers projets ont été mis en oeuvre dans le cadre du développement du parc naturel transfrontalier Hautes-Fagnes - Eifel, telle l'adaptation et l'extension d'une série d'équipements existants en faveur du "tourisme doux", ou l'entretien et l'embellissement des haies de part et d'autre de la frontière belgo-allemande. Bien que non privilégiées par la Commission dans le cadre d'INTERREG, certaines infrastructures ont également été réalisées, ainsi par exemple l'extension d'une station d'épuration sur le Geer en province de Liège.

Diverses mesures ont également été prises en matière de transfert de technologies telles l'organisation d'une bourse de technologie eurégionale, l'organisation de quatre manifestations technologiques et la publication de brochures s'y référant.

De par la diversité des partenaires, au nombre de cinq, la Région wallonne et la Communauté germanophone n'ont pas participé à tous les projets mis en oeuvre dans le cadre de l'EMR, contrairement à ce qui se fait dans la majorité des autres programmes bi ou tri-partites.

 

Particularité de l'EMR

L'EMR est le seul programme transfrontalier wallon doté d'une structure juridique propre, d'abord Association de fait et maintenant Fondation de droit néerlandais. Il dispose d'un bureau permanent localisé à Maastricht chargé du secrétariat, de la coordination et de l'administration, etc. Il est important de signaler ici que nos partenaires néerlandais sont partie prenante de sept programmes transfrontaliers également appelés EUREGIOS et fonctionnant selon ce principe. Remarquons cependant que la structure mise en place préalablement à l'introduction d'INTERREG perdure, même si, dans certains cas, elle n'est plus représentative de l'évolution des pouvoirs décisionnels. C'est ainsi que la Fondation est présidée collégialement par le Commissaire de la reine de la province du Limbourg néerlandais, les gouverneurs des provinces belges du Limbourg et de Liège et le Regierungspräsident de Cologne, alors que les décisions relatives à l'octroi des fonds INTERREG en Région wallonne sont assumées par le gouvernement de cette dernière.

En juin 1992, la Communauté germanophone de Belgique a fait son entrée dans les organes de l'Euregio en tant que cinquième partenaire, prenant ainsi une certaine indépendance institutionnelle par rapport à la Région wallonne dont elle fait pourtant partie. Le ministre-président de la Communauté germanophone est d'ailleurs le seul ministre intervenant dans le programme INTERREG à siéger au Comité directeur de la Fondation.

L'Euregio poursuit en outre sa structuration en parallèle de l'évolution d'Interreg. C'est ainsi qu'un Conseil provincial eurégional a été constitué en 1994.

2. Le Pôle européen de Développement (PED)

Qualifié par Jacques Delors de Laboratoire au millième de l'Europe, il est impossible d'aborder le sujet de la coopération transfrontalière en Wallonie sans parler du Pôle européen de Développement. Celui-ci a cependant été créé bien avant l'initiative communautaire INTERREG.

Les actions entreprises dès 1985 avaient un objectif prioritaire : répondre à un problème crucial qui frappait en même temps les bassins sidérurgiques de Longwy (France), Athus (Belgique) et Rodange (Luxembourg), à savoir la perte de près de 30.000 emplois. Des aides européennes très importantes ont dès lors été attribuées à cette petite zone frontalière tandis que les trois Etats membres adoptaient une déclaration commune, se fixant le but de créer 8.000 emplois en 10 ans. Divers projets ont été adoptés dans ce but, projets qui ont évolué en parallèle avec l'évolution des dispositifs mis en place par la Commission (Programmes nationaux d'intérêt communautaire, programmes opérationnels d'Objectif 2 et, en 1990, programme opérationnel INTERREG I).

Couverture géographique : les arrondissements d'Arlon, Neufchâteau, Virton et Bastogne en Belgique, les cantons de Capellen et d'Esch sur Alzette au Luxembourg, la Meuse du Nord, Longwy, Thionville et le bassin houiller en France.

Budget général INTERREG I : 50,87 mécus.

 

Exemples de projets :

Centrés au départ uniquement sur l'économique, par la création d'un Parc international d'Activités : aides aux entreprises, assainissement de friches industrielles, créations de halls-relais, formation...; ces projets se sont ensuite diversifiés afin de mettre à profit les nouveaux types d'actions proposées par la Commission. Je citerai ici divers exemples, dont certains ont toutefois été initiés préalablement à INTERREG I.

Le collège européen de technologies (CET). Ce collège, est organisé au départ de trois groupes nationaux fédérés par une convention trilatérale. Ces groupes sont eux-mêmes des fédérations d'organismes et d'institutions de formation, d'enseignement et de recherche, qui sont opérateurs de projets initiés au sein du CET. L'équipe de celui-ci intervient principalement en tant que catalyseur, intermédiaire entre les différents acteurs, garant de l'homogénéité de la démarche. Depuis le début d'INTERREG I, le CET forme environ 1.600 stagiaires par an.

Projet d'agglomération transfrontalière : entrepris dans le cadre d'INTERREG I et poursuivi dans le programme INTERREG II qui est pour l'instant examiné par la Commission européenne, ce projet vise à réussir la greffe du Parc international d'Activités dans une agglomération transfrontalière dynamique et attrayante par une recomposition urbaine, sociale et économique simultanément. La difficulté majeure tient à la triple organisation rencontrée sur le terrain, où chacun des Etats dispose de bases démocratiques propres. Une large étude de l'aménagement du territoire a été entreprise durant INTERREG I, portant sur les communes de Longwy (F), Aubange et Musson (B), Differdange et Bascharage (L). En parallèle à cette étude, certains projets concrets constituent déjà des jalons dans cette voie, telle par exemple l'acquisition d'un équipement de sécurité (lutte contre le feu), qui améliorera le réseau intégré déjà mis en place sur un plan transfrontalier, surtout du point de vue des risques industriels.

3. Le Programme PACTE (Wallonie / Nord-Pas-de-Calais)

Couverture géographique : le programme PACTE couvre la province du Hainaut (à l'exception de l'arrondissement de Soignies) et les arrondissements français de Lille, Roubaix, Tourcoing, Valenciennes, Cambrai et Avesne (Nord-Pas-de-Calais).

Budget global INTERREG I : 32 mécus

Ici aussi, la coopération transfrontalière avait été initiée dès 1989, déjà avec le soutien de la Commission. Sans s'être dotée d'une structure comme c'est le cas pour l'Euregio, le programme "PACTE 89" avait cependant permis d'initier divers types d'actions transfrontalières.

 

Exemples de projets :

Afin de travailler, au niveau transfrontalier, en complémentarité avec ce qui se faisait dans le programme d'objectif 2, un des accents du programme INTERREG a été mis sur le soutien à la création et au développement économique et technologique des PME. Dans ce cadre, l'un des projets vise la création d'un pôle de compétence européen en matière de néo-céramique par le renforcement du potentiel de deux centres de recherche existant de part et d'autre de la frontière regroupés au sein d'un centre commun : le CETT CERAM. Cette intervention comporte plusieurs volets qui vont de l'assistance technique directe aux PME-PMI sous forme d'essais, de tests de produits, de résolution de problèmes techniques, à la mise à disposition des entreprises d'un laboratoire d'analyses multiples utilisant les compétences et le matériel des deux institutions transfrontalières, le transfert technologique par la formation spécifique du personnel des entreprises. Une opération similaire a d'ailleurs été menée dans le secteur du bois.

Un bureau de rapprochement des entreprises (BDTE) a été créé. Son objectif est d'offrir une assistance aux entreprises et aux chefs de petites entreprises par l'accomplissement, pour leur compte, de l'ensemble des formalités nécessaires à l'exercice de leur profession de part et d'autre de la frontière, de proposer des séances de formation et d'information sur les marchés transfrontaliers...

D'autres projets sont également mis en oeuvre, tels par exemple la création d'un parc naturel transfrontalier entre la plaine de la Scarpe et de l'Escaut et le Sud Hainaut occidental, (supports de communication, animations coordonnées sur le tourisme fluvial, mise en valeur du patrimoine). Dans le domaine touristique, on peut encore citer la réalisation d'un programme pluriannuel d'actions de valorisation économique et touristique des sites situés le long de la voie dite "Brunehaut" sur base de diverses actions : création d'une cellule d'assistance technique au développement du potentiel local, développement de services touristiques transfrontaliers, etc.

 

4. Le programme Wallonie-Champagne-Ardennes

Couverture géographique : les arrondissements de Charleroi, Thuin, Namur, Philippeville, Dinant, Virton, Neufchâteau en Belgique et le département des Ardennes françaises.

Budget global INTERREG I : 14,7 mécus

Le programme Wallonie-Champagne-Ardennes a été le plus difficile à mettre en oeuvre. En effet, aucune communication n'existait entre les populations de part et d'autre de la frontière. Celles-ci ont toujours vécu dos à dos, notamment à cause de la bande forestière qui les sépare. Au niveau institutionnel également, les contacts qui ont été pris lors de la mise en oeuvre de programme étaient, en général, de premiers contacts entre institutions qui ne se connaissaient pas. Dès lors, le seul fait que la mise en oeuvre du programme ait initié un processus de relations et de coopérations jusque là inexistantes peut déjà être considéré comme un point positif. Le programme INTERREG I a dû apprendre aux populations à se connaître.

 

Exemples de projets :

Quatre études ont été réalisées concernant les flux de transport de part et d'autre de la frontière. L'une d'entre elles a notamment permis de déterminer un "effet frontière" de l'ordre de 25 à 50 kilomètres selon que l'on traverse la frontière occasionnellement ou régulièrement. Cette étude prouve donc bien un certain degré d'imperméabilité de la frontière et le cantonnement des populations locales sur leurs versants respectifs alors qu'elles pourraient profiter de services de proximité beaucoup plus proches de leurs domiciles, en traversant la frontière.

Mais ce programme a également permis des réalisations concrètes, notamment en termes de développement des ressources humaines. La gamme des formations transfrontalières élaborées dans le cadre de ce programme s'étendait des formations classiques (ardoisiers-couvreurs) jusqu'aux formations de pointe (formation aux outils de recherche en matériaux nouveaux) en passant par des formations mettant en valeur les ressources de la zone (formation en "travaux de la forêt"). De part les particularités de la zone, ces formations qui répondaient à des besoins réels, ont connu un grand succès et se sont caractérisées par un taux de placement particulièrement élevé des stagiaires à l'issue de leur formation.

La zone transfrontalière compte de nombreux atouts sur le plan des ressources naturelles et des richesses patrimoniales. Un axe "tourisme" a dès lors été développé en axant la promotion sur des pôles touristiques transfrontaliers homogènes ou sur des thèmes spécifiques mettant en valeur les ressources potentielles. Citons par exemple la création, en Wallonie, d'un centre d'hébergement et d'animation axé sur la sensibilisation à la flore-faune, à la géologie, en collaboration avec des activités du jour organisées par l'Office national de la Forêt en France, ou encore la mise en place de dispositifs transfrontaliers de surveillance des eaux de la Meuse et de ses affluents (laboratoire d'analyse, station de mesure...). Nous touchons ici un point parfois ambigu qu'est la définition d'un projet transfrontalier. Si la Commission préfère soutenir des projets disposant d'un opérateur de chaque côté de la frontière, elle accepte cependant certains projets localisés d'un seul côté, mais entraînant des retombées sur l'ensemble de la zone visée.

Evaluation d'INTERREG I

Il est encore difficile, à l'heure actuelle d'évaluer les retombées concrètes d'INTERREG I. En effet, de par le délai entre la publication des textes relatifs à INTERREG I et les décisions de la Commission relatives aux différents programmes (souvent plus d'un an), peu de projets ont réellement disposé du laps de temps initialement proposé. Certains opérateurs, préalablement sensibilisés, ont d'ailleurs entièrement dû refaire leur projet. La majorité des projets n'a généralement débuté qu'en 1994 et la plupart d'entre eux sont encore en cours.

La Région wallonne a cependant demandé à un groupe interuniversitaire de consultants de réaliser une évaluation intermédiaire des programmes INTERREG I PACTE et Wallonie-Champagne-Ardennes pour disposer d'une première base lors de l'élaboration des programmes INTERREG II. Celle-ci a permis de dégager les axes à privilégier dans le cadre d'INTERREG II, et a fourni de nombreuses recommandations quant à la gestion administrative de ce type de programme (5).

 

INTERREG II (1994-1999) par rapport à INTERREG I

La période de programmation a été doublée, elle est maintenant de six ans. Il faut cependant remarquer que la Commission n'a publié la Communication relative à INTERREG II qu'à la fin du mois de juillet 94. Les diverses autorités parties prenantes du programme ont ensuite dû élaborer leurs programmes communs. C'est ainsi que les programmes wallons ont été déposés à la Commission en novembre 94 (EMR), décembre 94 (programmes franco-wallons) et janvier 95 (PED). Nous avons reçu les remarques de la Commission relatives à ces différents programmes (entre mars et juillet 95), avons dû y répondre (en partenariat transfrontalier), et ne disposons à l'heure actuelle que de la décision relative à l'EUREGIO. Compte tenu du fait que, suite à l'approbation des programmes, les projets doivent encore être sélectionnés par le Comité de suivi, on peut dire qu'INTERREG II 94-99 ne commencera, dans bien des cas, qu'en 1996.

De nouvelles mesures éligibles ont été ajoutées, étendant encore le champ, déjà vaste, d'application d'INTERREG. Celles-ci sont proposées dans des domaines tels que l'éducation, la culture, la santé, les services multimédia, la formation linguistique et la planification spatiale. Le budget affecté à INTERREG II pour l'ensemble des zones frontalières de l'Union européenne se monte à 2.400 millions d'écus, dont 75% seront versés aux régions d'objectif 1 selon la logique de concentration des fonds de la Commission.

La Région wallonne a réintroduit quatre programmes de coopération transfrontalière, en prolongement aux actions entamées dans INTERREG I. L'éligiblité des régions wallonnes aux différents objectifs a été grandement modifiée entre INTERREG I et INTERREG II, la province du Hainaut étant maintenant éligible à l'objectif 1. Ceci a entraîné une grande disproportion dans la répartition des fonds attribués aux différentes frontières wallonnes. C'est ainsi que la Région bénéficie d'un cofinancement communautaire de près de deux milliards de francs belges, dont près de la moitié est affectée au programme Hainaut - Nord-Pas-de-Calais, étendu maintenant à la Picardie française.

La Région wallonne a également tenu compte des priorités déterminées dans le cadre des programmes d'objectif afin qu'INTERREG puisse agir en complément de ces derniers. Les programmes ont également été adaptés aux caractéristiques de la zone, tant au niveau de ses besoins (formation,...) que de ses potentialités (tourisme, environnement).

Conclusion

La coopération transfrontalière est certainement un bon révélateur de l'état d'avancement du processus engagé par l'Union européenne. Elle facilite en effet des coopérations préexistantes, les dotant de moyens financiers propres. Lorsqu'aucune collaboration n'a été entamée préalablement, elle nous permet par contre d'observer la difficulté de l'établissement de coopérations, surtout institutionnelles et administratives, de part et d'autre des frontières. Il est par contre réconfortant de constater que, même lors de nouvelles coopérations, la volonté existe chez de nombreux opérateurs potentiels, de tenter cette expérience de travail en commun.

Une des faiblesses de la plupart des programmes transfrontaliers est de rarement aboutir à la création de structures juridiques communes, ne serait-ce que pour la gestion de ces programmes. Le fait est que le droit européen ne propose qu'un modèle, le Groupement européen d'Intérêt économique, qui est difficilement accepté par certains Etats membres, qui y voient une perte de leur contrôle, voire de leur souveraineté nationale. C'est pourquoi le seul programme disposant d'une structure juridique propre est le programme EUREGIO, de par la souplesse offerte par le droit néerlandais. Dans ce sens également, il sera intéressant d'observer les programmes déposés par les différents Etats membres dans le cadre d'INTERREG II.

INTERREG peut être vu comme un "laboratoire" qui permet indéniablement de dégager certaines pistes de coopération et de travailler à la résolution de certains problèmes communs par la réalisation de projets concrets dont j'ai cité quelques exemples.

INTERREG est cependant tributaire de l'attitude de l'Etat membre par rapport au processus d'unification entamé par l'Union européenne. En ce sens, l'engagement de la Région wallonne dans le processus européen dès l'émergence de celui-ci et son rôle d'impulsion dans certains domaines ne pouvaient que favoriser notre prise de conscience de l'importance de la coopération transfrontalière, et donc motiver notre participation à cette initiative communautaire.

Notes

(1) NUTS : Nomenclature statistique des Unités territoriales, utilisée dans la classification communautaire normalisée.
(2) JO n° C180 du 1.7.1994, p.35.
(3) Les actions entreprises pouvant se dérouler, selon qu'elles émargent au FSE ou au FEDER, jusqu'à fin 1994 ou fin 1995.
(4) Ce budget comprend la contribution communautaire mais aussi la contribution des Etats membres.
(5) Programmes opérationnels INTERREG PACTE et Wallonie-Champagne-Ardennes, évaluation et prospective, SGP consultants, novembre 1994.

 

Barbara Destrée, La coopération transfrontalière, dans La Wallonie, une région en Europe, CIFE-IJD, 1997


 

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