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Droit de vote des immigrés :
La démocratie ...par à coup -

Des élus non - belges à la commune...pour faire quoi ?

Alberto Gabbiadini
Directeur de l'Ente nazionale acli instruzione professionale (ENAIP)
Administrateur de l'Isoc Wallonie,
Président de la Commission Immigration et Culture de l'Institut Jules Destrée

Septembre 2000,

La démocratie ...par à coup

Déception...quand les médias ont annoncé que près de 25% d’électeurs potentiels d’origine d’un des pays de l’union européenne s ‘étaient inscrits pour participer aux élections communales du 8 octobre.

Déception plus grande encore chez ceux qui depuis 1970 se sont fait promoteurs de ce droit de vote comme revendication primordiale pour engager la société vers une reconnaissance politique de la présence des travailleurs immigrés et la mener vers une démocratie représentée, ainsi par l’ensemble de la population.

Bien des questions se posent et il faudra les aborder si on ne veut pas perdre cette avancée, ou plutôt cette demi avancée démocratique puisqu’on a délibérément, écarté une part importante de la population ne faisant plus partie de l’Union Européenne, alors qu’elle a aussi pour sa part contribué économiquement et démographiquement à son essor.

1.      S’est-on trompé d’objectif ? Peut-être que d’avoir écarté, depuis 50 ans, les communautés immigrée du domaine politique et les avoir confinées dans un rôle purement économique et démographique, les ont aussi démobilisées de la revendication du droit politique : " Travaille et tais-toi " ne l’a-t-on pas assez dit sur tous les tons ?

Préoccupée à satisfaire les besoins premiers de la vie, écrasée par les soucis de leur avenir, auraient-elles pu s’intéresser à un domaine qui leur échappe et qui leur est étranger ?

 

2.      Peut-être n’avons nous pas assez convaincu nos compatriotes de l’importance de ce droit démocratique qui concerne tout citoyen ?

Peut-être avons nous consacré plus de temps à convaincre les responsables politiques et sociaux qu’à mobiliser la population, préoccupée qu’elle était de son droit de séjour, de la sauvegarde de son emploi, d’assurer l’avenir de leurs enfants de faire la sourde oreille aux propos racistes et xénophobes : ‘ "ils viennent manger notre pain, ce sont des profiteurs de mutuelle, à cause d’eux les caisses de chômage sont vides , ils ont beaucoup d’enfants pour profiter des allocations de chômage... "

Et pour ce qui est des candidats réfugiés, il y a la variante "à peine descendu d’avion, ils ont droit au CPAS "

A force de nous boucher les oreilles, nous ne nous sommes pas aperçus qu’ils sont devenus sourds et n’ont plus le courage de défendre leurs droits et leur dignité !

 

3.    Il est vrai que les responsables politiques ont montré trop d’inertie et ont manqué d’empressement à accorder ce droit fondamental.

Il a fallu les directives et les menaces de sanction européennes pour réviser la constitution et laisser tomber des critères qui dénotaient une peur de l’électorat étranger qui aurait menacé de changer l’échiquier politique des communes (et l’arrivée d’élus peu fiables)

De plus, ajouter l’obligation de s’inscrire préalablement...c’était une gageure !

La non volonté politique de certains partis, la peur de l’extrême droite ont fait plus reculer la démocratie qu’elles ne l’ont renforcée.

Car la meilleure manière de donner plus de vigueur à la démocratie, c’est faire participer politiquement l’ensemble des citoyens .

Pouvait-on attendre le premier Ministre qu’il impulse une mobilisation générale en faveur de l’inscription, puisque lui-même, alors député VLD a voté contre ce droit ?

Même la nouvelle loi sur l’acquisition de la nationalité (loi du 1 mars 2000) qui aurait pu amener certains à acquérir ce droit, a été boycotter soit par certaines administrations communales, soit par l’inertie des Parquets.

 

4.     Il faut reconnaître que certaines personnes ont parfaitement jouer le jeu et ont invité chaque personne concernée par lettre.

Mais une lettre ne suffit pas à convaincre les indécis, les méfiants, les indifférents .

Pourquoi n’avoir pas crée des équipes qui auraient été de maison à maison, de quartier à quartier, expliquer les enjeux de ce nouveau droit. Cela s’est fait aussi en 1973 à Liège, lors de l’élection au suffrage universel du premier Conseil Communal Consultatif. C’est ce qu’à fait magnifiquement l’asbl Démocratie sans frontière, en allant dans les centres.

 

5.    Le monde associatif a bougé, mais faute de moyen n’a pas été au delà de ses membres .

On estime que les associations regroupent environ 10% de la population. Il y a près de 18 % d’inscrits. Et les autres, qui peut les toucher,, eux qui font aussi de la démocratie ?

Certains articles dans les journaux ont sonné l’alarme, des tracts ont été distribué, mais peut-être n’étaient-ils pas assez mobilisateurs ? ne détaillant pas l’intérêt de ce droit ?

Deux vidéos ont été réalisées sur le sujet, mais arrivées avec du retard, elles n’ont pas pu être suffisamment utilisées. Pourquoi ne sont –elles pas passées à la Tv aux heures e grande écoute ?

Pourquoi n’avoir pas octroyé des subsides exceptionnels pour engager du personnel qui se serait consacré à ce travail de sensibilisation, comme cela s’est fait pour la régularisation des sans papiers ?

 

6.    Si le droit de vote communal a fait vibrer un moment l’immigration, actuellement cela n’est plus suffisant pour résoudre les problèmes.

Il faut aller au moins jusqu’au vote régional et même fédéral.

Le droit de séjour et le droit au travail restent un pouvoir fédéral.

Le permis de travail et la politique d’intégration ressortent du pouvoir régional.

Les différentes conceptions de la démocratie et les objectifs différents des partis font que le pays élabore difficilement les instruments légaux pour se donner une démocratie ouverte, généreuse et sans exclusive .

Une asbl s’est donné comme dénomination : Démocratie sans frontière, tant il est vrai que lorsque l’on établit des frontières ou que l’on met des exclusives, on va uniquement vers une démocratie ...par à coup

La démocratie est un droit qui s’accorde et non qui se mérite.

L’étranger n’est pas encore perçu comme un enrichissement social, culturel, économique et même politique.

Le peu d’enthousiasme des électeurs de l’Union Européenne ne va t-il pas induire les responsables politiques à ne pas aller au delà de cette démarche et en autre, à laisser tomber le droit de vote des non-européens

La constitution prévoit, pour eux, la possibilité de participer aux élections communales en 2006 mais il est nécessaire de voter, pour cela, une loi après 2001.

Verrons-nous les citoyens belges et européens se mobiliser pour que tous les citoyens puissent avec certitude, sans attendre la veille des élections ni le bon vouloir du gouvernement de ce moment-là, être considérés comme des citoyens à part entière et participer pleinement à la constitution d’une démocratie ouverte et généreuse soucieuse avant tout du bien être de toute la population.

 

Des élus non - belges à la commune...pour faire quoi ?

 Enfin après trente ans d’attente, il y aura des élus non – belges originaires des 15 pays de l’union européenne dans les conseils de certaines communes du pays, en octobre prochain.

Du moins, si les électeurs le veulent !

A moins que ce ne soit , comme pour les femmes et les enfants : il a fallu attendre longtemps pour que leur présence soit significative.

1.     Les partis démocratiques n’ont pas eu trop de difficultés pour trouver des candidats pour leurs listes.

C’était mal connaître les immigrés que de croire qu’ils allaient tous se concentrer sur un parti ; bien qu’ils aient connu les mêmes causes et les mêmes vicissitudes qui ont provoqué leur immigration et ils ont vécu ces périodes avec des options et des sensibilités différentes .

Et certains rapidement ont choisi d’être des leaders dans des différents engagements suivant leurs affinités sociales, culturelles ou politiques d’origine ou découvertes en Belgique.

Certains candidats n’ont pas toujours été mis en ordre utile sur les listes ou mis simplement comme porte voix au parti...à moins que la suppression partielle de la dévolution des voix de la case de tête n’apporte des surprises désagréables aux représentants traditionnels des partis.

 

2.     Certains candidats ont un passé qui laisse bien augurer des compétences acquises au cours de leurs engagements syndicaux ou de leur responsabilités dans des associations sociales ou culturelles.

D’autres ont pour eux leur renommée dans le milieu belge ou immigré. Mais ce sera le secret des urnes qui fera la répartition. Car certains, tout en ayant fait preuve de combativité et d’initiative dans leur syndicat ou dans leur mouvement, ne sont pas toujours très connu de la population. Il aurait été dommage qu’ils n’avaient pas été mis en ordre utile sur les listes .

Il est à espérer que même non – élus, ils puissent montrer leur dynamisme et leur compétence au sein du parti qu’ils ont choisi .

C’est bien là la question, élus ou non, comment vont-ils continuer à manifester leur présence au service de qui vont-ils mettre leur compétence ?

 

3.     La tentation sera grande de réduire l’activité de ces nouveaux élus au service de la vision particulière des problèmes de l’immigration des partis ou à des intérêts personnels en vue de leur promotion.

Après plus de 50 ans de politique migratoire, de connaissance des problèmes et la perspective de nouvelle migration, il est nécessaire de redéfinir une nouvelle politique d’immigration et une nouvelle politique du droit d’asile.

Au niveau européen, les responsables envisagent une nouvelle approche du problème. Et le ministre de l’intérieur, Antoine Dusquene veut, à l’occasion de la présidence Européenne de la Belgique, un grand débat sur une nouvelle vision de l’immigration et du droit d’asile.

Officiellement, l’Europe s’est définie multiculturelle. Et cela est vrai non seulement pour l’Europe, mais aussi pour chaque pays, chaque région, chaque province, chaque commune . La nouvelle politique sera donc d’arriver à un dialogue des cultures pour l’enrichissement de tous .

 

4.      C’est pour les nouveaux élus, une occasion de démontrer que les immigrés ne doivent plus être vus comme des cas sociaux à résoudre, ou des fruits de certains journaux à sensation, mais comme un enrichissement réciproque, en valorisant les apports culturels et sociaux, en mettant en place les structures nécessaires à l’épanouissement des valeurs humaines et du dynamisme économique et social.

Le dialogue interculturel postule des choix politiques qui permettent à tous de se reconnaître, participant au même projet d’une société ouverte, généreuse et capable de favoriser le bien-être de tous.

 

5.     Puisque les immigrés non européens n’ont pas pu participer aux élections, il est un devoir essentiel, pour les élus, d’être la voix de toute la population immigrée et surtout la plus fragile, c’est à dire, les candidats réfugiés, les sans papiers, les clandestins.

L’exemple des élus bruxellois d’origine maghrébine est à suivre, qui ont pris fait et cause pour les sans-papiers, qui ont visité les Centres fermés et qui se sont trouvés à l’aéroport de Zaventem pour vérifier comment se déroule l’accueil ou l’expulsion des candidats réfugiés.

Il est à espérer que les élus d’origine européenne vont illustrer par des initiations parlementaires au communale dans le débat politique en faveur de toute l’immigration.

 

6.     Le travail ne manque pas pour accentuer la politique communale en faveur des immigrés. On peut citer quelques exemples :

    -    L’attitude de certains CPAS vis-à-vis des sans papiers ou réfugiés laissent à désirer.

    -    Les services de la population (délivrance de papiers administratifs, inscription...)

    -    Les services de la population, les écoles mieux adaptées à la population, la promotion de la langue et de la culture (dans les bibliothèque...), les mairies de quartier, les antennes de CPAS etc.

    -    L’engagement du personnel compétent connaissant la langue et les coutumes et d’autres initiatives semblables donneraient la possibilité à la Commune de se créer une image de marque plus accueillante et plus souciante du bien-être de tous les habitants.

    -    L’aménagement de la voirie, la sécurité, l’amélioration de l’habitat, la création de plaines de jeux, d’espaces verts ...finiraient par casser les soi-disant ghettos des immigrés.

    -    Une politique culturelle, le soutien effectif aux diverses associations qui travaillent pour la convivialité et les rencontres interculturelles mettraient en évidence les différences culturelles dans leur apport enrichissant, dans leur effort de dialogue et dans leur lutte contre les préjugés et le racisme. C’est la meilleure manière de lutter contre la petite délinquance, la dégradation du bien public...et l’extrême droite.

 

Rêve ou utopie, peut-être, mais la tâche est enthousiasmante pour que ce qui est, au départ, une erreur politique (ne laisser participer à l’élection communale que ceux d’origine européenne) devienne une chance pour toute l’immigration et surtout pour une démocratie où toute la population participe à l’édification d’une cité accueillante et généreuse .

 

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