"Wallonie 2020", Institut Jules Destrée, Cinquième congrès La Wallonie au futur  

Wallonie 2020 : émergence des nœuds de futur
Rapport transversal des synthèses des quatorze groupes de travail tenus de février à juillet 2002

Groupe des JUSTINE  – Rapporteur : Joseph Charlier

Sommaire

Avant- propos

1. Composition du groupe des « Justine »

2. Les étapes du débat
2.1. Prise de connaissance et réflexions méthodologiques
2.2. Une approche des représentations de chacun, relatives à la définition de la Wallonie aujourd’hui, et la construction d’une représentation commune ?
2.3.Une définition progressive des problématiques et des enjeux pour le futur

3. Une évaluation du travail 
3.1. En termes de contenu
3.2. Au plan méthodologique

Annexes

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Avant-propos

La mission du rapporteur était définie dans le Vade-mecum de « Wallonie 2020 » comme suit : « faire ressortir les éléments de consensus et de dissensus ; être synthétique et non exhaustif ; être honnête dans la restitution, sans langue de bois, en faisant valoir l’avis du groupe et non pas son avis propre ; s’exprimer dans un langage rédigé dans des termes de démocratie délibérative plutôt que de démocratie participative ». Le rapporteur rédigerait un rapport structuré en fin de phase ; ensuite, ce rapport serait validé par le groupe[1].

Le présent rapport tente de respecter ces règles. Néanmoins, nous avertissons le lecteur que nous ne procédons pas ici à une énumération des listes de qualificatifs utilisés, ni à une description des schémas divers qui ont été rédigés au cours de ces réunions (vous les trouverez joints en annexe, listés dans la chronologie où ils ont été établis). Nous tentons plutôt de dégager les lignes de forces qui ont conduit notre débat et, par ailleurs, nous procédons à une brève évaluation du chemin parcouru.

Enfin, malgré les injonctions de départ, si vraies et fondées soient-elles, nul auteur ne peut se départir de sa subjectivité, même s’il prétend à la sacro-sainte « objectivité ». Aussi, nous espérons que le débat entre nos différentes subjectivités conférera à ce rapport une proximité plus grande au moins avec l’honnêteté demandée…

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1. Composition du groupe des « Justine »

Au départ, 24 personnes devaient participer aux travaux du groupe des « Justine ». En fait, le groupe a démarré avec 9 personnes, y compris l’animateur et le rapporteur, auquel il faut ajouter la conseillère de l’Institut Jules Destrée. Le nombre des participants s’est stabilisé à une moyenne de 7 personnes. Lors de la dernière réunion du groupe, le 18 juin, il s’est réduit à 5 personnes. Les raisons de ces désaffections n’ont pas été communiquées au groupe par les personnes concernées.

L’entièreté des membres du groupe sont titulaires de diplômes de l’enseignement universitaire ou supérieur, exercent des professions de cadres moyen ou supérieur, dans le secteur public et privé, d’enseignants, ou pratiquent une profession libérale. La moyenne d’âge du groupe avoisine la cinquantaine, avec deux personnes de moins de 40 ans ; le groupe compte une seule femme.  Les sous-régions « représentées » sont Charleroi, les Ardennes, la région liégeoise, le Pays de Herve, Bruxelles et le Brabant wallon.

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2. Les étapes du débat

2.1. Prise de connaissance et réflexions méthodologiques

Notre première réunion nous a permis de prendre contact avec la méthodologie proposée par l’Institut. Les réflexions des participants se sont polarisées sur la pertinence des critères de composition du groupe (sur quelle base les participants à Wallonie 2020 avaient-ils été invités ?), du fait de sa forte homogénéité sociologique type « classe moyenne supérieure », de la faible présence des femmes et encore moins des jeunes. Certains ont proposé de faire écho de nos réflexions à l’extérieur et, en retour, de ramener à celui-ci les questionnements recueillis lors de ces échanges (cela fut fait - seul exemple collectif réalisé - dans une contribution de syndicalistes liégeois relative aux qualificatifs à assigner à « Wallonie »). Il nous fut dit aussi par la représentante de l’Institut que notre participation était celle de «wallons motivés », et que cela pouvait constituer en soi une justification de la pertinence de notre travail. Dont acte. Cela restait à vérifier.

D’autre part, les attentes des participants exprimaient un fond commun, avec des tonalités variées il est vrai, à savoir une réelle interrogation sur la possibilité d’un avenir pour la Wallonie, celui-ci apparaissant comme étant des plus hypothétiques. Néanmoins, une curiosité positive animait l’ensemble des participants, car le fait de réfléchir sur une perspective à long terme (20 ans), sans lien immédiat avec les contingences du moment, apparaissait comme étant une démarche tonifiante et même gratifiante, mue aussi par un souci de responsabilité vis-à-vis des générations futures.

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2.2. Une approche des représentations de chacun relatives à la définition de la Wallonie aujourd’hui, et la construction d’une représentation commune ?

L’étape suivante consista, comme prévu par la méthodologie proposée par F. GOUX - BAUDIMENT, à lister les qualificatifs que chacun d’entre nous accolait au terme « Wallonie », à définir le sens de ces qualificatifs, à leur donner une couleur positive ou négative, à les regrouper par affinité de sens. Nous vous renvoyons ici aux listes et tableaux publiés en annexe.

Que reste-t-il dans nos mémoires de ce travail de bénédictin (intéressé et studieux, il est vrai) ? Qu’en garder pour l’analyse ? Risquons-nous à caractériser sommairement l’état des lieux ainsi réalisé.

Soulignons tout d’abord la diversité des approches individuelles, certains insistant davantage sur les aspects plutôt passifs, dépassés de la Wallonie, d’autres sur sa « faiblesse », sa « jeunesse », son « manque de projet(s) », son caractère « peu entreprenant ». Par contre, la majorité des uns et des autres nuançaient cette vision par d’autres qualificatifs : ils insistaient sur les qualités de « chaleur », d’ « ouverture », de « tolérance », d’ « accueil », qu’à leur avis, recèle la Wallonie, dont d’aucuns soulignaient par ailleurs les « potentialités ». Une discussion vive même, mais courtoise, se développait ainsi sur la caractérisation de l’identité de la Wallonie, dont tous soulignaient le manque de projet rassembleur, certains affirmant qu’elle était en somme « désaxée », incapable de se projeter dans l’avenir, « inconsciente » et « mythique ». D’autres encore soulignaient la méconnaissance dont la Wallonie jouissait à l’extérieur de ses « frontières », comme si elle formait une sorte de contraste en creux par rapport à notre forte voisine, la Flandre.

Ces approches individuelles différentes ne baignaient pas dans l’unanimisme, ni ne révélaient pas non plus de conflits d’interprétation sous-jacents très importants. Encore que…

Toutefois, l’aspect dominant était surtout révélateur d’un certain désenchantement, d’un état d’esprit critique - autocritique des participants quant à la « Wallonie » et aux « wallons ». La grande majorité affirmait son appartenance à la Wallonie, mais, tout aussitôt, insistait sur les aspects dits négatifs de celle-ci (voir supra) plutôt que sur les raisons d’espérer inhérentes pourtant, suggérait une minorité, aux potentialités et aux qualités qu’elle semblait posséder.

Mais, en fait, le constat était commun. La discussion sur les sens des qualificatifs avancés au départ, faisait vite émerger un accord unanime sur une liste plus restrictive de qualificatifs. Ensemble, partageant le même avis, les participants regroupaient dans une liste plus restreinte des concepts qualifiés de « positifs » ou de « négatifs », étant entendu que cette distinction n’était en rien un jugement de valeur par rapport à une meilleure pertinence des uns par rapport aux autres.

La discussion fut nourrie par des apports extérieurs (syndicalistes liégeois, conjoints de participants, etc…) Il est important de noter que cet éclairage extérieur permit d’intégrer de nouveaux qualificatifs à la liste de départ comme celui de « pauvre », et d’ « inégale ». L’échange souligna aussi le fait que la Wallonie est « contrastée ». Faut-il voir ici un effort de consensus entre les participants plus attachés à insister sur les diversités que sur les oppositions ?

Au terme de ces premières réunions surgissait ainsi un tableau « contrasté… », où l’on retrouvait ces connotations en moins et en plus, il faudrait plutôt dire en « yin » et en « yang », car, on le vit ensuite, des rapports dialectiques et complexes réunissaient ces différents termes, au centre desquels surnageait un concept mystérieux, celui de « potentielle », que nous avons encore fort peu défini à ce jour[2].

Pour conclure ce point, il importe encore de lister les remarques suivantes :

-                      nous avons réussi à dépasser une vision en noir et blanc sur ce que représente la Wallonie pour chacun et pour tous, puisque de nos échanges constructifs, s’est dégagé ce portrait aux reliefs divers admis par tous ;
-                      nous n’avons pas dressé un portrait de la Wallonie où la dimension « politique » occuperait une place importante si ce n’est en portant un jugement très général, utilisant le terme « sans projet », contrebalancé par  celui de « potentialités » ;
-                      certains aspects, tenant surtout aux qualités de la Wallonie - « chaleureuse », « ouverte » -, ont été développés par après dans nos propos jusqu’alors assez pessimistes (mais réalistes de l’avis de l’ensemble des participants) ;
-                      l’apport in fine de la seule femme participante nous a permis d’entendre une autre approche jusqu’alors absente par la caractérisation paysagère donnée à la Wallonie : le concept « vallonné » (tiens, quel est ce terme qui surgit comme cela à la fin du parcours, en franc tireur, comme si cet aspect de base de la Wallonie, oublié jusque là, il y aurait lieu d’en tirer quelque profit ?…)

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2.3. Une définition progressive des problématiques et des enjeux pour le futur

Nous en sommes arrivés au point où nous tentons de démêler les questions qui sont sous-jacentes à notre travail de cartographie « qualificative » et à tenter de définir quels sont les enjeux pour la Wallonie d’ici 20 ans.

En toute objectivité, nous avons seulement abordé cette étape lors de notre avant-dernière réunion. C’est ainsi que nous avons tenté de circonscrire les relations complexes entre les différentes facettes des qualificatifs retenus pour identifier cette chère « vieille », mais « jeune » Wallonie…

De cet échange extrêmement animé, que ressort-il ?

Hasardons une thèse. Le constat est unanime : cette Wallonie, « faible », « pauvre », « inégale », « dépassée », générée ainsi par son incapacité (méthodologique ?) à mettre en œuvre un (des) projet(s ?), grevée par son « inconscience » (en termes d’identité) et sa « jeunesse » (institutionnelle), mais surtout bloquée par une « passivité » ambiante et surtout institutionnelle, n’a de chances de s’en sortir que si elle se saisit de ses qualités, sa « chaleur », son « ouverture » (ses dispositions notamment à l’accueil), ses « contrastes » (son relief, ses dynamismes sous-régionaux ou propres à certains groupes sociaux)…

L’enjeu principal serait en somme de passer d’un « état » de manque de projet, de l’ « inconscience » actuelle, à une « activation », une « mobilisation » de ses potentialités, qu’il reste cependant à circonscrire très concrètement …, car sans cela on resterait dans le rêve…, et donc on pourrait continuer à naviguer à vue dans cette passivité que tous, peu ou prou, nous avons dénoncée.

La réunion du 18 juin 2002 a permis de dégager les enjeux, les défis, à relever pour préparer plus avant la réflexion sur ce qui est souhaitable pour la Wallonie d’ici 2020, et, ce qu’il est possible d’entreprendre dans ce sens. Les « nœuds » suivants ont été ainsi listés :

-                      Nœuds de contradictions

Entre d’une part, les « potentialités » de la Wallonie (en termes de richesses, cfr note 4, page ..) et, d’autre part, la difficulté de réaliser celles-ci, du fait d’un manque d’esprit d’entreprise ou plutôt d’un esprit d’entreprendre « culpabilisé ».

-                      Nœuds structurels

Inexistence d’un identifiant collectif (sous-régionalismes,…), d’un projet rassembleur, de personnalité(s) capable(s) de porter ce projet, alors que, dans le passé, il existait un identifiant collectif (une conscience sociale forte, d’opposition).

-                      Nœuds projectifs

Comment (re)construire un identifiant collectif, un projet fédérateur ? Il y a là une méthode à inventer qui fasse en sorte que la population prenne une part active à la définition et à l’élaboration de ce projet, et, par là, y adhère fortement.

-                      Nœuds de populations significatives

Indispensable de tenir compte de l’identité du corps social (identités « plurielles »), ce qui nécessite aussi la réactivation de la culture politique.

-                      Nœuds de carrefour ou de bifurcation

Ce projet fédérateur pour la Wallonie, cet identifiant collectif, comment le faire surgir ? D’une culture de « compromis », de « consensus » ? Ou d’une réflexion alternative ? Ou encore d’une façon volontariste ? La (les) question(s) reste(nt) ouverte(s).

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3. Une première évaluation du travail ?

3.1. En termes de contenu

Le défi devant lequel nous nous trouvions - réussir dans cette phase de travail à définir les enjeux du futur pour la Wallonie à longue échéance - peut être considéré comme étant atteint. Effectivement, une mise à plat des « nœuds du futur », a été réalisée suite à cette longue démarche, qui nous a permis de confronter des représentations individuelles diverses sur l’état actuel de la Wallonie, de construire progressivement une représentation commune et nuancée, et, de dégager la dialectique qui, d’après nous, sous-tend les blocages des potentialités wallonnes. Mais ce travail est resté très conceptuel. Quel peut être son aboutissement concret ? …

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3.2. Au plan méthodologique

La démarche proposée par F. GOUX-BAUDIMENT, et à la base de la méthodologie de ces rencontres, est apparemment satisfaisante, puisqu’elle nous a permis grosso modo de bien avancer sur le contenu de la réflexion. Néanmoins, n’a-t-elle pas rebuté certains, vu les désaffections enregistrées en cours de route ?

Peut-être, faudrait-il dépasser une sorte de vision mécaniste liée à une application trop stricte de cette méthode afin de garder un espace pour l’imprévu ou pour d’autres approches (philosophiques, éthiques, en termes de bilan social, politique, économique, culturel, environnemental…) ?…

Peut-être aussi, faudrait-il disposer d’autres méthodes d’approche afin de favoriser davantage la participation à cette recherche des couches sociales ou d’âge dont nous déplorions l’absence au début du processus ? La question de la « représentativité, de la « légitimité citoyenne » de cette démarche est ainsi posée. Pourquoi, affirment certains(es) ne pas aller directement à la rencontre des citoyens déjà actifs (ex. des conseils consultatifs) ?

Ce sont là des questions sur lesquelles il importerait de s’arrêter et qu’il serait intéressant d’intégrer dans la préparation de la deuxième phase de la démarche.

Les qualités de l’animation sont apparues dans la densité de ce rapport, qui traduit aussi quelque peu la convivialité qui a sous-tendu nos débats. Ce sont là des éléments positifs dus à la méthodologie employée et aux hommes et aux femmes qui l’ont portée, et qui, comme le disait un participant en finale, « nous ont permis de trouver quelques réponses à nos propres interrogations »… Surtout, le travail de groupe a favorisé l’émergence d’un processus d’intelligence collective, où l’apport de chacun a pu être intégré, reconnu et « potentialisé »…

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Annexes

-                      Tableaux successifs établis par le groupe
-                      Avis de syndicalistes liégeois
-                      Documentation

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Notes

[1] Un projet de rapport fut soumis au groupe des « Justine » lors de sa dernière réunion (18/06/02). Il fut validé par celui-ci. Le présent rapport comporte seulement un complément par rapport à ce projet concernant les problématiques et enjeux pour le futur (2.3.) et un ajout concernant l’évaluation (3).

[2] A notre dernière réunion, le 18/06/02, ces « potentialités » ont été définies comme suit : « qualités de la production et de la main d’œuvre ; capacités de recherche, capital intellectuel ; qualités d’accueil, d’ouverture, chaleur, de contraste, ainsi que le terme vallonnée ».

"Wallonie 2020", Cinquième congrès "La Wallonie au futur" -  Institut Jules Destrée - 2001-2003  
 
Wallonie 2020

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Page mise à jour le 07-04-2017

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