Préface
Sinvestir dans linnovant et le stratégique
Robert Collignon
Ministre-Président du
Gouvernement wallon
La dynamique La Wallonie au Futur, série de
réflexions et de congrès, est induite par lInstitut Jules Destrée depuis 1987. Il
reviendra aux historiens de demain de déterminer lampleur de son impact sur la
direction prise par la société wallonne.
Quelques semaines après le congrès de Mons
consacré à lévaluation, à linnovation et à la prospective, trois brèves
réflexions me viennent à lesprit concernant ces concepts.
Dabord, les travaux de Mons confortent le
gouvernement wallon dans la priorité quil a accordée à la recherche scientifique.
Un effort dun milliard de francs a été consenti en faveur de ce secteur via la
Déclaration de Politique régionale complémentaire.
Ces moyens nouveaux ont été prioritairement
affectés à laccroissement des dispositifs daides et aux transferts de
technologie par la valorisation, au sein des entreprises, des résultats des recherches
universitaires.
Cette option qui constitue le support de
linnovation présente et future en Wallonie me paraît indispensable. Bien
accompagnée, cette dynamique ne peut que permettre le développement dentreprises
de haute technologie, lessaimage fructueux des chercheurs les plus créatifs vers
celles-ci, la multiplication des incubateurs dentreprises innovantes,
cest-à-dire la mobilisation autour des pôles définis, pensés et
articulés des potentialités de sciences, de technologies et de savoir-faire qui
porteront notre nouveau développement wallon.
Ensuite, lexpérience menée par
lInstitut Jules Destrée, son congrès et ses experts dégage une réelle
philosophie de lévaluation. Cette approche renforce la conviction de tous ceux qui
ont rencontré ces pratiques dévaluation sur le plan régional et européen. Nous
disposons là dun instrument réellement apte à renouveler nos fonctionnements
politiques et administratifs.
Depuis le congrès de Mons, jai
dailleurs préconisé détendre la technique de formalisation dobjectifs
clairs, dont lagenda de réalisation est précisé, dont les axes sont quantifiés
et budgétisés, formant un programme aussi ambitieux que réaliste, et dont le suivi est
évalué sans complaisance à intervalles réguliers. Cest pourquoi, dès le début
de la prochaine législature, jinvite celles et ceux qui exerceront des
responsabilités gouvernementales à étendre cette méthodologie à lensemble des
compétences régionales ordinaires en énonçant, dentrée de jeu, pour une série
de matières, des objectifs chiffrés, des délais dexécution et des moyens
budgétaires. Cette démarche pourrait sinscrire dans un cadre quinquennal, voire
septennal, comme le propose le rapport de Jacques Chérèque sur les contrats de plan Etat
régions de France. Lidée consiste à harmoniser les plans avec la réforme
des fonds structurels européens. Celle-ci est indissociable de la mise en adéquation des
objectifs avec les moyens financiers et humains appropriés, ce qui implique des contrats
non seulement avec les administrations mais aussi avec lensemble des acteurs
concernés.
Ainsi, les grandes masses dun tel programme,
en termes dobjectifs quantifiés et de moyens financiers, seraient fixées de commun
accord avant la répartition des compétences entre partenaires gouvernementaux et, a
fortiori, entre Ministres, de telle sorte que les négociateurs puissent navoir à
lesprit que lintérêt régional, non lintérêt de parti, et pas encore
la défense de ce qui devient fort vite leur domaine réservé.
Enfin, loutil que constitue la prospective ne
permet dassurer le devoir danticipation des événements atout
fondamental pour la décision politique que si la société wallonne se dote
dinstruments qui lui font encore défaut aujourdhui pour lexercice de
ses compétences, cest-à-dire dindicateurs performants. En effet, malgré
diverses initiatives et plusieurs efforts, les statistiques régionales manquent toujours.
Il sagit, en fait, de mettre au point des banques de données permanentes, efficaces
et actualisées, réalisées dans une approche de développement durable, débordant
largement le cadre strictement économique.
Cette information est nécessaire non seulement au
niveau régional mais aussi au niveau de ce que lon appelle les bassins
demplois, les bassins de formation, ou encore en sinspirant de cette dynamique
française moderne des pays, que nous connaissons nous aussi, de manière traditionnelle,
sous les formes de Pays de Herve, Pays de Charleroi, Pays de Liège ou Roman Pays de
Brabant. Ces données collent à la réalité économique, sociale et environnementale.
Elles devraient permettre de mener des politiques différenciées selon les aires de
développements, en particulier dans laffectation des différentes formes
daides et dinterventions publiques.
Ces indicateurs auraient pour vocation de préparer
le travail prospectif, en dressant un état des lieux mais aussi en relevant les tendances
directes ou périphériques qui permettraient déclairer la prise de décision.
Toutes ces réflexions que minspirent les
travaux de ce congrès de Mons rejoignent fortement la volonté exprimée par
lInstitut Jules Destrée : mettre en uvre lessentiel des
conclusions de ces assises. Je ne peux que les y encourager. Une chose est, en effet, de
se dire acteur de la société, une autre est dagir en tant que tel.
La première initiative prise dans ce sens par
lInstitut Jules Destrée la création du chapitre Wallonie de lInternet
Society me paraît aller dans le bon sens : celui de lentrée de la Wallonie
dans le XXIème siècle.
Demain, pour nous tous, force sera de redoubler
defforts pour que la Wallonie sinvestisse chaque jour davantage dans
linnovant et le stratégique.
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