Liliane Céraulo
Administrateur délégué de Top-Intérim
Mon secteur dactivités, le travail
intérimaire, est une composante de lemploi en général. Voici quelques chiffres de
1997 pour situer notre domaine :
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il y a eu 97.249 travailleurs pour une moyenne
journalière de 52.000;
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95.000 ont travaillé sous le statut étudiant;
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70% des intérimaires ont moins de 30 ans;
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40% des intérimaires trouvent un emploi fixe par le
biais de leur mission.
Le travail intérimaire est souvent récrié,
certes, il nest pas LA solution au problème de lemploi, mais il est une
réponse aux besoins de flexibilité des entreprises fortement bousculées par la
mondialisation du système économique. Il peut être une aide rapide et efficace à court
et long terme pour les demandeurs demploi.
Je vous donnerai quelques réflexions sur le monde
de lemploi au travers de mon expérience et des gens que je suis amenée à côtoyer
chaque jour. Les points les plus importants sont évidemment les études, lemploi,
la formation et la synergie des différentes compétences.
Au niveau des études, nous vivons une période où
tout est remis en question négativement. Le flot dinformations est souvent
perturbant, négatif et peu objectif. Sil existe des difficultés réelles, la
Belgique reste un pays extraordinaire où tout est possible. Il faut faire preuve de
force, de détermination, dhumilité, de créativité, de curiosité et
dintérêt. Quel que soit le choix de nos études, nous avons le devoir d'être le
meilleur possible par rapport à ce choix et à nos intérêts particuliers. Prenons-nous
le temps danalyser les tendances et développements des secteurs d'activités dans
lesquels nos compétences pourront sintégrer ? Afin de mieux nous y préparer
en dehors des matières académiques, il convient de s'interroger pour savoir si le monde
éducatif tient suffisamment compte des réalités du monde économique.
Dans une démarche de demande demploi,
sommes-nous assez créatifs et volontaires ? Démarrer une carrière
aujourdhui, cest aussi commencer dans un domaine différent de ce pourquoi
nous avons été formés. Limportant, cest dentrer dans les entreprises
afin den connaître les mécanismes et de mieux se connaître soi-même pour se
valoriser ensuite. Les valeurs sûres dhier sont les valeurs sûres
daujourdhui. Léducation, le savoir-vivre, le savoir être,
lattitude vestimentaire, la parfaite connaissance de sa langue maternelle que
penser dun ingénieur qui commet des fautes dorthographe élémentaires dans
sa propre langue , la maîtrise dune deuxième langue. Toutes les entreprises
significatives sont implantées au niveau national et les autres commencent où devraient
commencer avec d'autres parties du pays également, sans parler de la réalité
bruxelloise ou trois interlocuteurs sur cinq sont néerlandophones. Il me semble que la
connaissance dune troisième langue est indispensable.
Lhumilité. En sortant des études, nous
avons une tête bien pleine, toutes nos connaissances doivent encore être organisées,
être rendues efficientes. Faisons que lentreprise ait envie de nous accueillir et
dinvestir en nous. Nous avons à apprendre de chacun et, au départ, lun plus
que lautre et cela coûte à lentreprise. Le chemin sera plus ou moins long et
sera fonction de notre sueur, abnégation et investissement, du respect de lautre et
de lapport de chacun en fonction de ses acquis et de son expérience.
Dans le domaine du travail intérimaire, nous
parlons souvent de formation et de comment entrer nous-même dans ce processus de
formation, pour les travailleurs intérimaires dans le système de formation à courte
durée. Dune manière générale, au niveau des travailleurs, il est dommage
quil ny ait pas plus de stages pratiques pendant les études, en Belgique et
à étranger, riches pour le mélange de cultures, dapproche des problèmes et
douverture. Il est regrettable quil ny ait pas un rôle plus vigilant,
actif et efficient, de ceux qui devraient penser aux conséquences de lévolution
technologique, économique, politique et sociologique voire même climatologique.
Que penser de linformation ? Il manque
deux mille informaticiens, cest un gâchis dénergie et dopportunité
pour les travailleurs et les entreprises. Peut-on accepter une telle déclaration ?
Deux mille emplois se créeront dans lactivité "call center" à très
court terme, annonce-t-on. Concrètement, que fait-on pour mettre en place de réelles
synergies, pour faire connaître la réalité du travail dans un "call center",
pour améliorer leur image qui est actuellement uniquement liée à la
téléprospection ? D'autres pays se sont déjà organisés pour répondre à la
demande, comme par exemple les Etats-Unis, où 95 % des produits de consommation ont
un numéro vert. La Hollande et lIrlande sont très loin également dans ce domaine.
Ces pays ont mis en place des formations de type court, voire même créé des
subdivisions denseignement dirigées par les fonctions "call center". En
Belgique, à part quelques initiatives très ponctuelles, il ny pas vraiment encore
dintérêt pour préparer le terrain. Certains investisseurs ont installé une
unité de fonctionnement chez nous mais sont découragés par les difficultés
opérationnelles. Le personnel motivé et compétent se fait rare.
La mobilité des travailleurs. Nous vivons
aujourdhui des situations extrêmes. Voici quelques cas qui vont dune extrême
à lautre. Je me souviens de mon voisin, père de famille, mineur et qui, au bout de
sa pose de nuit, faisait deux heures de route à pied, parce quil navait pas
dautres moyens de transport, heureux tous les jours de le faire et, fin de semaine,
très heureux de rapporter sa paie à sa famille, cétait son devoir, sa mission.
Aujourdhui on se retrouve souvent dans des
situations où 30 km pour aller travailler, cest trop long. Si vous acceptez un
travail à Bruxelles alors que vous habitez Mons, il vous semble tout à fait logique au
bout dun mois daller voir votre employeur et de lui dire : pour venir
travailler à Bruxelles, je perds une heure et demie le matin, une heure et demie le soir,
cela limite ma vie privée donc, je veux une compensation ou, en tout cas, pour le même
salaire, je veux réduire mon temps de travail. Je crois que la vie elle est faite
dune série de petits détails que nous devons regarder et essayer chacun
daméliorer. Il est peut-être faux de penser que tout doit venir de plus haut, que
la société doit penser pour nous. Je suis convaincue que chacun, à son niveau, peut
faire bouger des choses. Commençons par les faire bouger pour nous-mêmes dans notre
environnement proche, dans lentreprise.
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