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Anne-Marie Straus
Directrice générale
à la Direction générale des Technologies,
de la Recherche et de l’Energie
 

Proposition

Avant d'aborder plus spécifiquement les thèmes précis du carrefour ci-dessus, il m'a paru essentiel de me positionner par rapport au nouveau paradigme défini dans le cadre des congrès La Wallonie au futur, à savoir : la réflexion permanente sur un projet de société pour la Wallonie, conçu comme une démarche permanente transversale et interdisciplinaire avec, comme épicentre, l'éducation et input les réalités micro-locales. Le handicap fondamental mis en exergue étant d'ordre culturel, il était logique aussi que les moyens mis en œuvre partent en filigrane les transformations culturelles passant en particulier à l'universel et touchant toutes les couches de la population.

Avis

Si je me situe parmi ceux qui croient en la nécessité d'un projet pour la Wallonie à condition qu'il soit conçu comme une réflexion permanente et prospective – car comme le soulignait Henri Dehareng dans le cadre du Illème congrès, il faut marcher en pensant (1).

Le fait que plusieurs et surtout des jeunes candidats traceurs de lendemains puissent concevoir cette approche comme s'opposant au fait que la Wallonie, ou plus exactement ses sous-régions, se tournent vers l'extérieur (voir document de synthèse p. 1 1) est pour moi une preuve d'échec soit sur les solutions proposées, soit sur l'explication de la démarche entreprise. Pire encore, la réflexion suivant laquelle ce projet commun ne deviendra jamais crédible qu'à partir du moment où la Wallonie se retrouvera dans la dèche (p, 1 1 in fine 11).

Proposition

Maintenir, y compris dans sa démarche, même si elle est considérée comme "trop élitiste" ou trop théorique, la notion de réflexion permanente sur une région en devenir avec le concept de base retenu et développé depuis 1987 mais avec deux correctifs importants :

  • diffuser, informer, concerner;

  • avoir le courage d'effectivement marcher en pensant, c'est-à-dire entrer dans une démarche réellement évolutive et créatrice en adoptant un système d'évaluation positive

Je me permets d'insister sur ce dernier point, et ceci clôturera la partie générale de mon intervention et me permettra d'entrer dans le vif du sujet.

OUI, il faut se remettre en cause. OUI, il faut accepter une évaluation pour provoquer l'évolution. OUI, ce qui s'est passé ces derniers temps en Wallonie est essentiel en termes de remise en cause mais SVP arrêtons de dire il y a des coupables ou même nous sommes tous coupables et adoptons définitivement, dans nos têtes, enfonçons le avec des tenailles d'acier, martelons-le avec des mots, avec des images : Chacun, petit ou grand, faible ou puissant est un facteur de changement parce qu'il est la vie.

Chacun d'entre nous est, c'est sûr, le réceptacle d'une histoire, la mémoire du passé, c'est vrai et nous n'allons pas le nier, mais nous sommes surtout en devenir. Et si, pendant longtemps, j'ai vécu suivant le principe que chaque jour valait la peine d'être vécu, aujourd'hui je dis que, si aujourd'hui n'existait pas, il n'y aurait pas de demain.

Pour moi, la seule, la seule vraie question de changement culturel, c'est celle-là et, en cela, je remets en cause, profondément, non pas le nouveau paradigme mis en œuvre par les congrès La Wallonie au futur, mais l'expression suivant laquelle la Wallonie porte le poids de son passé économique et que, je cite, son avenir économique passe impérativement par une rupture avec les paradigmes anciens que sont le gigantisme de l'industrie motrice et sur la croissance polarisée.

Bien sûr, c'est vrai, mais nous avons évolué, nous avons dû évoluer, parce que le contexte international ne nous laisse pas le choix. C'est bien ou mal, je n'en sais rien, mais c'est. Alors cessons de nous lamenter sur ce que nous avons été ou de le regretter, pour partir de l'acquis et nous placer en devenir.

A cet égard, un ouvrage dont je ne pourrais jamais assez recommander la lecture dans la domaine de la prospective économique car, même s'il date de 1990, il n'a pas vieilli d'un iota : c'est 2100 ou le récit du projet siècle, de Thierry Gaudin de l'Observatoire des Sciences et des Techniques en France. Je ne pourrais d'ailleurs rien dire ni écrire de mieux que cette équipe en matière de prospective, puisqu'elle part de l'être tel qu'il est et de son contexte, pour le mettre en perspective jusqu'à l'utopie.
Donc pour moi, la première leçon, c'est Donnons au passé économique de la Wallonie la place qui lui revient dans notre histoire – ni plus ni moins. Or, dans le projet économique de la Wallonie au futur, c'est le mot "rupture" qui revient souvent.

Mais, quand on lit les facteurs qui favorisent la croissance économique et accompagnent la création d'emplois – à savoir, investissement en capital physique des entreprises R&D, capital humain (tenir le coup pendant de longues années) (2) – je dis non seulement que ce sont les mêmes facteurs qui ont fait le passé glorieux de notre économie mais que, dans les faits actuels, je constate que les entreprises qui gagnent sont celles qui, effectivement, jouent sur les quatre facteurs. Ce qui a changé par contre, c'est que l'entreprise locale n'a plus les moyens de réunir ces facteurs à elle toute seule.

Alors, de deux choses l'une, ou bien ces facteurs sont réunis au niveau d'entités supranationales sur lesquelles personne n'exerce plus de contrôle – ou bien les pouvoirs publics jouent un contrepoids réel en y mettant les moyens financiers et humains sur le long terme. C'est de cela, pour moi, que dépend effectivement l'avenir économique de la Wallonie.

Ces constats et ces recommandations font partie des travaux du congrès la Wallonie au futur, c'est vrai, mais comme le soulignent certains critiques, les propositions du congrès relèvent de l'incantation (3) ou en tous les cas sont trop édulcorées. Par ailleurs, certaines propositions du congrès ont fait l'objet de discours et d'approbation politique, certes oui, mais n'ont pas fait l'objet de véritables actions.

Reprenons, si vous la voulez bien les quatre grands principes mis en exergue que je rappelais ci-dessus et qui demandent bien entendu un esprit de risque développé (à retrouver en Wallonie).

a. Investissement en capital physique des entreprises

La Wallonie accuse un retard important en termes d'investissement productif par rapport à son partenaire flamand et aux autres pays européens.

La taux d'investissement estimé sur base des travaux de la comptabilité régionale était de l'ordre de 10 % du PIB en 1990, comparé aux 15 % pour l'ensemble de la Belgique. La part de la Wallonie dans les investissements nationaux est passée de 26 % entre 1972 et 1975 (4) à 19 % entre 1986 à 1990.

Qu'est ce qui a été fait ?

Augmentation des salaires et augmentation de la fiscalité d'où, aussi, taux de chômage élevé (5).

b. Investissements R&D (6)

Efforts insuffisants.

c. Capital humain

C'est sans doute à ce niveau que le handicap est le plus important.

  1. Même si les indicateurs relatifs à l'utilisation de personnel R&D, tant dans le secteur public que privé, sont un peu moins mauvais que les indicateurs R&D, il n'en reste pas moins vrai que nous restons à la traîne en Wallonie.

  2. En termes de formation, c'est la catastrophe (voir Athena).

  3. En terme de rencontre des besoins industriels, catastrophe :

    • Trop de sous-qualifiés;

    • Pénurie d'ingénieurs, de techniciens spécialisés.

  4. Absence totale de diffusion des services et des techniques. Manque d'évaluation

  5. Politique de restructuration accompagnée de politique qualitative : Qu'avons-nous fait ? – Voir politique Région wallonne.

Quels sont nos plus grands handicaps ?

  • manque de continuité dans l'effort;
  • manque d'esprit de risque;
  • manque d'envergure.

 Que devons-nous faire ?

  • maximiser les efforts entrepris;
  • parier sur le long terme;
  • renforcer la cohésion européenne.

Objectifs actuels

Pour soutenir le caractère déterminé et volontariste de la R&D en Région wallonne, il importait de définir une stratégie capable d'orienter les actions de la DGTRE.

Cinq objectifs servent de point de repère à la politique menée en la matière.

Une politique de R&D orientée vers l'innovation de produits

Traditionnellement, les efforts de R&D des entreprises wallonnes se sont portés sur l'innovation de processus et sur la recherche de gains de productivité.

Sans nier l'importance d'un accroissement de la compétitivité de nos entreprises, on a compris qu'il fallait s'appuyer prioritairement sur une politique d'innovation de produits.

Une politique de R&D ouverte sur le monde des nouveaux services

L'ouverture de nos politiques aux innovations technologiques "tertiaires" s'avérait cruciale compte tenu, d'une part, du taux de croissance des emplois dans les services (notamment les emplois dits de proximité) et, d'autre part, des nouveaux gisements d'emplois dans les marchés informationnels et communicationnels

Une politique de la R&D orientée vers le marché

La liaison entre la R&D et le marché suppose que soient repérées des "niches" technologiques pour lesquelles il existe un haut potentiel commercial.

L'identification de ces niches doit se faire en tenant compte, d'une part, des points forts de la Wallonie en termes de compétence technologique, de capacité d'exploitation et de valorisation commerciale et, d'autre part, des opportunités d'exploitation offertes par les commandes publiques et les marchés, d'autant plus que les directives européennes vont dans le sens d'une ouverture des marchés publics à la concurrence.

Une politique de R&D soutenue par des pôles scientifiques d'excellence

La constitution de pôles d'excellence dans le domaine de la recherche industrielle de base et de la recherche appliquée paraissait un concept intéressant dans la mesure où il permettait d'instaurer plus de continuité et de capitalisation dans les aides à la recherche dispensées par la DGTRE.

Une politique de R&D régionale dans l'Europe

La Wallonie en tant que région d'Europe doit être présente dans les grands programmes de R&D mis en œuvre par l'Union européenne. Cette présence, déjà bien assurée au plan universitaire, doit être renforcée au niveau des entreprises.

Préparer nos entreprises et nos centres de recherche à répondre aux appels d'offres européens ne peut se faire qu'en tenant compte, dans notre politique de R&D, des grandes tendances de la recherche et de l'innovation européennes.

Notes

(1) H. DEHARENG, Les entreprises stratégiques et les PME de pointe et de serviceRôle des intercommunales de développement, p. 257 – 258.

(2) La Wallonie au futur, Quelles stratégies pour l'emploi, Commission 2, Ressources humaines, création d'emplois et croissance soutenable, Charleroi, Institut Jules Destrée, p. 213, 1996.

(3) P. 18 de la synthèse.

(4) RITTS, p. 17, 1998.

(5) RITTS, p. 14.

(6) RITTS, p. 14 – Commission des Communautés européennes, RDT, indicateurs 1995.


 

 

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