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Rapport de la Commission 4 :
Infrastructure et relance

Giuseppe Pagano
Assistant en Economie publique à l'Université de Mons-Hainaut

 

Parmi les critères retenus par le traité de Maastricht pour la participation à la monnaie européenne ne figurent ni la croissance économique, ni l'emploi ni le progrès social. Certes, on me dira que l'objectif du traité est précisément de créer les conditions favorables à la croissance et à l'emploi. Il n'empêche que, dans l'immédiat, et alors que le chômage a déjà atteint en Europe une ampleur alarmante, la recherche prioritaire de la désinflation et de la réduction des déficits publics, menée simultanément dans tous les pays de l'Union, contribue à la stagnation des débouchés et, en conséquence, de l'emploi.

S'il ne fait guère explicitement allusion au progrès social, le Libre Blanc a eu le mérite de ramener la croissance et l'emploi au premier rang des préoccupations communautaires, compensant ainsi, mais sans doute fort partiellement, le caractère exclusivement financier des critères de Maastricht.

La stratégie du Livre Blanc repose d'abord, classiquement, sur une plus grande flexibilité du marché du travail, l'amélioration de la formation, et la réduction des coûts salariaux, notamment par la réduction des prelèvements obligatoires (voir Chapitres VII, VIII et IX). Mais, à côte de ces mesures, l'investissement joue incontestablement un rôle central, en particulier à travers les infrastructures de transport et les réseaux de télécommunications qui font l'objet de l'important Chapitre III.

Les travaux de la Commission 4 se sont inscrits dans cette logique. Ils dégagent quatre lignes de force principales.

La première d'entre elle est relative à la place de l'investissement dans la stratégie du Livre Blanc.

Les trois autres sont plus spécifiques à la situation wallonne. Il s'agit de l'importance, pour le développement économique wallon, des investissements immatériels, d'une part, et de l'environnement de l'habitat et du cadre de vie, d'autre part, et, enfin, de la nécessaire sélectivité de l'aide régionale.

 

1. La place de l'investissement dans le Livre blanc

La première ligne de force qui se dégage des travaux de la Commission est relative au rôle central de l'investissement. Comme le note H. Sneessens, "Le Livre Blanc [...] est, dans une large mesure, inspiré par la conviction que le développement économique de l'Union européenne et le retour au plein emploi ne peuvent être assurés que par une stimulation de l'investissement.". Dans une stratégie pour l'emploi, l'investissement devrait poursuivre un double objectif : permettre un réajustement de l'offre et soutenir la demande.

Permettre un réajustement de l'offre, d'abord. L'investissement doit soutenir la compétitivité globale de l'économie européenne afin que celle-ci conserve et d'accroisse sa part sur le marché mondial. L'objectif n'est pas seulement de réduire les coûts salariaux relatifs, mais aussi de prendre place sur les marchés à forte croissance et à forte valeur ajoutée dont l'Europe est trop souvent absente, ce qui "nécessite un effort d'investissement non seulement en capital physique, mais aussi et surtout en capital immatériel (R&D) et humain (éducation et formation)". A ce stade, l'investissement auquel fait allusion le Livre Blanc émane surtout du secteur privé. Au secteur public, il est recommandé de réduire ses déficits de façon à favoriser une baisse durable des taux d'intérêts.

Soutenir la demande, ensuite. Si, dans l'optique du Livre Blanc "la relance de l'investissement a pour objectif premier un réajustement de l'offre plutôt qu'une stimulation de la demande", il n'en demeure pas moins que sans perspective de débouchés, il ne peut y avoir de croissance durable et, en particulier, il "ne peut y avoir d'investissement autre que de rationalisation".

A ce propos, l'intervention de M. Colasanti a fait apparaître que, pour les auteurs du Livre Blanc, les travaux d'infrastructure ne doivent pas être vus comme l'instrument d'une relance keynésienne. Cette affirmation m'inspire deux commentaires. D'une part, même si rapportés au PNB communautaire, les montants considérés peuvent paraître faibles, les 250 milliards d'écus pour les réseaux de transport, 150 milliards d'écus pour les télécommunications et 174 milliards d'écus pour l'environnement, sont de nature à suppléer la faiblesse des investissements publics des Etats membres dont les finances ne sont pas encore totalement assainies et qui, en conséquence, continuent à réduire leurs dépenses. D'autre part, si vraiment le Livre Blanc a totalement négligé l'aspect demande, il s'agirait d'une lacune importante.

 

2. L'importance de l'immatériel

Après avoir insisté sur cette "double importance" de l'investissement, il est temps de donner à la notion d'investissement un contour plus précis. A l'évidence, il y a investissement et investissement et toutes les formes d'investissement ne sont pas également utiles pour le développement de l'économie et de l'emploi wallons.

Ainsi, et c'est là la deuxième ligne de force qui se dégage des travaux de la commission, P. Vandooren et A. Dangoisse observent que la Wallonie semble relativement bien dotée en infrastructures matérielles traditionnelles. Sur les 71 régions d'Europe considérées par Eurostat, la Wallonie occupe la 13e position pour l'étendue de son réseau fluvial, et de son réseau ferroviaire, la 12e pour son réseau autoroutier et la 3e pour son réseau routier.

En revanche, la dotation wallonne est nettement inférieure à la moyenne européenne dans le domaine des réseaux ferroviaires à grande vitesse et dans les infrastructures liées à l'immatériel : qu'il s'agisse des télécommunications de pointe, en particulier le réseau à large bande, ou qu'il s'agisse des services aux entreprises (pépinières, formation, encadrement des PME en phase de lancement, ...).

Cette insuffisance des infrastructures liées à l'immatériel constitue un double handicap. D'une part, la relative pauvreté de nos télécommunications de pointe réduit l'attrait que la Wallonie exerce sur les entreprises étrangères. D'autre part, l'insuffisance des services aux entreprises freine le développement endogène de la Région fondé sur les PME innovatrices dont on sait qu'elles ont précisément grand besoin de services performants, surtout dans la phase initiale de leur activité.

En conséquence, c'est dans ce domaine que l'effort public pourrait le plus utilement être concentré.

Ceci ne réduit cependant pas, comme le note F. Carnoy, l'intérêt qu'il y a à entretenir correctement l'important réseau routier-autoroutier dont dispose la Région, notamment, en raison de la haute intensité laboristique de ce type de travaux publics.

Par ailleurs, l'ensemble des travaux publics pourrait être utilisé pour donner aux chômeurs de longue durée, en particulier les moins qualifiés, une première expérience qualifiante. Une telle politique pourrait aisément être mise en oeuvre en incluant dans le cahier des charges l'obligation pour l'entreprise exécutante d'engager un pourcentage donné de chômeurs peu qualifiés.

 

3. L'importance de l'environnement, de l'habitat et du cadre de vie

A côté de l'immatériel, L. Maréchal mentionne l'environnement, le cadre de vie et l'habitat parmi les domaines d'investissement prioritaires; il s'agit là de la troisième ligne de force qui se dégage des travaux de la Commission.

D'une part, environnement, cadre de vie et habitat ne sont nullement exclus du Livre Blanc. Dans son Chapitre X, celui-ci note d'ailleurs explicitement que l'actuel modèle de développement "se caractérise par une exploitation insuffisante de la main-d'oeuvre et une surexploitation des ressources naturelles, d'où une détérioration de la qualité de la vie".

D'autre part, en matière de logement et de cadre de vie, la situation wallonne est préoccupante non seulement eu égard à la qualité de vie des résidents mais aussi en raison de l'importance croissante de la qualité de vie parmi les critères de localisation de certaines entreprises, en particulier pour le choix des sièges centraux.

 

4. La nécessaire sélectivité de l'aide régionale

Enfin, en quatrième lieu, J.-Ch. Jacquemin plaide pour une grande sélectivité dans le choix des projets aidés par la Région wallonne. La situation budgétaire de la Région, si elle n'est pas dramatique, n'en est pas moins contrainte par la rigueur de la loi de financement du 16 janvier 1989, ainsi que par les engagements de la Région à l'égard de la Communauté française, du logement social, des communes, et de la sidérurgie.

A terme, les perspectives pour les recettes régionales sont meilleures et dégageraient des marges de manoeuvre qui pourraient être consacrées, par priorité, au développement régional. Mais cela implique que, dans l'immédiat l'endettement de la Région soit contrôlé de façon à éviter que les charges de la dette ne détruisent les marges dégagées par l'évolution des recettes.

Cette sélectivité pourrait se fonder sur les critères traditionnels d'efficacité économique pour autant, bien évidemment, qu'on puisse quantifier correctement les effets des différents choix envisagés. Il n'est pas exclu, cependant, que des critères d'équité soit également retenus au bénéfice des régions les moins favorisées.

 


 

 

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