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Deuxième congrès La Wallonie au Futur
1991 -
Le Défi de l'Education

Congrès permanent La Wallonie au futur - Index des congrès

 

 
6. Les métaux - la musique

Vincent Louis
Romaniste attaché à l'Université de Liège

 

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Les quelques éléments de réflexion qui suivent devraient permettre de comprendre dans quel esprit j'ai choisi de développer cette section si curieusement intitulée. Si on pouvait poser un texte en exergue de chaque partie, celui que je choisirais, serait celui que Michelet consacre, dans son Histoire de France, à la "petite France de Meuse". Certes, l'historien y manifeste les idées, les sentiments d'un Français, non d'un Wallon; mais en rapprochant le travail des métaux et de la musique, il me permet d'embrasser de vastes domaines de l'activité humaine : de l'artisanat à l'industrie et de l'artisanat à l'art. De la conflagration suscitée par la confrontation de deux notions si peu liées devrait naître enfin une réflexion sur le statut et le destin des artistes wallons.

 

Plan : Le texte de Michelet

1. Les métaux

  • Propos sur la dinanderie, l'armurerie et l'orfèvrerie accompagnés d'une illustration représentant les Fonts baptismaux de Saint-Barthélémy.

  • Développement sur l'industrie métallurgique wallonne éventuellement accompagné d'un texte littéraire. Les documents iconographiques ne manquent pas, on pourrait choisir une sculpture de Constantin Meunier : le Puddleur.

 

2. La musique

  • Propos sur la musique populaire : les chansons, les cramignons; document : le Léim ploré ou la Chanson au Prince Charles d'Oultremont.

  • Panorama des principales figures de musiciens wallons : Roland de Lassus, Henry Du Mont, Jean-Noël Hamal, J-F. Gossec, A.E.M. Grétry, C. Franck, H. Vieuxtemps, A. Sax, E. Ysaïe, P. Froidebise et H. Pousseur. Je propose, pour illustrer cette sous-section, le buste de Grétry par Rutxhiel.

3. Les arts plastiques

  • -Je tiens particulièrement à glisser ici une réflexion sur la difficulté pour les artistes wallons de l'Ancien Régime à trouver un espace vital digne de leurs talents. Il faudrait expliquer que l'absence de cour princière puissante, le morcellement du territoire et l'attraction exercée par des princes étrangers ont souvent dispersé nos peintres, sculpteurs, graveurs et architectes dans bien des contrées. A cet endroit, prendraient place quelques "portraits" ou plutôt, quelques "destins" d'artistes obligés d'aller chercher protecteur ou clients en terre étrangère. Cette sous-section s'achèverait par un ou deux paragraphes consacrés aux principaux artistes wallons du XIXéme et du XXème siècles et à leurs qualités particulières.

On aura remarqué l'absence de textes littéraires. Rien ne s'oppose à ce qu'on en glisse quelques-uns dans la section, mais mon idée est de mettre l'accent sur les autres formes de création et d'expression en terre wallonne.

Ce qui suit est moins un début de rédaction qu'une rédaction condensée de la partie consacrée aux métaux. Elle donne une idée du ton dans lequel elle pourrait être écrite.

Que les Wallons et, en particulier, les habitants du couloir mosan, soient très tôt passés maîtres dans le maniement des métaux, rien n'est plus vrai. Dès les Carolingiens et surtout au cours des deux siècles suivants, les petites mains laborieuses de Dinant, de Namur, de Huy et de Liège acquièrent une telle habilité dans la fabrication d'objet en laiton, qu'elles en font leur spécialité. Très vite cependant, elles en abandonnent l'exclusivité à la seule ville de Dinant. Les pièces de "dinanderie" se vendent dans les foires de Champagne, de Paris et de Lyon. A Londres, les Dinantais ont même leur quartier et leurs privilèges!

Les ateliers de forge ne se sont pas pour autant tus à Liège : des artisans patronnés par de puissants marchands mettent en place ce qui devient rapidement la principale industrie locale pendant tout l'Ancien Régime : l'armurerie. Le commerce est florissant : les princes aiment la guerre. Celle-ci se fait-elle à l'arme à feu? Et le métal se marie au bois; en jabot et manchettes de dentelle? Damasquineurs et ciseleurs multiplient alors leurs entrelacs.

Il y a longtemps que le plaisir des yeux a trouvé à s'alimenter ailleurs qu'aux seuls éclats des armes décorées... Tournai et surtout Liège, sièges de riches évêchés ont vu très tôt s'épanouir une orfèvrerie religieuse particulièrement raffinée dont les deux villes sont fières. Ces cités abritent de nombreux orfèvres jalousement protégés. Liège s'enorgueillit d'ailleurs d'un chef-d'oeuvre, les Fonts baptismaux dits de Saint-Barthélemy, dont la technique de fabrication et la finition des décors, font une pièce unique, isolée, émergeant bien au-dessus du reste de la production du XIIème siècle.

Prélats et grands seigneurs et, à leur suite, nobles et riches marchands se gardent bien de laisser les orfèvres exercer leurs talents à la seule gloire de Dieu, estimant sans doute que leur renom mérite également le rehaut inestimable qu'apportent, sur leurs nappes blanches, les éclats dorés ou vermeils de belles pièces d'argenterie. Ainsi, Nivelles, Mons, Namur et surtout Tournai et Liège connaissent une production d'orfèvrerie civile qui, sans atteindre en qualité celle de France et d'Italie, n'en décorent pas moins pendant des siècles, des dizaines de tables wallonnes.

On n'aurait évoqué qu'une partie des travaux du métal en Wallonie, si l'on passait sous silence le plus récent et le plus spectaculaire d'entre tous : l'industrie métallurgique installée, depuis de XIXème siècle, dans les bassins de Charleroi et de Liège. Loin ici de la forge ou de la boutique d'artisan où la tâche est infiniment individualisée, nous pénétrons dans un décor d'ateliers immenses hérissés de cheminées où, rassemblés par équipes, des hommes par milliers partout, des milliers dans la fournaise, des milliers dans le vacarme des machines, fondeurs, couleurs et puddleurs tirent de l'acier incandescent des barres, des poutres et des tôles qui deviennent rails, ponts et bateaux. La puissance et la qualité de cette métallurgie sont telles qu'elle exporte ses produits jusqu'à la lointaine Russie, le savoir-faire de nos ingénieurs jusqu'en Suède.

Annexe : L'éducation en Wallonie

J'ai, au long de ces trois pages, mis lourdement l'accent sur la production artistique wallonne. Celle-ci me paraît injustement méconnue. Pourtant, il me semble que des incitations à la redécouverte de notre patrimoine ne seraient entendues et comprises que par cette frange dite cultivée de la population adulte qui pénètre déjà si faiblement dans nos musées... Non, l'effort doit manifestement se situer plus tôt, et, pour être plus précis, à l'école. Peut-on rêver endroit plus propice au dessein qui est le nôtre : réconcilier le Wallon avec son patrimoine artistique? Rien pourtant n'est fait de ce côté-là depuis .... j'ai envie de dire depuis toujours.

Les cours d'initiation artistique se sont réduits comme des peaux de chagrin. Au moment où, de plus en plus, le temps est de l'argent; les études, le rendement; et le travail, la productivité, quelques heures consacrées à l'éducation artistique (en ce compris, la pratique d'un art plastique et d'un instrument de musique et une initiation à l'histoire de l'art) permettraient peut-être de ramener l'homme (et son oeil) à de plus justes mesures. Et ce dernier mot n'est pas indifférent. Tout désir de création artistique n'est-il pas en effet avant tout lié à une manière de regarder le monde?

De tels cours ne viseraient certes pas à faire de chacun de nous un artiste mais permettraient d'aider chaque personne à modeler son regard, à l'éduquer. L'école de demain en Wallonie doit être capable de former des adultes, c'est-à-dire des regards individualisés, échappant à l'uniformisation et à la monotonie des images "télé-self service". Cela serait aussi une fameuse leçon de démocratie pour les Wallons de demain.

(Octobre 1991)

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