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Deuxième congrès La Wallonie au Futur
1991 -
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Quelques handicaps majeurs que rencontrent les fonctionnaires communaux dans l'accomplissement de leur mission

Jean Henrottay
Géographe, attaché à la Fondation Roi Baudouin

 

1. Quelques handicaps majeurs que rencontrent les fonctionnaires communaux dans l'accomplissement de leur mission

 

1.1. Le handicap culturel

C'est un handicap que nous partageons tous plus ou moins intensément. Combien d'aménagements ne sont-ils pas, par exemple, conditionnés par la voiture-passion, parce que le chef de service marche peu et fait la navette chaque jour entre son lotissement et son bureau dans sa voiture personnelle de plus ou moins grosse cylindrée?

Nous nous sommes habitués à un environnement urbain chaotique, à des espaces cloisonnés, à la disparition des relations de proximité naturelle, au "mal-vivre" et aux pseudo-progrès. Les fonctionnaires aussi.

 

1.2. Les handicaps de formation

Le bagage théorique des fonctionnaires chargés de l'urbanisme et de l'aménagement du territoire dans les communes est généralement bien maigre. Beaucoup d'agents se sont formés sur le tas. Dans bien des communes, leur rôle se limite à vérifier si les dossiers de demande de permis de bâtir et de lotir sont complets et conformes aux règlements en vigueur.

La qualité architecturale d'un projet et le bon aménagement du territoire sont, dans leur esprit, des concepts vagues, normalisés dont bien peu d'agents osent s'entretenir avec les auteurs de projet.

L'absence de recul vis-à-vis des phénomènes à traiter, la difficulté de penser en terme d'objectifs, le cloisonnement des compétences entre services (permis de bâtir, PPA, commodos-incommodos, etc.) sont chose courante. Aussi, les agents communaux demeurent-ils encore terriblement démunis pour impulser un aménagement intégré, actif et inventif.

Le besoin de formation et d'échange est unanimement ressenti par les fonctionnaires à tous les niveaux. Ceci d'autant plus que les communes ne peuvent se doter, par recrutement, d'un personnel suffisant et spécifiquement qualifié. Les restrictions budgétaires contraignent même certaines communes à ne pas remplacer les fonctionnaires qualifiés atteignant la retraite.

 

1.3. L'absence de cadre de référence

La volonté du pouvoir politique local de ne pas avoir de projet global d'aménagement constitue une autre difficulté pour le service de l'urbanisme. Les raisons de cet état de fait sont généralement peu glorieuses. Citons entre autre la paresse ou l'incompétence du Collège en place face à la réflexion à entreprendre pour maîtriser l'avenir de la commune, la préférence de la politique "au coup par coup" qui flatte l'ego de l'homme politique en mal de pouvoir, le manque de cohésion du Collège ou le choix délibéré pour la déréglementation ("laissons faire le privé").

Dès lors, que faut-il encourager? Que faut-il invoquer pour refuser un mauvais projet? Comment peut-on encore tenter d'améliorer un projet dont le bourgmestre ou l'échevin responsable a déjà promis le permis de bâtir à l'intéressé? Très fréquemment, les autorités communales considèrent l'urbanisme comme "un problème à résoudre" plutôt que comme une discipline de gestion de l'espace urbanisé.

 

2. Les séminaires techniques d'urbanisme (STU)

Face à cette situation, la Fondation Roi Baudouin a ressenti le besoin de raviver l'intérêt pour l'urbanisme et l'aménagement du territoire à l'intérieur des communes.

Quatre sessions de formation à l'intention des fonctionnaires communaux ont été organisées à ce jour (1984-1989). Il s'agit d'une formation dite "en cours d'emploi" qui, d'une part, s'appuie sur un acquis et, d'autre part, pratique l'analyse de "cas". Le programme comprend 120 heures, réparties sur 10 mois, soit 2 périodes de 6 heures par mois. Il est divisé en 4 parties : la théorie, les études appliquées, les visites d'expériences ou de chantiers urbains, des conférences. L'organisation de la formation est décentralisée au niveau provincial. Des journées de recyclage (4 par an) sont également organisées. A l'heure actuelle, 45 % des communes wallonnes ont profité des STU en permettant à un ou plusieurs de leurs fonctionnaires de parfaire leurs connaissances.

Quel bilan tirer des 4 premières sessions?

  1. Les STU ont mis en contact des fonctionnaires communaux confrontés aux mêmes problèmes. Des amitiés se sont développées, permettant ainsi la mise en place d'un réseau informel d'entraide administrative.

  2. Les STU on permis d'aborder les principales questions d'ordre juridique qui se posent dans les communes. Le bagage juridique des fonctionnaires communaux chargés de l'urbanisme en a été incontestablement enrichi. L'analyse de la jurisprudence a permis en outre de mieux comprendre l'esprit du code wallon.

  3. Les discussions autour de la philosophie d'un "bon aménagement du territoire" ont fait prendre conscience à de nombreux fonctionnaires de leur responsabilité quant à l'avenir de leur commune. La formation reçue devrait leur permettre de jouer davantage le rôle de conseiller du pouvoir politique. Les directions provinciales de l'urbanisme ont d'ailleurs confirmé qu'elles percevaient une différence sensible d'approche et de qualité d'analyse dans les choix opérés dans les dossiers qui leur sont présentés.

  4. Les STU ont montré des exemples de ce qui se fait de mieux en Wallonie et dans les régions voisines, suggérant par la même occasion des actions à entreprendre dans sa commune.

 

3. Quelques pistes pour l'avenir

D'évidence, le besoin de la formation concernant l'urbanisme et l'aménagement du territoire ira en grandissant, d'autant plus que les communes sont le plus en plus nombreuses à opter pour le régime de décentralisation. Le principe d'une formation continue et de recyclage permanents devrait être acquis.

Quels objectifs pourraient être poursuivis par ces futures formations? J'en citerai cinq :

  • développer un esprit de corps au sein des fonctionnaires qui ont en charge l'urbanisme et l'aménagement du territoire, afin de les aider à mieux maîtriser les relations parfois difficiles avec le pouvoir politique;

  • développer une approche pluridisciplinaire des phénomènes (séminaires "pour que vive la rue" (1));

  • "penser globalement et agir localement" ou encore développer la pratique de la gestion par les objectifs. Cette méthode de gestion comprend quatre phases :

    1. définition de la politique générale
    2. élaboration des priorités du planning
    3. choix des actions à mener
    4. réalisation du programme et évaluation

  • favoriser la créativité de telle manière que le futur ne soit pas la reproduction du présent; l'urbanisme doit sortir des normes et des habitudes;

  • convaincre d'oser la participation des habitants aux décisions et aux procédures d'évaluation des politiques menées.

Au niveau de la pédagogie :

  • la formation doit répondre aux préoccupations exprimées préalablement par les participants; elle doit les pousser dans leurs motivations;

  • elle doit susciter le questionnement et la participation active de tous;

  • la théorisation, là où elle est nécessaire, doit venir de l'examen de la réalité et non l'inverse;

  • enfin, la formation se doit d'être enthousiasmante.

Enfin, en terme de contenu, citons quelques domaines à aborder:

  • le rôle pédagogique du fonctionnaire auprès des habitants et au sein de la CCAT;

  • la planification et plus particulièrement l'élaboration et la gestion des schémas de structure architecturale;

  • la gestion du trafic et la requalification des espaces publics.

 

Notes

(1) Séminaires organisés par la Fondation Roi Baudouin (1991) à l'intention des agents communaux ayant en charge la gestion et la conception des voiries communales. La caractéristique principale de ces séminaires est le travail en groupes pluridisciplinaires, à partir d'un cas concret, avec pour objectif d'aboutir à définir une position commune présentable aux décideurs.

 


 

 

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