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Deuxième congrès La Wallonie au Futur
1991 -
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Une comptabilité régionale pour la Wallonie

Groupe COREG

 

La comptabilité régionale est l'instrument privilégié de diagnostic de la santé économique d'un pays. En effet, c'est dans les comptes nationaux que les économistes trouvent la plus grande partie des informations factuelles qui permettent de suivre l'évolution économique d'un pays ou de chercher à mieux comprendre les phénomènes. Ainsi, les travaux sur la comptabilité régionale, élaborés par le groupe de recherche interuniversitaire COREG, dotent la Wallonie d'une outil précieux d'évaluation.

L'élaboration d'une comptabilité nationale procède d'une double préoccupation.

D'une part, son objectif est de mesurer l'activité économique de la nation (Produit national). Plus précisément le produit de la nation peut être estimé selon trois optiques.

  • la première observe l'origine du produit national; le Département d'Economie appliquée de l'Université libre de Bruxelles (DULBEA) reconstitue celui-ci par agrégation des valeurs ajoutées des différents secteurs productifs sur le territoire de la Région wallonne.

  • La deuxième considère la répartition du produit national; le Service de macro-économie (GREA) de la Faculté Warocqué de l'Université de Mons enregistre l'ensemble des revenus primaires perçus par les unités résidant en Wallonie.

  • La troisième analyse l'affectation du produit national; le Groupe d'Economie wallonne (GEW) des Facultés universitaires Notre-Dame de la Paix de Namur estime le produit national brut par agrégation des dépenses de consommation (privée et publique) et d'investissement (intérieur et extérieur).

D'autre part, la comptabilité nationale répertorie les flux entre agents macro-économiques à travers les comptes. Les Services d'Economie publique de l'Université de Liège élaborent ainsi les comptes régionaux de l'Etat, des particuliers et du reste du monde.

La base de données ainsi constituée sur la période 1973-1989, met en évidence les performances économiques de la région en termes de croissance et de spécialisation d'activité, de formation et de répartition des revenus et des dépenses, de finances publiques, de balance extérieure, d'investissements, d'épargne...

 

A. Le produit régional de la Wallonie

Quelle est l'origine du produit régional wallon?

Du point de vue du diagnostic général, la part relative de la valeur ajoutée wallonne dans le total national a diminué de manière continue jusque 1986, la Wallonie se caractérisant, par rapport au reste du pays, par un taux de croissance annuel moyen structurellement inférieur à celui observé dans le reste du pays. Depuis 1986, les différentiels de croissance moyens s'amenuisent, voire même se renversent au profit de la Wallonie en 1987 et 1988.

Le produit intérieur brut est réparti non par agent (entreprises, Etat, ménages), mais par branches ou secteurs d'activité. Ainsi, au niveau national, les secteurs qui contribuent le plus à la valeur ajoutée sont respectivement les services, le commerce et les transports. Les fabrications métalliques arrivent en quatrième position. Il est par ailleurs utile d'observer une contribution nettement moins grande de la sidérurgie et un poids beaucoup plus important des services financiers en Belgique comparativement à la situation qui prévaut en Wallonie. Parmi les autres secteurs de l'activité industrielle de l'économie wallonne, la marginalisation des secteurs textiles, vêtements et chaussures, bois et meubles s'est fortement renforcée au cours des quinze dernière années. Il en est de même pour le secteur des métaux non ferreux. Bien que la spécialisation wallonne au sein du secteur des minéraux non métalliques subsiste, la contribution de ce secteur à la valeur ajoutée a cependant fortement diminué au cours de la période. Quant au secteur chimique, s'il maintient plus au moins sa contribution à la valeur ajoutée nationale, il voit par contre son rôle au sein de l'économie wallonne se renforcer. Enfin, on remarquera l'évolution particulièrement favorable de la contribution à la valeur ajoutée wallonne du secteur de l'eau, gaz et électricité.
 

Quelle est la répartition du produit régional wallon?

La présentation comptable distingue les revenus des trois agents nationaux, à savoir: les particuliers, les entreprises et l'Etat.

Le revenu primaire des particuliers comprend les salaires, les rémunérations des indépendants et les revenus de la propriété.

Quant aux revenus primaires des entreprises, ils sont constitués des bénéfices réservés des sociétés privées et publiques autonomes et des impôts directs des sociétés de toute forme juridique.

Le seul revenu primaire perçu par l'Etat est le revenu de la propriété qui comprend les loyers imputés, les intérêts, dividendes et bénéfices perçus par l'Etat.

La part du revenu des particuliers wallons dans le total des revenus est supérieure à la part nationale des revenus des particuliers belges et ce sur l'ensemble de la période considérée. A l'inverse, la part du revenu des entreprises wallonnes est inférieure à celle du revenu des entreprises nationales dans le revenu total. Toutefois, la part du revenu des particuliers wallons semble diminuer depuis 1986 au profit du revenu des entreprises. Remarquons encore qu'au cours des ces dernières années, le différentiel entre les niveaux des parts wallonne et nationale du revenu des entreprises tend à disparaître; il est de l'ordre de 10 %.

Quant au revenu primaire de l'Etat, les maigres entrées des revenus de la propriété et de l'entreprise échéant à l'Etat, ne compensent nullement les intérêts de la dette publique auxquels doivent faire face et l'Etat wallon et l'Etat central.

 

Comment le revenu régional des wallons est-il dépensé?

En toute généralité, le revenu régional est affecté à l'achat de biens de consommation ou à l'épargne. L'épargne est à son tour investie. Les biens de consommation prennent la forme de biens privés et publics.

Le solde, quant à lui, est investi :

  • soit, sous la forme d'actifs physiques à l'intérieur du territoire; c'est la formation intérieure brute de capital;

  • soit, sous la forme d'actifs monétaires et financiers détenus sur le reste du monde; c'est l'investissement extérieur de la région.

Structurellement, en Wallonie, nous consacrons une part plus importante de nos dépenses à des biens de consommation. En moyenne, sur la période 1973-1989, un revenu régional de 100 francs est affecté en Wallonie à raison de 72 francs à l'achat de biens privés, et à raison de 20 francs à la consommation de biens publics. Les valeurs correspondantes en Belgique sont respectivement de 64 francs et de 17 francs.

Corollairement, nous affectons, dans notre région, une fraction moindre du revenu à des dépenses génératrices d'un accroissement de notre richesse. Si, sur la même période, 19 % des dépenses wallonnes sont destinées à l'investissement intérieur, soit un effort semblable à celui observé au niveau du royaume, le solde commercial du sud du pays fait apparaître un déficit de quelque 11 % du PNB régional exprimant un endettement structurellement croissant. A l'opposé, la balance commerciale belge vis-à-vis de l'étranger est proche de 0.

Si la nation, au cours de la période 1973-1989, consacre 19 % de son revenu à des dépenses accroissant la valeur brute du patrimoine, la région, en revanche, n'en destine que 8 %.

 

B. Les comptes régionaux des agents macro-économiques

Le compte de l'Etat

Les travaux accomplis par le groupe COREG font référence à un "Etat régional wallon" qui ne correspond nullement à la construction institutionnelle née de la réforme belge de l'Etat. Le concept d'Etat régional wallon, développé par COREG, est représentatif de l'ensemble des administrations publiques

  • prestant tous les services, notamment d'enseignement ou de défense nationale;

  • organisant les transferts au profit des ménages (en particulier de sécurité sociale) et des entreprises.

L'exercice attribue dès lors au secteur public wallon l'ensemble des activités qui échoiraient à ses administrations si la Région était un Etat autonome, entièrement séparé du reste du pays. L'Etat wallon, ainsi construit, gère donc la totalité des matières qui relèvent institutionellement de la Région, de la Communauté et de la Nation et qui sont attribuables au sud du pays.

Le tableau des opérations courantes de l'Etat estimé par COREG montre l'importance croissante de la désépargne de l'Etat wallon. Toutefois, il nous faut constater que la désépargne de l'Etat belge est supérieure à celle de l'Etat wallon, ce qui signifie que les administrations publiques des autres régions connaissent également un processus de désépargne, et ce depuis 1978. Cependant, la désépargne wallonne représente sur les dernières années étudiées, 1987 à 1989, une part relativement importante de la désépargne nationale; ceci s'explique par une décroissance plus rapide du niveau de désépargne nationale par rapport à une désépargne wallonne qui ne décroît pas voire même s'accroît encore en 1989.

 

Le compte des particuliers

Par définition, le revenu disponible des particuliers est composé du revenu primaire (salaires et traitements, revenus des entrepreneurs individuels et revenu de la propriété échéant aux particuliers) et des transferts courants nets (en provenance et à destination des pouvoirs publics et de l'étranger). Le rapport de la consommation privée au revenu disponible trace l'évolution, de la propension moyenne à consommer des particuliers. Les estimations COREG nous permettent ainsi de dire que cette propension moyenne à consommer a augmenté jusqu'en 1984 et par la suite, n'a cessé de diminuer. Toutefois, elle reste élevée, de l'ordre de 85 % en 1989. Il faut encore faire remarquer que pendant toute la période considérée, les Wallons ont une propension à consommer plus importante que celle du reste du pays, l'écart actuel étant d'environ 7 %.

Si l'épargne des particuliers, au niveau national et régional, est restée positive tout au long de la période, elle représente une part de moins en moins importante par rapport aux revenus disponibles en Wallonie. Cela est probablement dû au fait que les consommateurs wallons ont préféré maintenir leur niveau de vie au détriment de leur épargne.

 

Le compte du reste du monde

Pour rappel, la balance commerciale vis-à-vis de l'étranger était positive au niveau national de 1973 à 1976, elle l'est de nouveau depuis 1983. Par contre, la balance correspondante en Région wallonne est toujours déficitaire.

Le solde des transferts vis-à-vis du reste du monde est lui aussi structurellement négatif de sorte que la somme des deux balances, soit la balance courante, apparaît négative sur toute la période. Elle exprime un endettement annuel vis-à-vis de l'étranger ou encore une diminution de nos avoirs nets.

De la sorte, sur le plan du seul patrimoine financier, le diagnostic posé pour la Wallonie exprime un appauvrissement net en Wallonie et un enrichissement net dans le reste du pays sur la totalité de la période.

 

Le compte des opérations de capital

L'épargne régionale s'investit soit en actif réel et accroît le patrimoine réel de la Région : soit en actif financier, il s'agit alors du prêt net au reste du monde. Le patrimoine réel a toujours progressé, c'est l'investissement intérieur. Il s'élevait à quelque 19 % du produit régional quoique une fraction de l'investissement n'ait comme seule finalité que de compenser l'usure du stock d'équipement existant, soit un amortissement de l'ordre de 18 % du produit national. Aussi, le patrimoine réel a-t-il seulement augmenté, chaque année, à raison d'un montant égal à plus au moins 11 % du produit national.

Dans le même temps, le patrimoine financier vis-à-vis du reste du monde dimimuait, en moyenne par an, de quelque 12 %. Ainsi au total, cette période a enregistré un appauvrissement global de la région wallonne alors que le reste du pays s'enrichissait.

(Octobre 1991)


 

 

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