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Regards syndicaux sur l'avenir wallon

Georges STAQUET
Président de la FGTB Régionale de Charleroi
Secrétaire général de la Fédération des Métallurgistes de Charleroi

 

Bien qu'il en ait été décidé ainsi, je tiens à préciser que les lignes qui vont suivre ne sont qu'une contribution personnelle à nos réflexions sur le thème: "Regards syndicaux sur l'avenir wallon". Ce n'est en aucun cas, au nom de la FGTB que j'exprime des positions ou orientations qui auraient été prises ou non au sein des instances syndicales de la FGTB.

La dernière décennie n'a certainement pas été une décennie d'abondance, loin s'en faut; elle fut surtout marquée par une crise d'austérité particulièrement exploitée par le pouvoir politique actuel et le patronat; elle fut surtout marquée par des restructurations industrielles profondes, des bouleversements technologiques, dont les conséquences sur la politique sociale et de l'emploi ont été considérables.

Des centaines de milliers d'emplois ont été perdus, les travailleurs et les assistés sociaux, au travers de la sécurité sociale, ne sont plus aussi solidairement protégés, des changements ou projets de changements de réglementation remettent aujourd'hui en cause les acquis de près d'un siècle de luttes sociales: durée du travail (l'offensive et la complicité du pouvoir politique et patronal sur ce point sont indéniables), la protection des délégués syndicaux, les grilles salariales, voire même l'application des conventions collectives librement et légalement négociées.

Le syndicalisme belge, sans aucun doute l'un des plus puissants d'Europe par son pourcentage élevé d'affiliés, n'a pas pu enrayer la machine de l'Etat et du patronat. L'attitude syndicale a été plus défensive qu'offensive en général. Nous pourrions parler longuement des causes de cet "échec". Là n'est pas notre propos.

Une note positive cependant: malgré l'ampleur des mesures patronales et du pouvoir politique actuel réduisant les avantages acquis, malgré une fréquente résurgence des sentiments anti-syndicaux soutenue par une certaine presse et autres médias, malgré un avenir économique très sombre, malgré une incitation vers les travailleurs au "chacun pour soi",... c'est pour nous une satisfaction de constater la grande fidélité des travailleurs au mouvement syndical; ce dernier n'est pas moribond, même s'il est parfois contesté ou regrettablement passéiste!

Cela dit, l'avenir syndical est-il wallon?

Le syndicalisme en Wallonie a, incontestablement, un rôle à jouer.

Sur le plan des structures notamment, le rêve d'un rassemblement des progressistes ne peut se concrétiser qu'au niveau de la Wallonie, même si, depuis 1981, l'évolution politique des partis au pouvoir prend plutôt une autre tournure.

En ce qui concerne les réformes de structures institutionnelles mises en place depuis le vote des lois sur la régionalisation de 1980, le mouvement syndical wallon doit être présent et compétent sur les matières régionalisées. C'était une adaptation nécessaire.

Toutefois, n'est-ce pas là aller à contresens de l'histoire économique et sociale du pays et de la Wallonie que d'envisager ou de dire: "l'avenir syndical est wallon?" N'est-ce pas finalement un repli sur soi? Repli qui peut être paralysant au moment où plus que jamais les plus avertis d'entre nous estiment que seule, une véritable Europe des travailleurs peut donner une nouvelle force de frappe aux syndicats et briser le courant, dangereusement exploité par nos adversaires, du "chacun pour soi".

Allons plus loin: le slogan de la FGTB, lancé lors des élections sociales d'avril dernier, "Ensemble, on est plus fort", a-t-il une signification véritable ailleurs qu'au niveau d'une dimension européenne du syndicalisme moderne?

N'est-ce pas aussi la seule dimension économique d'une Wallonie, terriblement éprouvée par la crise industrielle et toujours à la recherche d'un nouveau tissu industriel et urbain dans la perspective d'une société de l'an 2000?

Le document préparatoire au Congrès de l'Institut Jules Destrée d'octobre prochain cite au moins trois composantes du type de société wallonne vers l'an 2000: TRAVAIL - TECHNOLOGIE - CULTURE.

Si l'attitude du mouvement syndical est connue, et a été clairement définie par nos Congrès de 1986, en matière de travail et de technologie, elle est moins ferme, - et donc plus floue, - au niveau de la culture, surtout dans les esprits. Les syndicalistes wallons dans leur majorité n'ont pas, me semble-t-il, franchi le pas de placer la culture, au sens large du terme, parmi les revendications prioritaires du mouvement syndical FGTB; n'est-ce pas là une première lacune à combler?

Enfin, dans une Belgique fédéralisée, l'adoption d'une charte constitutive d'un peuple wallon n'aurait-elle pas le mérite de rendre confiance en lui-même au citoyen wallon?

Dans la justification de son avant-projet de Charte constitutive du Peuple wallon, Robert Moreau écrit notamment: "L'adoption de cette Charte, soit par décret, soit par référendum, est de nature à rendre confiance au Peuple wallon. Confiance en lui-même, en le rendant conscient de ses devoirs, de ses responsabilités et aussi de ses possibilités".

Le peuple wallon a des qualités intrinsèques, c'est connu, et la Wallonie a des ressources naturelles et technologiques plus qu'appréciables. Nos possibilités sont donc réelles. Hélas, beaucoup de Wallons sont encore aliénés à une civilisation industrielle (la deuxième) quasi éteinte, et ils en sortent mal. Ce qu'il faut préparer, ce sont les hommes et l'équipement économique du XXIème siècle; le reste n'assurera plus (difficilement) d'ailleurs que la transition entre deux types de sociétés, deux types de mentalités, deux formes de démocratie économique et sociale.

L'Avant-projet de Charte réclame pour la Wallonie des droits fondamentaux, tels que:

- le droit à l'éducation et à la culture;
- le droit à la santé;
- le droit à l'information, à la consultation et à la participation du citoyen;
- le droit au travail;
- le droit à la démocratie économique;
- le droit au logement;
- le droit à la qualité de la vie;
- le droit à la protection du consommateur.

Il y a là, assurément, de nombreux créneaux ouverts pour des revendications prioritaires et fondamentales du mouvement syndical wallon.

Il y a là des possibilités certaines de sensibilisation et d'adhésion du Monde du Travail, sans pour autant renoncer à la solidarité que nous défendons au travers d'une formule telle que "Ensemble, on est plus fort".

(Octobre 1987)

 


 

 

 

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