Créée en 1912, la revue Sambre et Meuse est
dirigée par François Bovesse. Le premier numéro date
du 11 août, il est imprimé à Namur, il rassemble une
élite locale d’écrivains et d’artistes autour d’un
berceau orné à son fronton d’une sculpture de H.
Bodart. Ce journal hebdomadaire, artistique,
littéraire et mondain veut, à travers un soutien
apporté aux lettres et aux arts, à travers la
promotion des sites et des monuments du pays wallon,
défendre et illustrer l’originalité de la terre
wallonne.
Dès le premier numéro, François Bovesse affirme la
dimension wallonne de la revue, par ces phrases
lyriques, qui expriment par ailleurs la force
symbolique de l’espace namurois : Et Namur avec ses
toits pointus enchevêtrés, mauves, gris, bleus, avec
Saint-Jean son vieux clocher à bulbes, et ses
balcons de bois hardiment suspendus, Namur unit la
Sambre et la Meuse à ses pieds et tout le
sang wallon y bat comme en un cœur. (...) Pour
chanter le pays, des hommes ont souffert, et
souffrent chaque jour. Ils ont souffert d’aimer leur
sol et leur terroir, leur coin et leur clocher. Ils
voudraient que chacun puisse l’aimer comme eux et
puisqu’ils ont compris qu’ils devaient tout d’abord
vous le faire connaître, ils viennent vers vous.
Nous dirons ce qu’est la terre wallonne.
Fin de l’année 1912, la Fédération des Artistes
wallons choisit Sambre et Meuse comme organe.
Néanmoins, jusqu’au seuil de sa deuxième année
d’existence, il semble que le journal se soit
essentiellement cantonné dans le combat culturel
local. En mars 1913, Sambre et Meuse déclare
vouloir abandonner la critique des faits et gestes
locaux, notamment pour s’ouvrir davantage au
mouvement artistique et littéraire de France et de
Wallonie. Ainsi, tout en restant essentiellement une
revue culturelle, Sambre et Meuse accomplit
des pas supplémentaires dans son engagement wallon.
En août, la rédaction adopte la devise Wallon
toujours ! et l’emblème du coq hardi.
Signe parmi d’autres de ce changement, Lucien
Marchal, secrétaire de rédaction, exprime sa
satisfaction devant la surprise provoquée par la
multitude des drapeaux au coq hardi arborés en août
1913 lors de la visite du roi et de la reine à
Liège. D’autres éditoriaux manifesteront un même
engagement. En septembre 1913, Sambre et Meuse
reproduit les statuts de la nouvelle Ligue wallonne
de l’arrondissement de Namur. Le journal rend compte
des activités de celle-ci, tout comme il continue de
renseigner celles de la section namuroise des Amis
de l’Art wallon. L’Assemblée wallonne, qui tient en
mars 1914 ses assises à l’hôtel de ville de Namur,
est saluée chaleureusement par Sambre et Meuse,
qui publie les statuts de cet organisme. Le dernier
numéro de la revue, daté d’août 1914, est consacré à
la guerre et est vendu au profit des blessés de la
Croix-Rouge.
Pendant la Grande Guerre, réfugié à Paris, François
Bovesse soulignera qu’il avait créé Sambre et
Meuse pour exalter et défendre la Wallonie,
lutter contre l’influence germanique sous toutes ses
formes et répandre la culture française. La revue
comptait parmi ses collaborateurs Maurice Barrès,
Nicolas Baudhuin, Jules Destrée, Maurice Des Ombiaux
et Oscar Colson notamment. À Paris, elle disposait
d’un secrétaire de rédaction en la personne de Jean
Desthieux que l’on retrouvera parmi les principaux
collaborateurs de L’Opinion wallonne à Paris
de 1916 à 1918. La revue recevait aussi une
chronique de Maxime Revon.
La revue cessa de paraître le 30 juillet 1914
lorsque ses principaux animateurs lâchèrent la plume
pour le fusil. Adolphe Dejardin fut tué par les
Allemands, alors que Lucien Marchal, Louis Boumal,
Léon Lefebvre de Vivy et François Bovesse
parvenaient à gagner la France et à rejoindre le
comité de rédaction de L’Opinion wallonne
dirigée par Raymond Colleye.
Arnaud Pirotte – Paul Delforge |