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Gaulois (Le) (1944-1955)

Quelques jours après la libération de Bruxelles, avant même la délivrance de la Wallonie, François Simon rassemble, avec Alfred Harcq et Alfred Heine, un certain nombre de Wallons de Bruxelles, Émile Foucart, Mlle Malcorps, Edmond Populaire et son épouse, à qui il suggère de créer à Bruxelles, un quotidien wallon. L’idée est accueillie avec enthousiasme. Un mois plus tard, le 11 octobre 1944, naît Le Gaulois. Le sous-titre du quotidien, édité par la coopérative Maison wallonne d’édition, annonce ses ambitions Pour la Défense de la Wallonie et de la Civilisation française.

Le grave problème nationalitaire, que pose à l’État la coexistence dans les mêmes frontières politiques des peuples flamand et wallon, est, affirme ce groupe de militants, volontairement méconnu. Aussi estiment-ils que la présence à Bruxelles d’un représentant de la cause wallonne qui ne soit plus une voix provinciale disposant, à tort ou à raison, d’une autorité toute locale s’impose pour que les tenants bruxellois du nationalisme belge soient placés en face d’un porte parole qui soit leur égal à tous les points de vue. Il leur semble urgent qu’à Bruxelles, cœur de la vie belge, les journaux et les milieux officiels apprennent qu’il existe un Mouvement wallon en pleine extension s’opposant aux entreprises colonisatrices du flamingantisme et à l’inertie intéressée du " middelmatisme ".

Le titre du journal est choisi pour affirmer que les Wallons sont des habitants de l’Occident européen, appartenant à la civilisation française. Les responsables du quotidien entendent proclamer d’autant plus que les Wallons sont des Gaulois, qu’au cours de l’occupation allemande certains se sont appliqués à persuader les Wallons qu’ils étaient des Germains. Cette identité, Le Gaulois entend l’affirmer d’autant qu’à ses yeux l’emprise germanique n’est pas, au sortir de la guerre, totalement desserrée en Belgique ; de plus, les milieux de collaboration ouverte ou déguisée sont toujours là, menacent l’existence et la sécurité de la Wallonie et sont les ennemis de la culture française à laquelle les Wallons appartiennent.

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La plupart des responsables du Gaulois sont dirigeants ou membres du mouvement de la Wallonie libre. François Simon devient président du comité de la section bruxelloise au sein duquel se retrouvent plusieurs collaborateurs du journal, Jacques-A. Dupont, Eugène Dubrulle, Alfred Harcq et Charles Becquet. Parmi les collaborateurs, on remarque encore Gaston Limage, Émile Foucart, Arille Carlier, Hyacinthe Brabant. Membre du directoire, Arille Carlier est chargé de la rédaction quotidienne du Billet politique du Gaulois. L’on peut encore lire dans la tribune libre les chroniques de Fernand Schreurs, directeur de la Wallonie libre, d’Aimé Despiegeler, éditeur responsable et administrateur-gérant de l’organe officiel du mouvement, de Jean Langlois, Fernand Pieltain et François Van Belle, tous trois collaborateurs à la Wallonie libre, d’André Schreurs, directeur de Jeune Wallonie et d’Émile Jennissen.

Le Gaulois dont la tendance politique se situe à gauche n’est pas un journal de parti. Il s’en prend énergiquement et indifféremment à tous ceux qui mettent en péril la Wallonie ou qui la défendent trop mollement, et plus particulièrement au parti catholique de la tutelle duquel il faut, écrit François Simon, soustraire le peuple wallon dont l’idéal démocratique s’oppose à cette formation politique qui a engendré rexistes et VNV et qui puise en Flandre l’essentiel de ses forces.

La solution minimum que Le Gaulois accepte est la réforme de la structure de l’État dans un sens fédéral. Seule cette thèse, qu’il qualifie d’opportuniste, est exposée dans des articles engageant la rédaction du journal, articles toutefois relativement rares. Quant aux solutions radicales, l’indépendance de la Wallonie et la réunion de celle-ci à la France, nombreux sont les articles qui leur sont consacrés dans la tribune libre du journal. Ces articles sont rédigés soit par des membres de l’équipe du Gaulois, soit encore et surtout par François Simon qui expose la thèse réunioniste tout en précisant cependant qu’il ne faut s’engager dans la voie de la réunion à la France que lorsqu’il aura été établi que toute entente dans le cadre Belgique n’est plus qu’un leurre. Le Gaulois affirme vouloir se plier aux résolutions qui seront adoptées au Congrès national wallon le 20 octobre 1945.

L’attitude anti-flamande du Gaulois, son radicalisme voire l’ambiguïté de ses positions sur l’avenir de la Wallonie et la propagande qu’il ne cesse de mener en faveur de la France lui attirent entre autres les foudres de Vrai et de Septembre auxquelles se joignent à l’occasion celles de l’Avenir du Luxembourg, de la Libre Belgique ou de La Dernière Heure. Élie Baussart, dans La Cité nouvelle du 22 août 1945, déplore l’attitude de ces frénétiques du Gaulois qui n’ont que hargne et mépris pour les Flamands et qui gâtent la cause wallonne par d’inutiles et irritantes exagérations.

Lors de la discussion de la déclaration ministérielle du premier gouvernement d’Achille Van Acker (1945), des allusions sur Le Gaulois sont portées à la tribune du Sénat. La première émane de Pierre Nothomb ; la seconde de Van Dieren, lequel demande au gouvernement s’il va, par l’intermédiaire du Gaulois, se laisser dicter la loi par la France dans la solution du problème rhénan. Quant à Pierre Nothomb, il dénonce les manœuvres de divisions du Gaulois en même temps qu’il le soupçonne de collusion avec les communistes.

Dans ce contexte, une mesure de suspension frappe Le Gaulois le 5 avril 1945. C’est sur proposition de Léon Mundeleer, ministre de la Défense nationale que le gouvernement prend cette mesure, pour une durée indéterminée, à la suite d’un article du 4 avril intitulé Les Flamands sur le Rhin ou la sécurité à rebours. La mesure gouvernementale semble à l’évidence davantage motivée par le contenu habituel du journal que contre le seul article précité. Les sources que constituent les documents de la Sûreté de l’État confirment que l’article n’est qu’un prétexte saisi par les autorités (Balace). Celui-ci apparaît comme un prétexte attendu depuis longtemps dans les sphères gouvernementales. Du constat de défaillance d’unités flamandes pendant la Campagne des Dix-huit Jours, l’article incriminé tire la conclusion qu’il serait dangereux de confier à des troupes flamandes une part de la défense du Rhin. L’auteur de l’article estime d’autre part que la garde de ce fleuve doit être placée sous une direction unique, en l’occurrence celle de la France, et demande enfin que les éventuelles troupes belges d’occupation soient incorporées dans l’armée française. L’article reproche également aux Flamands d’avoir favorisé les intérêts allemands avant la guerre.

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L’interdiction de paraître se base notamment sur un arrêté du 14 novembre 1944, permettant au ministre de la Défense nationale d’empêcher la circulation, la mise en vente et la distribution de journaux, brochures, écrits de nature à favoriser l’ennemi ou à ébranler le moral des armées ou des populations. Cette suspension va engendrer un malaise et suscite des protestations d’individualités, de groupes et de journaux divers. L’Association générale de la Presse belge condamne aussi le geste du ministre de la Défense nationale. De l’ensemble de ces protestations se dégage une double crainte : celle de voir la liberté de la presse menacée, celle de voir l’opinion wallonne étouffée. La suspension du Gaulois sera de longue durée ; le journal ne reparaît que le 23 août 1945.

Entre-temps, François Simon édite le premier numéro d’un journal Le Wallon enchaîné (25 avril). Rédigé par l’équipe du Gaulois, il porte le sous titre : Hebdomadaire pour la Défense de la Liberté et de la Wallonie. Ce numéro contient, outre des protestations véhémentes et des attaques serrées contre le ministre de la Défense nationale, des articles du même esprit que ceux régulièrement publiés par Le Gaulois. À peine sorti de presse, cet hebdomadaire fait l’objet d’une mesure d’interdiction motivée par un article intitulé : Le bâillon, arme des gouvernements faibles. Le jour même, les numéros offerts à la vente sont saisis.

Le Gaulois n’est ni l’organe officiel ni l’organe officieux du mouvement de la Wallonie libre. La Wallonie libre prendra d’ailleurs, petit à petit, ses distances par rapport à lui. Dans les premiers mois de la parution du Gaulois, La Wallonie libre qui reconnaît que les tendances de l’organe bruxellois sur le plan de la politique intérieure et extérieure n’ont pas l’assentiment de tous les Wallons, estime toutefois qu’elle ne peut légitimement lui faire grief d’avoir, sur les problèmes de l’heure, des opinions qui lui soient propres. Par ailleurs, appréciant le concours que Le Gaulois lui apporte dans sa lutte pour la Wallonie, elle demande aux sections du mouvement de soutenir efficacement le quotidien wallon en le diffusant au maximum. Par contre, lors de la suspension du journal, la Wallonie libre ne proteste pas avec la fougue que l’on pouvait attendre même si elle demande aux militants wallons, quelle que soit leur opinion sur la solution de la question wallonne, sur le ton et l’esprit du Gaulois, de soutenir ce quotidien par solidarité et par attachement à la liberté de presse. Lorsque Le Gaulois reparaît en août 1945, La Wallonie libre cesse toute publicité en sa faveur. Il semble que la tension entre le journal wallon de Bruxelles et La Wallonie libre résulte de la composition de l’équipe du Gaulois et de l’attitude de son directeur François Simon, ce casseur de vitres comme l’appelle le rédacteur en chef de La Wallonie libre, Hyacinthe Brabant. Celui-ci désapprouve la campagne d’agitation créée par François Simon suite à la suspension du Gaulois et n’y collabore plus lorsque celui-ci reparaît. Par ailleurs, si le quotidien wallon de Bruxelles suit dans les grandes lignes les directives transmises par le directoire de la Wallonie libre, il lui est arrivé de défendre des positions particulières à son équipe au sentiment parfois plus " avancé ". De là, à certains moments, des décalages encore accentués par l’outrance de certains articles du quotidien de Bruxelles. La Wallonie libre finit par s’en désolidariser totalement. Il faut attendre février 1946 pour que le directoire de la Wallonie libre décide, après mûre réflexion, de soutenir à nouveau Le Gaulois et de l’aider à devenir un grand journal wallon. Cet appui est toutefois assujetti à certaines conditions auxquelles souscrit Le Gaulois. Tout en restant indépendant, il doit se soumettre de plus près aux mots d’ordre du mouvement de la Wallonie libre. D’autre part, Le Gaulois a dû s’engager à se réformer profondément. Désormais, son Conseil d’administration est composé, d’une manière équitable, de représentants de toutes les régions et sa direction doit s’inspirer des conseils d’un comité politique qui comprend lui aussi des Wallons des diverses provinces wallonnes. François Simon abandonne par ailleurs en janvier 1946 la rédaction du journal pour des motifs de santé.

Les collaborateurs du Gaulois consacrent l’essentiel de leur activité journalistique à mettre sous les yeux de leurs lecteurs des documents destinés à révéler les ambitions conquérantes qui, de leur avis, se font jour en Flandre, à énumérer une copieuse liste de griefs wallons, à examiner les différents aspects doctrinaux de la question wallonne. De nombreux articles du Gaulois sont des réponses à des opinions parues dans diverses publications. Dans ce quotidien qui s’attache surtout à l’aspect politique et économique du problème wallo-flamand, les lecteurs voient s’exprimer toutes les nuances de l’opinion wallonne dans le cadre de la tribune libre que Le Gaulois réserve à des personnalités qui y présentent leur point de vue.

Le Gaulois publie une revue de presse flamande destinée à décrire aux Wallons ignorant le néerlandais le climat national de la Flandre. Cette revue est conçue pour mettre fin, dit Le Gaulois, à la duperie dont les Wallons ont été les victimes du fait que la presse de langue française éditée à Bruxelles les tient dans l’ignorance des réactions flamandes vis-à-vis de l’État belge.

Le journal wallon publie également une revue de la presse d’expression française lue en fonction surtout des grands problèmes qui préoccupent la Wallonie. Il donne enfin les principales informations concernant le Mouvement wallon et documente ses lecteurs sur l’activité des sections de la Wallonie libre. Si Le Gaulois consacre une bonne partie de ses colonnes à la défense de la Wallonie et de la civilisation française, il ne se désintéresse pas pour autant des faits que l’on peut lire dans d’autres quotidiens d’information. Le déroulement des opérations militaires, la situation internationale et les grands problèmes posés par l’organisation de la paix y sont évoqués et analysés régulièrement. Chaque jour, la politique intérieure belge trouve place dans les pages du quotidien wallon. Chaque semaine, une chronique politique est consacrée aux faits saillants et aux idées dominantes de l’actualité en Belgique. Le domaine littéraire n’est pas négligé. Outre quelques chroniques relatives aux arts et au folklore wallons, Le Gaulois, attentif aux manifestations de la vie française, publie aussi des articles qui s’efforcent de refléter la vitalité intellectuelle et artistique de la France renaissante. Le quotidien wallon publie également une chronique sportive. Il comporte enfin différentes rubriques de servitude : bulletin météorologique, loterie coloniale, programme de spectacles, nécrologie et offres d’emploi.

Le 30 mars 1946, c’est la fin d’une aventure unique, la publication d’un quotidien uniquement motivé par l’action wallonne. En effet, le journal devient hebdomadaire, mais dans un premier temps, le nombre de pages triple. À partir de décembre 1950, Le Gaulois devient bimensuel, puis mensuel au cours de l’année 1951. En 1954, il adopte une parution trimestrielle. Après une interruption entre le 27 juin 1953 et le 27 février 1954, il reparaît deux fois en 1955 ; la dernière livraison est celle du 10 décembre 1955.

Bernadette Donnay et Arnaud Pirotte

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  Page mise à jour le 18-01-2005

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