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Cette section propose la liste des notices contenues sur le cédérom de l'Encyclopédie du Mouvement wallon. Les notices accessibles en ligne sont datées : le carré jaune indique les mises à jour, le carré rouge signale les nouvelles notices.

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 Bary Jean

     Né à Tournai en 1877, décédé à Bruxelles en décembre 1916

Journaliste, collègue de Franz Foulon, Jean Bary lui succède à la tête du journal libéral L’Écho de la Dendre lorsque Foulon devient directeur de l’hebdomadaire bruxellois Le Ralliement (octobre 1906). Les deux journalistes restent en contacts étroits. Plusieurs articles de L’Écho de la Dendre consacrés à des questions wallonnes portent leurs deux signatures. Ils sont sur une même longueur d’onde lorsqu’il s’agit de réfuter les idées irrédentistes du comte Albert du Bois, ou de rejeter les revendications linguistiques flamandes. Au nom de l’Association libérale d’Ath, Bary invite Julien Delaite et Charles Magnette à tenir conférence sur des problèmes wallons (1910-1912). Il en retient des arguments, comme par exemple le financement inéquitable des travaux publics par le gouvernement belge : ce dernier favorise la Flandre au détriment de la Wallonie. En 1912, Jean Bary salue l’émergence de la prise de conscience wallonne, la création de l’Assemblée wallonne et se réjouit de voir les Wallons « sortir de leur apathie à l’égard des intransigeances flamingantes ». Comme Foulon, il assimile facilement flamingantisme et cléricalisme. Il rend longuement compte de la Lettre au roi de Jules Destrée.

Réagissant à la demande de « Home Rule » pour la Wallonie formulée par le député libéral de Virton Georges Lorand (l’Angleterre vient d’accorder ce statut particulier à l’Irlande), J. Bary constate que « l’idée de la séparation fait du chemin », mais se montre davantage partisan d’une formule de décentralisation au profit des provinces et des communes, formule « nécessaire dans ce pays bilingue et composé de deux races si différentes par tant de côtés » (1912). Avec Foulon, ses références explicites seront les projets remis à l’occasion du Congrès wallon de juillet 1912 par le socialiste hennuyer François André, par le conseiller provincial libéral liégeois Julien Delaite, et surtout par le député libéral de Charleroi Émile Buisset. Défenseur du principe de la liberté absolue en matière de gestion communale, du choix par le père de famille en matière scolaire, opposé à la flamandisation de l’université de Gand, Jean Bary apparaît comme un militant défenseur de la langue française partout en Belgique, et comme un partisan d’une large autonomie provinciale, lorsque la Première Guerre mondiale éclate. C’est par ses écrits dans la presse que Jean Bary défend des positions wallonnes. Il n’apparaît pas, en effet, comme membre ou responsable de cercles ou groupements wallons. Il n’est pas membre de l’Assemblée wallonne. Directeur de L’Écho de la Dendre, il est aussi rédacteur de La Flandre libérale et chroniqueur à La Meuse. Il préside l’Association des journalistes libéraux de Belgique.

Aux premiers jours de l’invasion allemande, Jean Bary se réfugie en France. Il est l’unique correspondant libéral du journal Le Courrier de l’Armée. Dès le printemps 1915, il prend la plume pour combattre la politique annexionniste des milieux proches du gouvernement belge. Avec Émile Royer (dans L’Indépendance belge), Bary est l’un des pionniers de l’opposition à la politique annexionniste, soutenue par quelques journaux français comme Le Parisien, Le Matin, Le Rappel, ou L’Action française. Par des articles dans Le Figaro notamment, Bary tente de faire contrepied à Fernand Neuray et au XXème siècle.

Face aux pressions dont il est l’objet, il préfère cependant démissionner (avril 1915) et poursuivre ses articles incisifs dans L’Indépendance belge : il y défend les principes du régime constitutionnel, du contrôle parlementaire, et continue à dénoncer les volontés d’agrandissements du territoire belge, en s’en prenant notamment à la Nouvelle Belgique dirigée par Dumont-Wilden.

                                                                               

Quand il reçoit soudainement des fonds qui lui permettent de supporter durablement un exil, il quitte Paris et s’établit en Suisse, où il continue à combattre la politique annexionniste de certains parlementaires belges sous la forme de pamphlets. Ce sont des milieux pacifistes anglais, voire défaitistes, qui auraient ainsi misé sur Jean Bary, en lui proposant de l’aider financièrement dans l’édition de son propre journal. Là, il édite une brochure intitulée France et Belgique, soit le même titre qu’une brochure rédigée par son ami Foulon en 1913, et il commence, à Genève, à partir du 15 février 1916, la publication du journal La Belgique indépendante. En mars 1916, Bary participe à une réunion des Belges de Suisse, sous la direction de Paul Otlet, eux aussi opposés aux projets de Grande Belgique et qui décident de former un Cercle actif.

La Belgique indépendante rassemble alors de fort bons articles noyés au milieu d’une prose parfois abjecte et souvent incohérente. Jean Bary y développe ses thèmes de prédilection contre le gouvernement du Havre, composé de cléricaux, de nationalistes et d’annexionnistes. Il signe des articles où il dénonce la politique de l’Angleterre. Attentif aux revendications wallonnes avant-guerre, J. Bary développe des idées qui s’écartent désormais des programmes wallons habituels. Ceux-ci étaient davantage enclins à défendre une union franco-belge, militaire et économique au minimum, ainsi que l’unilinguisme pour les Wallons. J. Bary, pour sa part, défend l’idée d’une entente belgo-hollandaise et considère qu’il faut introduire et imposer le bilinguisme aux fonctionnaires wallons.

Journaliste, correcteur, éditeur, diffuseur, Jean Bary s’occupe de toutes les étapes de la fabrication de son journal. Isolé, il est cependant victime de son tempérament. Il se voulait l’observateur le plus clairvoyant de la politique extérieure et le seul redresseur de toutes les iniquités. Se croyant « persécuté », il s’en prend alors à tous ceux qui ne pensent pas exactement comme lui et attaque, parfois méchamment tant ses réels ennemis que ses anciens amis. Selon les rares témoignages recueillis, J. Bary aurait été gagné par la folie, rêvant d’instaurer une République belge dont il aurait été le président. Les réactions à ses divagations sont à la mesure de ses attaques. Traité de vendu et de traître, J. Bary ne supporte pas la pression. Abandonnant ses affaires en Suisse, il rentre en Belgique où il se suicide en décembre 1916. Au moment de son départ, les Allemands tentent de s’emparer des réserves de La Belgique indépendante pour en assurer la diffusion. Des « résistants » suisses parviendront à intervenir et à détruire les milliers de pages que J. Bary tenait en réserve.

Une note du 11 juin 1918 adressée au gouvernement belge du Havre indique que Raymond Colleye entretenait des relations avec Jean Bary au moment où celui-ci était en Suisse. Le gouvernement belge lui reprochait sa collaboration à la presse censurée, après son retour en Belgique occupée.

 

Paul Delforge

 

A.E.B., Dossier B 259 : R. Colleye - Jean-Pierre Delhaye et Paul Delforge, Franz Foulon. La tentation inopportune, Namur, Institut Destrée, 2008, coll. Écrits politiques wallons n°9 - Paul Delforge, La Wallonie et la Première Guerre mondiale. Pour une histoire de la séparation administrative, Namur, Institut Destrée, 2008 - L’Indépendance belge, décembre 1916 - L’Opinion wallonne, n°2, 15-31 janvier 1917, p. 2 - M. Leroy, La presse belge en Belgique libre et à l’étranger en 1918, CIHC, Cahier n°63, Louvain-Paris, 1971, p. 20.  - Témoignage de Henri Henquinez, Université de Liège, Salle des manuscrits, Dossier procès de Namur - J. Willequet, Documents pour servir à l’Histoire de la presse belge (1887-1914), CIHC, Cahier n°16, p. 21, Louvain-Paris, 1961

 

 

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