Henri-Julien d’Andrimont
se faisait ordinairement appeler Jules d’Andrimont afin de le distinguer de
son père. Des études brillantes lui permettent d’enlever à 21 ans le titre
d’ingénieur civil des Mines, titre décerné par l’Université de Liège en
1856. Marié à la fille du chevalier Henri-Gustave de Mélotte de Lamalle, il
succède à son père à la tête du charbonnage du Hasard et, dès 1860, effectue
son entrée au conseil communal de Liège. C’est à cette époque qu’il
entretient une vive amitié avec Léonie de Waha. Membre du Parti libéral,
vice-président (1877-1878) puis président de l’Association de l’Union
libérale de Liège (1885-1886), conseiller provincial libéral du canton de
Fléron (1864-1871), il devient bourgmestre de la Cité ardente le 20 août
1867. Il abandonne cette fonction le 7 mai 1870 (mais reste conseiller
communal), peu avant d’accéder au Parlement. Le 14 juin, l’arrondissement de
Liège l’envoie à la Chambre des Représentants. Il y demeure jusqu’en février
1878 ; c’est à cette date qu’il passe au Sénat, et il siège à la Haute
Assemblée jusqu’à sa mort. On le voit cependant occuper à nouveau les
charges de bourgmestre en novembre 1885, de façon provisoire d’abord, puis
effective à partir du 22 février 1886, fonction qu’il exerce jusqu’en 1891.
Au Parlement
comme à la “ Violette ”, son action vise surtout à assurer la promotion de
sa ville natale. Il veille tout particulièrement à l’expansion de
l’industrie locale et il s’attache à développer les communications par le
rail. Ce libéral tout en rondeur sait se montrer un homme d’ordre : c’est
sous son maïorat qu’éclatent les émeutes ouvrières de 1886. L’énergie qu’il
met à les réprimer lui vaut la considération des milieux bourgeois. La
popularité qui l’entoure s’accroît encore lorsqu’il se met à organiser de
façon régulière des fêtes et des réceptions grandioses auxquelles la
population est associée. On garde en mémoire, dans les chaumières, que les
fontaines de la place du Marché débitaient du vin au lieu d’eau.
Fort intéressé à
la conservation du dialecte, qu’il pratiquait sans problème, d’Andrimont
assiste régulièrement aux séances de la Société liégeoise de Littérature
wallonne. Le 19 mai 1888, au Sénat, il prononce quelques paroles en wallon
afin de répliquer aux discours flamands de Vanden Bemden et de Lammens : il
cherche ainsi à protester contre le subside que le gouvernement vient
d’accorder pour ériger à Gand une Académie de Littérature flamande. Il veut
également assimiler le parler de nos frères du nord aux patois
romans.
En novembre 1888,
d’Andrimont jette les bases d’une Fédération wallonne qui vise à relayer
l’éphémère Ligue wallonne créée en février par Léon Dereux et Alfred Journez.
Le bourgmestre de Liège préside en outre deux meetings “ mémorables ” dans
les locaux du casino Grétry et de la Renommée afin de s’opposer à la
proposition de loi Coremans qui prétend imposer le flamand comme seule
langue judiciaire dans les provinces flamandes. Enfin, il adhère parmi les
premiers au congrès wallon de 1890. Cette “ fibre régionaliste ” que l’on
sent sincère lui attire la sympathie d’un mouvement wallon encore
balbutiant. Édouard Remouchamps lui dédie une de ses œuvres [À Monsieur
d’Andrimont / (…) / Qui a pris noss disfinse / Li disfinse dès Wallon…]
et quand il passe de vie à trépas le 21 juillet 1891, on chante sur le
passage du char funèbre la complainte de Sylvain Hertog : Adieu au Père
des Wallons !
Sophie Jaminon