Institut Destrée - The Destree Institute

               Accueil

Organisation

Recherche scientifique

Education permanente

Conseil

Action

Evénements

 

 

Cette section propose la liste des notices contenues sur le cédérom de l'Encyclopédie du Mouvement wallon. Les notices accessibles en ligne sont datées : le carré jaune indique les mises à jour, le carré rouge signale les nouvelles notices.

Notices biographiques

Notices thématiques

Presse d’action wallonne

Congrès,associations et partis

   

TROCLET Léon

 

Né à Bagimont le 14 février 1872,
décédé à Liège le 7 octobre 1946

Conseiller communal socialiste de Liège (1904), échevin (1933), conseiller provincial (juillet 1900), député de Liège (27 mai 1900-1904 ; 12 novembre 1907-1936 ; 21 octobre 1945-1946), questeur de la Chambre (28 novembre 1918-24 mai 1936), échevin encore (1938), Léon Troclet accomplit la totalité de sa carrière politique au service du Parti ouvrier belge mais aussi de la Wallonie. À l’occasion de tous les débats parlementaires intéressant le devenir de la Wallonie qui jalonnent son parcours politique, Léon Troclet montera à la tribune ou interviendra dans des débats parfois houleux pour faire entendre la voix des Wallons. Ardennais d’origine, autodidacte amoureux de son pays, Léon Troclet adhère très vite aux idées fédéralistes tout en gardant une grande préoccupation pour les questions ouvrières. On peut affirmer qu’il est l’un des rares socialistes de son époque à mener parallèlement et en symbiose la lutte pour la Wallonie et le monde ouvrier.

Le premier exemple en est donné en 1903, lorsque Léon Troclet lance un quotidien intitulé La Wallonie, qui est l’organe de la fédération liégeoise du POB. Même si le quotidien ne vécut que dix jours, il symbolise parfaitement la double préoccupation de celui qui se présente volontiers comme un régionaliste et un fédéraliste, défenseur de l’usage de la langue française par les ouvriers wallons ou flamands parce que, avec le flamand, on fait le tour de Tongres, avec le français, on fait le tour du monde (...) ; le français est un outil plus puissant (Enquête de L’Action wallonne, 1909, meeting du 29 janvier 1911). Interrogé en 1911 sur la solution à apporter au problème de la Belgique (Souhaitez-vous l’annexion de la Wallonie à la France ? Êtes-vous partisan de la séparation administrative ?), il répond qu’il suffit de laisser chacun faire son ménage à sa manière, c’est-à-dire accorder l’autonomie à la Wallonie et à la Flandre, formule qui permettrait un plus grand progrès social tant en Flandre qu’en Wallonie, par la force de l’exemple que ne manquerait pas de donner cette dernière. La séparation administrative et politique offrirait la possibilité d’un développement optimal pour les Wallons et les Flamands. En avril 1911, il prend la parole lors d’un meeting anti-flamingant organisé à Bruxelles sur l’initiative des ligues wallonnes. Très écouté, il déplore, à titre personnel, les exagérations flamingantes. Se voulant respectueux d’un certain nombre de revendications exprimées par le Mouvement wallon, il en déplore ce qu’il appelle les excès et cite comme exemple les nominations à Liège de magistrats dont la langue maternelle est le flamand. Observant d’importantes inégalités entre la Wallonie, Bruxelles et la Flandre dans les charges contributives à l’État, ainsi que dans la répartition du budget des travaux publics (82 millions accordés à la Flandre, 32 à Bruxelles et 7 à la Wallonie), Léon Troclet considère que l’impudence des flamingants conduit à la séparation administrative (1911).

Auteur d’une étude sur le système fédéraliste publiée dans Wallonia (1911), Léon Troclet participe à la seule réunion de travail du comité d’études pour la sauvegarde de l’autonomie des provinces wallonnes, à Bruxelles le 27 janvier 1911. Il y collabore avec Émile Buisset et Charles Magnette. Ce comité avait été constitué sur l’initiative de la Ligue wallonne de Liège en vue d’étudier la question de la séparation administrative. En quelque sorte, ce comité préfigurait l’Assemblée wallonne qui sera créée en 1912 à l’issue du Congrès wallon (7 juillet 1912). Lors de ce Congrès wallon, quatre projets d’une séparation plus ou moins nette entre Wallons et Flamands sont proposés aux congressistes ; Léon Troclet est l’un de ceux qui, avec Jules Destrée, Émile Jennissen et Albert Mockel, défendent vigoureusement l’idée de la séparation administrative. Dans un vif débat qui l’oppose à Maurice De Miomandre, Léon Troclet dénonce les carences du gouvernement belge à l’égard des provinces de Namur et de Luxembourg alors que des dépenses, à son avis inutiles, sont réalisées en Flandre, notamment l’aménagement des ports d’Ostende et de Zeebrugge. Le député de Liège souligne que les impôts indirects frappent davantage le peuple de Wallonie que le peuple des Flandres.

Le 20 octobre 1912, Léon Troclet participe à la création de l’Assemblée wallonne où il est l’un des rares socialistes liégeois. Membre assidu, il est l’un des délégués de Neufchâteau-Virton (1912-1914, 1919-1940) et l’un des conseillers de son bureau permanent (1925-1940). En 1913, l’Assemblée wallonne devant choisir un jour de fête nationale, il propose la date du 20 octobre comme jour de fête de la Wallonie afin de commémorer la fondation de l’Assemblée wallonne. Léon Troclet participe aussi au congrès de la Ligue wallonne de Liège, en 1913, parallèle à l’Assemblée wallonne ; il y présente un projet fédéraliste, plus modéré que celui d’Émile Jennissen et de Julien Delaite. Troclet est partisan de la reconnaissance de trois régions, la Flandre, la Wallonie et l’agglomération bruxelloise. Il prévoit, notamment, pour certaines questions, une autonomie absolue pour les régions.

La Grande Guerre ne modifie pas les options fédéralistes de Troclet. Il résume d’ailleurs sa pensée dans un projet de réorganisation politique et administrative de la Belgique (publié à Bruxelles en 1919). Après l’Armistice, il fait partie du bureau permanent de l’Union nationale wallonne ; il en préside le premier et seul congrès (2 octobre 1921). Attentif aux travaux de l’Assemblée wallonne, il est un collaborateur occasionnel de La Barricade (organe de la Garde wallonne autonomiste), puis de L’Action wallonne. C’est néanmoins dans La Barricade de janvier 1924 que Troclet présente un projet d’autonomie régionale fondée sur trois provinces agrandies et où les grandes communes bénéficient d’une autonomie étendue en matière financière, d’enseignement, des services publics, des travaux communaux et de nomination des emplois communaux. La province wallonne est séparée de la province flamande par la frontière linguistique et la province brabançonne comprend l’arrondissement de Bruxelles. Préservant ainsi l’intégrité française de la Wallonie, Léon Troclet prévoit six niveaux de pouvoir législatif : communal, cantonal, d’arrondissement, provincial, la Chambre et le Sénat. Les trois provinces bénéficient de larges compétences alors que l’État central ne conserve que les finances d’ordre général, la poste, les télégraphes et chemin de fer. Quant à l’armée, Troclet préconise la création de régiments régionaux. En juillet 1924, il participe activement au premier congrès de la Ligue d’Action wallonne dont il partage alors les vues autonomistes. Lors du deuxième congrès, il présente un rapport consacré au recrutement régional à l’armée (Liège, 1925).

Entre-temps, s’inspirant des résolutions prises par le POB, sur proposition de Paul Pastur, en matière de décentralisation, Léon Troclet dépose à la Chambre une proposition de loi tendant à une décentralisation provinciale (juin 1924) : il s’agit en fait de revoir profondément la loi provinciale du 30 avril 1836. Rendue caduque par la dissolution des Chambres, sa proposition de révision de la loi établissant une plus large autonomie des provinces est présentée une nouvelle fois le 19 juillet 1925, avec les signatures de Louis Bertrand, Eugène Van Walleghem, Joseph Dejardin, Hippolyte Vandemeulebroecke et Franz Fischer. Sans suite concrète. Si ce n’est qu’en 1928, Léon Troclet fait partie d’une commission d’études formée par le POB pour étudier la question linguistique. Les conclusions de cette commission contiendront plusieurs idées auxquelles Troclet était attaché.

À la suite du Compromis des Belges élaboré sur l’initiative de Jules Destrée et de Camille Huysmans et signé notamment par Léon Troclet, le POB crée une commission d’étude de la question de l’autonomie culturelle et de l’emploi des langues en matière administrative, judiciaire et militaire. Chargé du rapport de la commission, Léon Troclet y déclare notamment que, pour l’application du principe général et de toutes les dispositions qui en découlent sur le terrain scolaire, administratif, judiciaire et militaire, il est indispensable qu’une fois pour toutes, on procède à l’établissement légal de la frontière linguistique. L’ensemble de son rapport sera approuvé par le POB en 1930.

À l’occasion du septième et dernier congrès de la Ligue d’Action wallonne (1930), Léon Troclet fait observer que Le malheur du mouvement wallon, c’est de se laisser entraîner dans un belgicisme périmé et de manquer d’idéal. Quant au rattachement à la France N’en parlons jamais, mais pensons-y toujours. Présent au congrès de Concentration wallonne de 1934, Léon Troclet démontre qu’il n’est pas l’homme d’un seul mouvement. On le rencontre d’ailleurs aussi au premier Congrès culturel wallon de 1938 organisé à Charleroi par l’Assemblée wallonne : il est membre du comité d’honneur et présente un exposé sur l’action wallonne au sein des conseils communaux. D’ailleurs, en tant que président de la fédération liégeoise du POB, il est le responsable de l’organisation du premier congrès des socialistes wallons, en 1938 aussi. À la tribune, il souligne que le problème wallon et flamand en Belgique dépasse largement la question des langues. Dans le domaine militaire, comme dans celui de l’administration ou de l’enseignement, les différences de sensibilité entre les deux communautés s’accentuent. Il invite le POB à se saisir de la question, à l’étudier sérieusement car, précise-t-il, la vie est différente d’il y a 100 ans (...) Rien ne s’oppose plus à ce qu’on établisse trois provinces au lieu de neuf.
 

Père de Léon-Éli Troclet, Léon Troclet devait mourir un an après le retour de la paix sur la terre wallonne qu’il avait tant défendue et pour laquelle il avait cherché tant et plus à trouver le moyen de la doter d’un statut respectueux de ses besoins. En 1945, il avait accepté d’être membre du Congrès national wallon. Fédéraliste régionaliste, défenseur de l’autonomie linguistique de la Wallonie, Léon Troclet a été l’un des premiers mandataires socialistes à accorder une égale et véritable attention aux questions économiques, sociales et linguistiques touchant la Wallonie. Ses études et analyses des systèmes institutionnels étrangers n’ont pas manqué de nourrir une doctrine très personnelle.
 

 Paul Delforge

 

 

L'Institut Destrée L'Institut Destrée,
ONG partenaire officiel de l'UNESCO (statut de consultation) et 
en statut consultatif spécial auprès du Conseil économique et social
des Nations Unies (ECOSOC) depuis 2012
  The Destree Institute The Destrée Institute,
NGO official partner of UNESCO (consultative status) and 
in Special consultative status with the United Nations Economic
and Social Council (ECOSOC) since 2012 

www.institut-destree.eu  -  www.institut-destree.org  -  www.wallonie-en-ligne.net   ©   Institut Destrée  -  The Destree Institute