Éditeur, écrivain, journaliste, poète, Nestor
Miserez a été à l’origine de nombreuses revues et sociétés au cœur du Pays
de Charleroi et dans toute la Wallonie. À 25 ans, en juillet 1927, il fonde
la revue Sang nouveau. Puis, de 1938 à 1957, Miserez dirige les
fameux Cahiers du Nord qui, en 1947, notamment, consacrent un numéro
aux Arts en Wallonie 1918-1946.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, Miserez
participe, avec d’autres, à la création du Conseil économique wallon
clandestin à Charleroi et, avec Octave Pirmez, est l’un des fondateurs de la
section de Mont-sur-Marchienne de Wallonie libre qu’il préside (1945). Il
s’empresse, après la Libération, de fonder les Compagnons de l’Art en
Wallonie, la section carolorégienne de l’Association pour le Progrès
intellectuel et artistique de la Wallonie, l’Équipe du cinéma d’art, le
Conseil national des Écrivains (français) de Wallonie, le Mouvement des
Jeunes Lettres, les Amis d’Adolphe Biarent (dont il est l’administrateur-délégué)
et les Amis de Roger Desaise. Secrétaire de la régionale du Hainaut de
Wallonie libre (mars 1945), il en restera membre jusqu’à sa mort, en 1968.
Membre du Congrès national wallon, il participe au congrès wallon de 1945
(Liège, 20 et 21 octobre).
Ces nombreuses activités ne l’empêchent pas de
se consacrer également à la poésie. Proche de la démarche poétique d’Albert
Mockel, Nestor Miserez écrit cinq recueils : Les reposoirs du calvaire ;
Climat perdu ; Poème de la rose et de la nuit ; Chœurs pour
d’anciennes ténèbres ; Ce désert de ma faim) et trois essais (Francis
Carco, Chronologie sentimentale, Poètes de ce temps), et
publie la correspondance littéraire entre Albert Mockel et Roger Desaise. Il
signe, en outre, de nombreux articles dans des revues, dans La Gazette de
Charleroi et dans La Nouvelle Gazette, dont il est le rédacteur
en chef de 1945 à 1968. Coopté au sein du Comité permanent du Congrès
national wallon en 1955, il ne semble pas y avoir joué un rôle majeur.
Éditorialiste pamphlétaire virulent à la fin
des années cinquante dans les colonnes de La Nouvelle Gazette, Nestor
Miserez met en évidence l’inaction du pouvoir central au regard du déclin
prononcé de l’économie wallonne et surtout du Hainaut. Ainsi, par exemple,
dénonce-t-il, dès 1955, la centralisation à outrance à Bruxelles de
toutes les activités de l’Exposition internationale de 1958, privant les
autres régions du pays (Flandre et Wallonie) de toutes retombées. Ce
souci de défendre le développement économique de la Wallonie, Nestor Miserez
semble le perdre petit à petit après les événements de l’hiver
’60-’61. Effrayé par les
grèves et vraisemblablement par la revendication des réformes de structure
des régionales wallonnes de la FGTB puis, par la suite, du Mouvement
populaire wallon, il réclame de nouvelles garanties pour la Wallonie (11
janvier 1961), mais ne se prononce plus en faveur du fédéralisme. Membre du
nouveau parti libéral de l’unitariste Omer Vanaudenhove, Nestor Miserez est
élu sénateur libéral de l’arrondissement de Charleroi en mai 1965 et le
demeurera jusqu’en 1968, année de son décès.
Laurent Lévêque