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Cette section propose la liste des notices contenues sur le cédérom de l'Encyclopédie du Mouvement wallon. Les notices accessibles en ligne sont datées : le carré jaune indique les mises à jour, le carré rouge signale les nouvelles notices.

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Moreau Robert 

    Né à Tulle (France) le 20 mai 1915, décédé à Montigny-le-Tilleul le 23 juillet 2006 

Fils d’un syndicaliste actif et petit fils d’un des fondateurs de la Maison du Peuple de Marcinelle, Robert Moreau est âgé de 14 ans quand il commence à travailler comme garçon de course aux ACEC de Charleroi, ce qui ne l’empêche pas d’obtenir, aux cours du soir, un diplôme de dessinateur électricien, puis de se perfectionner à l’Université du Travail de Charleroi. Chômeur pendant la crise du début des années trente, mineur, ouvrier cuiseur d’émaux, il rentre aux ACEC en 1937 ; il obtient alors un emploi au bureau de dessin qui répond à sa formation. Dès ses débuts professionnels, il mène une action syndicale ; secrétaire d’une section locale de métallurgistes alors qu’il n’a que 17 ans (Syndicat des métallurgistes de Thiméon – 1932), il n’arrêtera pas d’assumer des responsabilités toujours plus importantes. Mêlé à la politique, il participe aux actions des Jeunes Gardes socialistes (1930-1935).

En 1943, délégué syndical et employé clandestin aux ACEC, Robert Moreau adhère au Mouvement syndical unifié d’André Renard, mouvement alors clandestin et il déclenche, aux ACEC, la grève des employés contre la déportation. En avril 1945, il devient permanent syndical. À partir de 1947, il est secrétaire régional FGTB à Charleroi, puis, de 1957 à 1962, secrétaire provincial du Hainaut. En 1952, au départ du secrétaire général de la FGTB Paul Finet, il propose que la FGTB nationale dispose d’une double direction, wallonne et flamande. L’idée est repoussée. Néanmoins, désigné comme secrétaire national adjoint à André Renard en 1954, Robert Moreau représente, dans les faits, la Wallonie auprès de la direction de la fédération syndicale.

Républicain et opposé à la politique menée par Léopold III, Robert Moreau prend une part active dans le mouvement de protestation déclenché en juillet 1950. Dès cette époque, Robert Moreau apparaît comme l’un des premiers syndicalistes qui prennent conscience de la problématique wallonne et surtout essayent d’intégrer la dimension wallonne à l’action ouvrière. Dans l’Action, édition namuroise et hennuyère de Germinal, Robert Moreau publie, en 1953, un article intitulé Wallons, debout !, qui est repris par Wallonie libre de septembre. Il y défend le principe du fédéralisme et attire l’attention sur l’émergence de la prise de conscience du peuple wallon. Au sein de la FGTB, il sent le besoin d’apporter des réformes permettant à l’aile wallonne d’être moins dépendante de Bruxelles et de la Flandre. Au nom de la régionale FGTB de Charleroi, en vue du congrès de la FGTB nationale des 14-15-16 novembre 1953, Robert Moreau dépose et défend un projet dans ce sens. Sans succès.

En pleine crise du charbon (1959), lors d’un rassemblement à Quaregnon, il déclare que la menace qui pèse, de manière inéluctable sur le Borinage, vise en réalité toute la Wallonie. De novembre 1960 à mars 1961, c’est-à-dire pendant toute la durée du mouvement contre la Loi unique, Moreau assume le secrétariat du Comité des Régionales wallonnes de la FGTB qu’il a appelé de ses vœux. Début mars 1961, il démissionne une première fois de son mandat national à la FGTB, à la suite d’André Renard et d’André Genot ; à la demande de sections du Hainaut, il reprend son poste en posant deux conditions ; celles-ci n’étant pas rencontrées début avril, il démissionne définitivement, et devient secrétaire du groupe syndical du Mouvement populaire wallon (avril 1961-décembre 1963) et s’occupe aussi du secrétariat du mouvement dans la région de Charleroi (novembre 1962). En fait, il est chargé par André Renard de l’organisation du Mouvement populaire wallon naissant, dont il est membre du conseil général depuis sa fondation. Signataire du manifeste du Mouvement populaire wallon (mars 1961), il en défend les deux principales revendications : fédéralisme et réformes de structure. Président de la section de Marcinelle (1961-1964), il dénonce l’intolérable déportation dont l’économie du Hainaut est victime.

                                                                           

Étant l’un des quatre vice-présidents du Comité d’Action wallonne de Charleroi (1962-1964), où il représente le MPW, Robert Moreau participe notamment à l’organisation du Congrès d’Action wallonne, qui se tient à Namur le 23 mars 1963, contribue à l’organisation de l’importante manifestation du 26 mai 1963, à Charleroi. Après la disparition subite d’André Renard, de sérieuses divergences de vue paraissent séparer André Genot et Robert Moreau, les deux bras droits du leader wallon. La plus importante concernerait la transformation du Mouvement populaire wallon en un parti politique. André Genot affirme sa totale hostilité à cette idée tandis que Robert Moreau, dès septembre 1963, réunit des représentants du Mouvement populaire wallon et de Rénovation wallonne pour former le Front d’Action wallonne de Marcinelle. Ce groupement politique a comme objectif la conquête du fédéralisme, seul capable d’assurer à la Wallonie l’expansion économique et le progrès social, dans la liberté et la vraie démocratie. Maurice Verschoren préside le Front d’Action wallonne dont Oscar Delbart et Robert Moreau sont les vice-présidents. Déjà, au moment de la constitution du Collège exécutif de Wallonie, on remarque que Robert Moreau apparaît comme membre suppléant de Victor Van Michel et donc comme représentant du Parti d’Unité wallonne et non comme le représentant du Mouvement populaire wallon.

Président de la section de Marcinelle du Parti socialiste belge de 1945 à 1953, membre de ce parti depuis 1932, Robert Moreau démissionne en janvier 1964 lorsqu’il fonde le Front wallon pour l’Unité et la Liberté de la Wallonie. Il crée ce parti sur base du Front d’Action wallonne de Marcinelle et après avoir noué des contacts avec le Parti d’Unité wallonne de Victor Van Michel. Il est encouragé dans sa démarche par le résultat du pétitionnement organisé durant l’automne 1963 par le Collège exécutif de Wallonie. En janvier 1964, Robert Moreau démissionne aussi de ses fonctions au Mouvement populaire wallon. Il a résolument opté pour l’action wallonne sur le seul plan politique.

Représentant de Charleroi à la première réunion du conseil général provisoire du Front wallon pour l’Unité et la Liberté de la Wallonie (Namur, 16 janvier 1964), il participe ensuite à l’assemblée constitutive (Charleroi, 19 janvier) qui adopte la Déclaration de principes et crée quatre groupes de travail chargés d’élaborer les rapports à soumettre au premier congrès statutaire du Front wallon auquel il participe aussi (Charleroi, 12 avril 1964). Il est chargé de rédiger le programme économique, social et culturel du parti. Élu secrétaire général, Robert Moreau est aussi le président de la fédération de Charleroi (avril). Membre fondateur de la société coopérative Renaissance wallonne (décembre 1964), il figure comme tête de liste du Front wallon, à Charleroi, lors des élections législatives du 23 mai 1965. Dans la mesure où le pétitionnement n’a pas été pris en considération, il exhorte les Wallons à s’emparer des élections légales pour montrer de quel poids la Wallonie peut peser dans l’État belge. Son programme s’articule alors autour de quatre axes : fédéralisme ; réformes de structure économiques, sociales et culturelles ; referendum ; retour des Fourons en province de Liège. Au soir du 23 mai, Robert Moreau est député. Avec François Perin à Liège, les listes wallonnes remportent ainsi leur tout premier succès électoral. Robert Moreau conservera ce mandat jusqu’en 1981.                         

En juin 1965, lors du congrès de fusion du Parti wallon des Travailleurs et du Front wallon, Robert Moreau est désigné comme secrétaire général du nouveau Parti wallon. Président de la fédération de Charleroi dès sa constitution en novembre 1965, le député wallon est l’une des deux locomotives du Parti wallon. S’appuyant sur un travail en profondeur, il intervient très souvent à la tribune de la Chambre : opposition au bilinguisme généralisé, défense des populations fouronnaises, opposition à la présence de l’OTAN en Wallonie, défense de la sidérurgie et des mines, développement d’un plan de reconversion, etc. Lors du premier congrès statutaire du Parti wallon, il définit la ligne économique, sociale et culturelle du PW : développement d’une infrastructure permettant à la Wallonie d’être en contact avec Paris et avec la Ruhr ; plan de reconversion économique ; économie dans la sécurité sociale ; établissement d’un statut de la condition féminine ; défense des pensions des victimes de guerre ; opposition au bilinguisme obligatoire et concrétisation rapide de l’autonomie culturelle. Quant à la question de Louvain, Robert Moreau estime que le transfert de la section française en Wallonie est inéluctable et qu’il ne pourra que revivifier la région où elle s’implantera. Il estime que la Wallonie doit saisir cette occasion unique de créer un centre universitaire catholique

Par la suite, Moreau fait évoluer le Parti wallon vers le Rassemblement wallon dont il est l’un des fondateurs (7 mars 1968). Secrétaire général du Rassemblement wallon, il est l’un des ténors d’un parti qui, progressivement, fait du fédéralisme intégral sa doctrine politique. Rapporteur général à divers congrès, Robert Moreau continue d’accomplir un travail parlementaire important. Ses interpellations, nombreuses, portent notamment sur les questions culturelles (projet culturel, infrastructures sportives, démocratisation des études, collaboration avec la francophonie, etc.), les questions économiques et sociales (statut de la femme, temps de travail, droits sociaux à inscrire dans la constitution), sa thématique favorite restant les questions de maladie-invalidité et la politique générale de la santé. En avril 1972, il présente un nouveau schéma d’organisation de la Belgique dans lequel les autonomies culturelle et régionale sont effectives, de grandes villes sont créées en Wallonie (par des fusions de communes) et où une véritable déconcentration s’opère. Représentant du Rassemblement wallon au Conseil culturel de la Communauté française, il en critique le fonctionnement et propose, en quinze points, une vraie politique culturelle pour la Wallonie (1972). Dénonçant les gaspillages financiers de l’appareil d’État ainsi que les nominations politiques et partisanes, soucieux d’un redéploiement économique véritable pour la Wallonie, Robert Moreau met aussi l’accent sur la nécessité d’une réelle initiative industrielle publique (février 1974).

                                                                              

Président de la régionale de Charleroi (1968-1980), président fédéral intérimaire (juin-octobre 1974) lorsque François Perin devient ministre, Robert Moreau est appelé à son tour à exercer des fonctions ministérielles d’octobre 1974 à 1977. Ses attributions sont spécifiquement wallonnes, à savoir le secrétariat d’État aux Affaires sociales wallonnes (du 4 octobre 1974 au 8 décembre 1976) puis le ministère des Pensions et des Affaires sociales wallonnes (du 8 décembre 1976 au 3 avril 1977). Il fait ainsi partie du tout premier Comité ministériel régional pour la Wallonie (octobre 1974-1977), sorte de premier Exécutif wallon officiel, créé à l’initiative du Rassemblement wallon, via la loi Perin-Vandekerkhove. Ministre, Robert Moreau abandonne la présidence du Rassemblement wallon à Paul-Henry Gendebien et se donne comme objectif d’organiser la régionalisation et le regroupement en une seule administration wallonne des matières suivantes : famille et démographie, hygiène et santé publique, emploi et accueil.

En 1975, alors qu’il souhaite que l’on ne s’enfonce pas dans la régionalisation provisoire, Robert Moreau et le sénateur bruxellois de la VU, Lode Claes, élaborent ensemble un projet complet pour régler le contentieux communautaire. Ce texte n’aura pas de suites concrètes immédiates. Persévérant dans son combat en faveur de la reconnaissance définitive de la Wallonie, multipliant les contacts discrets, les rencontres, les plans et les projets, Robert Moreau aboutira aux accords Leysen-Moreau. Le poids du CVP aura cependant raison de ses efforts. Toujours durant son mandat, le ministre Moreau multipliera les initiatives afin de rencontrer d’autres préoccupations wallonnes. C’est ainsi qu’il demandera une étude sur la démographie wallonne à l’Université de Louvain afin d’orienter sa politique (rapport POLIWA). Il augmentera le budget de l’aide familiale et de la santé publique, budget régionalisé. Il répétera souvent sa proposition de décentralisation de départements régionalisés : économie régionale à Liège, institutions politiques à Namur, affaires culturelles à Mons, affaires sociales wallonnes à Charleroi. Il s’agissait là d’accélérer la décentralisation et de ramener des milliers d’emplois en Wallonie.

Au moment où le Rassemblement wallon se partage entre partisans du président Gendebien et sécessionnistes libéraux, Robert Moreau demeure un des piliers du Rassemblement wallon dit originel et apporte son soutien inconditionnel au manifeste publié durant l’automne 1976. Éditeur responsable de L’État wallon (1978-1979), il redevient, à Charleroi, l’un des principaux animateurs du parti wallon. Les programmes de la CSC wallonne et de l’Interrégionale wallonne de la FGTB lui font espérer la concrétisation des revendications qu’il porte depuis longtemps : fédéralisme et réformes de structure. La chute du gouvernement Tindemans ruine cependant ses espoirs. Il avait aussi introduit un avant-projet de charte wallonne et l’inscription de nouveaux droits dans la Constitution.

Par ailleurs, les relations entre Moreau et certains dirigeants du Rassemblement wallon se détériorent. Le 14 juillet 1980, dans une tribune libre accordée à La Nouvelle Gazette, il se prononce en faveur de l’autodétermination, une autodétermination qui n’est possible que s’il se trouve une majorité politique pour l’accepter. En égratignant P-H. Gendebien, il rejette purement et simplement l’option indépendantiste qui se développe au sein du parti : L’indépendance est la voie du néant. Rappelé à l’ordre par Henri Mordant qui donne l’exacte définition du terme autodétermination, Robert Moreau démissionne de la présidence de la régionale de Charleroi du RW, dans le souci de préserver l’unité du parti, puis cesse toute affiliation au Rassemblement wallon, le 12 octobre 1981. Quelques mois plus tard, il rallie le Parti socialiste.

Lors du congrès constitutif de Wallonie Région d’Europe, Robert Moreau apporte sa caution à la naissance du nouveau mouvement wallon (Namur, 25 septembre 1986). Par ailleurs, auteur de plusieurs ouvrages sur le Mouvement wallon et sur son action militante, Robert Moreau défend l’idée d’un projet de Constitution wallonne, qu’il initie au sein de l’Institut Jules Destrée.

 

Paul Delforge

 

 

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