Avocat et professeur de langues, Fernand Mallieux participe dès
1907 à des activités de la Ligue wallonne de Liège. À l’occasion
d’un de ses meetings, il dénonce la proposition de loi Coremans
de 1907 et notamment la volonté des flamingants de faire de
Bruxelles une ville flamande. Il collabore aussi à la revue
Wallonia à partir de 1910. L’année suivante, en avril, une
proposition de loi visant la flamandisation de l’Université de
Gand est déposée par les présidents flamands des trois partis
traditionnels dont les positions sont généralement fort
éloignées : Louis Franck, Frans Van Cauwelaert et Camille
Huysmans. Face à ce front flamand, Mallieux se lance dans une
vaste enquête auprès d’hommes politiques, d’écrivains,
d’artistes et de militants wallons : Faut-il flamandiser
l’Université de Gand ? Comment se défendre contre l’assaut du
flamingantisme ? Comme la proposition de loi, cette enquête fera
grand bruit à la veille des législatives de 1912 où le cartel
libéral-socialiste se présente contre le Parti catholique. Dans
la foulée, Mallieux rédige un rapport sur la germanisation de
l’Université de Gand qui doit servir de base aux discussions de
l’Assemblée wallonne (1913).
Collaborateur régulier et important de la revue Wallonia,
Fernand Mallieux contribue à lui donner une orientation
davantage politique au travers de la chronique intitulée Défense
wallonne. Au moment de la création de l’Assemblée wallonne, il
développe sa chronique en dehors de la revue Wallonia et
La Défense wallonne devient l’organe officiel de
l’Assemblée wallonne ; Mallieux est ainsi le premier directeur
de La Défense wallonne, durant les années 1913-1914,
période durant laquelle le journal paraît sous la forme de
petits tracts. Mallieux y apporte une contribution précieuse,
surtout en raison de la documentation abondante et précise qu’il
a rassemblée. Outre les informations relatives au Mouvement
wallon lui-même, Fernand Mallieux traite de l’actualité en
Wallonie, accueille des rubriques sur différents problèmes, tels
que les chemins de fer, la défense nationale, les sciences et
les arts, etc.
Délégué de Liège à l’Assemblée wallonne (1912-1914, 1919-1934),
Mallieux est encore membre de la section liégeoise de la Société
des Amis de l’Art wallon, dès sa création en 1912. Dans le cadre
de la préparation du Congrès wallon de juillet 1912, Fernand
Mallieux est chargé par la Ligue wallonne de Liège d’un rapport
sur le bilinguisme, admis en Flandre, rejeté en Wallonie. En
septembre, il est nommé membre du comité exécutif de la Ligue
wallonne de Liège.
Resté au pays pendant la Grande Guerre, Fernand Mallieux est
l’un des trois avocats auxquels les Allemands donnent
l’autorisation de plaider devant leurs tribunaux. Connaissant
plusieurs langues, il parvient à sauver de nombreux cas de la
prison. Dans le même temps, il communique des renseignements
précieux au gouvernement du Havre, et aux services de
renseignements français. Soupçonné par les Allemands, il est
arrêté en janvier 1918, condamné et déporté en Allemagne.
Au lendemain de l’Armistice, le groupe liégeois de l’Assemblée
wallonne se réunit et publie un Manifeste (décembre 1918) qui
évoque les griefs wallons. Alors que la Flandre est libérée et
sans attendre que la Wallonie soit évacuée par l’ennemi, s’est
constitué un nouveau gouvernement belge et les Chambres se sont
réunies. Le nouveau gouvernement ne comprend pas trois Wallons
sur ses douze membres, et aucun qui a pris explicitement la
défense des Wallons ; de plus, le gouvernement a annoncé la
création prochaine d’une université flamande à Gand, a déclaré
admettre le principe du bilinguisme et de l’imposer au pays.
Fernand Mallieux est l’un des quinze signataires de cette vive
protestation.
Après l’Armistice, il reste actif au sein de l’Assemblée
wallonne. C’est d’ailleurs lui qui, lors de la réunion de
l’Assemblée à Verviers en 1919, tente de trouver une solution
intermédiaire entre les « séparatistes » de la proposition
Dupierreux et les « unionistes » de la tendance Remouchamps.
Mallieux propose de soumettre deux systèmes à la constituante :
le premier reconnaît l’autonomie absolue des peuples wallon et
flamand sur les plans politique et administratif qui ne
concernent pas les intérêts nationaux belges ; l’autre accorde
une large décentralisation provinciale en matière administrative
et le maintien de l’unité gouvernementale et parlementaire avec
application du vote bilatéral (système Remouchamps) pour les
questions politiques. Cette proposition de conciliation entre
les deux tendances ne résistera pas à leur opposition. Elles se
sépareront définitivement en 1923.
Persuadé que rien n’empêchera les Flamands de créer leur
université à Gand, Mallieux craint que l’épreuve soit rude pour
la nation belge. Il regrette que, pour ne pas donner prétexte
aux Flamands de se mêler des affaires wallonnes, beaucoup de
Wallons renoncent à aider les francophones de Flandre (1920).
Par ailleurs, Mallieux publie aussi des articles dans La
Meuse et dans L’Action wallonne. Président de
l’Association des condamnés politiques (1921), vice-président de
la Cour des Dommages de Guerre, il est choisi comme échevin de
la ville de Liège de 1924 à 1934. En 1931, il participe au
deuxième congrès de la Concentration wallonne.
Paul Delforge |