Originaire de la région liégeoise, Jean
Lausier s’est établi à Bruxelles comme commerçant ; jusqu’en
1913, il tient une chemiserie, commerce qu’il cède peu avant la
guerre. Trésorier de la Ligue wallonne de Bruxelles, membre de
la Ligue wallonne du Brabant, il n’en est pas le secrétaire
lorsqu’éclate la Première Guerre mondiale. Il le devient fin
1917, début 1918 lorsqu’il est propulsé à cette place par Désiré
De Peron, auteur d’un coup de force à la tête de la Ligue
wallonne. Après guerre, Jean Lausier affirmera avoir été sous la
coupe de De Peron. Dépourvu de moyens d’existence, il accepte sa
situation parce qu’il perçoit un salaire de 150 francs par mois
comme employé au journal Le Peuple wallon que vient de
créer De Peron. Bien que son nom apparaisse en première page du
nouveau journal, Lausier nie en avoir été le secrétaire de
rédaction, affirmant ne pas en être capable. Resté en fonction
en février, mars et avril 1918, Lausier est affecté à des tâches
administratives. Il perçoit les abonnements, copie à la main les
coupures de presse désignées par De Peron et se rend
régulièrement à Charleroi pour lever la correspondance. De mai
et la mi-juin 1918, il réside même à Charleroi dans la maison de
la rue Léon Bernus 40, qui sert de siège fictif au journal Le
Peuple wallon et où arrive la correspondance.
Malgré les protestations qu’il dit avoir
élevées contre De Peron et Houba, Lausier les suit à Liège
lorsque s’y installe Le Peuple wallon. Il est alors
chargé de surveiller le personnel du journal pour 300 francs par
mois. En septembre, suite à une dispute avec Désiré de Peron,
Lausier quitte le journal, refusant de se rendre chez Delaite et
Schoonbroodt « pour chercher de la copie séparatiste » : Lausier
dira être convaincu qu’ils n’en feraient rien.
Même si le nom de Lausier figure au bas
du Manifeste en faveur de la création des États-Unis de
Flandre et de Wallonie et d’un programme politique
visant à la reconnaissance d’une Wallonie autonome à côté d’une
Flandre autonome (27 janvier 1918), il niera, après guerre,
avoir eu la moindre activité politique wallonne. Pourtant,
interrogé sur la personnalité de Lausier, Jean Henrijean, ancien
président de la Ligue, le considère comme un « anarchiste
convaincu, violent dans ses expressions, et parfaitement capable
de déchaîner un mouvement révolutionnaire au point de vue
wallon ; les idées de Lausier ont toujours été subversives ».
Selon Henrijean, Lausier aurait disposé d’un libre parcours sous
l’occupation et circulait librement entre Bruxelles et
Charleroi. D’autre part, il semble que celui qui avait accepté
de travailler au Peuple wallon quand le journal a
déménagé à Liège pour être imprimé dans les installations
réquisitionnées de la Gazette de Liège (juin 1918), a préféré
suivre le chemin de Désiré de Peron.
Après la Grande Guerre, Lausier n’est pas condamné par la
Justice, lors du procès du Peuple wallon. L’auditeur
militaire n’a pas trouvé de preuve « de propagande ou de visées
activistes à Bruxelles ». On ne trouve plus trace dans le
Mouvement wallon de Jean Lausier qui se retrouve seul, sans rien
ni personne. On ne trouve plus trace de J. Lausier dans le
Mouvement wallon après la Grande Guerre.
Paul Delforge
Paul
Delforge, La
Wallonie et la Première Guerre mondiale. Pour une histoire de la
séparation administrative, Namur, Institut Destrée, 2008 |