Namurois d’origine, il est le cousin du député Georges Honinckx,
lui-même neveu de Joseph Grafé. Assez jeune, Paul Honinckx vient
se fixer à Bruxelles, comme peintre décorateur. Mais la capitale
de la Belgique ne le conquiert pas. Il n’y prend pas racine et
reste attaché, par-dessus tout, à la Wallonie. Défenseur de la
Wallonie et de la culture française, il s’efforce d’organiser la
résistance face au flamingantisme. Lorsque, vers 1906, les
frères Chainaye réorganisent la Ligue wallonne d’Ixelles et
celle du Brabant, il est à leurs côtés. Ses activités, ses
démarches personnelles contribuent à doter la Ligue d’Ixelles du
premier effectif qui lui est nécessaire pour entreprendre la
tâche à laquelle les convie l’éloquence des frères Chainaye. Il
recrute les premiers ligueurs, puis s’occupe du premier comité
de la Ligue.
Lorsque la Ligue wallonne du Brabant est créée en 1906, on
retrouve Paul Honinckx au premier rang et au sein du comité. Il
est parmi les plus actifs à organiser, à Bruxelles et en
Wallonie, meetings, congrès, conférences, cortèges de
protestation contre les lois flamingantes. C’est aussi lui qui
prépare les interventions de la Ligue d’Ixelles et du Brabant
dans les campagnes électorales pour le choix des candidats au
Parlement, au conseil provincial et au conseil communal. En
1913, il remplace Hector Chainaye, décédé, à la présidence de la
Ligue d’Ixelles (-1921).
Quand la Première Guerre mondiale éclate, Paul Honinckx se porte
volontaire de guerre, est refusé une première fois en raison de
son âge, insiste et est engagé, à Anvers, parmi un groupe de
civils chargés de terrassements et autres tranchées. Blessé, il
est rapatrié à Bruxelles où il reprend l’animation de la Ligue
wallonne d’Ixelles, en tant que secrétaire général. Il se défend
de toute autre activité. En consacrant son tout premier numéro à
un Manifeste patronné par la Ligue wallonne du Brabant, le
journal Le Peuple wallon du 7 février 1918 avait
nommément cité une douzaine de membres de son comité, dont Paul
Honinckx. Rédacteur en chef du journal et secrétaire général de
la Ligue, Désiré de Peron affirmait que la Ligue s’était
prononcée, en date du 27 janvier 1918, en faveur de la création
des États-Unis de Flandre et de Wallonie, et que son programme
politique visait à la reconnaissance d’une Wallonie autonome à
côté d’une Flandre autonome. Le journal annonçait aussi la
création d’un Parti nationaliste wallon et se disait l’organe du
groupe Les Jeunes Wallons, créé sur le modèle des activistes
flamands du Jong Vlaanderen.
Très vite cependant les allégations de de Peron sont dénoncées.
Plusieurs lettres recommandées dénoncent l’usurpation dont de
Peron se rend coupable en affirmant s’exprimer au nom de la
Ligue wallonne du Brabant. Il est d’ailleurs rappelé que les
vrais responsables de la Ligue, parmi lesquels Ivan Paul, ont
adopté, le 1er août 1914, un Manifeste où ils
s’affirmaient « Belges avant tout », face aux menaces de guerre
qui régnaient alors, et refusaient de prêter la main à l’ennemi
germanique. En octobre 1918, la guerre n’est donc pas encore
finie, Paul Honincks, avec d’autres dirigeants de la Ligue,
convoque une assemblée générale afin de dénoncer et réprouver
L’Appel aux Wallons ainsi que le programme diffusé par de
Peron dans Le Peuple wallon ; ils font constater leur
réunion par un huissier, mais il faudra attendre la signature de
l’Armistice pour que cesse l’amalgame Ligue wallonne du Brabant/Peuple
wallon.
Après l’Armistice, Paul Honinckx poursuit son combat pour la
défense des Wallons et de la langue française ; délégué
suppléant de Bruxelles à l’Assemblée wallonne de 1912 à 1914 et
en 1919, il devient effectif en 1922. Il le restera jusqu’à sa
mort en 1928. En décembre 1919, lors du procès dit « des
ministères wallons », Paul Honinckx est l’avocat d’un des
prévenus présents. Il est le seul à ne pas minimiser la question
de la séparation administrative. Dans sa plaidoirie, il
souligne que celle-ci était effectivement revendiquée avant
guerre par de nombreux wallons, mais que l’Assemblée wallonne
avait décidé de s’abstenir en période de guerre. Il affirme :
« S’il n’y avait eu un « aktivisme flamand », jamais il ne se
serait trouvé de Wallons pour penser à la séparation sous
administration « boche ».
Il prend une part active dans la fondation de la Fédération des
Sociétés wallonnes de l’Arrondissement de Bruxelles et
reconstitue le comité pour l’érection d’un monument aux frères
Chainaye. Il est aussi l’un des collaborateurs du journal Le
Réveil wallon. Une opportunité professionnelle le conduit en
France où il s’installe en octobre 1922. Le gouvernement
français lui décerne les palmes académiques.
Paul Delforge
Paul Delforge,
La Wallonie et la Première Guerre mondiale. Pour une histoire de
la séparation administrative, Namur, Institut Destrée, 2008 |