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Cette section propose la liste des notices contenues sur le cédérom de l'Encyclopédie du Mouvement wallon. Les notices accessibles en ligne sont datées : le carré jaune indique les mises à jour, le carré rouge signale les nouvelles notices.

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de Peron Désiré

    Né à Ougrée le 3 février 1885, décédé à une date inconnue 

Désiré de Peron est le fils de Jean-Joseph de Peron, docteur en médecine, directeur de la Colonie wallonne des Aliénés de Lierneux qui, après plusieurs procès intentés contre lui, tant à Verviers, Liège et Bruxelles, renonce à ses fonctions, devient médecin aliéniste à Ixelles avant d’être désigné en 1912 par le gouvernement comme médecin expert du ministère des Chemins de fer de l’État. En 1914, le père de Peron quitte la Belgique ; quant à son autre fils, Lucien, il a fait la campagne de Belgique et restera sur le front pendant quatre ans.

Pendant sa formation à l’Université libre de Bruxelles, Désiré de Peron est secrétaire de la Société générale des Étudiants de Bruxelles. Ingénieur, ce Liégeois qui semble s’être alors essayé en politique dans les rangs du parti libéral s’établit à Bruxelles en 1905. Rapidement, il rejoint les rangs de la Ligue wallonne du Brabant et fait partie de son bureau dès 1907. Cette année-là, il marque son opposition à l’imposition de la connaissance exclusive des langues (français en Wallonie, flamand en Flandre) dans le métier d’ingénieur des mines. Vice-président de la Ligue wallonne du Brabant wallon, il en devient le secrétaire général juste au début de la Grande guerre et le restera pendant tout le conflit, à sa seule initiative. Lors du congrès wallon de Verviers (1914), il préconise la création d’une fédération des associations wallonnes privilégiant les seuls aspects politiques et abandonnant le côté agrément et art de certaines sociétés. Il affirme que la défense des droits des Wallons passera par la séparation, si nécessaire.

Engagé volontaire en 1914, Désiré de Peron fait la longue retraite de Namur au cours de laquelle il est blessé. Réformé, il gagne Bruxelles. En 1915, avec l’accord des membres de la Ligue wallonne du Brabant, de Peron ouvre à Bruxelles un « Bureau de documentation anti-flamingant » : son rôle se limite alors à rassembler de la documentation pour l’avenir et il doit respecter le principe que toute activité « extérieure » et visible est interdite. Au cours des séances secrètes que continue à tenir la Ligue, de Peron exprime de plus en plus ouvertement sa volonté de rompre avec l’abstentionnisme ambiant. En 1917, avec l’aide d’Ernest Houba, il parvient à rassembler autour de son projet suffisamment d’appuis pour faire imploser le comité et en exclure les principaux responsables restés au pays, défenseurs du principe de l’Union sacrée.

Investis d’une autorité spoliée, de Peron et Houba entreprennent alors de rallier à eux tous les chefs wallons, en Wallonie comme à l’étranger. Le chef allemand pour la Wallonie, Edgard Haniel von Haimhausen, place tous ses espoirs dans le jeune propagandiste radical-socialiste. Dès septembre 1917, selon les archives du Conseil de Flandre, ils entreprennent des démarches auprès du Raad van Vlaanderen et, en décembre, ils obtiennent un soutien financier de la part du… Raad, à savoir un subside mensuel de 1000 francs pour l’édition de leur futur journal !

Dans le même temps, soutenus par les Allemands, les deux hommes tentent aussi de convaincre des parlementaires du Hainaut connus pour leur engagement wallon : René Branquart, François André, Désiré Maroille, etc. A Bruxelles, ils entreprennent Oscar Grosjean. À Liège, ils ne rencontrent pas plus de succès et ils se heurtent à l’opposition d’Oscar Colson qui leur reproche de vouloir imiter le programme des « Jeunes Flamands », dans leur volonté de diviser la Belgique en deux États séparés et fédérés. Malgré les avertissements et les mises en garde de militants wallons d’avant-guerre, de Peron se lance, avec Ernest Houba, dans l’édition du journal Le Peuple wallon, qui reçoit l’appui de l’occupant et constitue un groupement intitulé « Jeunes Wallons ».

                                                                              

Le premier numéro paraît le 1er février 1918 à raison de deux numéros de 4 pages par semaine, depuis Bruxelles, même si plusieurs articles et rubriques donnent à penser que les bureaux sont installés dans le Hainaut. « Il faut profiter des circonstances pour délivrer la Wallonie de l’étreinte cléricale et flamande » auraient affirmé Houba et de Peron à Branquart. Le 1er juin, les autorités allemandes réquisitionnent les installations de la Gazette de Liège, y font imprimer Le Peuple wallon, sous la « direction » de de Peron. Le journal devient quotidien, avec une nouvelle numérotation.

Rédacteur en chef du journal, de Peron défend et promeut l’idée de la séparation administrative et développe des idées socialisantes. Cela n’empêche pas de Peron d’attaquer régulièrement Jules Destrée, accusé de faire le jeu de la réaction et des nationalistes belges. De février à novembre 1918, les articles de de Peron se radicalisent. Du fédéralisme, ils glissent vers l’indépendantisme. L’État belge est une erreur, écrit-il, la Wallonie la vérité. Désireux de devenir l’interlocuteur du Raad van Vlaanderen, de Peron en vient à défendre l’idée d’une Wallonie et d’une Flandre indépendantes. Il dénonce régulièrement les décisions du gouvernement belge du Havre, ses visées annexionnistes, son désintérêt pour la Wallonie. Il dénonce les options politiques choisies dans les années 1890-1900 qui, en accordant le suffrage capacitaire puis surtout en instaurant le système de la proportionnelle, ont permis « au virus clérical et conservateur de pénétrer en Wallonie » (Le Peuple wallon, avril 1918). À la fin de l’été 1918, après avoir tenu des propos défaitistes, il se dit déterminé à rompre avec le principe monarchique et à proposer, pour les États-Unis de Wallonie et de Flandre, une constitution républicaine.

Dans le premier numéro du journal, de Peron annonce la création d’un Parti nationaliste wallon dont le programme a été défini par le comité de la Ligue wallonne du Brabant. Les dénégations de plusieurs membres du comité de la Ligue tendent à montrer que de Peron pourrait avoir usurpé ses fonctions et porte préjudice à la réputation de la Ligue et de ses dirigeants. En août 1914, la Ligue s’était imposé de ne pas briser l’Union sacrée et, par la publication d’un journal, de Peron va à l’encontre de cette décision. À plusieurs reprises, de Peron est dénoncé par les membres du comité de la Ligue.

Lorsque de Peron veut faire partie du Comité de Défense de la Wallonie et signer son Manifeste, Oscar Colson s’y oppose le jugeant trop extrémiste par ses idées de rattachement de la Wallonie à la France. Rejeté par le Mouvement wallon, par les activistes flamands et honnis par les autorités belges, de Peron n’attend pas la libération de la Belgique. Dès novembre 1918, il quitte précipitamment la Belgique, se réfugie d’abord en Allemagne puis part pour l’Angleterre sans laisser d’adresse. En décembre 1919, il ne comparaît pas au procès de Namur, réservé aux ministères wallons. La Justice ne s’intéressera à lui que dans le cadre du procès contre Le Peuple wallon dont le verdict est rendu par la Cour d’Assises de Liège, le 27 juin 1921. L’information a été ouverte contre Houba et de Peron, considérés par le procureur général comme des égarés cupides, serviteurs serviles de la politique de division imposée par les Allemands. Son réquisitoire conclut à la culpabilité de de Peron et de Houba, conformément à la totalité de l’article 118 bis du Code pénal. Outre les articles défaitistes, pacifistes, favorables à la séparation administrative et irrévérencieux pour les personnes et des institutions belges, il est encore reproché la publication régulière de petites annonces d’engagement de main d’œuvre destinée à servir l’ennemi. L’article 115 du code pénal est donc aussi invoqué : avoir fourni des secours en hommes aux ennemis de l’État. Il est condamné par contumace à 8 ans de prison.

 

Paul Delforge

 

Jean-Pierre Delhaye et Paul Delforge, Franz Foulon. La tentation inopportune, Namur, Institut Destrée, 2008, coll. Écrits politiques wallons n°9 - Paul Delforge, La Wallonie et la Première Guerre mondiale. Pour une histoire de la séparation administrative, Namur, Institut Destrée, 2008

 

 

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