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Institut Destrée, Centre de recherche européen basé en Wallonie

Contrats, territoires et développement régional
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Journée d'étude du 11 mai 1999 au Château de Namur
Organisation :
Institut Jules Destrée
CEMAC (Centre de Management et de Créativité)
OGM (Organisation Gestion Marketing)
Contrats, territoire et développement régional -11.05.99

Contrats et territoires

Damien Devouassoux
Adjoint au conseiller technique chargé de la coordination interministérielle et territoriale à la DATAR

 

Je me dois de vous présenter très brièvement la Datar. La Datar (Délégation à l'Aménagement du Territoire et à l'Action régionale), c'est une administration de mission à vocation interministérielle qui est née en 1963 sous l'un des gouvernements du Général de Gaulle et qui avait pour objectif de préparer les décisions que devaient prendre le gouvernement, les autorités centrales, en matière d'aménagement du territoire, et d'intervenir dans ce qu'on appelait à l'époque, l'action régionale mais une action qui n'avait certes pas l'importance qu'elle a prise au cours des années. C'est donc un organisme de mission, souple, réactif, composé d'environ 70 chargés de mission et conseillers. La différence, c'est que la Datar ne dépend plus seulement de Matignon puisqu'en 1993, le ministère de l'Intérieur est devenu ministère de l'Intérieur et de l'Aménagement du Territoire et qu'actuellement, la Datar est également sous la tutelle de la ministre de l'Aménagement et de l'Environnement du Territoire, Madame Voynet, dont un phénomène de double tutelle, le ministère de l'Aménagement du Territoire et bien entendu, les services du Premier ministre.

Mon propos sera de vous parler de cette relation contrat - territoire et de son évolution. Je le ferai en deux parties, la première sera un exposé un peu général, liminaire, pour caractériser cette relation. La deuxième portera sur la préparation de la 4ème génération des contrats de plan Etat - Région, un exercice dans lequel la Datar est effectivement complètement immergée et elle le sera jusqu'au début 2000, période à laquelle les contrats de plan Etat - Région, 4ème génération, devraient entrer en application.

L'une des expressions clés de la politique d'aménagement du territoire, aussi bien au niveau du discours qu'au niveau de sa mise en œuvre à travers l'action publique, c'est une relation entre contrat et territoire. Pour qui se remémore les années 1960-1970 en France, l'aménagement du territoire, comme d'autres politiques publiques d'ailleurs, était un monopole d'Etat, l'expression, dirions-nous, d'un pouvoir technocratique. Or d'un schéma unitaire où les autorités centrales de l'Etat concevaient et dirigeaient exclusivement les politiques territoriales – c'était l'époque de la planification française avec l'omniscience du commissariat général au plan, l'époque du développement national où prévalait un modèle de croissance privilégiant les infrastructures et les grands équipements publics –, on est passé à un concept de partage partenarial de l'action publique. Alors, que s'est-il passé ?

D'abord, la fin du mythe connu sous le vocable des "30 glorieuses", cette espèce de développement continu et des taux de croissance supérieurs à 5 % où on avait une sorte de croyance collective en la toute puissance du progrès scientifique et technologique, et de l'accroissement des richesses matérielles pour entraîner plus de progrès et, donc, plus de bonheur. Certes, il y avait déjà une prise de conscience que les ressources naturelles n'étaient pas inépuisables, si l'on se souvient de Stockholm en 1972, du Club de Rome, de Sicco Mansholt et sa théorie de la croissance zéro, des travaux du MIT. Mais toutes ces menaces étaient perçues comme lointaines et manifestement exagérées par les mouvements écologistes naissants.

Ensuite, la mise en œuvre de la décentralisation en France, décentralisation qui exprimait l'idée que l'Etat ne pouvait s'occuper de tout avec une égale réussite, qu'il y avait une demande des citoyens pour que les décisions se prennent à un niveau plus proche d'eux et donc, une montée en puissance des pouvoirs locaux et des territoires avec une traduction législative, institutionnelle où l'Etat répartissait ses compétences avec des collectivités territoriales, la région, le département, à côté des communes qui préexistaient et des groupements de communes. On avait plusieurs niveaux d'administration territoriale avec lesquels il fallait composer et surtout, le fait que ces collectivités territoriales n'étaient pas hiérarchisées entre elles. Donc, il était nécessaire, du fait de la complexité des politiques publiques, d'assurer une coopération et une coordination entre ces différents niveaux d'intervention et cette coordination revient à l'Etat, l'Etat qui fixe les règles du jeu et qui est garant de l'équité, l'équité pour les conditions de vie sur le territoire national puisque l'objet de l'aménagement du territoire est resté le même, c'est celui de bien répartir les activités et les hommes sur l'ensemble du territoire. En parallèle, on a permis une montée en puissance, parmi ces collectivités publiques, de la Région qui, en 1983, est devenue une collectivité territoriale à part entière, une collectivité élue et ensuite, avec laquelle l'Etat a renforcé ses relations contractuelles, en matière d'aménagement du territoire. On poursuivait l'exercice de planification nationale mais, à partir de 1984, nous avons eu des contrats de plan entre l'Etat et les régions et puis, à partir du 11ème plan, c'est-à-dire à partir de 1993, on a abandonné la planification nationale pour se focaliser exclusivement sur les contrats de plan Etat - régions.

Que s'est-il passé encore ? L'abolition des frontières, la libre circulation des marchandises et des capitaux, l'implication d'un nombre croissant de pays émergeant dans le jeu mondial des marchés, et cette implication croissante, naturellement, a exacerbé la concurrence – concurrence entre Etats qui devaient se lier par des accords de coopération et qui devaient protéger leurs marchés par des règles du jeu communes commerciales – mais également concurrence au sein des régions, concurrence au sein des métropoles, des grandes villes, bref, au sein des territoires infrarégionaux. Ces facteurs et d'autres que je n'évoque pas ici, et surtout leurs interactions, expliquent que cette relation contrat - territoire qui est de nature dialectique, ce n'est pas une relation naturelle, surtout pour un Etat comme la France, c'est vraiment une relation qui progresse par dépassement de ses contradictions, prend une telle importance. Elle aurait semblé, sinon incongrue voici 25 ans, du moins très très limitée, alors qu'elle trouve aujourd'hui sa pertinence dans le contexte d'un pays qui entend désormais gouverner ses territoires par l'intermédiaire d'un système d'actions collectives qui repose sur la coopération des acteurs des politiques territoriales.

Alors, ce thème sur lequel porte mon intervention, "contrats et territoire", est très vaste et il est assez vaste pour que je choisisse une approche et un champ particuliers, capables d'illustrer cette relation contractuelle qui prévaut désormais en matière d'aménagement et de développement du territoire. Ce champ sera donc celui de la contractualisation entre l'Etat et les régions, les contrats de plan entre l'Etat et la Région dont nous préparons en ce moment la 4ème génération pour une durée de 2000-2006, une durée d'ailleurs qui coïncide avec le démarrage des programmes structurels européens. C'est aussi la raison pour laquelle nous avons décalé la contractualisation en cours, d'une année.

Mon approche n'est pas celle d'un universitaire, elle n'est pas celle d'un expert ou d'un élu. Vous aurez, ici je crois, la vision des contrats de plan par les élus, les grands élus, mais plutôt celle d'un praticien de l'administration qui contribue un peu modestement à son poste de travail à orienter et coordonner le jeu nécessaire des acteurs aussi bien au niveau des ministères qu'au niveau des régions. Mais auparavant, il me paraît utile d'apporter deux précisions qui portent, l'une sur la nature juridique des contrats de plan et l'autre sur ce qu'on appelle le territoire de projet qui est à la base de la contractualisation entre l'Etat et les collectivités territoriales.

Le contrat de plan Etat - régions, est-ce un contrat administratif au sens du droit public ? On pourrait le penser puisque le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu en 1988 qui opposait le gouvernement à la Communauté urbaine de Strasbourg a effectivement décidé que c'était un contrat de droit public qui comportait des droits et obligations réciproques entre les parties. Il n'est pas allé, néanmoins, jusqu'au bout de son raisonnement et a débouté le requérant pour des raisons de procédure; surtout pour la raison qui tient au fait que la requête n'était pas recevable parce que le contrat de plan n'était pas un acte réglementaire. Il n'empêche qu'il faut considérer ce contrat plutôt comme un protocole d'accord, de coopération que réellement comme un contrat car les engagements pluriannuels que prennent les partenaires, l'Etat et la Région, sont soumis, pour ce qui concerne l'Etat, à la règle de l'annuité budgétaire, comme l'a dit M. Burin, et qu'en fait, les engagements que prend l'Etat trouvent leurs limites dans la comptabilité publique qui impose et qui autorise l'engagement de crédit seulement dans la limite de l'année budgétaire; et l'autre limite, c'est que la mise en œuvre des projets que l'on inscrit dans les contrats de plan est parfois aléatoire. Prenez la construction d'une autoroute ou d'un TGV, cela nécessite toute une série de procédures lourdes, complexes. Il faut d'abord obtenir un consensus politique suffisant entre les élus, il faut pouvoir assurer son financement pluriannuel. Il faut que le projet soit techniquement prêt, c'est-à-dire que les enquêtes publiques trouvent un dénouement favorable dans une période raisonnable – ce n'est pas toujours le cas. Et puis, il y a à obtenir un consensus de la part des habitants. Lorsque vous faites passer un TGV dans une région désertique, ça va relativement assez vite; si vous le faites passer entre Avignon et Marseille, vous imaginez les problèmes qui peuvent survenir. Donc, ce sont des aléas que ni l'Etat ni la Région ne maîtrisent vraiment. Et c'est ce qui explique qu'au bout d'un contrat de plan, on ait un taux d'exécution qui ne soit pas de 100 %. On avait, à la fin de l'année 1998, un taux d'exécution qui était de 83-84 %. Le fait que l'on prolonge la durée de contractualisation améliorera effectivement ce taux d'exécution. Il sera de 92-93 % mais en tout cas, il ne sera pas de 100 %.

La deuxième précision, c'est cette notion de territoire de projet qui est réellement innovante et très importante, même si elle n'est pas si neuve que ça puisqu'elle apparaissait déjà en filigrane de la préparation des contrats de plan précédents (1991-1992). Simplement, l'inflexion est plus nette. En fait, on a bien pris conscience que la qualité des territoires est devenue un facteur de développement aussi bien qu'un service attendu par la population et par les entreprises. Et donc, partant de ce fait, on invite les décideurs locaux, qu'ils soient élus, organismes publics, entreprises, associations, organismes de développement, à s'organiser autour d'un projet global de développement. En fait, il s'agit bien de produire des territoires cohérents au sens où l'espace sur lequel sont prises des multiples décisions par ces acteurs dont je parlais, influe sur le maintien ou non des habitants sur un espace donné, sur leur répartition spatiale avec, pour conséquence, le développement, la stagnation ou le déclin. Et donc, cet espace, c'est ni plus ni moins qu'une production collective à laquelle, certes, l'Etat contribue mais qui est surtout entre les mains d'acteurs locaux qui disposent désormais d'une autonomie et de moyens accrus. Cela ne veut pas dire que l'Etat se désengage, l'Etat par la qualité de ses services publics, par les investissements qu'il consent à leur égard, je pense aux infrastructures, je pense aux nouvelles technologies de l'information et de communication, aux hôpitaux, enfin à tous ces services collectifs qui font que les entreprises prennent des décisions d'investir ou de s'implanter là ou à un autre endroit. Ce rôle, l'Etat le conserve mais puisqu'on parlait, dans l'introduction, de cette stratégie de bottom-up, l'Etat a pris conscience qu'il fallait que le développement local, le développement endogène soit beaucoup plus promu, soit davantage stimulé, bien qu'il soit, je le répète, entre les mains des acteurs locaux eux-mêmes.

J'en viens maintenant à cette nouvelle génération qui se prépare de contrats de Plan et de la Région. On s'est d'abord livré, au niveau de l'action interministérielle, à un exercice qui n'avait jamais été fait auparavant depuis 1984. C'est une sorte de bilan critique des contrats précédents et des contrats en cours et cet exercice a été conduit sous l'égide de Jacques Chereque qui dans un rapport, a énoncé un certain nombre de préconisations. Si on devait résumer ce rapport en une phrase, on dirait que cette contractualisation de certaines politiques publiques est un exercice positif qui a suscité certes des attentes et des frustrations mais qui demande à être poursuivi. Exercice positif en termes d'intérêt et de nouveauté puisque, nous l'avons vu, la création des contrats de plan Etat - régions a accompagné la décentralisation et correspondait à un besoin et à une attente des citoyens, et donc à une demande de modification du fonctionnement de l'Etat. En terme de partenariat, puisque les contrats de Plan ont impliqué de plus en plus d'acteurs, à travers une approche davantage territorialisée des actions de développement. Voici une petite idée sur les montants financiers que cela implique. Pour les années 1984-1988, on avait 70 milliards de francs, 42 pour l'Etat, 28 pour les régions. Pour la période 1989-1993, on a 102 milliards, l'Etat 56 et les régions 45. Pour la période 1994-1999, on passe à 220 milliards, l'Etat 88, les régions 71 et l'Europe 72; et il est probable que cette clé de répartition - maintenant 1/3 Etat, 1/3 région, 1/3 Europe - va se poursuivre pour la génération qui se prépare. Donc, ce sont des efforts financiers et de l'Etat et des partenaires qui ne sont pas négligeables mais il faut garder à l'esprit que c'est quand même assez peu puisque, dans le budget d'une région, cela correspond, en moyenne à 20 et 30 % de son budget, donc ce n'est pas l'essentiel de son intervention qui est contractualisé, et pour l'Etat, c'est quelques 10-15 pour cent de sa capacité annuelle d'investissement. Ce n'est pas négligeable.

Mais l'exercice a suscité des attentes et des frustrations. En effet, les contrats de plan et leurs engagements initiaux traduisaient donc un effort de l'Etat et des régions mais ils ont été contrariés par au moins deux facteurs. Le premier, c'est la crise que l'on a connue dans les années 1991, 1992 et 1993. Le deuxième, c'est la volonté de respecter les critères de Maastricht, les fameux critères de convergence. Effectivement, l'Etat a été amené à ne pas honorer tous ses engagements et naturellement, ses partenaires élus lui ont en beaucoup voulu. Ensuite, le principe de rééquilibrage entre les régions. Il ne faut pas perdre de vue que si l'on fait de l'aménagement du territoire, c'est d'abord pour tâcher de corriger les écarts de développement entre régions; c'est un souci que seul l'Etat peut prendre en compte, que de veiller à l'égalité des conditions de vie sur le territoire. Ainsi, pour moduler l'effort que consentait l'Etat dans les régions, on avait inventé tout un système de calcul qui consistait, à partir de critères macro-économiques, comme le potentiel fiscal des régions, comme le taux d'activité, le taux de chômage, à classer nos régions en trois ou quatre groupes. Et on avait dit que le premier groupe, qui était le plus défavorisé – régions pauvres – verrait son enveloppe augmentée fortement, le second groupe un peu moins, le troisième pas du tout et le quatrième - en fait l'Ile de France qui est très riche -, verrait son enveloppe baissée. Malheureusement, cela ne s'est pas passé ainsi. Ca n'a pas marché, pourquoi ? Parce que, dans le jeu de la négociation, les régions sont montées à l'assaut du pouvoir central en disant : ça ne va pas du tout, l'effort que vous consentez ne correspond pas à la place que nous avons dans la Région ou aux difficultés que nous rencontrons et qui ont été sous-estimées par l'Etat. Donc, il y a eu des avenants à ces contrats. Ensuite, il y a eu des programmes qui avaient été négociés hors contrat de plan et qui sont venus s'y intégrer comme le programme Université 2000. Enfin, d'autres facteurs ont faussé les bases de calculs et ont fait que cette péréquation a été très critiquée par les partenaires de l'Etat. Il nous faut donc pour cette génération, revenir sur cette modulation financière entre les régions mais certes, d'une autre manière.

Ensuite, la déconcentration des moyens de l'Etat entre les mains des préfets de Région était une première administrative : une première passionnante. En fait, on disait : il y a une enveloppe globale pour les contrats de plan. On la répartit entre les mains des préfets puisque ce sont eux qui ont fait remonter les besoins du terrain et proposé une stratégie de développement compatible avec les objectifs de l'Etat. Leur position était la suivante : à notre avis, après négociation et consultation de nos partenaires, voilà ce que l'Etat doit faire dans la Région pour les cinq ou six ans concernés. En fait, que s'est-il passé ? Les préfets se sont heurtés aux ministères. Les ministères ont pris avec une relative mauvaise volonté le fait que les préfets disposent de "leur" enveloppe; et ont en conséquence réintroduit leurs priorités : l'Etat a contraint l'engagement des régions sur ces priorités, c'est ce que l'on a appelé les noyaux durs; ces noyaux durs avaient d'ailleurs une proportion très forte, – si encore ils avaient atteint une proportion de 50 %, dans la mesure où l'on considère que l'Etat et la Région financent la moitié du contrat, cela pouvait passer. Seulement, dans certaines régions, ces noyaux durs ont constitué 70 voire 75 % et donc, la marge de manœuvre des préfets de Région était très faible et c'est ce que nous ont dit les grands élus, les présidents de conseil régional : que reste-t-il à négocier ?

Donc, ce sont toutes ces attentes et ces frustrations qui ont fait que nous sommes amenés à revoir les conditions dans lesquelles l'Etat interviendra dans cette nouvelle génération. Ceci dit, la quasi totalité des partenaires de l'Etat ont quand même fait part de leur intérêt pour cet exercice et ont demandé sa poursuite. Ils ont considéré qu'au regard des enjeux et des échéances qui se profilent au plan européen, il paraissait plus que nécessaire d'assurer la cohésion des politiques publiques dans la durée et sur un espace clairement identifié et que, dans un contexte de mondialisation des échanges d'ouverture des territoires et des marchés, la rationalisation des organisations territoriales – c'est-à-dire tâcher de mettre fin aux chevauchements de compétences, aux conflits d'attribution, aux concurrences stériles et coûteuses entre collectivités –, cet effort de rationalisation était incontournable tant pour des raisons de compétitivité économique que pour des raisons d'optimisation de la dépense publique, parce que la dépense publique est limitée et que la tentation de l'augmenter trouve rapidement sa traduction au niveau des feuilles d'impôts.

Dans ce contexte, comment s'inscrivent ces nouveaux contrats de Plan en préparation ? Tout d'abord, et c'est une nouveauté, ils découlent d'une loi d'orientation qui est, en ce moment, en discussion au Parlement, c'est la loi d'orientation d'aménagement et de développement durable du territoire. Que dit cette loi ? Elle dit : il faut faire moins d'infrastructures, moins de routes, moins de béton, moins de bitume. Pourquoi ? Parce que le niveau atteint par un certain nombre d'infrastructures de base est relativement satisfaisant et que ces infrastructures et équipements privilégient des modes de vie générant de plus en plus de nuisances et consomment nos ressources naturelles. Manifestement, il y a un rééquilibrage à faire entre la route et le rail, entre les transports individuels et les transports collectifs, il faut favoriser l'intermodalité des transports, il faut favoriser les transports combinés, il faut favoriser les investissements immatériels, ceux qui agissent sur la qualité de l'organisation, des services. Il faut parier sur l'intelligence, mettre en réseau des universités, des établissements du supérieur de recherche, des chercheurs, favoriser la mobilité des étudiants, les plates-formes technologiques, les systèmes productifs locaux, les incubateurs. Voilà donc quelles sont les priorités : faire du développement durable, c'est-à-dire un développement qui allie la compétitivité économique à la cohésion sociale et également la protection des ressources. La protection des ressources, c'est maintenant très important parce qu'on n'est plus à l'époque où l'on disait certes que les menaces de l'environnement, c'est bien beau mais que c'est loin et pour les autres. Non, parce que les atteintes à l'environnement, on les voit, on les vit tous les jours. L'homme de la rue, à la campagne, les sols pollués par l'agriculture intensive, les nitrates, les phosphates; en ville, la qualité de l'air, la qualité de l'eau. Donc, ces problèmes sont importants et on les prend en compte.

Voilà donc les priorités essentielles de la loi et ces priorités vont naturellement se traduire dans les nouveaux contrats de Plan Etat - régions : c'est ce qu'on peut dire sur ces principes.

J'ajouterai quelques éléments clé. On milite pour plus de rigueur dans la contractualisation, c'est-à-dire qu'on va essayer de contractualiser moins mais de contractualiser mieux, de faire en sorte qu'on prenne en compte des projets qui soient techniquement, politiquement et financièrement prêts, de façon à éviter d'inscrire dans les contrats des objectifs ou programmes dont on sait pertinemment que ni l'Etat ni les régions n'auront les moyens de les réaliser ou de les mettre en œuvre. Ce ne sera naturellement pas facile parce qu'on va se heurter à la volonté des élus dont les choix d'investissement sont parfois conditionnés par des motifs politiques, et à celle des ministères qui chercheront à préserver, à "sanctuariser" leurs crédits pendant toute une période; je pense notamment au ministère des Transports dont l'essentiel de la politique d'investissement en matière d'infrastructures routières nationales se traduit dans les contrats de Plan Etat - Région. Et, l'autre principe, c'est, comme je vous l'ai dit, non plus de décider depuis Paris mais partir des besoins identifiés par la Région et par les acteurs concernés. Donc, un effort de démarche participative et démocratique.

Voilà ce que je voulais vous dire, de manière très libre, sur cette préparation de contrat de plan.

Quelques mots sur la préparation des prochains contrats de plan Etat - Région. Où en est-on actuellement ? On a commencé par une réflexion stratégique en amont, aux mois de septembre, octobre, novembre où, d'un côté les ministères nous ont fait part des orientations qu'ils entendaient mettre en œuvre dans les contrats de plan; de l'autre, les préfets de Région nous ont fait remontrer leurs documents stratégiques. On a rapproché ces orientations, de telle façon que l'Etat ne parle que d'une seule voix. Ensuite, on a mis à la consultation, dans les régions, ce document de stratégie; d'abord au niveau du partenaire régional et ensuite au niveau des autres acteurs. Les régions ont alors été chargées de produire leur propre projet régional et c'est sur la base de la confrontation entre ces deux projets que nous déterminerons la plate-forme commune de propositions qui donnera naissance au contrat de plan Etat -  Région. Actuellement, la période de consultation s'achève. On va donc effectivement faire un travail de centralisation, de synthèse. Nous allons préparer les mandats et les enveloppes, répartir l'enveloppe globale qui est donc de 105 milliards entre les ministères et entre les régions de telle façon que la négociation proprement dite puisse démarrer à partir à l'été 1999. Quelques mois de négociations seront nécessaires pour que les contrats de Plan soient signés à partir du 1er janvier 2000. Toutefois, les contrats de Plan ne seront mis en œuvre qu'à l'issue de leur approbation par les parties signataires.

Donc, en guise de conclusion rapide, je pense que la relation Etat - contrat et territoire est une relation qui a beaucoup d'avenir devant elle. Pourquoi ? Parce qu'on s'aperçoit qu'à côté du mode classique de légitimation de l'action publique que sont la loi, le règlement – expression de la volonté politique –, on a besoin de la recherche de consensus pour que cette volonté politique justement ne soit pas seulement un vœu pieux, car elle a besoin de se traduire en actes. La combinaison du règlement et du contrat devrait contribuer à résoudre cette contradiction entre application normative de l'intérêt public et reconnaissance des intérêts catégoriels au sein des territoires.

 

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